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1 juin 2018 5 01 /06 /juin /2018 07:00


Relire :

http://servirlepeuple.over-blog.com/2017/10/trigger-warning-affaire-ramadan.html

http://servirlepeuple.over-blog.com/2017/11/pour-conclure-sur-tariqramadan.html

http://servirlepeuple.over-blog.com/2018/02/ramadan-deuxpoidsdeuxmesures.html

http://servirlepeuple.over-blog.com/2018/02/quand-il-n-y-a-rien-a-ajouter-c-est-bien-parce-que-comme-ca-on-ajoute-rien.html

http://servirlepeuple.over-blog.com/2018/02/encore-des-nouvelles-de-tariqramadan.html

[Vous allez voir que ce que vous allez lire là va sûrement vous rappeler des choses... Des choses comme des affaires en lien avec la GUERRE que mène la petite bourgeoisie militante blanche-et-token pour conserver son monopole sur le "milieu" face à l'irruption croissante d'éléments non-blancs ou prolétariens (comme dans un "certain" bar militant de Montpellier par exemple).

Les choses, au regard des FAITS, sont pourtant d'une clarté cristalline : la teub n'efface pas la classe (prolo), tout comme la classe (bourgeoise) ou la teub + la classe n'effacent pas systématiquement la race sociale. Il va falloir urgemment se mettre ces choses-là dans la tête, surtout lorsque l'on prétend parler au nom de "l'intersectionnalité".

Pourquoi n'est-il pas si simple, fut-ce "faute de mieux", de s'en tenir aux principes du droit bourgeois dans ce qu'il a (résultat de la pression des masses populaires au cours des siècles) de plus DÉMOCRATIQUE, et dont le SEUL problème est en réalité la non-application ou l'application à géométrie variable : accusation => ENQUÊTE, avec respect de la parole de la présumée victime MAIS AUSSI de la PRÉSOMPTION D'INNOCENCE de l'accusé, et => le cas échéant, sanction PROPORTIONNÉE et dans toute la mesure du possible éducative (au lieu de "morts sociales" de toute façon inapplicables à la société entière et qui ne protègent donc que celles et ceux qui les prononcent), ou éventuellement recours à la psychiatrie (avec toutes ses limites certes) pour les cas comme celui où un quart de ce qui est reproché à Tariq Ramadan serait véridique ?]


Féminismes blancs, féminismes non blancs :
quel bilan après l’affaire Tariq Ramadan ?


https://lemuslimpost.com/feminismes-blancs-bilan-affaire-tariq-ramadan.html

Quels sont les effets politiques de l’affaire Tariq Ramadan ? Houria Bouteldja, porte-parole du Parti des Indigènes de la République, répond à cette question et fait l’état des lieux des féminismes.

Puisqu’il sera question ici d’une affaire judiciaire en cours, je tiens à préciser que je ne m’intéresse pas ici au fond de l’affaire mais à ses effets politiques.

En France, depuis les années 2000, nous assistons à l’émergence de nouvelles dynamiques  féministes qui entendent remettre en cause le féminisme hégémonique, qui comme vous vous en doutez est blanc. « Blanc » au sens où il défend principalement les intérêts des femmes blanches.

Suite à l’affaire du voile, on a vu apparaître un féminisme islamique qui combattait l’idée d’une supposée incompatibilité entre Islam et féminisme. Plus tard, avec l’apparition du mouvement décolonial et de l’antiracisme politique, il y a eu le féminisme intersectionnel. Toute une galaxie de féministes non blanches s’en réclament dont le féminisme islamique et l’afro-féminisme.  Je précise que ces mouvements qui sont plutôt très dynamiques ne représentent qu’une partie minoritaire des femmes issues de l’immigration post-coloniale car dans les faits, plus les femmes sont écrasées par leur condition moins elles militent. Cela vaut aussi pour le militantisme décolonial dont je me réclame. Nous ne sommes qu’une minorité agissante.

Quelles réactions après l’incarcération de Tariq Ramadan ?

Je voudrais ici analyser de près les réactions de ces différents secteurs du féminisme face à l’incarcération de Tariq Ramadan pour les mettre à l’épreuve du politique et de leurs ambitions affichées. Précisons que les féminismes non blancs se situent entre deux pôles : le féminisme blanc, lui-même partie prenante de ce que Sadri Khiari a théorisé comme étant le « champ politique blanc » et le pôle décolonial qui représente la puissance indigène en formation et qui assume la rupture politique, théorique et organisationnelle avec le premier. L’hypothèse que je vais tenter de défendre ici est que la plupart des féminismes non blancs peinent à remplir leur promesse d’articuler réellement l’oppression de genre et l’oppression de race, à savoir définir une ligne stratégique réellement émancipatrices pour les femmes indigènes mais irrécupérable par le pouvoir.

Tariq Ramadan est un militant, intellectuel musulman mondialement connu et très actif en France depuis vingt ans. Il est connu pour être un penseur de la réforme en Islam, il promeut l’idée d’une adaptation de l’Islam à la modernité tout en restant fidèle au texte coranique et à la tradition prophétique. Je m’empresse de dire que pour notre part, nous sommes plutôt sceptiques quant à cette voie car le projet décolonial rejette le paradigme de la modernité mais il faut lui reconnaître le fait qu’il a réussi, alors que le modèle intégrationniste français était en crise, à promouvoir l’idée d’un Islam citoyen dont les adeptes n’avaient pas à choisir entre leur identité islamique et leur citoyenneté française, ce qui allait à l’encontre du projet purement assimilationniste, à savoir devenir complètement blanc.

Au mois d’octobre dernier, il est accusé de viol par deux femmes, puis par une troisième. Il est depuis février 2018 en détention provisoire.

Cette affaire a déclenché une grande émotion d’abord du fait de la notoriété de l’intellectuel mais aussi parce que ces viols présumés remettaient en cause sa probité religieuse aux yeux de la communauté musulmane. Enfin, parce qu’au moment où la campagne Me Too était à son apogée des personnalités politiques et médiatiques de premier plan accusées d’agressions sexuelles n’ont pas été inquiétées par la justice. Ces hommes de pouvoir sont toujours en liberté ou en attente de leur procès alors qu’ils sont accusés de faits similaires à Tariq Ramadan. Certains ont même le soutien du pouvoir alors que le procès médiatique de Tariq Ramadan a eu lieu avant même le procès judiciaire ce qui équivaut à une condamnation de fait. Qu’en est-il des réactions féministes ?

Premièrement, les féministes blanches: Je ne vais pas faire ici la cartographie des féminismes blancs et des multiples sensibilités qui le composent. Je me contenterai de citer Simone de Beauvoir qui déclare dans « Le Deuxième Sexe » à propos des femmes blanches :  « Bourgeoises, elles sont solidaires des bourgeois et non des femmes prolétaires ; blanches des hommes blancs et non des femmes noires »[1].

Cette citation est extraordinaire à plus d’un titre. D’abord, parce qu’elle montre l’extrême lucidité de Simone de Beauvoir à qui il faut vraiment rendre hommage ici et ensuite parce qu’elle est d’une surprenante actualité.  En effet, pendant la campagne « Balance ton porc » en France, alors que des milliers de femmes font entendre leur voix pour dénoncer le caractère massif des violences sexuelles qu’elles subissent, une tribune publiée par Le Monde et signée par des femmes célèbres et bourgeoises, parmi lesquelles l’actrice Catherine Deneuve, défend l’idée de « se faire importuner » par les hommes. Ce faisant, elles se positionnent en défense des hommes de leur milieu mis en cause par « Balance ton porc ». 

[À ce sujet lire ici : http://servirlepeuple.over-blog.com/2018/01/ben-ecoutez.html]

Qu’en est-il du féminisme hégémonique à prétention universelle qui veut défendre toutes les femmes ? Celui-ci a largement soutenu les campagnes « Me too » et « Balance ton porc ». Évidemment. Il a clairement dénoncé les hommes de pouvoir dont l’impunité est flagrante. Jusqu’ici tout va bien. Mais comment le féminisme hégémonique a-t-il réagi lorsque Tariq Ramadan a été incarcéré sachant que les autres hommes n’ont pas été inquiétés ? Soyons honnêtes et reconnaissons qu’elles n’ont pas chargé la barque et qu’elles ont même tacitement refusé d’être instrumentalisées à des fins racistes, ce dont il faut se réjouir. J’ai le sentiment qu’elles ont quand même compris, sûrement grâce aux  progrès du mouvement décolonial et du féminisme non blanc, qu’elles ne pouvaient plus jouer avec le feu. Il n’en reste pas moins que la plupart n’ont pas dénoncé l’incarcération abusive de Tariq Ramadan ou à tout le moins fait campagne pour que les autres soient traités comme lui ce qui au final revient à une complicité tacite avec le racisme d’État. La seule exception que je connaisse est l’appel intitulé : « Tariq Ramadan, pour une justice impartiale et égalitaire ». Parmi les signataires féministes nous pouvons trouver Joan Scott et Christine Delphy.

Deuxièmement, les féministes non blanches (islamiques et/ou intersectionnelles). Les réactions ont été de deux types : le silence ou l’affirmation d’un soutien indéfectible aux plaignantes. Précisons que toutes ces féministes se revendiquent de l’intersectionnalité, c’est à dire qu’elles refusent l’instrumentalisation raciste du sexisme et, inversement, l’instrumentalisation sexiste du racisme. En d’autres mots, elles cherchent une voie qui les libère à la fois du racisme d’État mais aussi du sexisme de leur communauté.

« Les féministes musulmanes passent leur temps à devoir prouver que l’Islam n’est pas incompatible avec le féminisme »

Les premières, celles qui sont restées silencieuses sont celles qui n’ont pas souhaité crier avec les loups du fait de l’instrumentalisation raciste de l’affaire mais qui sont restées emprisonnées dans leur identité féministe. Comment défendre la présomption d’innocence de l’islamologue et rester crédible en tant que féministe surtout quand on est femme indigène, suspecte de « communautarisme » ? Comment défendre les plaignantes lorsque la meute est lâchée contre un homme indigène ? Le silence devenait alors la seule échappatoire. Ne rien dire pour ne pas perdre la confiance des indigènes d’un côté et celle des féministes de l’autre et je dirais plus largement de tous les milieux qui comptent (l’université, la recherche, la gauche, les médias). L’exercice est d’autant plus redoutable que les féministes musulmanes, par exemple, passent leur temps à devoir prouver que l’Islam n’est pas incompatible avec le féminisme. Si elles devaient prendre position pour le respect de la présomption d’innocence de Tariq Ramadan, elles mettraient en péril toute une stratégie de réhabilitation vis-à-vis des progressistes blancs. Mais en prenant position pour les femmes, elles fragilisaient toute une rhétorique féministe visant à convaincre les masses musulmanes que le féminisme n’est pas un produit de l’Occident mais au contraire inhérent à l’islam. Des stratégies qui peinent à convaincre… L’association Lallab en a encore fait les frais récemment. Ses militantes regrettent en effet ne pas avoir été sollicitées « au sujet des autres affaires de violences sexuelles apparues au début du mouvement « Balance ton porc ». « Comme si nous étions des musulmanes avant d’être des femmes » rapporte le site Mediapart. Quant à Ismahane Chouder, musulmane et féministe revendiquée, elle rapporte une expérience similaire que je restitue de mémoire : « Malgré de nombreuses années de militance féministe, les médias ne m’ont jamais considérée comme telle à cause de mon voile et voilà que l’affaire Ramadan m’a comme par magie promue « grande féministe » pour des raisons peu avouables. La seule chose qu’ils cherchaient, c’était de m’entendre piétiner la présomption d’innocence de Tariq Ramadan ». Voilà pour celles qui ont gardé le silence.

Les secondes, partant du principe qu’une société patriarcale donne toujours raison aux hommes,  ont apporté un soutien sans faille aux plaignantes et certaines sont même allées jusqu’à réclamer l’inversement de la charge de la preuve et de prendre le parti de « croire la parole des femmes » ce qui est une revendication de certains courants du féminisme blanc. Ce qu’on peut constater ici, c’est que le féminisme prend le pas sur l’antiracisme ce qui va de fait à l’encontre de l’ambition intersectionnelle.

En face du pôle blanc et du pôle féministe non blanc, il y a le pôle décolonial dont je me réclame. Notre position a été la suivante : puisque la justice est raciste et sexiste, il s’agit d’abord de dépassionner l’affaire et de l’appréhender de manière dialectique. On sait que les plaintes pour viol sont à 80 % fondées, que la majorité écrasante des femmes ne mentent pas lorsqu’elles portent plainte. La statistique est incontestable. Mais on sait également que l’impunité en matière de viol bénéficie essentiellement aux hommes de pouvoir[2] et qu’au contraire, la justice n’a aucune clémence vis à vis des hommes des classes défavorisées surtout lorsqu’ils sont Noirs ou Arabes. On sait aussi que le racisme et la prison produisent des masculinités ultra toxiques et que ces masculinités qu’on peut aussi appeler « masculinités non hégémoniques » sont nocives tant pour les hommes eux-mêmes que pour les femmes de leur entourage car elles génèrent toutes sortes de pathologies mais aussi de la violence qui se retourne le plus souvent contre les femmes et les enfants au sein de la famille.

« C’est bien du côté de l’intérêt des femmes indigènes que je me situe. Mais certes, je ne parle pas leur langue. J’invente la mienne »

Relisons Rita Segato qui nous explique que le capitalisme prédateur met en place un champ de bataille dans le corps des femmes. Selon elle, dans la précarité générale, la position de l’homme est fragile : « Il ne peut pas pourvoir, il ne peut pas avoir, il ne peut pas être ». Mais en même temps il doit prouver qu’il est un homme. Les hommes sont ainsi soumis à un « mandat de masculinité » qui les oblige, pour être, à faire preuve de force et de pouvoir : physique, intellectuel, économique, moral, militaire, militaire, etc. Ainsi, le mandat de la masculinité chez les hommes indigènes, qui vivent dans la précarité, souvent se traduit par un mandat de violence et c’est effectivement ce que les femmes indigènes constatent dans leur quotidien.

Je profite de ce moment pour revenir sur un passage de mon livre qui a fait polémique. J’y relatais l’expérience d’une femme noire, victime d’un viol par un homme noir aux États-Unis et qui expliquait qu’elle ne porterait pas plainte car elle ne supportait pas qu’un homme noir soit jeté en prison. Mes détracteurs ont fait passer un propos descriptif en propos prescriptif ce qui, by the way, en dit long sur leur insondable médiocrité (sauf s’il ne s’agit là que de l’expression de leur panique ?) et sur celle d’un certain lectorat qui boit leur parole. On voit bien avec cet exemple, qu’on peut étendre à une fraction non négligeable des femmes non blanches, que les postures moralisantes ou principielles qui consistent à dire le Bien et le Mal n’y changeront rien. De deux choses l’une : agissons sur l’oppression spécifique des hommes indigènes et nous agirons sur les mécanismes qui bloquent la puissance d’agir des femmes, accentuons l’oppression des hommes et nous prolongerons d’autant celle des femmes. Contrairement à ce que prétend un certain féminisme (blanc ou indigène), c’est bien du côté de l’intérêt des femmes indigènes que je me situe. Mais certes, je ne parle pas leur langue. J’invente la mienne. 

C’est pourquoi lorsque les plaintes contre Tariq Ramadan ont été rendues publiques puis lorsqu’il a été incarcéré, je me suis exprimée trois fois sur ma page Facebook :

Ces prises de positions publiques, pourtant rigoureuses et plutôt équilibrées, ont été frauduleusement interprétées comme étant au « service des porcs » avec la bienveillance de certains médias et sites progressistes, au nom de la sainte parole des « principales concernées ».

En réalité, confrontés à ce cas, en tant que décoloniaux, nous disons la chose suivante : dans une société raciste et sexiste, et compte-tenu 1/ de la personnalité et de l’importance dérangeante de Tariq Ramadan dans la lutte contre l’islamophobie et en faveur de la Palestine, 2/ de la nature de ses ennemis : l’establishment politique français, 3/ de la réalité massives des agressions sexuelles ; il est non négociable de respecter d’une part les règles élémentaires de la parole des plaignantes, présumées victimes, et d’autre part, la parole de l’accusé, présumé innocent.

Ainsi, l’affaire Tariq Ramadan ne doit pas faire l’objet d’une quelconque instrumentalisation politique ou médiatique. Nous avons ajouté qu’il était faux de dire que la justice française restait patriarcale lorsque l’accusé était noir ou arabe. Elle l’est effectivement lorsque l’ordre blanc patriarcal est mis en cause mais avec Tariq Ramadan le pouvoir est au contraire conforté. Comme l’a très justement analysé Norman Ajari, philosophe fanonien, « la campagne Mee Too a créé la division entre les Blancs tandis que la campagne contre Tariq Ramadan a réintroduit tendanciellement l’unité entre eux. »

Par conséquent, nous avons tenu, malgré une hostilité inouïe, à rester fidèle à ce que nous avons théorisé comme étant les principes de base d’un féminisme décolonial et matérialiste, sa colonne vertébrale.

Notre postulat de départ est que le féminisme est un phénomène politique né dans un « Occident » lui-même en construction, dans un moment dialectique qui est la formation des États-nations européens et la conquête du monde par le colonialisme. Ainsi le féminisme nous paraît être un événement politique majeur de la modernité dont l’objet premier est de résoudre les contradictions entre les hommes et les femmes blanches, tous citoyens de démocraties impérialistes et complices avec leurs élites de la spoliation des pays du Sud. Les femmes blanches opprimées par le patriarcat local profitent malgré tout des rapports Nord/Sud et c’est d’ailleurs à ce titre qu’elles sont blanches car intégrées dans la Nation. Ainsi pour comprendre le féminisme décolonial, je voudrai vous donner 5 repères importants :

  1. Domenico Losurdo : « L’histoire de l’Occident se trouve face à un paradoxe. La nette ligne de démarcation entre Blancs d’une part, Noirs et Peaux-rouges d’autre part, favorise le développement de rapports d’égalité à l’intérieur de la communauté blanche ».
  2. Sadri Khiari : « Le principe de la démocratie capitaliste, c’est la liberté individuelle et l’égalité politique. Les races en sont la négation. Elles en sont aussi indissociables. La modernité bourgeoise, qui s’installe au tournant du XVIIIe et XIXe siècles, se développe en effet au croisement de deux mouvements contradictoires et néanmoins complémentaires, la libération des individus du carcan des hiérarchies statutaires indispensables à l’affirmation de l’État moderne et à l’épanouissement du Capital, et l’expansion impériale qui leur est tout autant nécessaire »
  3. Simone de Beauvoir : « Bourgeoises, elles sont solidaires des bourgeois et non des femmes prolétaires; blanches des hommes blancs et non des femmes noires ».
  4. Chester Himes : « Puisqu’on ne me considère pas comme un homme dans les usines, il faut au moins que je le sois au lit. Tout ce que je ne peux pas être dans une usine, je le serai au lit. »
  5. James Baldwin à propos de la violence des hommes noirs envers les femmes et de leur nécessaire transformation : «Cela exige de redéfinir les termes de l’Occident.»

Ces repères forment une espèce de fil à plomb qui part de la formation des démocraties capitalistes/ impérialistes et de l’apparition de la notion d’égalité (concept qui doit être questionné par la pensée décoloniale), et des conséquences que cela produit dans les rapports entre hommes et femmes blanches, entre Blancs et Indigènes et entre hommes et femmes indigènes.

« Je trouve en effet dommageable la manière dont on appréhende cette question dans un contexte raciste même de la part de celles et ceux qui prétendent articuler les différentes oppressions »

Je voudrais conclure par une réflexion autour de ce que j’appellerais le règne des idées sacrées en politique. En effet, le militantisme donne naissance à des idées qu’il est souvent interdit de remettre en cause. Alors imaginez quand ces idées sont produites par des progressistes blancs ! Le féminisme n’est pas en reste et parmi les idées sacrées il y a par exemple : « Mon corps m’appartient ». Il y aurait pourtant beaucoup à dire notamment sur le caractère libéral de ce mot d’ordre. Et pourtant, c’est quasiment un dogme. Autre exemple : pendant la campagne Mee Too, ce qui est apparu comme une position sainte, c’était la parole des femmes. La plupart des féministes et au-delà ont considéré que la parole des femmes était sacrée et qu’elle ne pouvait pas être suspectée. Lorsqu’une femme déclare un viol, il faut la croire sur parole.

Cette posture est en fait justifiée à plus d’un titre puisque comme je l’ai dit plus haut, 80 % des plaintes pour viols sont fondées ce qui à priori donne raison aux féministes.

Mais, il y a un mais. Je trouve en effet dommageable la manière dont on appréhende cette question dans un contexte raciste même de la part de celles et ceux qui prétendent articuler les différentes oppressions. Je trouve dommageable cette faiblesse théorique qui consiste à appliquer des postulats valables en milieux blancs à des milieux non blancs.

Prenons l’exemple des lynchages de Noirs pendant la période de la ségrégation aux États-Unis. Sait-on par exemple que de nombreux hommes noirs ont été lynchés sur simple dénonciation d’une femme blanche ? Il suffisait parfois qu’une femme blanche déclare que tel homme l’avait regardé de manière concupiscente pour susciter la rage des hommes blancs et que l’accusé se retrouve pendu à un arbre. La célèbre chanson de Billie Holiday, « Strange Fruits » a immortalisé dans un style délicat et poétique la mémoire de ces hommes victimes d’un autre patriarcat autrement plus cruel, implacable et supérieur. D’où mon hommage en introduction.

Le parallèle avec aujourd’hui est flagrant : la parole des femmes lorsqu’elle met en cause le patriarcat dominant  est immédiatement disqualifiée. Lorsqu’elle met en cause le patriarcat indigène, elle est survalorisée que ces femmes soient blanches ou  non blanches.

Ainsi le féminisme décolonial est un féminisme d’équilibriste. Et surtout, le seul qui articule réellement. Car comme le souligne, Malik Tahar-Chaouch, « l’axe décolonial permet de penser les conditions concrètes des luttes communes dans un système-monde, conformé par la modernité coloniale, contre les symétries abstraites et paradoxales du catéchisme progressiste des Blancs de gauche ».

Je terminerai par un autre clin d’œil à l’histoire coloniale. Vous connaissez tous l’histoire de ces immigrés WASP américains qui pour mater les tribus indiennes et pour éprouver leur loyauté exigeaient d’elles qu’elles ramènent le scalp de l’un des leurs. Dans l’affaire Ramadan, ce qu’on a exigé des femmes indigènes, c’est qu’elles ramènent son scalp. Une poignée l’a fait, une partie non négligeable, refusant de trahir s’est murée dans son silence, une autre partie non moins négligeable (et probablement majoritaire) a défendu l’accusé en criant au complot et en niant toute crédibilité aux présumées victimes.

Quant au féminisme décolonial, une fois n’est pas coutume, il a pris le chemin le plus risqué : refuser dans le même temps de livrer le scalp d’un homme indigène au pouvoir blanc et tenter de sauver la parole de cette majorité de femmes (toutes « races » confondues) qui ne mentent pas et qui deviennent de fait les victimes collatérales de l’instrumentalisation raciste de l’affaire Ramadan puisque celle-ci se met au service d’un système patriarcal bien plus puissant, bien plus structurant et bien plus déterminant : le Pouvoir blanc.

A l’aune de toutes ces considérations, la libération de Tariq Ramadan et la revendication d’un procès équitable deviennent des exigences majeures.


[1] Simone de Beauvoir, « Le Deuxième Sexe », édition Gallimard 1947.

[2]  Je précise que je ne considère pas Tariq Ramadan comme un homme de pouvoir comme on l’entend souvent. Il ne fait pas partie du sérail, il en est au contraire exclu.

À lire aussi absolument :

Viol : les racines du mal

par Malika Salaün, membre du PIR


Le viol a été au-devant de l’actualité pendant plusieurs mois, conduisant la France à faire évoluer ses standards en matière de licite et d’illicite. La campagne #MeToo a provoqué une onde de libération de la parole si massive qu’elle a fait craindre à Emmanuel Macron que la France bascule dans une culture de la délation[i]. Une affaire cependant cristallise l’attention. Et certains, forts de ce qu’ils viennent d’apprendre sur la question du viol, cèdent à la tentation de nous éduquer, nous, sujets postcoloniaux, sur ce qu’est ce crime et sur la manière dont il devrait être pris en charge politiquement. Une mise au point s’impose.

Il n’y a pas d’universel du viol.

C’est la base. Naturaliser, c’est le procédé habituel des Occidentaux pour donner poids à leurs dénonciations et revendications, en prétendant représenter plus que leur groupe social.  Dire que le viol est arrivé partout, de tout temps, sous la même forme, est inexact. Le viol se commet dans une société précise, dans un contexte politique précis. Il y a des sociétés où les viols sont rares, d’autres où ce crime est industriel. L’anthropologie s’est penchée sur cette question[ii], en questionnant les règles internes aux cultures. Dans une démarche plus politique, Angela Davis s’alarmait de la banalisation de ce crime dans la société américaine des années 70 et, en tant que communiste, l’attribuait alors au capitalisme : « Aux Etats-Unis, le viol est actuellement le crime qui augmente le plus vite. La nature profondément pathologique de cette épidémie ne peut être correctement comprise que si la haute fréquence de la violence sexuelle dans les pays capitalistes et mise en regard avec sa quasi absence dans les pays socialistes »[iii].  L’idée forte introduite ici est que c’est en fonction du système qu’agissent les auteurs. LM Williams écrivait ainsi en 1986[iv] : « Un système de valeurs dans une culture donnée encourage et promeut des comportements sexuels agressifs et les membres de la culture soutiennent des normes qui encouragent ces comportements. »  En conséquence, pour comprendre le viol en tant que fait social, il faut analyser le système dans lequel il s’inscrit et la relation qu’il entretient à ce crime.

Concernant la société française actuelle, mon constat est qu’il existe un problème endémique de viol et, dans une grande mesure, de violences sexuelles sur mineurs[v].

Dans le discours, le viol est unanimement réprimé, qualifié de « pire des crimes ». Dans les faits, c’est le crime le moins suivi de condamnation : il est estimé que 10% seulement des victimes portent plainte et que seulement 3% des viols se traduisent par un procès en assises[vi]. Et la majorité des actes échappent aux statistiques. Ce crime est, certes, puni par la loi, mais la législation seule n’indique pas son degré réel de prise en compte. C’est en tout cas un problème culturel tellement profondément enraciné dans l’histoire du pays que quelques lois ne suffiront pas à soigner ce mal.  Ses racines sont assez évidentes : colonialisme et viol relèvent de la même logique, simplement ils s’exercent à des niveaux différents.

Le viol – en tant que crime adossé à un système global – est un crime colonial : il est employé en contexte de génocide, d’occupation[vii], de répression, de domination, d’esclavage… Il est une arme de destruction qui vise notamment à affecter durablement la manière dont celui qui le subit se perçoit. Il n’est donc pas accidentel que chez les anciens colonisateurs, ce crime se perpètre dans de telles proportions. Là sont les racines historiques de ce mal endémique. Les colonies constituaient à la fois un univers fantasmatique et le cadre où exercer toutes formes de violence. S’y exerçait un double standard permettant de perpétrer des actes de violence extrême en cultivant un ethos de civilité et d’humanité, puisque le discours raciste légitimait les actes inhumains perpétrés sur autrui. Ces deux comportements – barbarie et civilité – pouvaient s’exercer en un même lieu : le propriétaire d’esclaves qui commettait, avec l’aide de la loi, les pires actes sur les hommes, femmes et enfants esclaves, pouvait dans le même temps et le même lieu être un époux attentif et un père tendre. Cette distinction entre ce qui pouvait être fait aux Blancs et le terrain de violences possibles que constituait le corps infériorisé persiste.

Les premiers témoignages de viols apparaissent dans des récits d’hommes et femmes africains asservis dans l’univers concentrationnaire des Amériques : ce crime y existait de manière industrielle. Les hommes et femmes mis en esclavage n’étant pas sujets politiques mais juridiquement objets propriétés des maîtres. La seule infraction que ces actes pouvaient constituer était un dommage occasionné par un autre que le maître (un ouvrier par exemple) sur sa propriété[viii]. Néba Fabrice Yale explique que le viol, dans ce cadre, répondait à plusieurs motivations :

« Les colons auraient eu recours à cette pratique pour montrer à leurs esclaves toute l’étendue du pouvoir que leur conférait le statut de maître qui les préservait de toutes sanctions. (…) D’autres, par contre, considéraient plutôt cela comme un droit qu’ils avaient sur leurs esclaves. Un droit qui ne devait pas leur être refusé au risque de s’exposer aux tortures les plus sévères. (…) Les planteurs se sont parfois aussi servis des viols pour punir certains esclaves indisciplinés qui mettaient constamment leur autorité à l’épreuve par des actes de rébellion ou de sabotage. Dans ces cas-là, l’abus avait lieu en présence de l’esclave fautif et de toute sa famille. L’objectif en agissant ainsi était de l’humilier, de l’atteindre dans ce qu’il avait de plus cher tout en lui faisant porter à jamais la culpabilité du déshonneur subi par les   siens. (…) Les planteurs véreux utilisaient également les femmes noires, toujours perçues comme des objets sexuels, pour l’initiation sexuelle de leurs enfants.» [ix]

L’abolition ne fait pas disparaître ce crime : à partir de la fin du XVIIIe, aux États-Unis, les Noirs américains étaient exposés aux lynchages[x] ainsi qu’à la perpétuation massive du viol sur les femmes noires[xi]. Ces lynchages[xii] étaient souvent commis sur la base de fausses accusations de viol : les femmes blanches avaient en cela un pouvoir de mort sur les hommes noirs[xiii]. L’union consensuelle entre un homme noir et une femme blanche constituait d’ailleurs un viol, parce que menaçant l’ordre social. On voit donc que la loi n’est pas l’instrument le plus fiable pour juger de la moralité d’un acte. Ce n’est pas pour rien que ces questions émergent d’abord dans les productions militantes noires américaines.

Le viol fut aussi un instrument de génocide contre les Amérindiens ; avant d’être exposées aux Européens, leurs sociétés ne connaissaient pas le viol[xiv], en tant que système politique et judiciaire garantissant sa perpétuation. Bonnie Clairmont, experte à l’Institut des lois et politiques tribales[xv], écrit que les milliers de Nations Amérindiennes, au-delà de leurs différentes de cultures et langues, avaient en commun de ne pas avoir de mot pour viol. Dans ces sociétés souvent matriarcales et matrilinéaires, les femmes et les enfants étaient, avant le contact avec les Européens, considérés comme sacrés ; les hommes n’avaient pas un rapport de propriété aux femmes. La souveraineté individuelle et tribale était reconnue. Et la justice tribale punissait très sévèrement les actes de violence. La réalité actuelle est toute autre, et c’est en lien direct avec le fait que « Le viol a été utilisé, et continue d’être utilisé comme une arme pour contrôler et coloniser les peuples amérindiens », comme l’écrit Sarah Deer (Mvskoke)[xvi].  Les Amérindiens furent dépeints comme sales et dépravés par les colons, pour que soient justifiés les crimes commis sur eux. Cela a continué de se perpétrer massivement sur ces populations colonisées. Les enfants arrachés à leurs familles pour être assimilés de force dans les Boarding Schools[xvii] ont eu à subir massivement des abus sexuels. Actuellement, les femmes amérindiennes sont, dans l’État colonial d’Amérique, la catégorie de population la plus exposée aux viols et enlèvements[xviii].

Le lien entre colonialisme, violence sexuelle et impérialisme est amplement analysé et discuté par les activistes et chercheurs amérindiens, c’est un champ d’étude extrêmement dense. Une part importante de cette recherche est centrée sur l’invention d’alternatives à la « justice » coloniale. Mais plus largement, il s’agit de réhumaniser tous les protagonistes, c’est pourquoi la reconquête de l’intégrité individuelle est pensée en lien avec celle collective, perdue à la suite du génocide culturel. Penser la place des femmes, des hommes, des enfants dans des sociétés dont l’équilibre a été durablement et profondément bouleversé, c’est un chantier gigantesque que les amérindiens n’ont jamais cessé de mener.

L’exemple de la colonisation française de l’Algérie est aussi éclairant. Dans l’Algérie colonisée, l’érotisation de nos aînées, adultes et enfants, par la carte postale coloniale, facilitait aussi l’agression en justifiant leur viol, par anticipation. Ces mises en scène orientalistes étaient un exutoire à la frustration que ressentait le colonisateur. Ce dernier était privé du pouvoir de scruter les femmes, l’organisation de la vie sociale algérienne ne lui permettant pas de les observer. À l’examen de ces cartes postales[xix], le lien entre dévoilement et effraction paraît assez évident.

Après l’indépendance algérienne, cette « érotisation de la différence algérienne[xx] » va se reconfigurer et s’articuler autour de la question du viol. « L’empire, la violence coloniale et leurs conséquences définirent les problématiques du viol en France, donc les manières dont les féministes appréhendèrent ces questions » écrit Todd Sheppard dans son livre Mâle Décolonisation[xxi]. Il montre qu’à partir de 1962, la masculinité nationale française est meurtrie par la défaite algérienne ; l’apparition d’hommes algériens dans les rues françaises crée une panique raciste. Le nationalisme deviendra le cadre où se reviriliser. Cela passera essentiellement par la criminalisation des Algériens[xxii] qui mêlera définitivement discours sur le viol et racisme. L’Algérien devient, en préjugés, un pervers qui menace la France, comme dans ce document publié en 1964 dans Europe-Action :

La sexualisation des hommes indigènes les transforme en potentiels violeurs méritant d’être mis hors de nuire avant d’agir. Cela se traduit judiciairement : dans les années 70, les « prolétaires et les immigrés » représentent la majorité des condamnés pour viol, alors que ce crime est commis dans toutes les classes sociales. Une étude menée par Pierre Seguret, et citée par Todd Sheppard chiffre à 38% la proportion d’immigrés nord-africains parmi les condamnés pour viols en 1978[xxiii]. Véronique Blanchard a consacré une thèse de doctorat à la déviance féminine juvénile dans les années 40 et 50[xxiv]. Abordant la question du contact qu’entraîne l’augmentation de l’immigration algérienne à partir de 1947, elle décrit de quelle manière les rapprochements entre adolescents algériens et jeunes françaises sont proscrits par les parents de ces adolescentes, qui n’hésitent pas à recourir à la justice. Fréquenter des Nord-Africains est tellement interdit qu’il arrive que des jeunes filles, à postériori, produisent un discours archétypal autour de la dangerosité des « Nord-Africains » et du fameux mythe de «  la  traite  des  blanches  », pour se protéger d’éventuelles répercussions[xxv]. Ce mythe d’une perversité arabo-musulmane n’a pas disparu, il se déploie aujourd’hui dans les discours occidentaux culturalistes sur l’islam[xxvi].

Une partie de la gauche dénoncera le racisme de ce discours. Certaines féministes prendront des distances avec le mouvement contre le viol, dénonçant sa complicité avec l’État dans la répression des classes populaires. Elles s’interrogeront sur l’opportunité de livrer ces hommes à ce qu’elles nomment une « justice bourgeoise et raciste ». Un texte viendra fragiliser cette dénonciation de l’instrumentalisation raciste du viol : le témoignage, publié par Libération, du viol d’une militante anti-impérialiste d’origine vietnamienne – Maï – agressée par un compagnon de lutte antillais[xxvii]. On ne peut pas imaginer que l’auteur, un homme noir, militant anti-impérialiste, bénéficie de la moindre clémence de la part de la justice. Maï qualifie le viol d’impérialisme quotidien, renforçant l’idée d’un crime naturel et inéluctable, qui prend le même sens en toutes circonstances. Les féministes blanches sont évidemment celles qui tirent le plus grand profit de cette thèse. Le timing est aussi intéressant : ce texte sort à la fin de la guerre du Vietnam, où le viol par les militaires fut « une procédure opératoire normalisée (…), une action systématique collective »[xxviii]. Il intervient peu après la médiatisation mondiale de l’histoire de Phan Thi Mao, jeune fille qu’un groupe de G.I. kidnappe pour la mettre à mort après assauts. Ce crime est décliné en film et récits, parce qu’il met en scène un héros blanc, le G.I. qui a dénoncé ces faits. L’affaire Maï ressemble, avec le recul, au redéploiement d’éléments clés de la politique de l’époque autour d’un cas particulier. Il sera en tout cas plus difficile, après la publication du texte de Maï, de dénoncer le traitement raciste du viol par les médias et la justice.

Les féministes inscrivent le viol dans le patriarcat. Mais le féminisme contre le viol est une production récente et localisée. La loi contre le viol votée en 1980 a été concédée aux féministes françaises après une décennie de luttes. L’idée de ce combat, comme souvent, est venue des USA. Ainsi, la matrice de la théorie française sur le viol est américaine[xxix]. Tout ce qui se dit aujourd’hui, et qui constitue le récent standard en France, au moins au niveau du discours[xxx], est dans le livre de Susan Brownmiller, paru en 1975. Dans son livre, Susan Brownmiller brosse un historique de ce crime et l’inscrit dans l’oppression patriarcale. Plutôt que d’avancée, en ce qui concerne #Metoo, on devrait plutôt parler de réduction de retard. Tout ce qui commence, lentement, d’être mis en place en France, avait été préconisé par ces féministes dans les années 70. Cette décennie avait même été celle de la « libération de la parole ». Les avancées de 2018 sont loin d’atteindre les ambitions des précurseures. C’est qu’en France les forces engagées pour maintenir le statu quo sont massives et les backlashs cycliques.

Le viol sur nous, issus de l’immigration postcoloniale, est avant tout un outil de terreur et de répression, une « effraction et appropriation du corps, révélant, dans le fond, une pathologie chez l’assaillant du rapport à soi-même[xxxi] ». Ces effractions et appropriations du corps ont existé de multiples manières, en contexte de domination ; il s’agit d’inscrire dans la chair sa supériorité sur un être humain ou sur un peuple.  Toutes ces pratiques visent à rappeler au colonisé à qui il appartient et à le ou la rendre docile. L’opportunité de viol naît du déséquilibre de pouvoir.

Notre rapport de sujets postcoloniaux au viol n’a donc pas débuté en 1970 avec le MLF. Notre héritage ne s’inscrit pas dans la lignée de Brownmiller et de la théorie féministe. C’est même l’inverse qui s’est passé : le féminisme a emprunté aux luttes des colonisés. Les femmes blanches ont même, d’une certaine manière, bénéficié des luttes des colonisés. Les nouveaux droits leurs ont été concédés par des États-nations coloniaux cherchant à consolider la structuration raciale des rapports entre pays du Nord et pays du Sud. Le féminisme connaît son apogée immédiatement après la répression des mouvements de libération des colonisés et ne fait pas face à une répression d’ampleur comparable. Les anciens empires, en n’empêchant pas son émergence, offrent le visage de sociétés progressistes et libérales, et assurent une transition après des scènes de terrorisme, d’assassinats et de répression sanglante des luttes contre le colonialisme. Le combat féministe emprunte d’ailleurs aux mots (la liberté, l’autonomie) et aux symboles des luttes contre le colonialisme (les youyous[xxxii], le poing levé).

Les colonies seront d’ailleurs l’un des terrains, pour elles, où élaborer l’objet politique « viol ». En 1960, Djamila Boupacha, est poursuivie en justice pour avoir déposé une bombe à Alger. Elle risque la peine de mort et est défendue par Gisèle Halimi qui, quelques années plus tard, deviendra la figure de proue du mouvement français contre le viol. Parmi les tortures subies par Djamila Boupacha il y a le supplice de la bouteille, employé massivement par les Français pendant la guerre d’Algérie pour torturer hommes et femmes. Ces pratiques ont été dénoncées par Gilles Perrault et Henri Alleg[xxxiii].  La société algérienne a fait un choix, concernant ces tortures, Djamila Boupacha s’en éloigne : « Djamila fut la seule Algérienne violée qu’elle a défendue à accepter la publicisation des violences subies, les autres exigeant d’elle le secret. »[xxxiv]. Gisèle Halimi va utiliser ces tortures pour rédiger sa défense, en les cadrant comme des viols faits à une femme[xxxv]. Djamila Boupacha est « décrite comme désireuse de rompre avec l’enfermement des femmes musulmanes et l’emprise des « frères » »[xxxvi]. Pourtant, ce n’est pas uniquement une question féminine : les assauts, dans le système raciste, sont subis indistinctement par hommes et femmes[xxxvii].  Comme dans le cas du  seasoning[xxxviii]. Dans ces camps de détention des esclaves africains, les captifs récemment déportés étaient « torturés en vue d’être brisés et conditionnés à la vie d’esclave ». La Jamaïque, qui était l’île où étaient déportés les plus insoumis des captifs -ceux que les Européens peinaient à soumettre- a abrité l’un des plus terribles de ces camps. Les masculinités jamaïcaines sont fréquemment critiquées, sans que soit reconnu en réaction à quelle barbarie ces masculinités ont dû se construire.

Si le mouvement féministe ne peut pas donner de leçon aux héritiers de la lutte anticoloniale, la façon dont il se positionne vis-à-vis du colonialisme importe. Ainsi, si l’on observe le positionnement de S. Brownmiller concernant cette imbrication du viol et du racisme, il apparaît qu’elle ne l’intègre que superficiellement à sa théorie. Quand elle décrit des viols commis sur les Amérindiens[xxxix] elle les met au même niveau que ceux commis par des Amérindiens sur des Européennes, alors que les deux sont sans commune mesure : outil de génocide dans un cas, instrument de vengeance ou fait divers dans l’autre. Parce ce procédé, elle aplanit la relation entre deux conditions diamétralement opposées : colonisé et colonisateur.

Angela Davis accusera S. Brownmiller d’avoir réactivé le mythe du violeur noir et rappellera aux féministes blanches que les premiers, aux Etats-Unis, à s’être organisés contre le viol étaient les Noirs et leurs alliés. Ils intégraient ce combat dans celui contre le racisme. Par ailleurs, S. Brownmiller égratigne dans son ouvrage plusieurs figures de la lutte anticoloniale : Eldridge Cleaver, évidemment, mais plus étonnamment Patrice Lumumba et Frantz Fanon. Ce dernier est à ses yeux « un arrogant qui hait les femmes ».  Elle n’a pas aimé l’analyse du psychiatre martiniquais de l’attrait fétiche des femmes blanches pour le corps indigène, manifesté dans sa clinique par des fantasmes de viol. L’Américaine en profite au passage pour mépriser les propos d’hommes algériens que Fanon rapporte. Sa théorie est balbutiante mais Susan sait sans doute déjà qu’elle sait mieux que les Algériens…

Le féminisme occidental a produit des théories et des analyses politiques concernant le viol ; il ne constitue pas sur ce thème la seule voie possible, précisément parce qu’il n’en couvre pas tous les aspects.  Ses outils (la féminisation du viol, la libération de la parole, le soutien inconditionnel à la victime, la judiciarisation, etc.) ont été en partie construits en réaction à l’objet viol spécifique à la France et ne tient pas compte de la façon dont ce crime s’exerce sur les colonisés. Ainsi ici, l’on oppose aux victimes blanches doute, mépris et indifférence, afin qu’elles s’enterrent dans le silence et la honte. En d’autres endroits dans le monde, ou dans des subcultures ici, une personne dira naturellement quels assauts elle a subi parce qu’elle sera assurée d’une réaction collective immédiate (justice rapide et satisfaisante, stigmatisation des auteurs par la communauté, etc.). Il n’existe donc pas un modèle de prise en charge du viol applicable par toutes les sociétés.

Tout cela se passe longtemps avant les tournantes, Cologne et Tariq Ramadan, et laisse entrevoir un continuum. Toute analyse du viol, en France, nous oblige donc à prendre en compte les racines coloniales de ce crime, ainsi que le fait que les indigènes ont une longue histoire de lutte contre le viol, par comparaison avec le mouvement français contre le viol, qui lui est plus récent. Il est intellectuellement impossible d’imaginer une sortie de cette culture de violence sans se centrer sur le colonialisme, et en particulier sur la continuation de ce double standard.

Pour nous, la lutte contre le viol s’inscrit dans notre lutte contre le colonialisme et pour la dignité. J’ai pris conscience de ça en trois temps : le premier a été le visionnage des témoignages d’hommes algériens torturés par les Français pendant la guerre[xl]. Ils décrivaient ces tortures de manière factuelle, et parler de ces tortures ne remettait en cause ni leur dignité ni leur qualité d’hommes. Cela m’a impressionnée. Puis, la mobilisation autour de la suspicion de crime sexuel sur le petit Caïs à Montreuil en juillet 2016[xli]. L’entourage réagissait, condamnait et dénonçait avec le même aplomb que s’il s’était agi d’un autre type de crime. Enfin, en assistant à la mobilisation massive et immédiate de la population à la suite du viol de Théo Luhaka en février 2017, et aux interventions publiques de ce dernier, m’est apparue, par contraste, l’existence d’une spécificité culturelle française concernant les crimes sexuels.  Forts de leurs héritages, Algérien dans un cas, Congolais dans les deux autres, ces hommes et femmes détonnaient avec le silence gêné pratiqué par les gens de culture française, qui assimilent le discours sur le viol à du discours sur l’intimité. En parler, publiquement, de manière détaillée et factuelle, paraît alors parfaitement incongru. Les victimes perçoivent ces contraintes et adaptent leur comportement en fonction d’elles. Ces témoignages et mobilisations d’indigènes m’ont convaincue que le modèle politique à adopter concernant le viol est à construire à partir des héritages indigènes, pour pouvoir offrir des alternatives à la victimologie et à la judiciarisation préconisées par les féministes. Ce modèle s’inscrirait plus largement, dans la dénonciation de l’ensemble des pratiques coloniales d’entrave, d’intrusion et d’effraction du corps et de viol de sa souveraineté.

Au lieu d’engager le chantier colossal de l’éradication du viol, il serait tentant pour l’État d’opérer un dégazage, en faisant de Tariq Ramadan un exemple. Ce serait une erreur de penser que le sort réservé à Tariq Ramadan va dans le sens des revendications des féministes, ou bien qu’il augure d’une ère nouvelle. Les corps des femmes ne sont sacrés que quand ils permettent de réprimer les colonisés. La politisation de ces plaintes visant Tariq Ramadan vise à masquer la manière indigne dont la France traite en général les victimes de viol. D’ailleurs, l’attention portée à la libération de la parole masque aussi les faibles ambitions affichées par l’État concernant la façon dont les diverses institutions appréhendent le viol.

Parmi les femmes noires de mon entourage, donc vivant en France actuellement, la proportion d’entre elles qui ont été violées est alarmante. Toutes ont été abusées par des hommes blancs, de milieux sociaux variés. Toutes ont vu leur espoir d’obtenir justice piétiné ; toutes ont été stigmatisées d’avoir dénoncé les faits commis par ces hommes « respectables et insoupçonnables », des hommes auteurs pourtant d’actes d’une cruauté et d’un sadisme terrifiants. Et pour ces sociopathes, la négrophobie structurelle constituait un élément d’opportunité garantissant l’impunité. A ce jour, il m’est impossible de dire si ce sont ces abus ou l’indifférence qu’ils ont suscitée de la part de la société qui ont le plus affecté ces femmes. Et les hommes qui ont vu en leur négritude la promesse de crime impunis savent, j’en suis sûre, qu’ils ne risqueront jamais un millième du traitement infligé à Tariq Ramadan. Les assauts contre ceux que l’État ne reconnait pas comme siens sont licites en France. Les indétectés[xlii] le savent et choisissent des proies qui leur assurent l’impunité : enfants, personnes vulnérables ou sous leur autorité, indigènes, individus en précarité de logement, de papiers, de travail, obligés, etc. Viol et pouvoir sont inextricablement liés et se traduisent, judiciairement, par une grande impunité laissée aux indétectés.

Pour les colonisés, la question du viol s’inscrit dans un ensemble d’effractions du corps, d’abord commises par l’État. Ce sont toutes les situations où le colonisé perd la souveraineté sur son corps. “Ton corps m’appartient” dit en substance le policier quand il procède à tout ce qu’Insa Sané[xliii] décrit dans l’ouvrage dirigé par Leonora Miano. Et nombre de ces pratiques policières ciblent la masculinité, comme autrefois le faisait la barbarie coloniale :

« C’est un élément qui revient souvent dans les récits des interpellations policières violentes au sein des quartiers populaires : un caractère sexuel prononcé. Insultes homophobes, testicules écrasés, fouilles appuyées des parties intimes, jusqu’au viol dont aurait été victime Théo à Aulnay-sous-bois »[xliv]

Viol est un terme juridique dont l’objet n’est pas de condamner les infractions faites au corps indigène.

Pour l’État, ce qui arrive à Théo n’est pas un viol,

Pour l’État, ce qui est arrivé aux femmes noires de mon entourage n’est pas un viol,

Mais viol est un motif qui, en tant que crime, soupçon ou accusation infondée, suffit à déclencher la mise sous entrave du corps indigène. C’est l’effet que ne manquera pas de produire la loi de criminalisation du harcèlement de rue, alors même que le foyer est le lieu où s’exercent la majorité des crimes sexuels recensés. Se joue, autour du viol, la question de la propriété de nos corps. Deux des points qui ont le plus causé d’émoi dans le livre de Houria Bouteldja[xlv] sont liés à cette question : le fait qu’elle attribue aux siens la propriété de son corps a été vécu comme un traumatisme par certains lecteurs. Quant à son exposé des raisons pouvant pousser une femme noire à ne pas aller en justice, qu’est l’affaire Ramadan sinon la démonstration de la justesse de son propos ?

La décolonisation du viol devra commencer par le constat que la qualité raciale du prévenu et de la victime influe plus sur le cours de la justice que les faits commis. Ce n’est pas faire l’apologie du viol que d’exiger que des actes similaires entraînent des procédures judiciaires équivalentes. Le cas Tariq Ramadan reflète le traitement inhumain auquel sont soumis prévenus et détenus non-blancs d’ordinaire, car bien qu’intellectuel issu d’une classe sociale élevée, il n’est ici qu’un indigène : à lui s’appliquent la présomption de culpabilité et la détention provisoire.

La réalité générale des premières heures de GAV ou de détention des indigènes relève de la même logique que le seasoning, précisément parce que ce traitement n’est pas infligé à tous de la même manière. Aux uns l’isolement, la privation de soins, d’hygiène, de nourriture, les techniques de soumission et d’avilissement, aux autres l’impunité car leur valeur sociale prime sur les crimes qu’ils ont commis. En sa forme actuelle, la prison ne permet pas de rompre avec la culture de la violence, elle est un des instruments de sa perpétuation.

Pierre-Just Marny, autre indigène arrogant sur qui s’est aussi abattue la vengeance d’Etat, parlait de justice coloniale. Le combat pour la dignité que les victimes de viols, ici en Centrafrique, en Haïti ou en Iraq ont dû mener, je le rapproche du combat mené par les colonisés face à la justice coloniale. Dans les deux cas, il s’agit de se battre pour rester un être humain, malgré les humiliations, malgré la volonté d’avilir, malgré les tentatives en face de briser et de rabaisser.

En mémoire d’Abeer Qassim Hamza al-Janabi, d’Ange et de Quyen Ngoc Nguyen

À Théo, Caïs, Sonia, Ali, Charneshia, ainsi qu’à toutes les cibles de la violence coloniale

Malika Salaün, membre du PIR

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Récapitulatif des "grandes thèses" de Servir le Peuple


À lire également, les Considérations Diverses, petits "billets" trop courts pour faire un article et donc regroupés par trois, quatre ou plus, exprimant notre CONCEPTION DU MONDE sur toute sorte de sujets. 


Même étude sur l'État espagnol (1 et 2) ; le Royaume-Uni (1 et 2) et l'Italie.

 

APRÈS 8 SÈGLES… (Huitième centenaire de la bataille de Muret 1213 & DÉCLARATION FONDATRICE de notre Comité de Construction du PCR-Òc)

 

 






 

 

 


 


 

 

Le 'centre mlm' de Belgique, la Guerre populaire et le (n)PCI (sur la stratégie révolutionnaire en pays impérialiste) ; et dans la continuité :

Gramsci et la théorie de la Guerre populaire en pays capitaliste très avancé (1ère partie)

et Gramsci et la théorie de la Guerre populaire en pays capitaliste très avancé (2e partie)

 

 

 

EXCLUSIF : Lotta Continua - "Prenons la Ville !" (1970) [avec un salut rouge et fraternel à l'AA Bordeaux ]

Manifeste Programme du (n)PCI

Présentation

du chap. 1 du Manifeste pour les lecteurs/trices francophones (valable pour tout le Manifeste)

 

(Chapitre I): PDF - WORD

 

 

 MANIFESTE COMPLET

(version non-définitive ; chap. 4 et 5 pas encore validés par les camarades italiens)

 

IMPORTANT pour la compréhension du Manifeste :

La crise actuelle, une crise par surproduction absolue de capital (en PDF)

article de 1985 paru dans Rapporti Sociali n°0

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