Des "échos" de la presse népalaise, souvent bourgeoise, à prendre avec des pincette mais bon :
Il y a énormément d'écho de la réunion plénière du Parti Communiste Unifié du Népal - maoïste dans la presse népalaise. Le débat qui a lieu en ce moment à l'intérieur du Parti traverse toute la société. Il y a donc beaucoup de choses qui sont dites et chaque journal cite ses "sources de l'intérieur". Nous informons donc le lecteur que le contenu de l'article ci-dessous est soumis à caution et que les citations des dirigeants sont des paroles rapportées.
Plusieurs journaux, citant des membres du Bureau Politique, ont affirmé que Prachanda avait tenu une série de discussions avec Kiran pour faire alliance contre Bhattarai. Kiran a refusé en affirmant qu'il ne suffisait pas d'être proche idéologiquement mais qu'il fallait également mettre en pratique l'idéologie.
Ce qui est sûr, c'est qu'hier a commencé la session à huis clos et que 'Kiran' Baidya et Baburam Bhattarai ont présenté leur rapport hier. Les exposés ont duré chacun deux heures. Aujourd'hui, c'est Prachanda qui a présenté son rapport. Les discussions sur les textes ont ensuite eu lieu en 30 groupes.
Voici donc ce qui est ressorti dans la presse népalaise.
Kiran : la révolution reste à faire
Kiran a menacé de se révolter contre le parti si sa ligne officielle n'était pas mise en pratique.
"Si le parti n'est pas révolutionnaire et s'enlise dans le révisionnisme, nous devrons lever le drapeau rouge de la révolution."
Il a prévenu qu'il ne resterait pas dans le parti s'il glissait dans le révisionnisme.
Il a attaqué Prachanda car il n'avait pas mis en pratique la ligne officielle du Parti de la "République Populaire Démocratique Fédérative" et d'y parvenir par la révolte populaire, comme décidé lors de la réunion nationale de Kharipati en 2008. Certains journaliste affirment que c'est la lutte de ligne que Kiran a mené qui avait permi l'adoption de cette ligne par le Parti.
"Le temps a mûri pour la révolte. Nous pouvons nous emparer du pouvoir d'Etat par la fusion d'une Guerre Populaire et d'une révolte populaire."
Il a affirmé partager beaucoup de choses avec Prachanda mais a affirmé que des similitudes idoélogiques n'étaient pas suffisantes.
"La ligne du Parti n'a pas été mise en pratique." "Dire une chose en théorie et faire l'opposé en pratique ne mène le Parti nulle part."
Il a continué en affirmant qu'il présentait un document politique séparé pour prévenir la direction du Parti contre le révisionnisme et pour montrer le drapeau rouge pour guider le Parti vers les objectifs révolutionnaires. Il a affirmé n'avoir aucune intention de s'emparer de la direction du Parti.
Kiran a également sévèrement critiqué Bhattarai. Selon lui, les arguments de Bhattarai comme quoi le "féodalisme domestique" uniquement, et pas l'Inde, devrait être déclaré l'ennemi principal du Parti ne sont pas pertinents.
"Le féodalisme domestique et l'Inde ont joint leurs mains dans le contexte actuel. Les deux doivent donc être déclarés l'ennemi principal du Parti."
Il a affirmé ne pas être en désaccord avec Bhattarai que les maoïstes doivent pousser pour la paix et la constitution mais a écarté la possibilité que le pays voit la fin du processus de paix et la nouvelle constitution en raison de "l'état d'esprit arriéré" des autres partis politiques, particulièrement le Congrès Népalais.
"Les autres partis sont contre la formulation d'une constitution en faveur du peuple ; ils martèlent des questions comme le pluralisme dans la nouvelle constitution. Si nous tombons d'accord avec eux, nous plongerons dans le révisionnisme ; nous suivrons le chemin du PCN-UML."
Il a affirmé que les idéaux du Parti communiste sont en train de s'effriter et que de nouvelles classes ont émergé dans le Parti (entre les possédants et les non-possédants). "De nombreux cadres sont impliqués dans la corruption et des irrégularités qui doivent être stoppées. Le Parti doit également porter une attention suffisante pour la gestion de ses travailleurs à temps plein."
Ecartant la possibilité de parvenir à la République Populaire Démocratique Fédérative par le processus de paix actuel, Kiran a demandé que le Parti parachève "quatre types de préparations" (techniques, idéologiques, organisationnelles et politiques) et lance la révolte populaire. Il doit être rappelé que les maoïstes avaient achevé "quatre types de préparation" avant de déclencher la Guerre Populaire en 1996.
Bhattarai : continuer le processus de paix
Bhattarai a également attaqué Prachanda en affirmant que ce dernier n'avait pas de ligne idéologique et qu'il vacillaire entre les lignes des deux vices-présidents.
"Kiran et moi sommes clairs à propos de nos lignes, mais le président ne l'est pas. Il doit donc clarifier sa ligne."
Il a critiqué l'emprise de Prachanda sur le Parti. "Quartier Général signifie direction collective, pas le président tout seul."
Il a argumenté par institutionnaliser les achèvements politiques gagnés jusqu'ici et accomplir le processus de paix et la constitution avant de faire une nouveau pas vers la réalisation des objectifs idéologiques communistes.
Il a également affirmé que sa ligne prévaudrait dans le Parti. "L'Histoire a prouvé que la ligne que j'ai répandu a toujours été correcte."
Bhattarai a également argumenté que le parti ne pourrait pas combattre de manière efficace en déclarant et l'Inde et le "féodalisme domestique" comme ses ennemis principaux.
Selon lui, la nature de l'impérialisme et de l'expansionnisme a changé dans le monde globalisé.
"L'impérialisme s'est étendu au système international de la finance. Il n'y a pas d'intervention directe par les pays étrangers. Si un quelconque pays intervient directement au Népal, je serais la première personne à aller sur le champ de bataille."
Prachanda : pour l'unité contre l'Inde
Prachanda a mis en avant le besoin de "l'unité populaire" pour combattre l'interventionnisme indien dans les différents niveaux de la vie népalaise. Ainsi, selon lui, le Parti doit formuler une stratégie à cet effet. Il a également affirmé que l'intervensionnisme indien n'était pas le seul problème auquel faisait face le pays mais que les forces réactionnaires locales sont également engagées dans un processus de "démoralisation et de paralysie" des achèvements démocratiques.
"Les compradores, les laquais des étrangers, le féodalisme domestique et l'expansionnisme indien sont devenus nos ennemis de classe aujourd'hui. Nous devons être prêts pour une révolte populaire et également dresser un plan pour combattre les possibles interventions étrangères."
Il est de l'opinion que l'Inde interviendra militairement quand le Parti lancera la révolte populaire pour s'emparer du pouvoir d'Etat et que le Parti doit donc se préparer à résister à l'intervention indienne.
Prachanda et Kiran partagent le même point de vue vis à vis du "féodalisme dmestique" : il est protégé par l'Inde et que le Parti, lorsqu'il lancera sa révolte, devra finalement combattre l'Inde, qui interviendra vraissemblablement au Népal. Kiran pense d'ailleurs que le Parti doit développer des liens solides avec les maoïstes indiens et que cela aidera les maoïstes des deux pays à combattre leurs classes dirigeantes.
Selon Prachanda, la chute du gouvernement dirigé par les maoïstes a été planifiée par l'Inde. "L'Inde conspire pour en finir avec notre Parti."
Il a critiqué Bhattarai pour son argumentation que le Parti ne devrait pas dégrader ses relations avec l'Inde en ce moment.
"Il est faux d'argumenter que nous devrions développer des idées positives à propos de l'Inde. L'Inde est responsable de l'actuel état critique de la nation."
Il s'est défendu des accusations des deux vices-présidents à propos de l'état actuel de confusion du Parti et de toutes sortes de déviations.
"En tant que président du Parti je suis grandement responsable de où en est le Parti aujourd'hui. Mais je ne peut pas être le seul à porter la responsabilité de toutes sortes de déviations. Nous avons une direction collective."
Par rapport à l'accusation de vaciller entre la ligne de Kiran et de Bhattarai :
"C'est vous qui m'avez donné la direction par le passé et m'avez 'déifié' et maintenant vous dites que je n'ai pas de ligne idéologique propre. C'est grotesque."
Par rapport à l'accusation de Kiran de ne pas avoir mis en pratique la ligne du Parti :
"La ligne du Parti ne se met pas en pratique du jour au lendemain ; elle est dans le processus d'être mise en pratique."
Il a également concédé que la direction du Parti avait commis beaucoup d'erreurs depuis l'arrivée dans le processus de paix et que dissoudre les gouvernements et les tribunaux populaires du Parti ont fait partie de ces erreurs.
A la fin, il a mis l'accent sur le besoin d'unité et a demandé à ce que la lutte entre les deux lignes se poursuive dans de bonnes conditions.
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Il est trop fort, ce Bhattarai... C'est ça, le trotskisme : l'art d'amener le menchévisme à travers un discours "révolutionnaire pur". Sous couvert de dénoncer le "vilain nationalisme" de Kiran et Prachanda, et de lutter "principalement" contre la "féodalité locale", il met en avant la limitation de la révolution aux objectifs strictement "démocratiques" bourgeois de l'accord de 2006...
Au contraire, Kiran a parfaitement compris l'enjeu que représente la tutelle indienne : le "protectorat" qu'exerce l'Inde sur le Népal depuis "l'indépendance" des deux pays (fin des années 40), en "sous-traitance" de l'impérialisme (principalement US, britannique et européen), est le NOEUD du problème au Népal, l'obstacle absolu à toute révolution réellement démocratique, ininterrompue vers le socialisme. Sans libération nationale du gigantesque "gendarme régional" voisin, pas de libération démocratique et sociale possible de l'exploitation des classes dominantes locale !
En revanche, il est erroné de parler d'"impérialisme indien" comme dans un récent article de VP. La Chine est un pays impérialiste ou quasi-impérialiste, car c'est un pays qui tout en se faisant "l'usine du monde", a gardé la main sur ses ressources stratégiques, sur son capital financier, son industrie lourde etc., un pays fortement centralisé avec un Etat fort. En revanche l'Inde est un pays ultra-fédéral composé de dizaines de féodalités locales (dans chaque Etat, chaque district...), aux ressources stratégiques totalement aux mains de "multinationales" (monopoles) impérialistes... L'Inde est surtout une immense armée au rôle de gendarme régional en Asie du Sud, de sous-traitant local de la domination impérialiste des monopoles.
Pour revenir à Bhattarai, des déclarations ultra-mégalos comme "L'Histoire a prouvé que la ligne que j'ai répandu a toujours été correcte" fleurent bon maître Léon (dans le genre "J'ai cessé d'être un élève pour devenir un maître"). Quant à l'argument selon lequel "la nature de l'impérialisme et de l'expansionnisme a changé dans le monde globalisé. L'impérialisme s'est étendu au système international de la finance. Il n'y a pas d'intervention directe par les pays étrangers" ; il semble tout droit sorti de "L'Empire" du trotskoïde et "révolutionneur du marxisme" Toni Negri...