Pour moi, Taddeï n'est certainement pas un révolutionnaire de notre camp. Sa "neutralité", son "absence de parti pris" affichées en font au choix un anarchiste de droite ou un social-fasciste. Un fils de famille bourgeoise qui aime s'encanailler, se donner les frissons dont son enfance a manqué, au contact des idées "pas lisses" ; et jouer à laisser planer le mystère sur s'il les partage ou pas. Peut-être (c'est une théorie possible) un tenant du "en même temps", non pas entre centre-gauche et centre-droite comme Macron, mais entre gauche et droite radicales...
Pour autant, je pense que le paysage audiovisuel et médiatique aurait BESOIN d'être fait de gens comme lui et comme ceux qu'il invite... Pour RÉAPPRENDRE À PENSER, même si c'est au milieu d'un péril brun omniprésent.
Parce que le Système, la dictature d'aujourd'hui c'est justement l'inverse... et c'est probablement le PIRE DE TOUT : on ne sait plus penser. Nager à contre-courant de quoi que ce soit, même si c'est réactionnaire (mais parfois, peut-être ne l'est-ce qu'en apparence !). S'affronter intellectuellement avec des gens aux idées antagonistes (alors qui va, a fortiori, s'affronter physiquement si il le faut ?).
On peut même voir en cela une grosse racine du postmo-idpol : une fragilité, presque immunitaire pourrait-on dire, face à la contradiction et aux discours qui nous semblent détestables ; qui pousse à se réfugier derrière les oppressions, pourquoi pas bien réelles, que l'on subit afin de "trigger" et faire battre en retraite le contradicteur et l'"agression" qu'est la contradiction qu'il nous porte (généralement, à ce moment-là, avec le soutien d'une nuée de défenseur-euses qui surgissent, "non mais comment tu oses parler comme ça à un-e opprimé-e de X - Y - Z" etc. etc.).
La ou les oppressions revendiquées peuvent être tout à fait réelles et sérieuses ; les propos du contradicteur tout à fait réactionnaires et nauséabonds... Sauf que malheureusement, ce n'est pas avec de telles "armes" que l'on affronte l'oppression et le fascisme, déjà dans le champ intellectuel, alors ne parlons même pas du champ militaire.
Taddeï "a donné la parole à Soral, à Nabe"... Eh bien oui : il FAUT leur donner la parole, si on veut pouvoir forger nos armes intellectuelles pour combattre leurs idées, les démonter, les réduire à néant par une démonstration matérialiste magistrale.
Leurs idées... qui DE TOUTE FAÇON feront leur chemin quand même, car ça aussi c'est la réalité ; par les médias alternatifs, la "dissidentosphère". Eh oui. En Italie, ça y est : leurs idées sont au pouvoir. Avec certes d'un côté (Salvini) le soutien de Berlusconi, grand parrain médiatique du pays ; mais de l'autre, du côté du M5S arrivé en tête, aux idées peut-être les plus proches en termes de "confusion" d'un "plateau de Taddeï", TOTALEMENT par le biais d'Internet, des réseaux sociaux, des médias alternatifs.
Qui dit expression "dissidente" dit administrateurs, contrôle, PROPRIÉTÉ PRIVÉE des "dissidents" qui s'expriment sur leurs médias d'expression ; et impossibilité de les y contredire (suppression de posts, bannissements, blocages) car à ce niveau-là ils ne s'"emmerdent" pas plus que Clavreul ou Enthoven ou tout autre tenant de la "pensée unique" qu'ils dénoncent, ou les "chasseur-euses de conspis/confus/antisémites" sionard-e-s "de gauche" façon Nad Iam ou Les Morbacks Véners, ou les postmos "agressé-e-s" par la moindre divergence avec leur "point de vue situé". C'est autre chose que chez Taddeï !!
On peut toujours monter des contre-médias, entièrement dédiés à leur porter la contradiction, mais c'est généralement trop tard : ils ont une longueur d'avance, déjà mis dans toutes les têtes que leurs contradicteurs sont des "agents du système".
C'est à dire que, pour parler clairement, les idées VRAIMENT révolutionnaires, VRAIMENT "en rupture" sont au final les SEULES véritables victimes du Néant institutionnalisé de la Pensée.
Les gens chercheront toujours à sortir de la "pensée unique" qui correspond au système de domination qui les écrase au quotidien. SPONTANÉMENT, ils le feront TOUJOURS dans une direction réactionnaire ou du moins "confuse", et ce flot là sera toujours si puissant qu'il trouvera toujours les fissures par lesquelles se déverser.
La Pensée révolutionnaire, elle, doit toujours ACTIVEMENT se battre pour conquérir les esprits. Elle doit déjà, pour commencer, EXISTER : s'être FORGÉE, dans la participation aux luttes, dans l'étude scientifique de ce qu'il se passe, certes mais aussi et surtout dans la confrontation des points de vue, des analyses, du Vrai avec le Faux.
Deux choses évidemment impossibles dans le paysage médiatique actuel, où l'on a ni la possibilité de se faire entendre, ni encore moins celle de se forger dans le débat antagonique ; tandis que la "dissidence" réactionnaire trouve quant à elle toujours les moyens de toucher son public, les gens qui en ont ras-le-bol.
Alors bon, il ne s'agit pas de rêver à un paysage médiatique idéal qui n'existera JAMAIS dans le système capitaliste (un paysage médiatique où la révolution pourrait avancer à la fois en se faisant entendre et en se forgeant contre ses adversaires), ni de croire que la pauvre émission de Taddeï désormais exilée sur RT et regardée par 4 tondus va changer quoi que ce soit de fondamental. Mais simplement de dire que le Taddeï-bashing représente (encore un exemple parmi tant d'autres) le degré zéro de l'"antifascisme" en peau de lapin ; car ses émissions sont au contraire ce que devrait être le paysage médiatique pour être un terrain infiniment plus favorable POUR NOUS que ce qu'il est actuellement (et à côté, les 4 sites internet tout pétés de l'extrême-gôôôôche...).