Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
11 juillet 2014 5 11 /07 /juillet /2014 13:59

 

Initialement publié sur le site de L'Humanité, ce reportage décrit le quotidien des masses populaires sur un territoire particulièrement relégué de la "région Aquitaine" (concentration de chômage, d'emploi précaire et sous-payé, de très bas revenus, de désocialisation etc.) : un "couloir" allant du Haut-Médoc (pointe de Grave à l'embouchure de la Gironde) jusqu'au nord d'Agen. Cette région occitane, après avoir été longuement disputée, a été globalement rattachée à l'entité-système "France" au milieu du 15e siècle (bataille de Castillon etc.) ; et d'après un récit de l'époque "ceux qui furent trouvés de la langue de Gascogne furent décapités et eurent leurs têtes tranchées"... De fait, ces territoires girondins au nord de Bordeaux (entre Blaye et Libourne, globalement) subirent une telle extermination de population lors de cette conquête (que l'histoire officielle retient comme la "fin victorieuse de la Guerre de Cent Ans"...) qu'il fallut les repeupler de paysans et autres travailleurs amenés du Poitou (entre autres), ce qui conduisit à une importante "oïlisation" de ce territoire jusque-là de langue et culture gasconne (Pays gabay ou "Gavacherie") - la toponymie (noms des lieux) continuant toutefois à trahir l'occitanité originelle.

La résistance se poursuivra cependant encore tout au long des siècles suivants (aux cris de "Vive Guyenne !", nom de la région alors) avec notamment la fameuse (et très démocratique) République de l'Ormée et même l'opulente bourgeoisie bordelaise mettra du temps avant de "rentrer dans le rang" (on pense aux fameux Girondins, députés hostiles au centralisme parisien pendant la Révolution) même si avec le commerce colonial, et notamment la sinistre traite esclavagiste, on peut considérer sa couche supérieure comme acquise - achetée - dès le 17e siècle (le grand patriciat mettra tout en œuvre pour écraser l'Ormée, mouvement populaire à direction petite- et moyenne-bourgeoise) ; la ville devenant alors le "centre-relais" BBR du "Sud-Ouest" qu'elle est actuellement (et que l'on voit bien en blanc sur la carte ci-dessus, "bavant" jusqu'à ses villégiatures du Bassin d'Arcachon mais comptant aussi, bien sûr, ses ghettos "ZUS").

Un "centre-relais" APPUYÉ sur l'immense "couloir de relégation" (en bleu sombre sur la carte) que nous allons découvrir ci-dessous ; un "couloir" où sont pourtant produits rien de moins que... les vins les plus chers de la planète, autre source (depuis l'époque gallo-romaine) de la prospérité des notables locaux !

Bien entendu, 90% de l'"extrême-gauche" du système-France nous rétorquera que "cela n'a rien à voir" et que nous "fantasmons sur de vieilles chimères" moyenâgeuses et "anticapitalistes romantiques"... C'est bien connu, quand un territoire et une population (autrement dit des FORCES PRODUCTIVES) sont rattachés à un système capitaliste de production de plus-value, "ce n'est pas" pour s'y voir attribuer et assigner une PLACE qui déterminera ensuite l'oppression subie par ladite population*.

LA VÉRITÉ c'est que l'entité francouille a conquis (pro vincia) et soumis dans le sang la Gascogne et la Guyenne comme tant d'autres terres et peuples, qu'elle les a PÉRIPHÉRISÉES dans le cadre de son État au service de la valorisation du Capital tout en faisant de Bordeaux l'un de ses grands ports transatlantiques et le siège d'une bourgeoisie-relais francouillisée qui se pâme aujourd'hui sur son Juppé et son tramway, et que ce "couloir" qui va du Haut-Médoc au Réolais (comme tant d'autres Terres d'Òc et d'ailleurs) est désormais une CAMPAGNE, une FUTURE BASE ROUGE de la Guerre populaire révolutionnaire que nous devons et voulons livrer contre le Capital !

Tout près de là, du côté de Lacanau ou de Royan, certain-e-s d'entre vous auront peut-être la chance de passer quelques agréables vacances. Vous aurez alors, n'en doutons point, une pensée pour ces hommes et ces femmes prolétaires qui n'ont même pas 14 euros pour se rendre à la ville voisine...

OCCITÀNIA, LIBERTAT, SOCIALISME ; per tots mejans necessaris !

L'ORA ES VENGUDA !

Bonne lecture.

ob medoc

Alors que le gouvernement a reçu le huitième rapport annuel de l’Observatoire national de la pauvreté et de l’exclusion sociale, l’Humanité est allée à la rencontre de ceux qui font face quotidiennement à la crise et au chômage en Aquitaine. Nous avons ainsi parcouru « le couloir de la pauvreté », territoire qui s’étend du Haut-Médoc jusqu’au Réolais, où 30% des habitants de moins de 65 ans survivent avec le RSA.

De Lesparre-Médoc...

11527563-0« Je suis prête à travailler dans tous les rayons, boucherie, poissonnerie, caissière mais je ne veux pas finir ma vie comme ça », dit Émilie, 21 ans, à une conseillère de la mission locale de Lesparre-Médoc. « Quelles sont vos priorités ? Est-ce que vous souhaitez rester sur ce territoire ? ». Émilie répond : « Je n’ai aucun objectif à part trouver du travail ». La conseillère lui suggère les emplois saisonniers. Émilie résiste : « Deux mois ici, deux mois là, ça ne m'intéresse pas trop». « Vous cherchez le CDI ? », lui rétorque la conseillère. « Oui, comme tout le monde », répond Émilie. « Bon, là, il va falloir se calmer... Chez Carrefour, Leader Price ou la vigne, c'est les CDD de deux mois ou rien ». Justement, Émilie vient de perdre son CDD de caissière à Leclerc, puis radiée par Pôle emploi. Dans cette région mondialement réputée pour ses vignobles d’exception, nombreux sont les jeunes qui, comme elle, se sentent pris au piège.

« La vigne, ça détruit. Ma mère s’est fait opérer plusieurs fois. Je connais, c’est très dur. Mais, je n’ai pas le choix, il va falloir que je dépose des CV dans les châteaux. Je calcule tout au centime près : essence, loyer et nourriture… Je me prive en permanence», lâche Émilie, fille de viticulteurs, native de Lesparre-Médoc. C’est dans cette petite ville située au cœur de la presqu’île du Médoc que commence le « couloir de la pauvreté ». Un territoire baptisé par l’Insee, la CAF et la MSA (Mutuelle de santé agricole) qui s’étend de la pointe du Médoc jusqu’à Agen, sur plusieurs départements bordant la Garonne et ses affluents. Ce couloir, qui alterne petites villes et zones rurales, a la particularité d’abriter une population faiblement qualifiée et peu rémunérée, soumise aux contrats saisonniers. Qu’il s’agisse de la vigne, soit près de 80 % de l’activité économique, ou du tertiaire, tous les voyants sont au rouge. Entre 2010 et 2013, le nombre de personnes percevant le RSA socle est passé de 90 000 à 98000. Résultat : plus d'un Aquitain sur huit vit sous le seuil de pauvreté, l’équivalent de moins de 950 euros disponibles par mois. Sur les 226 jeunes suivis par la mission locale à Lesparre et Gaillan-en Médoc, 41 % sont sans qualification et seuls 32 % possèdent le permis de conduire. « Ici on peut être sûr d’avoir du travail toute l’année avec la vigne, mais il faut le permis. Or, la plupart des jeunes n'ont pas les moyens de payer 1500 euros. La question de la mobilité est centrale dans une région où il n'y a qu'un train qui relie à Bordeaux et où les bus ne relient pas les villages entre eux », témoigne Vina Seedoyal, conseillère emploi.

ia194_txchom.pngSous une chaleur pesante, à quelques pas d'un centre-ville où un magasin sur deux affiche « bail à céder » ou « à louer », le local de l'association SOS emploi accueille une douzaine de chômeurs en formation. Son objectif : l'insertion durable dans le service à la personne, le bâtiment, la voirie, l'aménagement d'espaces verts... Durable mais souvent précaire. « Depuis quelques années, la crise est palpable. Il y a moins de CDI et une recrudescence de gens qui touchent les minima sociaux, qui n'ont pas le permis et qui manquent de formation, estime Daniel Keromnes, directeur de la structure. 80 % de la population est en dessous du niveau CAP. Le Médoc est une région enclavée. Certains jeunes n'ont jamais mis les pieds à Bordeaux. Et puis, il y a un côté seigneur ici... Qui aurait intérêt à ce que les ouvriers agricoles fassent plus d'études ? Sûrement pas les propriétaires des châteaux... ». Parmi le groupe en formation, Vanessa, 24 ans, mère célibataire, ne trouve pas d'emploi avec son CAP coiffure. Reste la restauration, la grande distribution ou la vigne... Comme toujours. « Je suis au RSA, seule avec deux enfants de 3 et 5 ans. J'ai fait les saisons avec des contrats de deux mois mais tout mon salaire passe dans le loyer et la nounou. Je n'arrive pas à me projeter. Et puis, les châteaux préfèrent embaucher des Marocains ou des Espagnols qui leur coûtent moins cher», témoigne-t-elle.

Mardi matin, c'est jour de marché à Lesparre-Médoc. On aperçoit les étals de légumes. Sur une des rues adjacentes, l'association Envols distribue ses colis alimentaires. Les chariots défilent. Un groupe de femmes marocaines arrive avec les enfants. Farida, 33 ans, raconte dans un espagnol parfait une vie d'exil. Celle de ses parents, celle de son mari, la sienne et celle de milliers d'autres. « Nous vivions à Bilbao depuis douze ans. Mon père y est arrivé bien avant nous pour chercher du travail et une vie meilleure. Je l'ai rejoins, je ne parlais pas espagnol. J'y ai rencontré mon mari qui travaillait dans le bâtiment et la restauration. La crise, on la regardait de loin et puis elle nous est tombée dessus vers 2007. Les salaires ont baissé. Les emplois sont devenus rares, on a tenu grâce aux aides. Mais au bout de deux ans, elles ont été supprimées. Par le bouche à oreille, on a appris qu'il y a avait du travail dans la vigne à Lesparre. On est ici depuis huit mois. La vigne, c'est très dur. C'est grâce aux aides qu'on ne meurt pas de faim. Grâce à la solidarité d'ici ». Dans les locaux de l'association Envols, les nouveaux migrants côtoient une classe moyenne ayant quitté Bordeaux il y a une vingtaine d'années pour devenir propriétaire et vivre aisément. C'est le cas de Kamel, professeur de danse, de sa femme, fonctionnaire territoriale et de leurs trois enfants. « Il y a quelques années, j'ai perdu mon emploi, dit Kamel avec son sac rempli de lait et de légumes. Mais les traites de la maison sont restées identiques, 1000 euros par mois. Ma femme gagne 2000 euros. Il faut payer l'essence, les charges, les études des enfants. À cinq, on ne s'en sort pas. L'été, je tiens un stand de kebab sur les marchés. Sinon, je ne sais pas comment on ferait».

à Pauillac...

ob dc7914 6-medoc-coret-006Nous quittons Lesparre-Médoc vers le sud. À une vingtaine de kilomètres, Pauillac, la ville des grands crus, fait partie du couloir de la pauvreté. Ici, l'union locale CGT croule sous les dossiers et les permanences juridiques. Licenciements, harcèlement au travail, maladies professionnelles, heures supplémentaires non payées, ruptures conventionnelles, droits syndicaux bafoués... Alain Curot, responsable de l'union locale CGT, a un agenda de ministre. « On a de plus en plus de dossiers à traiter, 800 personnes de plus en trois ans. Les licenciements pour inaptitude sont le gros du bataillon. La vigne oui, mais on a aussi les caissières et les salariés du commerce ». Fille d'un ouvrier de la vigne et d'une femme de ménage marocains arrivés en France dans les années 60, Khadija, maman célibataire, s'est adressée au syndicat lorsqu'elle a été confronté à du harcèlement dans la clinique où elle était agent d'entretien. Toujours en procès avec son employeur, elle cumule aujourd'hui neuf emplois pour à peine 1000 euros par mois. « Je travaille dans une maison de retraite de nuit, je fais des ménages, des extras dans la restauration et je suis aide à domicile. Mais je ne suis pas un cas isolé à Pauillac», s'empresse-t-elle de préciser. Khadija est née dans le salon bourgeois du château Fonréaud à Listrac, alors que sa mère lavait le parquet. « J'ai grandi dans les logements attenants au vignoble avec les Maghrébins et les Portugais que les patrons sont allés chercher dans les villages. Moi aussi j'ai travaillé très tôt dans la vigne. C'était l'esclavage, les cadences, le chaud, le froid. Mes parents sont déglingués. Et ça continue avec en plus les pesticides qui provoquent des cancers et des maladies d’Alzheimer».

Véronique Lalanne exerce comme assistante sociale depuis 2009 à la Maison des solidarités de Pauillac. Elle pointe la question de l'habitat insalubre et du surendettement. « Les gens trouvent à se loger facilement dans le privé mais il s'agit d'un habitat énergivore qui entraîne des charges qu'ils ne peuvent pas assurer. Du coup, ils déménagent mais ne font que déplacer les problèmes », explique-t-elle. Depuis un ou deux ans, cette professionnelle voit de plus en plus de travailleurs pauvres venus de Bordeaux, envoyés par les bailleurs sociaux. Mais sans emplois, les nouveaux arrivants plongent encore un peu plus. « On est dans une zone sinistrée où l'emploi est rare et où la mobilité est un problème grave. Ce sont des familles entières qui touchent à peine le SMIC qui arrivent dans la région par nécessité et qui ne sont pas éligibles aux aides. Cela renforce automatiquement les poches de pauvreté déjà existantes ». Une réalité sourde qui tranche avec des paysages majestueux, les grands châteaux et les jardins soignés où des cars de touristes stationnent. Et puis, des pieds de vigne à perte de vue qui poussent silencieusement au soleil. Quelques fois, en bordure des champs, des camionnettes stationnées indiquent la présence d'ouvriers. On descend le long de l'estuaire. Nous roulons dans le couloir de la pauvreté.

en passant par Sainte-Foy-la-Grande 

ob f9ced7 14-medoc-coret-018Passé Libourne et Castillon-la-Bataille, nous entrons à Sainte-Foy-la-Grande, 2500 habitants, classée zone de sécurité prioritaire en février dernier par l'ex-ministre de l'intérieur Manuel Valls. Dans cette petite ville considérée comme un nouveau « ghetto urbain », 30% d'habitants dépendent du RSA et plus de 40 % des allocataires dépendent de la CAF pour plus de la moitié de leurs ressources. C'est le cas de Marie-Claire, maman célibataire de quatre enfants, vivant dans un petit HLM, à Pineuilh, à quelques minutes de Sainte-Foy. De contrats aidés en emplois à mi-temps, elle n'a cessé d'enquiller les boulots saisonniers dans la vigne et dans le maraîchage pendant dix ans. « Depuis 2006, je n'ai plus d'emploi. Que ce soit l'usine de pommes ou la vigne, c'est très physique, il faut se lever aux aurores et faire garder les enfants. À Sainte-Foy, on est peu aidés, il faut dire que trois quart des gens ici sont au chômage. On vit dans une ville en faillite qui s'enfonce dans la pauvreté », tranche-t-elle. À 34 ans, Marie-Claire survit avec 1000 euros tout net. « Vous enlevez les factures, le loyer, la nourriture, il ne reste plus grand-chose. Je suis obligée de garder des enfants la nuit pour d'autres mamans qui travaillent très tôt. C'est la débrouille permanente ». Chaque mois, le surendettement la guette. Il suffit d'une fois où un des enfants est malade et là voilà dans le rouge au 20 du mois. « J'ai la CMU mais il y a toujours des frais à avancer. L'orthodontie coûte très cher. Mes deux aînés auront un appareil dentaire. Sur 580 euros, le mois dernier, il a fallu que je paie de ma poche 170 euros. Les semelles orthopédiques ne sont pas remboursées non plus », détaille Marie-Claire.

Des situations de pauvreté comme la sienne, Marie-Claire en rencontre souvent aux Restos du Cœur où elle est bénévole. Là, elle a fait la connaissance d'Estelle, 27 ans, maman de deux enfants, dont une handicapée. Pour trouver du travail, elle a tout tenté : l'aide à domicile, le Mc Do, Lidl, Leclerc... Mais à chaque fois, c'est négatif. « Les caméras de vidéo-surveillance ne nous ont pas changé la vie ou amené du travail... La délinquance et les trafics se sont déplacés. L'hôpital a fermé des services entiers pédiatrie, chirurgie, maternité. On se sent lâchés de partout», poursuit-elle. À Sainte-Foy-la-Grande, il n'y a pas de Pôle emploi. Le plus proche est à Libourne, 14 euros l'aller-retour en train. « Je n'ai pas cet argent et je ne suis pas la seule dans ce cas. Les gens qui sont dans les villages autour, c'est pire. Du coup, on se fait radier et on abandonne». Ancien élu communiste, Claude Mirande a vu sa ville « dégringoler ». Pendant une dizaine d'années, il s'est battu pour empêcher la fermeture de l'hôpital, qui était le plus gros employeur de la ville et de ses environs. « L'argument, c'est qu'il n'y avait pas assez de fréquentation. Résultat aujourd'hui, l'hôpital fonctionne à minima et manque de personnel. Les femmes vont accoucher à Bergerac alors qu'on avait tout sur place. Depuis peu, on voit arriver des gens sans moyens de la banlieue bordelaise qui atterrissent chez les marchands de sommeil, dans des taudis. Au lieu de faire venir les flics, Valls aurait mieux fait de se préoccuper de l'emploi et des services publics ».

jusqu'à La Réole

ob 9e09b6 16-medoc-coret-024Aller de Sainte-Foy-la-Grande à La Réole, c'est quitter la Dordogne pour rejoindre la Garonne. S'enfoncer dans les terres du Réolais. Dernière étape de notre périple, ici encore, tout semble calme et même charmant. « On a beau avoir le label Ville d'art et d'histoire, on est une ville très pauvre », lance une des bénévoles des Restos du Cœur, dont le local est à quelques kilomètres du joli petit centre-ville. À La Réole, il reste une gare qui a failli fermer il y a quelques années parce que « soit-disant pas rentable », poursuit une autre. En augmentation constante, le nombre de familles ayant recours à l'association a doublé en cinq ans, alors que les barèmes se sont durcis. Comme à Pauillac ou Saint-Foy, les nouveaux arrivants viennent chercher des loyers modérés et une qualité de vie. « En fait, ils sont pris au piège parce qu'il n'y a pas de travail », explique Élisabeth Margot, présidente de l'association. Une fine silhouette sort du hangar où se fait la distribution de denrées. Sonia, 50 ans, ancienne secrétaire médicale n'a pas eu le choix. « Je suis tombée gravement malade et ma vie a basculé. J'ai perdu mon travail et je ne pouvais plus assurer le loyer. Je vis à La Réole depuis cinq ans dans une petite maison un peu humide. Je ne fais aucun extra, je n'ai pas de voiture car je ne pourrais pas payer l'essence. Les aides au logement sont bloquées alors que tout augmente. Jamais je n'aurais imaginé qu'à mon âge, je doive venir ici pour me nourrir... ».

Sous une pluie fine, Maria, 25 ans, s'empresse de ranger les légumes et les couches dans le coffre de sa voiture. Les yeux cernés, elle raconte comment les difficultés ont commencé : « Mon mari est parti. Je me retrouve seule avec un petit salaire et la garde des enfants. C'était pas prévu ». Ouvrière en CDI dans un abattoir, elle commence à 5 heures du matin et débauche à midi. Impossible avec les enfants. « Je me suis mise en congé parental et je touche 400 euros par mois. J'essaie d'être rigoureuse dans ma gestion, je ne veux pas me morfondre à mon âge. Je me dis que c'est une mauvaise passe et que ça ira mieux plus tard ». Les ménages monoparentaux sont très nettement sur-représentés, soit 30 % des ménages usagers et deux tiers des personnes qui ont recours sont des femmes. Le chassé-croisé continue. Un couple avec des jumeaux vient d'apprendre qu'il n'est pas éligible aux aides de l'association. « On dépasse de quelques euros. On est pourtant au RSA à 468 euros avec quatre enfants », explique la maman. En location dans une maison insalubre, ils ont du débourser près de 1800 euros en quatre mois pour l'électricité. Un gouffre. Le père, lui, a travaillé dans le gardiennage et ne trouve pas de travail dans cette branche. « Quand je dépose mes CV dans la manutention ou le BTP, on me dit que je suis trop qualifié. Depuis deux ans, on ne s'en sort pas ». Dans un mois, ils quitteront La Réole pour « tenter » Paris, dans l’espoir de trouver du travail.

Ixchel Delaporte

photos Olivier Coret

À retrouver sur le site de Humanite.fr, l'intégralité du reportage photo d'Olivier Coret

ob 42483f 9-medoc-coret-013

* En lien avec l'actualité, et sans comparer le moins du monde l'État français à Israël et les classes populaires occitanes périphérisées aux Palestiniens (nous savons bien que la spécialité de certain-e-s est de faire dire aux autres ce qu'ils n'ont pas dit), il est d'ailleurs intéressant de remarquer comment les négateurs et les "moqueurs" de cela, ceux pour qui évoquer ces conquêtes-massacres d'il y a 5 ou 8 siècles relève du "romantisme identitaire", sont souvent les MÊMES qui nient la très actuelle oppression sioniste en Palestine (en renvoyant, par exemple, les deux camps dos à dos) et "antisémitisent" ceux qui la dénoncent. C'est que nous avons tout simplement là le reflet d'une IDENTITÉ MATÉRIELLE ET (donc) INTELLECTUELLE totale dont eux-mêmes n'ont pas conscience en raison (justement) du "différé" historique entre les deux situations, du caractère actuel du sionisme en Palestine et du caractère passé de la Conquista de l'Occitanie (et des autres "provinces"). L'État sioniste (colons venus principalement d'Europe, construction historique subjective) a prétendu, au 20e siècle et encore aujourd'hui, refonder le royaume hébraïque de Salomon (son mythe fondateur) en soumettant et niant le Peuple palestinien (produit objectif de l'histoire) qui vivait là. L'État français (construction historique subjective) a prétendu, de la monarchie capétienne des 12e-13e siècles jusqu'à la "Révolution" bourgeoise et aux régimes du 19e siècle, refonder la Gaule romaine (son mythe fondateur : celui d'une Gaule "fécondée" par Rome à travers la défaite héroïco-sacrificielle de Vercingétorix, et bien sûr le mythe des "frontières naturelles", leitmotiv de sa politique d'expansion qui n'échouera qu'au Nord) en soumettant et niant les Peuples (produits objectifs de l'histoire) qui l'habitaient. Dans un cas comme dans l'autre, la véritable question n'est pas celle du "mythe fondateur" et de ses élucubrations et contre-vérités historiques diverses et variées, mais simplement que toute classe dominante exploiteuse cherche à se constituer une BASE D'ACCUMULATION géographique par la soumission et la négation des masses populaires, quelles que soient les "subtilités" idéologiques et pratiques qui accompagnent le processus.

D'ailleurs si un certain sionisme religieux, messianique s'est développé depuis quelques années sous l'influence des milieux fondamentalistes chrétiens US, le sionisme est historiquement une idéologie LAÏQUE, "éclairée" et "civilisatrice" totalement fille de l'idéologie coloniale francouille de Jules Ferry & co (et les Juifs ultra-religieux, historiquement, y étaient plutôt hostiles).

Bien sûr, les milieux "antisionistes" réactionnaires BBR (national-catholiques, gaullistes, "souverainistes" de tout poil) sont eux aussi très hostiles à nos affirmations de Peuples niés ("destination Babel" comme dit leur icône Pierre Hillard... qui est au demeurant un fondateur et contributeur de Boulevard Voltaire et trouve plutôt grâce aux yeux de certains sur "Riposte laïque" 1 - 2, sites pourtant pas vraiment fans de l'"antisionisme" soralien, ce qui montre bien comment toute cette merde baigne dans les mêmes latrines !) ; mais nous avons également montré comment en Hexagone l'antisémitisme est indissociable de la construction de l'entité étatique, notamment aux dépens de l'Occitanie. De fait, il n'y a pas une idéologie francouille "philosémite" et une autre "antisémite" ; il y a, depuis un peu plus de deux siècles que le "débat" fait rage, deux écoles antisémites : ceux qui acceptent d'intégrer au monde franco-blanc les Juifs qui en assimilent les valeurs ET/OU, depuis la Seconde Guerre mondiale, les partagent via le sionisme ; et ceux qui refusent catégoriquement d'intégrer les Juifs au monde franco-blanc européen-chrétien (et a fortiori que des Juifs, en Palestine occupée, se retrouvent investis des attributs de la puissance étatique : les Palestiniens ne servent ici que de simples faire-valoir).

 

Partager cet article
Repost0
11 juillet 2014 5 11 /07 /juillet /2014 11:57

tologaza1tologaza2.jpgtologaza3tologaza5tologaza6

La déclaration :

http:// couppourcoup31.over-blog.com/2014/07/gaza-toulouse-est-avec-toi.html

Ce soir, jeudi 10 juillet, près de 2000 personnes ont manifesté dans les rues de Toulouse à l'appel du collectif Coup pour Coup 31 en solidarité avec le Peuple palestinien.

Aux cris de " Palestine vivra, Palestine vaincra !" , "Sionistes, racistes, c'est vous les terroristes", "Vive la lutte du Peuple palestinien ! " ou bien " Israël assassin, Hollande complice !" le cortège dynamique a démontré que le Peuple palestinien était soutenu à Toulouse.

Continuons la mobilisation, pour suivre les prochaines initiatives : facebook.com/couppourcoup31

Ci-dessous, la déclaration de notre collectif qui a été lue en début et en fin de cortège :

Contre les crimes sionistes, soutenons le Peuple palestinien !

Une vague de répression s’abat depuis plusieurs jours sur toute la Palestine. Des raids meurtriers frappent Gaza déjà soumis à un blocus inhumain. Ces trois derniers jours Israël a mené plusieurs centaines de raids faisant des dizaines de morts et des centaines de blessés. 40 000 réservistes ont été appelé en prévention à une attaque d’envergure. De nouvelles arrestations ont été menées ces dernières semaines par l’occupant sioniste qui persiste dans sa volonté de maintenir ce déni du droit qu’est la détention administrative. Celle-ci a conduit les prisonniers à se mettre en grève de la faim. La répression s’abat sur toute la Cisjordanie et Jérusalem avec de nombreuses victimes, morts et blessés, la dernière connue étant un jeune Palestinien de Jérusalem-Est, Mohammed Abu Khdeir, torturé et assassiné.

Le prétexte de l’enlèvement tragique de trois colons israéliens ne saurait masquer la volonté israélienne de poursuivre la conquête coloniale de la Palestine et d’imposer au Peuple palestinien l’apartheid avec son ordre répressif et raciste.

C’est à une répression de grande ampleur que se préparent les dirigeants israéliens forts de la complicité des dirigeants occidentaux.

Nous n'oublions pas non plus le combattant pro-palestinien Georges Abdallah, enfermé depuis 30 ans en France. Notre camarade paie pour son combat sans relâche contre l'impérialisme et le sionisme !

Le collectif anti-impérialiste Coup pour Coup 31 appelle à une large mobilisation de solidarité envers le Peuple palestinien. Nous exigeons l’arrêt immédiat des attaques israéliennes, la levée du blocus de Gaza et la libération de tous les prisonniers politiques palestiniens !

Vive la lutte du Peuple palestinien !

Palestine vivra ! Palestine vaincra !

*****************************************************************************************************

Ce à quoi nous ajouterions : pourritures de défenseurs des crimes sionistes et autres "anti-antisionistes" au nom de toutes les "centralités ouvrières" et de tous "les nationalistes et les fascistes religieux des deux bords se valent" que vous voudrez, préparez-vous à cavaler et à cavaler VITE car L'HEURE DES COMPTES APPROCHE et la complaisance qu'il pouvait y avoir envers vous il y a quelques années, la tétanie qui pouvait saisir les révolutionnaires conséquents entre vous et vos alters egos de la suprématie blanco-occidentale, les Soral et compagnie, C'EST TERMINÉ !
D'ailleurs, pendant que nos "anti-antisionistes" s'échinent à dépeindre le massacre des Palestiniens (et la maigre résistance que ces derniers parviennent à opposer) comme une "guerre" entre "deux camps réactionnaires" renvoyés dos à dos, et à traquer le "mao-stal antisémite conspi pro-islamiste qui relaie X qui relaie Y qui un jour - en 2009 il nous semble - a relayé du Michel Collon" ("théorie", finalement, du... "complot complotiste" (!) suivant exactement les mêmes "raisonnements" et méthodes d'amalgame que les "conspis" et autres "chasseurs" de "sionistes partout" qu'ils prétendent dénoncer, comme le conclut fort bien ce petit collectif socialiste dans sa réponse à Yves Coleman - l'un des "gourous" de cette petite mouvance)... des milliers d'Israélien-ne-s anonymes, avec tous les risques d'ostracisme social et autres - y compris d'agression physique ! - que cela implique, sont descendu-e-s dans la rue pour dénoncer les crimes fascistes de "leur" gouvernement :

haifa1.jpghaifa2.jpg

HONTE À TOUTES LES MERDES SIONARDES FRANCOUILLES et pire encore, aux SIONARDS DÉGUISÉS SOUS LE MASQUE DE "L'ANTIFASCISME" ET DE LA "LUTTE DES CLASSES" !

VIGILANCE ABSOLUE également contre les appels à la mobilisation "pour la Palestine" émanant en réalité des secteurs anti-US/anti-israéliens de l'extrême-droite fasciste. À la suite des camarades de Quartiers Libres, nous relayons ainsi cette mise en garde de la Campagne BDS France : Solidarité avec la Palestine - Non à la récupération de l’extrême-droite

Ne pas tomber dans le piège, ou alors y aller... en mode manche de pioche pour leur exploser la gueule ! Le Peuple palestinien souffre et meurt et les "solidarités" de ce genre, qui sont en réalité des insultes et un service objectif rendu au sionisme et à l'impérialisme (pour sa propagande) ne doivent recevoir que ce qu'elles méritent. Quoi, qu'entendons-nous, "les gauchistes veulent s'arroger le monopole du soutien à la Palestine" ? Oui m'sieur, c'est exactement ça. Les "gauchistes" sont légitimes de par leur histoire et leur conception du monde à soutenir la cause d'un Peuple colonisé, apartheidisé et écrasé sous les bombes d'un bras armé fasciste de l'impérialisme occidental. Pas les nostalgiques de l'Algérie "française" et les défenseurs de l'impérialisme bleu-blanc-rouge du moment qu'il n'est pas (trop ostensiblement) aligné sur Washington et Tel-Aviv ("du temps du général De Gaulllllllle... monsieur !!!") ; pas cette extrême-droite qui ne supporte pas que des Juifs (les sionistes) aient accédé au monde blanc mais ne remet en cause (bien évidemment) ni celui-ci ni sa "destinée manifeste" à dominer les "macaques" des cinq continents.

C'est d'ailleurs fichtrement ballot car voilà que l'idole absolue de toute cette petite mouvance, le dirigeant "avec une paire de c****" par excellence qui "tient tête au Nouvel Ordre Mondial", nous avons bien sûr nommé Vladimir Poutine, vient d'affirmer ouvertement le "droit d'Israël à assurer la sécurité de ses citoyens" : http://www.israelnationalnews.com/News/News.aspx/182754#.U8AYjYaRLHk

 


Communiqués des organisations maoïstes :

(OCML-VP) Attaques et exactions contre le peuple palestinien ! L’Europe et la France complices !

(PCmF) À bas l'agression contre le Peuple palestinien !


Partager cet article
Repost0
9 juillet 2014 3 09 /07 /juillet /2014 14:09


Cet article pourra vous sembler un énième rabâchage de ce qui est notre position ; mais enfin c'est ainsi : quelqu'un quelque part il y a un certain temps a bien dit que la politique est "l'art de la répétition", et mieux vaut répéter les choses afin qu'elles "rentrent" plutôt que de laisser place à l'autre art de la politique selon certains, celui de l'interprétation fallacieuse venant pallier l'absence d'arguments et (plus largement) une conception petite-bourgeoise réactionnaire du monde.

Clarifions donc une nouvelle fois notre logique de positionnement sur les évènements qui surgissent régulièrement (et de plus en plus avec l’aggravation de la crise mondiale) de par le monde.

Servir le Peuple ne raisonne pas en termes de "camp" du "Bien" ou du "Mal", autrement dit d'un "bloc" de forces et de régimes politiques qu'il faudrait systématiquement défendre (même avec 100.000 cadavres à leur actif) contre un autre qu'il faudrait systématiquement condamner, et dont il faudrait systématiquement voir la main contre les premiers. Servir le Peuple raisonne en termes de MASSES et de "ON A RAISON DE SE RÉVOLTER" contre l'oppression et l'exploitation, pour plus de démocratie (pouvoir de décider de son destin), de dignité humaine et de meilleures conditions de vie ; tout en étant bien conscients que les révoltes sans direction politique correcte sont souvent détournées et récupérées au service d'intérêts qui ne sont pas les leurs (pas ceux du Peuple, pas ceux qui les ont originellement déclenchées).

Sur cette base :

Coalition- En Syrie, on avait raison de se révolter contre le régime oligarchique, antipopulaire, policier et corrompu du clan Assad, issu d'un coup d'Etat réactionnaire (1970) contre le gouvernement progressiste de Salah Jedid. Malheureusement, faute de direction politique conséquente, la légitime révolte a été détournée par tout un jeu de manœuvres impérialistes et expansionnistes régionales qui l'ont transformée en une guerre fratricide entre un "bloc chiite" piloté par l'Iran et un "bloc sunnite" impulsé par l'Arabie saoudite, la Qatar, la Turquie etc. Dans cette guerre réactionnaire, il n'y a désormais clairement plus de parti à prendre. Aucun camp n'est celui du Peuple, sauf peut-être les zones kurdes contrôlées par le PYD (PKK de Syrie) dans le Nord du pays.

- En Libye, on avait raison de se révolter contre un régime Kadhafi répondant aux mêmes caractéristiques, quand bien même il aurait pu tenter de jouer un certain rôle progressiste (anti-impérialiste) à certains moments des années 1970 ou 1980. Là aussi, la légitime révolte a été détournée par un bloc impérialiste franco-anglo-US pour instaurer à Tripoli un régime totalement à sa solde. Ce régime, cependant, presque trois ans après la victoire de la "révolution", ne contrôle pas grand-chose et sur pratiquement chaque kilomètre carré du pays la population lui résiste, encadrée par ses structures traditionnelles (tribus, confréries religieuses etc.). On n'observe pas vraiment dans tout cela de force réellement progressiste ; néanmoins, on peut considérer plutôt positivement le fait que les impérialistes occidentaux se retrouvent face à une situation beaucoup plus compliquée que dans leurs sinistres plans.

les-bombardements-ont-touche-gaza-ce-vendredi-matin 968608- En Palestine, on a raison de se révolter et de résister contre l'occupation sioniste, l'expropriation massive et continue de tout un Peuple depuis 1948, les brutalités et les vexations permanentes de l'apartheid qui frappe (tout du moins) les habitant-e-s des "territoires" (conquis et occupés en 1967) ou encore les crimes barbares des colons extrémistes comme l'assassinat de ce jeune Palestinien brûlé vif (!) dernièrement (l’État israélien a beau jeu de dénoncer et même punir les actes les plus barbares, alors que son existence et son idéologie mêmes en sont la source). Le fait que l'oppresseur et bon nombre de ses défenseurs autour du monde se réclament du judaïsme n'a aucune importance à nos yeux, ils pourraient se réclamer du bouddhisme que cela n'y changerait rien. Il existe des personnes pour lesquelles cela a une importance, parce qu'elles détestent les Juifs alors que par contre un oppresseur non-juif peut opprimer qui il veut tant qu'il veut, parce qu'elles ne peuvent supporter (dans leur conception du monde) que des Juifs aient un État, une armée relativement puissante, des médias de propagande et autres attributs d'une "vraie nation", parce qu'elles n'admettent pas, en définitive, que des "youtres" (les sionistes) aient intégré le monde blanc (les Palestiniens opprimés ne servent ici que de simples faire-valoir). C'est le cas d'Alain Soral et consorts (qui entretiennent, au demeurant, des relations étrangement proches avec certains ultras du sionisme, comme si tout cela n'était finalement qu'un match de foot que l'on regarde entre potes). Mais nous avons bien expliqué que ce n'est pas ce sentiment qui est déterminant dans la solidarité envers le Peuple palestinien qui s'exprime tout autour de 1559283 777289835646772 3171665654636233903 ola planète, mais un ensemble d'autres facteurs. Bien entendu les sionistes et leurs défenseurs internationaux de droite comme de "gauche" (voire d'"extrême-gauche"), ayant bien compris que cela pouvait déstabiliser certaines consciences politiques faibles, aiment mettre en avant ce caractère "juif" du sionisme et "antisémitiser" ceux qui les combattent ; mais ce terrorisme intellectuel est totalement dénué d'effets sur nous. De même, le fait que certains résistants palestiniens se réclament d'idéologies islamistes ou nationalistes, aient des conceptions proches de ce que nous appelons l'antisémitisme etc. etc. n'est pas un motif pour rejeter la légitimité de la lutte dans son principe. En réalité, nous sommes très mal placés pour donner des leçons à ce sujet alors que nous vivons dans un État qui a plus que contribué, parfois au-delà des exigences nazies, à la VRAIE Shoah (c'est-à-dire l'extermination des Juifs d'Europe par le nazisme hitlérien, pas les roquettes de la résistance palestinienne sur les villes sionistes) et alors que nous bénéficions tous plus ou moins directement des crimes commis par notre impérialisme depuis des siècles et tout autour du monde (impérialisme dont la majorité des représentants, y compris FN, soutient le droit d'Israël à "exister et se défendre" - comprendre fidayyin"coloniser et massacrer" - et qui a même été son principal soutien international sous la IVe République). À la rigueur, lorsque l'on reconnaît clairement la légitimité de la résistance palestinienne, on est alors éventuellement en droit de s'interroger sur certaines idéologies ou pratiques qui peuvent selon nous l'éloigner de la victoire ; tout en sachant bien que ces questions ne peuvent être résolues que par les Palestiniens eux-mêmes et que ces derniers ne sont pas dans les conditions optimales pour le faire. Si par contre, dans le fond, c'est la lutte palestinienne en elle-même qui est illégitime (au nom de tous les arguments fallacieux que l'on voudra, "nous on lutte pour la classe ouvrière pas pour les nations" blablabli blablabla), on a alors le droit de fermer sa gueule ou de se la faire fermer à coups de manche de pioche.

- En Hexagone, on a raison de se révolter contre l'exploitation capitaliste et toutes les oppressions subies au quotidien. Le problème est que ces révoltes ne peuvent devenir révolution si elles restent dispersées ; elles ne peuvent triompher et peuvent même conduire à dresser une partie des masses contre une autre : les travailleurs du privés gênés (pour aller travailler et gagner leur vie) par une grève de ceux des transports publics par exemple, ou encore les travailleurs "de type européen" contre ceux "d'origine immigrée" (extra-européenne) qui "profitent, n'aiment pas ce pays et foutent la merde" etc. etc. "Il faut coordonner les luttes" dit et répète, sans y parvenir, l'"extrême-gauche" depuis des années. Tout simplement parce que "coordonner les luttes" signifie comprendre les oppressions subies comme un système dans sa totalité, où chacun-e a "sa place" qui explique lesdites oppressions. Il faut notamment bretagnecomprendre comment ce système du nom de "France" s'est construit à travers les siècles et (c'est indissociable) comment il fonctionne aujourd'hui. C'est seulement ainsi que l'on peut cesser de voir son État (la "République française une et indivisible") comme un "recours" contre les oppressions, ainsi que le voient malheureusement beaucoup de gens en lutte.

Dans le cadre de cette réflexion, nous avons notamment compris que l'entité "France" est une "Prison des Peuples", et pas seulement outre-mer (lire ici et suivre les "lire la suite") : elle a été construite historiquement PAR ET POUR le capitalisme émergent (sous l'autorité politique de la monarchie absolue, principalement) en annexant des territoires et leur population (= force de travail) qui se sont vus chacun attribuer "sa place" dans le système total, et un caractère de Centre ou de Périphérie. Et que si l'on veut parler (et nous parlons volontiers !) de "Commune universelle" ou de "République mondiale des travailleurs", il n'est possible de le faire qu'en entendant - par là - fédérer démocratiquement des Peuples LIBRES... Il faut donc libérer ces Peuples des Prisons qui les enferment : il faut abattre les murs de ces États-Prisons ! Nous avons ainsi compris que ce que ses détracteurs appellent "régionalisme" est en réalité une conscience de peuple qui est l'expression, dans un cadre géographique donné avec une histoire donnée, de la conscience de classe populaire (ouvriers, paysans et apparentés). Comprendre que l'on n'est pas "français" mais occitan ou breton (ou "indigène intérieur" d'origine ceci ou cela) n'est peut-être pas le seul moyen de rompre avec le "sens commun" et d'accéder à la conscience révolutionnaire, mais ce qui est certain c'est que c'en est un. Et ce qui est tout aussi certain, c'est que ceux qui limite la bave aux lèvres se répandent contre le "régionalisme identitaire" au nom de toutes les "classes ouvrières" et les "prolétariats qui n'ont pas de patrie" que l'on voudra sont en réalité des chiens de garde du système bourgeois "France" : un système qui est leur RÂTELIER et qu'ils s'ingénient, à grands coups de démonstrations "marxistes" ou "libertaires", à faire perdurer en attendant l'hypothétique et utopique "République universelle" dont ils rejettent la première condition (briser les murs des Prisons des Peuples pour les Peuples libres puissent se fédérer) !

3484740777- En Ukraine, à Maïdan, on avait par bien des aspects raison de se révolter contre le régime oligarchique et corrompu de Viktor Ianoukovitch. Personne n'a jamais dit le contraire, ni nous ni les camarades locaux de Borotba. Cependant, dès le début et très visiblement, le mouvement quelles qu'aient été ses aspirations légitimes a été détourné et pris en otage par des forces au service de l'impérialisme euro-US (libéraux de Vitali Klitchko etc.) et surtout des éléments ultra-nationalistes d'extrême-droite, nostalgiques de l'alliance du nationalisme ukrainien avec le IIIe Reich pendant la Seconde Guerre mondiale. Suite à la chute de Ianoukovitch le 22 février, ces forces sont désormais au pouvoir (les ultra-libéraux dirigent main dans la main avec le FMI, la Banque mondiale et l'Union européenne, le parti d'extrême-droite Svoboda a obtenu plusieurs postes importants et les milices fascistes du "Pravyi Sektor" ont été intégrées dans une soi-disante "Garde nationale"). "EuroMaïdan" c'est fini et bien fini, et les aspirations à la démocratie et à la justice sociale qui ont éventuellement pu s'y exprimer sont mortes et enterrées.

- Face à cela, les masses populaires dites russophones du Sud et de l'Est du pays ont raison de se révolter contre l'esclavage (démantèlement FMIsto-BCEsque de leur appareil économique, sans doute le dernier encore un peu solide en Ukraine), la négation (interdiction de la langue russe) voire le nettoyage ethnique et la mort qui leurs sont promis par les nouveaux maîtres de Kiev. Ceci est indiscutable. Bien sûr, là encore, les énormes insuffisances idéologiques de cette mobilisation populaire favorisent son détournement, cette fois-ci au profit des intérêts impérialistes russes. Il ne fait 628x471mystère pour personne que la Russie de Poutine ne veut pas que sa base navale de Sébastopol devienne comme la base US de Guantánamo, encerclée en territoire politiquement hostile. Il ne fait mystère pour personne que les dirigeants politiques de Crimée et de l’État séparatiste du Donbass (rebaptisé "Nouvelle Russie") sont des agents du Kremlin, parfois au sens propre comme le colonel du GRU (renseignement militaire russe) Igor Strelkov, devenu "Ministre de la Défense" du nouvel État. Mais la différence (et les raisons du relatif succès, contrairement aux déstabilisations US à Cuba) c'est qu'il y a aussi une authentique mobilisation populaire aux raisons plus que légitimes. Personne dans les classes populaires laborieuses n'a "spontanément" envie de devenir un esclave dans un système économique thatchérien (ou du type imposé par la Troïka en Grèce), avec de surcroît un pistolet néo-nazi sur la tempe, quand bien même cela donnerait l'opportunité de "gagner plus" à ceux qui "travailleraient plus". Et personne n'a envie de devenir un étranger, un "sous-homme", un colonisé dans le pays qu'il habite depuis des générations. Devant cette perspective, il est LOGIQUE (à défaut d'être correct) que puisque l'on est russophone et culturellement russe*, rejoindre la Fédération de Russie apparaisse comme une sortie de secours voire, pour certain-e-s, comme une "petite renaissance" de l'URSS dont la nostalgie est un facteur incontournable si l'on veut comprendre les événements politiques de là-bas ; quitte, si l'on n'aime pas Poutine, à voter contre lui en tant que citoyen-ne russe aux prochaines élections.

Du premier aspect, il n'y a évidemment rien à tirer et tout à dénoncer. Mais le second contient des potentialités éminemment positives, sauf à considérer que des gens luttant et mourant avec le drapeau rouge de l'URSS à la main contre d'autres arborant le Wolfsangel nazi constituent un événement politiquement anodin et insignifiant.

Déjà, comme l'explique dans un récent article en anglais le camarade Shapinov de l'organisation communiste Borotba, "en dépit du fait que la direction de la République populaire [du Donbass] n'appartienne pas au camp politique de la gauche - ce sont plutôt des conservateurs attachés aux 'valeurs traditionnelles', la logique même de la lutte [les] pousse vers des politiques anti-oligarchiques, si ce n'est pas carrément anticapitalistes ; exactement comme la même logique pousse les clans oligarchiques de Donetsk dans les bras de la junte de Kiev".

10378092_683717041705200_4485409615347167135_n.jpgEt puis dans tous les cas, c'est une question de cohérence politique : si l'on admet la légitimité du Peuple palestinien à résister contre la négation sioniste de son existence même, y compris sous des drapeaux et avec des idéologies (nationalistes, islamistes etc.) qui ne nous plaisent pas forcément, alors on doit admettre le droit à la résistance des masses populaires russophones d'Ukraine y compris sous des drapeaux russes avec ou sans aigles, des drapeaux cosaques etc. et avec une idéologie que les petits donneurs de leçons professionnels auront vite fait de qualifier de "rouge-brune" [de fait, ce mélange de nationalisme russe/slave anti-occidental virulent et de nostalgie pour l'URSS de Brejnev est actuellement la conception du monde hégémonique dans les masses populaires russes de Russie et des États voisins, un peu comme les "valeurs républicaines" et une certaine économie de marché encadrée par la loi et "sociale" sont finalement le dénominateur commun des masses d'Hexagone : il est bien évident que les masses russes doivent déconstruire ce carcan idéologique 10385395_655075697911559_3160398102734922813_n.jpgpour aller au communisme... mais l'agression barbare que subit le Donbass n'est pas tout à fait le meilleur contexte pour cela !]. Ou alors, il faut rejeter l'un et l'autre : on est alors un petit connard, certes, mais au moins un petit connard cohérent (de plus en plus de personnages de ce type, et c'est tout à leur "honneur", s'acheminent vers une telle cohérence politique).

La comparaison avec les nationalistes serbes dans la Yougoslavie des années 1990 est ici inopérante : pour ces derniers, il s'agissait de maintenir la position prééminente qu'ils avaient dans l'ancienne fédération (quitte à se partager la Bosnie avec leurs homologues croates, aspect principal du conflit jusqu'au printemps 1994) en "nettoyant ethniquement" le territoire revendiqué comme la "Grande Serbie". Ceci, sans "blanchir" pour autant les manœuvres de dépeçage des impérialistes US, allemands etc. dans les Balkans, était politiquement indéfendable pour un communiste conséquent. Leurs chefs de guerre étaient généralement des mafieux issus de la décomposition du capitalisme d’État "autogestionnaire" titiste, et leurs références politiques étaient plutôt à chercher du côté des Tchetniks anticommunistes de Draža Mihailović que de l'Armée populaire des Partisans de 1941-45 (c'était plutôt dans les forces bosniaques que l'on trouvait cette volonté de conserver, en Bosnie, une sorte de "réduit" de la Yougoslavie "socialiste" multiethnique de Tito).  

En Ukraine, ce sont les populations moskali (terme injurieux pour les russophones "pro-russes") qui sont justement menacées de "nettoyage ethnique" par le nationalisme bandériste ultra qui a pris le pouvoir à Kiev. Nous avons pu craindre, au début des événements, pour les Tatars (surtout présents en Crimée dont ils sont la population indigène, antérieure à la colonisation russe du 18e siècle) ; mais il semble finalement que les forces "pro-russes" les laissent relativement tranquilles, voire qu'elles leur aient fait miroiter l'image d'une Russie "multiethnique" où (sauf à être un séparatiste en mode djihadiste) "il n'y a pas de problèmes" pour les minorités, face à un nationalisme ukrainien dont la xénophobie n'est plus à démontrer (les Russes eux-mêmes sont considérés par lui comme des 1401897330 go-20"Tatars"). Les références anticommunistes sont présentes (surtout chez les revendiqués "cosaques") ainsi que la revendication de l'identité religieuse orthodoxe, mais on voit aussi beaucoup de références au passé soviétique et à la Révolution d'Octobre (tandis que les drapeaux communistes et les monuments à Lénine ou à l'Armée rouge sont la cible privilégiée de l'autre camp). Certains dirigeants (comme Strelkov) ont certes participé dans les années 1990 à l'appui impérialiste russe aux nationalistes serbes, mais les oligarques et les mafieux (c'est souvent la même chose) de l'Est ukrainien ont pour 99% d'entre eux cherché et trouvé un compromis avec le nouveau régime (rappelons que c'est le parti de l'oligarchie, le Parti des Régions de Ianoukovitch, qui a voté à l'unanimité la destitution de celui-ci en février) et la volonté de mettre l'appareil productif du Donbass en coupe réglée est plutôt du côté de ce dernier...  

Bref, les différences sont énormes et l'esprit qui règne chez les "pro-russes" (on devrait plutôt dire les anti-Kiev) du Donbass ou d'Odessa n'est absolument pas comparable à celui des nationalistes serbes de Bosnie, même si l'on peut voir dans les manœuvres du Kremlin un équivalent de celles de Milošević (lui-même appuyé par la Russie à l'époque) ainsi que d'autres similitudes et même des personnages récurrents (Strelkov).

10376723 762445917129659 2287306119129610635 nVoilà pourquoi nous avons sur les événements en Ukraine une position que d'aucuns (pour qui la réflexion politique se résume à jeter l'anathème) qualifieront de "pro-russe" alors que sur la Syrie, la Libye et (il y a très longtemps, alors que SLP n'existait pas encore) la Yougoslavie nous avons plutôt eu une position opposée à celle de la Russie et de ses supporters campistes internationaux : c'est tout simplement que nous ne sommes rien de tout cela et que nous ne raisonnons absolument pas en ces termes. La ligne de démarcation pour nous ne passe pas entre "impérialisme russe" et "Occident" mais entre communistes conséquents toujours aux côtés des opprimé-e-s et campistes ; elle nous sépare tout autant de ceux pour qui il faut systématiquement être du côté de Poutine (qui est une pourriture réactionnaire, nous n'avons jamais dit le contraire) que de ceux pour qui il faut systématiquement rejeter ce qu'il soutient (de près ou de loin). Elle nous sépare aussi bien de l'"extrême-gauche" BBR francouille colonialo-paternaliste version "ose défendre un Peuple victime de l'impérialisme occidental, surtout les Palestiniens victimes du sionisme, et tu vas voir sale rouge-brun antisémite conspi adorateur de nationalistes !" que de celle version "ose dire du mal d'un régime dont Fidel et Chávez disent du bien et tu vas voir sale BHL !" (les deux se rejoignant d'ailleurs souvent sur un point intéressant : "ose remettre en cause la construction historique bourgeoise 'France', affirmer les Peuples qu'elle emprisonne et nie et tu vas voir sale identitaire régionalo-pétainiste"). À vrai dire, elle nous sépare de l'"extrême-gauche" tout court car nous n'en faisons pas partie, puisque le terme d'"extrême-gauche" sous-entend une position au sein de quelque chose et non EN DEHORS : l'"extrême-gauche" du système capitaliste-impérialiste hexagonal et mondial. L'extrême-gauche est morte... Vive la révolution !

Une mise au point nécessaire sur nos positions internationalistes et aux côtés des Peuples Nous raisonnons ainsi parce que pour nous la notion d'avant-garde communiste (qui fait tant hurler les anarchistes bornés et met généralement fin à tout débat censé avec eux) signifie être au service du peuple, DANS LE CAMP DU PEUPLE en toute circonstance, être les porte-voix et l'expression militante radicale des classes populaires (dans notre propre pays et dans le monde entier car nous sommes internationalistes), et non être des petits profs qui méprisent, jugent en permanence le peuple et lui dictent ce qu'il doit faire et être.

Bien entendu pour qu'une mobilisation de masse soit politiquement "impeccable" (et encore... rien ne l'est jamais !), ne soit pas détournée par des forces ennemies du peuple et remporte la victoire (faire triompher les intérêts des exploité-e-s), il ne peut s'agir que d'une Guerre populaire révolutionnaire menée par un Parti communiste du prolétariat (nous n'avons donc, déjà, aucune leçon à recevoir de gens qui rejettent ces notions), comme en Inde. Mais nous savons qu'un tel phénomène social est aussi rare en politique qu'une mutation génétique engendrant une nouvelle espèce en biologie, et a à peu près autant de chances de succès (conduire la population concernée au communisme) que la nouvelle espèce biologique d'être viable ; car il s'agit de donner naissance à un nouveau type de société qui, au-delà d'un niveau élémentaire (atteint pendant quelques années et avec beaucoup d'imperfections par l'URSS, la Chine, Cuba et quelques autres pays), n'a pas de précédent dans l'Histoire.

En dehors de ces quelques cas (pour le moment) rarissimes, les masses résistent à l'oppression qu'elles subissent avec ce qu'elles ont "idéologiquement en main". Il est absolument inutile et vain de chercher la "pureté" idéologique communiste dans une mobilisation de masse, surtout lorsque l'on n'est pas un communiste local pour pouvoir y faire quelque chose.

ob fa3097 affiche-khdeirNotre raisonnement doit alors être : LE CAMP DU PEUPLE EST NOTRE CAMP ; déterminer qui est l'oppresseur et qui est l'opprimé, qui opprime et qui résiste à l'oppression, et nous placer résolument du côté de l'opprimé qui résiste. Car comme nous l'avons déjà maintes fois expliqué, ce qui est décisif pour qu'une mobilisation de masse contre l'oppression devienne communiste et révolutionnaire c'est 1°/ son caractère de classe certes (cela ne peut pas être une mobilisation de bourgeois ou d'autres dominants pour le droit d'exploiter et d'opprimer) et 2°/ l'attitude des communistes à son égard ; pas les conceptions idéologiques présentes qui en jaillissent de ci de là dans tous les sens.

Les "communistes" qui passent leur temps à reprocher aux classes populaires de ne pas être "purement" communistes ne verront jamais un Peuple communiste de leur vie, ni la révolution pour laquelle un tel Peuple est indispensable...

À la fin d'un de nos nombreux articles sur l'Ukraine, il y a deux mois, nous écrivions déjà ceci :

- Nous sommes revenus au début du 20e siècle ce qui signifie qu'en dehors de quelques cas de Guerres populaires (Asie du Sud, Philippines, ce qu'il en reste au Pérou ou en Turquie) et de luttes de libération relativement oubliées (Delta du Niger), tout évènement conflictuel dans le monde a principalement un aspect inter-impérialiste : si le conflit n'est pas piloté dès le départ par l'affrontement entre puissances et/ou 'blocs' impérialistes (comme c'est le cas en Ukraine), il le devient au bout de quelques semaines ou mois (Libye, Syrie) dès lors qu'une solution de "tout changer pour que rien ne change" (Tunisie, Égypte) n'a pas été trouvée par l'oligarchie locale et la "communauté internationale" impérialiste.

- Les évènements potentiellement intéressants pour nous communistes sont forcément secondaires ; forcément à rechercher AU-DESSOUS de cet aspect principal ; et généralement de nature ambivalente et contradictoire. Si nous nous arrêtons à l'aspect inter-impérialiste et inter-réactionnaire principal, nous ne pouvons pas les voir ; exactement comme quelqu'un qui se serait arrêté à l'affrontement entre l'Allemagne du Kaiser (avec ses alliés austro-hongrois et turcs) et les impérialistes franco-britanniques avec leur allié russe, pendant la Première Guerre mondiale, n'aurait pas pu voir la naissance de la Guerre de Libération irlandaise ou de la Guerre de Libération arabe (au Machrek) qui se poursuivent encore au jour où nous écrivons, ni même de la Révolution bolchévique ("coup" des Allemands selon la propagande de la bourgeoisie russe et des Alliés). Nous sommes comme face à un lac gelé dont il faut briser la glace pour aller voir sous la surface.

- Nous devons savoir évaluer les résultats concrets d'une action concrète en dépit des intentions et motivations idéologiques premières de leurs initiateurs, étant donné le flou artistique idéologique dans lequel le grand reflux du mouvement communiste international (1975-2000) a plongé les choses. Ceci est typiquement le cas dans l'Est et le Sud de l'Ukraine mais peut aussi s'appliquer aux "Bonnets rouges" bretons de l'automne dernier ou aux Forconi du Mezzogiorno italien, ou encore à la victoire psychologique du Hezbollah libanais sur l'entité sioniste en août 2006 (immense victoire pour tout le Peuple arabe du Machrek).

- Nous ne devons pas pour autant oublier les intentions et revendications légitimes premières sous prétexte que le résultat concret d'un mouvement est négatif : ceci s'applique à la Syrie mais peut aussi s'appliquer au mouvement EuroMaïdan de l'hiver dernier en Ukraine, ou ici en Hexagone aux mouvements populaires (colonisés intérieurs) de rejet de l'idéologie républicarde dominante et de ses "religions" ("laïcité", "Lumières", Droits de l'Homme BLANC, soutien indéfectible au sionisme en manipulant honteusement la mémoire de la Shoah) quand bien même ils déboucheraient sur des positions politiques réactionnaires comme le dieudonnisme ou le salafisme antisémite assassin d'un Mohamed Merah.

- Nous ne devons pas ignorer les résultats positifs mineurs d'évènements concrets sous prétexte que les résultats négatifs prédominent : cette prédominance est certes une réalité à court terme, mais les aspects positifs aujourd'hui mineurs peuvent être les "graines" de développements ultérieurs très positifs à moyen et long terme. Nous ne devons pas oublier que les classes dominantes (bourgeoisies impérialistes, oligarchies expansionnistes régionales et bureaucrates-compradores locaux) "font" peut-être l'histoire dans l'immédiat, mais que les masses font l'histoire sur la longue durée.

- Nous devons (ré)apprendre à analyser les évènements mondiaux dans TOUTE LEUR COMPLEXITÉ. Nous devons rejeter les dogmatiques et les révisionnistes qui veulent, vers tous les Orients compliqués de la planète, "voler avec des idées simples". Nous devons nous débarrasser des vieilles habitudes de la Guerre froide ce qui signifie ne pas se faire les thuriféraires aveugles des impérialismes russe et chinois, des "BRICS", de l'expansionnisme iranien ou de l'ALBA cubano-vénézuélienne dans lesquels certains cherchent à voir désespérément le bloc pseudo-"socialiste" soviétique dont ils sont orphelins, mais aussi ne pas "clôturer" les dossiers internationaux d'un revers d'un main sur un simple "c'est un affrontement inter-impérialiste entre factions locales bureaucratiques-compradores fascistes", comme c'était "tout simplement" hier "l'impérialisme occidental contre le social-impérialisme de Moscou" : ce maoïsme-là est précisément un maoïsme qui n'est pas sorti des réflexes de la Guerre froide (typiquement le maoïsme péruvien "pensée Gonzalo" de ce qu'il reste du PCP, et ses partisans internationaux). Les masses en mouvement sont le facteur historique déterminant en dernière instance et la révolution prolétarienne mondiale est inéluctable, quand bien même sembleraient prédominer pour le moment les manœuvres des impérialistes, des expansionnistes régionaux et des clans oligarchiques concurrents : JAMAIS ceux-ci ne pourront contrôler éternellement TOUTES les mobilisations de masse qu'ils auront suscitées. Dans la "matière brute" des forces révolutionnaires mondiales de demain se trouvent actuellement des partisans de la "République de Donetsk", de Nicolas Maduro au Venezuela ou du président déchu Zelaya au Honduras autant que des partisans déçus d'EuroMaidan à Kiev ou de la révolte populaire initiale en Syrie. En dehors des quelques Guerres populaires sous la conduite d'un Parti communiste maoïste comme en Inde, nous sommes à l'heure de la crise générale du capitalisme, de ses conséquences socialement destructrices et parfois guerrières-meurtrières pour les masses et des RÉSISTANCES à cela, des "radicalités" populaires et des "utopies pirates" bourrées d'ambivalences comme cette République du Donbass qui fait tant penser au Fiume de D'Annunzio en 1919 ; "radicalités" mathématiquement porteuses d'autant de fascisme que de réformisme démocratique bourgeois... ou de conscience révolutionnaire ; tout dépendant du rôle que pourront et sauront jouer les forces révolutionnaires marxistes avancées dans l'affaire.  

C'est cela, être des matérialistes dialectiques. Libre à qui le souhaite de nous traiter d'opportunistes... et BONNE CHANCE pour faire la révolution du haut de leur groupuscule "gardien du Temple" de la "Vérité révolutionnaire", qui sera sans doute (n'en doutons point !) rallié spontanément et in extremis par des masses qu'ils auront couvertes d'injures jusque-là !

À lire aussi (très proche de tout ce qui vient d'être dit et rappelant aux fondamentaux du marxisme et du léninisme) : À propos du mouvement de solidarité avec la Palestine et du Hamas du Comité anti-impérialiste ; excellent texte qui remet les pendules à l'heure !

Ou encore cette excellente mise au point par le dirigeant de l'organisation marxiste-léniniste Borotba Victor Shapinov (septembre 2015) : Le marxisme et la guerre dans le Donbass (ou "De l'internationalisme à géométrie variable d'une certaine extrême-gauche").


[* Cette question de "Novorussie"/"Novorusses" a été très largement débattue, et non sans raisons. En effet, les cartes "ethnographiques" tendent à montrer que les véritables Russes (selon, sans doute, l'ancienne classification soviétique des nationalités) ne sont majoritaires qu'en Crimée (~ 60%) et dans quelques raïons (districts) du Donbass, de la région de Kharkov ou encore proches de la Moldavie (Boudjak). Mais alors, sur quoi (diable) repose donc cette (fichue) identité "novorusse" du Sud et de l'Est de l'Ukraine ? Eh bien, elle repose peut-être précisément sur cela : ni les Russes, ni les Ukrainiens ni qui que ce soit d'autre (Bulgares, Tatars, Roumains/Moldaves, Gagaouzes etc.) ne représentent une écrasante majorité de 90% ou plus dans ces régions. La caractéristique locale est justement le multiethnisme.

Le bandérisme, cet ultra-nationalisme ukrainien fondé sur une "pureté" ethnique ukrainienne "plus-vraie-que-vraie", n'y fonctionne donc pas (sans même parler du fait que sa collaboration passée avec le nazisme, dans des régions martyres de la guerre d'extermination lancée par Hitler contre l'URSS, ne plaide pas en sa faveur...). Des idéologies au service de l'impérialisme russe telles que l'"eurasisme", le "panslavisme" (unité plus ou moins fédérale de tous les Peuples slaves) ou encore un certain "néo-soviétisme" peuvent y fonctionner - et de fait y fonctionnent ; mais le bandérisme, la population du Sud et de l'Est de l'Ukraine le vomit. Si l'Ouest (à 90 ou 95% ukrainien "ruthène") en veut, "tant mieux" pour lui ; mais au Sud et à l'Est on n'en veut pas, c'est ainsi.

On notera que cette culture de coexistence nationale s'accompagne généralement d'un usage de la langue russe comme lingua franca ou plus localement (surtout le long du Dniepr - en orange sur cette carte) d'un dialecte populaire mêlant russe et ukrainien, le sourjyk ; d'où la confusion qui tend à s'installer entre russophones (notion linguistique), "pro-russes" (notion politique) et "Russes" au sens de la classification soviétique des nationalités (notion "ethnique"). La carte de l'usage principal du russe dans la vie quotidienne, ou encore celle des partisans de sa co-officialité (aux côtés de l'ukrainien) montrent ainsi des réalités notablement différentes de celle des pourcentages de Russes "ethniques".]

52371160

Partager cet article
Repost0
26 juin 2014 4 26 /06 /juin /2014 08:23


maoc C'est cette fois vers un endroit bien connu des militant-e-s écologistes et anticapitalistes, Notre-Dame-des-Landes où la "zone d'aménagement différé" (ZAD) pour la construction de l'aéroport du "Grand Ouest" (voulue par le cacique local et ex-Premier ministre Jean-Marc Ayrault) est devenue "zone à défendre", que nous nous tournerons pour illustrer une nouvelle fois ce que nous avons exposé dans une étude de référence en deux parties (1 et 2) : la façon dont la "terre du commun" qui prévalait dans la société paysanne de "l'horrible et obscure" féodalité a été démantelée, dépecée par le "lumiéreux" et "progressiste" capitalisme (jusqu'en 1789 sous l'égide de la grande aristocratie de Cour, propriétaire "éminente" de communes entières, puis sous celle des "racheteurs" grands-bourgeois de ces droits de propriété "nationalisés") dans le but fondamental pour ce mode de production d'arracher la force de travail (la masse populaire des producteurs) à tout moyen de production et plus largement à tout moyen de subsistance autre que son salaire ("loyer" capitaliste de la force de travail), afin d'en faire sa "chair à usine".

[Lire : http://partage-le.com/2018/10/linvention-du-capitalisme-comment-des-paysans-autosuffisants-ont-ete-changes-en-esclaves-salaries-pour-lindustrie-par-yasha-levine]

Ce processus fondamental pour l'accumulation capitaliste (de la fin du Moyen Âge à la fin du 18e siècle) et tout son développement ultérieur jusqu'à l'ère des monopoles et de l'impérialisme où nous nous trouvons, processus brillamment décrit par Marx dans Le Capital, est absolument INDISSOCIABLE de la construction concomitante des grands États modernes sous l'égide de l'absolutisme puis de la bourgeoisie par et pour elle-même ("révolutions" bourgeoises) et de la négation des Peuples annexés par eux (comme force laborieuse productive) à travers les siècles.

Des Peuples dont la conscience toujours renaissante (Notre-Dame-des-Landes comme les mobilisations de l'automne dernier, la question de la réunification administrative ou encore l'indignation contre les régulières marées noires qui frappent le littoral en offrent l'illustration pour le Peuple breton) n'est pas "autre chose" que la conscience de classe, avec laquelle il faudrait "gérer la contradiction" : la conscience de Peuple (et non "nationale", ce qui inclurait la bourgeoisie) C'EST la conscience de classe (ouvrière, paysanne, populaire) exprimée dans un cadre/contexte géo-historique donné ; et mener la lutte de classe à la victoire (révolution) c'est inévitablement comprendre ce cadre/contexte, donc avoir une conscience de Peuple. C'est bien pour cela que l’État, la Républiiiiique du Grand Capital née dans les boucheries de 1871, cherche à tout prix à l'étouffer ; que l'hystérie se déchaîne dès qu'il est question de la toute bourgeoise et inoffensive "Charte des Langues minoritaires", pourtant déjà ratifiée par de nombreux États européens (mais voilà, dans ces États elle ne concerne que de petites minorités localisées et largement "gérables", alors que la "France" matériellement n'est RIEN sans les Peuples qu'elle a annexés et brutalement soumis, le territoire de la monarchie qui l'a "faite" ne couvrant même pas la totalité de l'Île-de-France au départ !) ; ou encore que le gouvernement est prêt à toutes les contorsions "redécoupagières" pour ne pas rendre la Loire-Atlantique à la Bretagne ni créer de grandes entités administratives occitanes ; que les syndicats de régime organisent une pitoyable contre-manifestation de 2.000 tondu-e-s quand les ouvriers et les paysans bretons (et quelques petits patrons, en effet) se mobilisent en masse à Quimper en novembre dernier, etc. etc.

L'article qui suit aborde de manière très documentée et instructive, donc, ce démantèlement de la "terre du commun" et de la "communauté solidaire villageoise" dont elle était le support par le capitalisme triomphant, sous l'Ancien Régime et au 19e siècle. Un processus consistant en une négation, la négation capitaliste de la féodalité certes (propriété éminente seigneuriale ou cléricale sur les terres et les populations) mais aussi de la communauté populaire solidaire et de sa propriété utile (souvent collective) sur les moyens de "production et reproduction des conditions d'existence" (ce que Rosa Luxemburg appelait l'économie naturelle). Aujourd'hui que le capitalisme a fait son temps est venue l'heure de la négation communiste du capitalisme et des ses États (appareils politico-militaires et idéologiques encadrant la force de travail) et, dans un sens, de la renaissance de la communauté populaire solidaire médiévale À UN NIVEAU SUPÉRIEUR qui est la société socialiste.


L’usage des communs à Notre-Dame-des-Landes, d’hier à aujourd’hui


Rien de plus méconnu que les landes dont les Bretons eux-mêmes ont pu observer la terrible régression et dont beaucoup se sont réjouis à force d’entendre qu’elles étaient à l’image de la misère à laquelle ils voulaient tourner le dos. Pourtant, les landes furent au cœur d’une agriculture inventive, généreuse, particulièrement durable. Centrées sur des usages collectifs, les pratiques traditionnelles apportent une précieuse contribution à la réflexion actuelle sur les biens communs.

C’est pourquoi il convient de se réapproprier l’histoire du paysage et des hommes là où s’inventent de nouvelles façons de vivre et de travailler et tout particulièrement à Notre-Dame-des-Landes.

La commune de Notre-Dame-des Landes n’a été constituée qu’en 1871 par démembrement de celles de Fay-de-Bretagne (deux tiers du territoire de la nouvelle commune) et d'Héric (un tiers). La paroisse existait depuis 1847 et affichait une population significative, qu’on peut estimer à plus d’un millier. En 1871, il y a 1785 habitants. C’est l’ensemble des communes situées autour de Notre-Dame-des-Landes qui sera pris en compte pour tenter de reconstituer la genèse du paysage.

NDDL

La ZAD vers 1750 (carte de Cassini)

La constitution des landes

Comme on le sait, en dehors du littoral, les grandes landes ne sont pas des formations naturelles spontanées mais des formations « secondaires » nées des défrichements opérés dès le néolithique aux dépens de la forêt. Toutefois, la lande existait ponctuellement par lambeaux, sur les sols acides et peu profonds, autour des petits affleurements rocheux. Quant à la forêt, elle n’avait pas l’aspect que nous donnent les boisements actuels ; elle pouvait être rabougrie, le feu et les grands mammifères y ouvraient des clairières et les castors y créaient des marais tandis que les arbres poussaient et mouraient dans le plus grand désordre. De plus, à certaines périodes de déclin démographique, des boisements ont pu reconquérir des terrains en lande ou en culture.

On peut considérer que durant tout le Moyen Âge et jusqu’au XVIIIe siècle, les landes ne firent que s’étendre aux dépens de la forêt. Le besoin de terres à cultiver n’était pas la seule motivation : il fallait beaucoup de bois pour couvrir de multiples besoins allant de la construction à la micro-industrie en passant par la construction navale. De plus, les cycles de régénération naturelle des forêts fondés sur un équilibre entre les herbivores et leurs prédateurs ont été profondément perturbés : les forêts accueillent désormais des parcs où la haute noblesse élève des chevaux ou s’adonne à la chasse mais surtout des nuées de porcs qui ne consomment pas que des glands. Ce ne fut pas, bien sûr, un mouvement continu mais, l’appât du gain, les impératifs de la survie pour beaucoup et les désordres aidant, la forêt bretonne était réduite à sa plus simple expression et en fort mauvais état au début du XIXe siècle (5 % du territoire contre 13 % aujourd’hui). Ainsi, l’ancienne forêt d’Héric est, selon P.-H. Gaschignard « encore largement composée, au milieu du XVIIIe siècle, de terres vaines et vagues, frost et gas, landes bruyères et pâtures ».

On peut penser qu’après avoir mis en culture un enclos de défrichement dans un espace forestier, on pouvait épuiser l’humus en quelques années et laisser cet espace appauvri évoluer vers une lande, le maintien de celle-ci étant favorisé par le pâturage extensif et la récolte de litière et de combustible. De plus, les bruyères secrètent des produits toxiques qui renforcent la stabilité du milieu dès lors que les éléments naturels et/ou les prélèvements par les hommes et le bétail ajoutent une pression supplémentaire.

NDDL2L’évolution vers la lande et son maintien étaient aussi favorisés en Bretagne par les substrats de grès ou de quartzites et le lessivage des sols mis à nu ; les modifications chimiques qui interviennent alors dans le sol ne laissent plus pousser que des plantes adaptées telles que l’ajonc et les bruyères. À Notre-Dame-des-Landes et dans les environs, les pédologues notent la présence de sols compactés à pseudogley, saturés d’eau en hiver et s’asséchant facilement en été. On y trouvait donc plutôt des landes moyennement humides (mésophiles) à bruyère ciliée et ajonc nain.

Les petites quantités de fumier disponibles ne pouvant être utilisées que sur des surfaces réduites, les défrichements de la forêt créaient donc aussi des landes. Les défricheurs, moines ou agriculteurs, devaient de plus acquérir une connaissance du terrain et repérer les espaces les plus favorables aux cultures et ceux dont il ne fallait pas attendre trop. De manière générale, les fermes ou les villages se sont installés sur les terrains les plus riches et la trame bocagère s’est étendue à partir du noyau initial où l’on avait « mis en défens » un premier jardin et un premier champ, les landes occupant finalement les confins du territoire. Mais il ne faut pas se représenter les landes telles qu’en général elles nous apparaissent aujourd’hui, par exemple dans les monts d’Arrée ; ce n’était pas forcément des étendues totalement dépourvues d’arbres et les usages créaient sûrement une très grande hétérogénéité.

Néanmoins, les surfaces étaient telles que les voyageurs s’en effrayaient. Toussaint de Saint-Luc, vers 1664, ne voit que « des landes désertes » sur dix-huit lieues (60 km environ) entre Nantes et Rennes ; Edmond Richer s’exclame, un siècle et demi plus tard, en passant entre Treillières et Blain « vous ne pouvez rien vous figurer d’un aspect plus sauvage que ces vastes bruyères qui s’étendent sous vos yeux, à perte de vue ».

Les usages traditionnels

Contrairement à ce que firent nombre d’agronomes à partir du XVIIIe siècle, les agriculteurs n’opposaient pas des « landes stériles » à « des terres productives » tant ils étaient convaincus de la complémentarité de ce qu’ils appelaient les « terres froides » et les « terres chaudes ». À leurs yeux, une bonne ferme devait obligatoirement comporter un espace de landes proportionné à celui des espaces labourables et des prairies : « la meilleure propriété qui n’en posséderait pas une certaine étendue, ne trouverait pas de fermier dans le pays » écrit en 1864 J.-C. Crussard qui fut directeur de la ferme-école de Trécesson en Campénéac et président du comice agricole de Ploërmel.

Les principaux usages étaient le pâturage et la coupe de la végétation (« fauchage, litiérage et paccage » selon certains actes) pour faire du fumier (fumier produit dans les étables ou dans les cours et les chemins où l’on étendait la litière et tous les débris végétaux récupérables). De manière sans doute plus systématique au nord de la Bretagne qu’au sud, on pratiquait l’écobuage. Après une fauche, on arrachait les mottes de terre et de racine dont on faisait des tas en « fourneaux » que l’on brûlait, les cendres étendues permettaient une culture de seigle ou de blé noir pendant trois à cinq ans avant que la parcelle retourne à la lande, souvent, dans un premier temps, sous la forme d’une parcelle d’ajonc semé. Le Dictionnaire du patois du canton de Blain rédigé par Louis Bizeul vers 1850 indique que l’écobuage se fait sur des landes de petite étendue (et avec un outil nommé « écobue » qui ressemble à une large tranche ». Les branches d’ajoncs mais aussi les mottes arrachées au sol et séchées, pouvaient servir de combustible. La Statistique du département de la Loire-Inférieure parue en 1801 signale que l’écobuage est pratiqué dans l’arrondissement de Paimbœuf et qu’ailleurs on laisse parfois « reposer les champs plus de deux ans, et on brûle sur place les genêts ou la bruyère dont ils sont couverts » ; cette pratique qu’on doit plutôt nommer brûlis est notée par Jean Bourgeon à Treillières « on recouvre la surface du champ de plantes sauvages ramassées dans les landes ; on y met le feu qui brûle toute la nuit, puis le lendemain on sème sur les cendres qui apportent au sol un peu de potasse et de soude ». Les Usages locaux et règlements du département de Loire-Inférieure paru en 1861 ne disait cependant plus un mot de cette pratique originale sans doute très résiduelle alors qu’il parle de l’étrépage. La pratique ancienne de l’écobuage n’en reste pas moins inscrite dans la toponymie comme l’atteste l’Écobut à Héric.

La molinie, les fougères, les genêts avaient aussi de multiples utilisations (litière, protection, etc.). En fait, toujours d’après Louis Bizeul, le défrichement d’une parcelle est nommé « un béchis » et il se fait collectivement avec l’aide de 30 à 40 voisins qui « travaillent en chantant » et qu’on « régale d’un veau gras et d’une barrique de cidre ». On voit que l’opération, quoiqu’apparemment moins ritualisée qu’en Finistère, en présente le caractère festif et gratuit.

Jusque dans les années 1960, là où restaient des landes ouvertes ou sous pinède quand ce n’était pas simplement au bord des talus, on coupait les végétaux avec une étrèpe, principalement en hiver, afin de faire de la litière pour le bétail, parfois aussi pour l’étendre dans les cours et les chemins où la macération formait des boues (nommées « marnis ») que l’on mettait dans les champs au printemps.

De très nombreux témoignages soulignent l’importance d’un outil généralement nommé « étrèpe » pour faucher la litière. En 1851, dans son livre Les derniers paysans, Émile Souvestre (1806-1854) évoque, au Gâvres, à proximité de Blain, « l’étrêpe, faulx recourbée avec laquelle ils coupent dans les bois la litière de leurs étables ». De même, dans son récit « La femme blanche des marais » paru en 1878 dans les Contes de Bretagne, Paul Féval (1816-1887) qui a vécu à Glénac, écrit « Un homme surtout éveillait ses soupçons. C’était un éterpeur de landes d’assez méchante renommée, qui demeurait au bourg Saint-Vincent. » Et il précise : « On nomme éterpe ou étrèpe dans le Morbihan, une sorte de hoyau plein et tranchant, avec lequel les paysans tondent les landes ». On trouve des étrèpes mentionnées dans des inventaires après décès du XVIIIe siècle à Fay-de-Bretagne. Toutefois, la diffusion du terme et de l’objet déborde au-delà de la partie gallèse de la Bretagne puisqu’on trouve des « étrêpes » dans des inventaires en 1681 et 1693 à Mendon (entre Auray et Lorient), et « deux estrèpes à couper [la] lande » en 1674 à Surzur. Jean-Pierre Roullaud nous a décrit une « étrèpe » utilisée jusque dans les années 1960 à Guenrouët pour couper la litière et se présentant comme un triangle scalène (trois côtés inégaux) emmanché à l’angle des deux plus petits côtés. Dans un secteur tout proche, du côté de Moisdon-la-Rivière, Isabelle Paillusson nous a fait découvrir la « vouge », sorte de houe coupante, plus large (30 cm) que haute (15 cm), au manche centré et perpendiculaire. Le mot vouge désigne habituellement une serpe sur un long manche.

L’Écomusée Rural du Pays Nantais qui est installé à Vigneux-de-Bretagne nous a communiqué un très bel ensemble de photographies des étrèpes conservées dans les écomusées du département et on voit qu’elles correspondent aux descriptions rassemblées, confirmant la belle diversité des formes et l’ingéniosité des forgerons.

NDDL3

Le vouge (photo Isabelle Paillusson)

NDDL3

L’étrèpe (écomusée de Fay-de-Bretagne)

Les landes attaquées

Sous l’Ancien régime, le territoire de l’actuelle commune de Notre-Dame-des-Landes et de ses environs appartenait pour l’essentiel aux seigneurs de Rohan (marquisat de Blain), au domaine royal (châtellenie du Gâvre), à divers aristocrates et à des roturiers pour une part grandissante au fil du temps. Depuis le XVIe siècle (1549), on dispose d’actes d’afféagement par lesquels ces propriétaires autorisaient, moyennant une rente annuelle, le défrichement de bois ou de landes. Ces opérations menées sur de petites surfaces et au coup par coup peuvent même s’achever par abandon de la parcelle et ne posent généralement pas de problème. Certains contrats qui ne portent que sur le droit de faucher « privativement » interdisent de clore et il ne peut donc s’agir d’un défrichement. On note d’ailleurs qu’il existe des cas d’afféagements collectifs par lesquels il est possible de garantir la jouissance commune, tel celui accordé en 1774 par le duc de Rohan à soixante laboureurs pour utiliser ensemble les landes des Grands Mortiers à Héric qui resteront « vagues à perpétuité ». En effet, la question se pose de façon beaucoup plus conflictuelle au XVIIIe siècle, quand, par vagues successives associées aux décisions facilitatrices du Roi ou du Parlement de Bretagne, des opérations plus ambitieuses sont engagées et mettent en cause l’usage collectif des landes. De nombreux procès sont engagés et parfois gagnés, imposant le déplacement de certains afféagements « trop gênants pour les habitants des villages voisins » (en plus de supprimer des espaces de pâturages, les clôtures empêchent l’accès à des points d’eau ou des chemins). Des procédures collectives remettent même en cause de vieux afféagements conclus depuis 40 ans au nom d’actes passés cent ans plus tôt (on a le cas en 1778 pour des landes autour de la Rolandière et de la Villeneuve). Quand le problème est trop brûlant les paysans s’assemblent et mettent à bas les nouveaux talus comme à Héric en 1773.

Même si l’argument a été rapidement balayé par le rationalisme triomphant et les dures lois du marché, notons que le droit au pâturage sur les « terres vaines et vagues » était quasiment sacré et qu’au XVIIIe siècle encore, il s’est trouvé autour de Nantes de pieux aristocrates pour interroger leur confesseur sur la faute que pouvait constituer le défrichage et donc l’afféagement qui y conduisait quand il privait les pauvres de leur accès à des pâturages. En effet, la Très ancienne coutume de Bretagne (rédigée entre 1312 et 1325) stipulait que les choses qui ne « peuvent point porter de profit à ceux à qui les choses sont » mais qui pourraient profiter à d’autres sans nuire au possesseur, ne devaient pas être empêchées « car ce serait péché ». Un groupe de confesseurs rédigea à ce sujet un état de ses interrogations pour les soumettre au barreau du Parlement de Bretagne. Lequel répondit que le seigneur devait avant toute chose opérer un « triage », opération qui permet au seigneur de se réserver une fois pour toutes un tiers des communs et d’en disposer à sa guise.

C’est dans ce contexte que l’abbé Renaud, curé de Treillières, prit en 1752, la défense de ses paroissiens en recopiant les actes établissant leurs droits et que son neveu participa en 1786 à la destruction de talus et aux procès qui s’ensuivirent. Dans ce cas, comme dans d’autres, les procès traînent assez pour qu’on retrouve les réclamations dans les cahiers de doléances. Celui de Treillières indique que « le seigneur a fait renfermer une infinité de landes et communs ce qui est contraire à nos possessions et notre aisance ». À Héric, on demande que les « vagues et landes » qui ont été afféagés par le Roi reviennent aux vassaux, c’est-à-dire aux paysans riverains. À Fay-de-Bretagne, on reste très modéré puisque l’on se contente de demander que les « biens restent communs entre les seigneurs et nous », on réclame toutefois de ne plus payer de rente pour ce qui a été afféagé.

Une grande hésitation va marquer la période révolutionnaire quant au devenir des landes : la Révolution hésite entre la défense des pauvres qui souhaitent conserver les usages collectifs et celle du progrès associé à l’idée de propriété individuelle.

Les landes dépecées

La commune de Fay-de-Bretagne, qui totalise 9 000 ha vers 1840, compte 3 800 ha de landes et taillis et dans la quasi-totalité des communes des environs, on trouve entre 30 % et 40 % de la surface communale en landes. Mais à la même époque, le curé de Treillières note que l’on a défriché 500 ha dans sa paroisse en quatre ans. La commune y possédait 1 000 ha de landes dont elle avait conservé l’essentiel, se contentant de louer quelques petits morceaux ou de faire payer ceux qui avaient bâti leurs masures et défriché un bout de terrain. Comme l’écrit Jean Bourgeon, « le mitage des landes évolue au gré de la dette municipale ». Mais ce n’est qu’un mitage car au début du XIXe siècle l’agriculture manque encore de bras. L’Empire et ses guerres ayant disparu, la situation change et certains villages ressortent leurs vieux actes établissant leurs droits, demandes des parages, invoquent le progrès. On fait des procès, on tergiverse, on régularise les empiètements des nombreux miséreux qui bâtissent leurs cabanes au bord des chemins et se font un jardin. Les besoins de la commune augmentant et chacun pouvant avoir sa part ou sa miette dans le cadre des partages qui sont doucement engagés, les landes communales sont démembrées entre 1837 et 1850. À Héric, c’est en 1838 que s’est fait le partage des landes des Grands Mortiers. Malgré le coût de l’enquête fastidieuse où chacun apporte son témoignage sur ce qu’a connu son grand-père et recherche sur le terrain des marques d’une limite (arbre, mare, chemin…), les terrains sont attribués de telle sorte que chacun semble y trouver son compte et que, dans de nombreux cas, on pourra fixer le nouvel état des lieux dans le premier cadastre communal.

Les lois votées à partir de 1850 pour faciliter les partages et la « mise en valeur », tant attendues par nombre de propriétaires dans le reste de la Bretagne, ne concernent plus qu’un faible espace (il n’y a plus que 23 ha à partager en 1869 dans les landes de Parignac à Fay-de-Bretagne). En fait, la Loire-Atlantique a bénéficié de trois éléments incitatifs : une classe de riches propriétaires se détournant du commerce avec l’Amérique pour investir dans la terre, des exemples réussis dans le domaine de Grand-Jouan à Nozay autour de l’agronome Jules Rieffel ou de l’abbaye de Melleraye, de la découverte des pouvoirs fertilisants du « noir animal », sous-produit de l’industrie sucrière qui résout le problème des engrais en attendant l’arrivée des nitrates du Chili. Mais le mouvement est lancé et sous l’impulsion de nombreux propriétaires, on crée même de nouveaux villages (le nom de Solférino, une bataille gagnée en 1859, qui apparaît à Blain a son pendant dans les landes de Gascogne).

Il s’est donc bien agi d’opérations de partage menées sur de grandes surfaces en un temps relativement court qui explique le dessin très géométrique du parcellaire agricole. Les haies sont plantées pour marquer les propriétés autant que pour empêcher le bétail d’aller dans les cultures. Il faut rapporter ici une pratique notée à Fay-de-Bretagne par Per Bihan : « la pousse ou repousse des jeunes haies sont protégées de l’appétit des bestiaux par aspersion d’excréments d’animaux, à l’aide de petits balais en genêts ». On pratique le plessage, une très ancienne technique de création et d’entretien des clôtures maîtrisant et utilisant la dynamique végétale des haies vives pour les rendre plus hermétiques. Les landes ne furent pas totalement détruites car les agriculteurs eurent longtemps besoin de litière. Ils continuèrent à semer de l’ajonc pour nourrir les chevaux jusqu’au milieu du XXe siècle. Michel Tarin, né en 1938 et agriculteur à Chavagnes dans la commune de Treillières, raconte que son père allait du côté de Châteaubriant (soit une cinquantaine de kilomètres) acheter des graines d’ajonc.

Le défrichement des landes a donné naissance à un milieu original, un bocage sur zone humide mis en place par les ancêtres des agriculteurs que la folie de notre époque veut chasser. Ce bocage est caractérisé par la présence de petites prairies, non amendées et non drainées, de talus non enrichis et plantés de haies anciennes, de ruisseaux non recalibrés et d’un réseau de mares diversifiées d’une grande densité. On notera que les talus sont en partie des « conservatoires » de l’ancien paysage dans la mesure où ils ont été construits en creusant les fossés qui les bordent. Toutefois, ils sont plus secs et la bruyère cendrée y est donc plus présente que la bruyère ciliée qui marquait les grandes landes originelles. On voit que l’histoire du paysage est complexe mais que ses nouvelles pages n’effacent jamais tout à fait les précédentes (sauf à les arracher toutes pour écrire une page bâclée de l’histoire de l’aviation).

NDDL5

Des Naturalistes en lutte à la recherche de la Gentiane pneumonanthe

Sauvons les dernières landes

En Loire-Atlantique, on part, selon certaines estimations souvent citées, d’environ 300 000 ha de landes au début du XIXe siècle. Toutefois, si l’on se réfère à la méticuleuse Statistique du département de la Loire-Inférieure publiée par Jean-Baptiste Huet de Coëtlizan (1769-1823) en 1801, on ne trouve que 133 632 ha, soit 20 % de la surface totale (marais et prairies sont comptés à part et le total des « incultes » est 161 127 ha). D’ailleurs, cette estimation concorde avec les 100 000 ha de 1844 donnés comme le « premier chiffre fiable » par René Bourrigaud. L’actuel inventaire départemental des espaces naturels compte 1,4 % de « landes et fourrés » soit un total 9 782 ha, sachant qu’en fait on ne connaît que cinq sites de landes (dont trois littoraux) un tant soit peu significatifs mais qui ne doivent pas totaliser beaucoup plus de 200 hectares à eux tous, le plus étendu et le mieux conservé se situant sur le plateau du Landonnais à Grand Auverné. La base Corine Land Cover donne d’ailleurs le chiffre de 624 ha pour les « landes et broussailles ». La botaniste Aurélia Lachaud qui a longuement parcouru le département résume bien la situation quand on l’interroge : « les landes de grande surface sont quasi inexistantes à part sur les coteaux du Don (à Grand-Auverné et Moisdon). Sur le littoral les plus belles landes étaient à Préfailles mais aujourd’hui ce sont en grande majorité des fourrés à ajonc. Le reste des grandes surfaces se trouvent sous pinède dans des états plus ou moins relictuels. Sinon il reste des mouchoirs de poche qui chaque année régressent faute de gestion appropriée ».

C’est dire que chaque parcelle de lande à bruyère est précieuse en Loire-Atlantique et que les deux hectares qui subsistent en plusieurs petits éléments à Notre-Dame-des-Landes sont les derniers témoins du paysage dominant il y a deux siècles. Leur caractère patrimonial ne fait aucun doute. Si ces landes sont à protéger, c’est pour des raisons proprement humaines et culturelles, car c’est dans sa diversité que la nature joue un rôle essentiel dans notre expérience sensible du monde et dans l’enracinement qui nous permet de prendre la mesure du monde.

NDDL6

Coussinet de sphaigne dans une des landes humides de Notre-Dame-des-Landes

Les communs au cœur du débat

Pendant des siècles, les landes ont fait l’objet d’usages collectifs. Des conflits ont éclaté chaque fois que des individus ont voulu, d’une manière ou d’une autre, déroger aux usages qui assuraient l’équilibre général et, en particulier, basculer dans l’appropriation privative. Il a fallu plus de deux siècles pour imposer la privatisation des landes communes.

La philosophie de ce partage est bien résumée par le premier préfet d’Ille-et-Vilaine, Nicolas-Yves Borie, qui écrivait en 1801 que « l’état de communauté entraîne la destruction ». C’est à peu de choses près la thèse qu’a défendu en 1968 le biologiste Garrett Hardin (1915-2003) dans la revue Science sous le titre « La tragédie des communs » (The Tragedy of the Commons). L’idée de Garrett Hardin est que « les communs » (qui pour lui intègrent les zones de pâturage mais aussi les parcs publics, les réserves naturelles ou la sécurité sociale) font l’objet d’une surexploitation par chaque individu aux dépens des autres afin de maximiser son profit. Seul le régime de la propriété privée est aux yeux de l’écologue américain en mesure de préserver la durabilité des ressources. La polémique ouverte par ce texte qui apportait de l’eau au moulin néolibéral en construction est au cœur d’un débat toujours actuel. Il a, en effet, contribué à relancer la réflexion concernant les communs voire, depuis quelques années, « le commun », incluant aussi, par analogie, le champ d’Internet. De très nombreux auteurs appuient leur réflexion sur le mouvement des enclosures en Grande-Bretagne qui a marqué la pensée économique, sociale et politique depuis le XVIIIe siècle. Même un ouvrage récent comme Commun, essai sur la révolution au XXIe siècle écrit par le philosophe Pierre Dardot et le sociologue Christian Laval, ne cite aucun exemple français.

On aura compris, espérons-le, qu’il y a, dans l’histoire des landes de Bretagne et dans celle qui s’écrit aujourd’hui sur la ZAD de Notre-Dame-des-Landes, la matière pour mieux appréhender le fonctionnement d’autres modèles sociaux que ceux qui font la part belle à un État tout-puissant ou à un marché totalement libéré. C’est ce que suggérait récemment Grégory Quenet (Qu’est-ce que l’histoire environnementale ?) quand il affirmait que « la gestion collective offre de nombreux exemples historiques d’une gestion soutenable plus efficace que la propriété privée ». Un procès fait en 1698 par les usagers des landes communes de Lanveur à Languidic contre un accapareur illustre parfaitement le fait que l’usage des communs relève essentiellement d’un droit non-écrit et se fonde sur un savoir-vivre populaire qui est le meilleur gardien de la durabilité du patrimoine commun. Les « pauvres de la paroisse » ne sont pas d’égoïstes rapaces qui raclent jusqu’à la roche les maigres landes dont ils peuvent disposer ; bien au contraire, ils les défendent contre ceux qui veulent y arracher des mottes alors qu’elles ne peuvent supporter que la fauche et le pâturage. Ils sont en fait les gardiens du système menacé par un individu qui, précisément, fonde son pillage irréversible en invoquant le droit du propriétaire du sol. Le commun, c’est d’abord une volonté de vivre ensemble, d’avoir un avenir et de renforcer périodiquement les liens des hommes entre eux, par exemple dans le cadre de fêtes autour de travaux collectifs. Cette expérience séculaire devrait alimenter la réflexion de ceux qui vont continuer à vivre sur la ZAD.

François de Beaulieu

15 mai 2014

NDDL7

Le coupeur de litière et le réparateur de parapluie. Lucien Pouëdras, 2006.

Bibliographie

BEAULIEU (de), F., Pouëdras, L., 2014, La Mémoire des landes de Bretagne, Skol Vreizh (sous presse).

BIHAN, P., 1997, Contribution à l’histoire de Fay-de-Bretagne, s.e.

BIHAN, P., 2001, Faouell, contribution à l’histoire de Fay-de-Bretagne, s.e.

BOURGEON, J. 2012, Treillières, un village au pays nantais, Coiffard.

BOURGEON, J., 1986, La vie est dans le pré, portrait d’une commune rurale avant et pendant la Révolution [Treillières], éditions ACL.

BOURRIGAUD, R., 1994, Le développement agricole au XIXe siècle en Loire-Atlantique, Centre d’histoire du travail de Nantes.

COLOMBEL, H., 1828, ‎Mémoire sur les Terres vaines et vagues de la ci-devant Province de Bretagne, rédigé dans l’ordre des questions qu’avaient posées la société académique de Loire-Inférieure‎, Mellinet-Malassis.

DARDOT, P., LAVAL, C., 2014, Commun, essai sur la révolution du XXIe siècle, La Découverte.

GASCHIGNARD, P.-H., 1996, Héric pendant la Révolution 1789-1799, Les Amis de l’histoire d’Héric.

GASCHIGNARD, P.-H., 2000, Héric, des origines à la Révolution, Les Amis de l’histoire d’Héric.

HUET DE COËTLIZAN, J.-B., 1801, Statistique du département de la Loire-Inférieure, Impr. des Sourds-muet

LEBRETON, M.-A., 1998, Notre-Dame-des-Landes, naissance et vie d’une paroisse, s.e.

MAHEUX, H., 2004, « Champs ouverts, habitudes communautaires et villages en alignements dans le nord de la Loire-Atlantique : des micro-sociétés fossilisées dans l’Ouest bocager », In Situ, 5.

QUENET, G., 2014, Qu’est-ce que l’histoire environnementale ?, Champ Vallon.

SIBILLE, A., 1861, Usages locaux et règlements du département de Loire-Inférieure, Merson.

Ce travail n’a été possible que grâce à Yves Riou et Marie-Ange Lebreton qui ont rassemblé toutes les monographies locales et tous les Naturalistes en lutte qui ont bien voulu apporter des contributions.

64173945_640.jpgNotre-Dame-des-landes.jpg

Partager cet article
Repost0
23 juin 2014 1 23 /06 /juin /2014 14:43

 

1313982-corridaComme chaque été les grand-messes "populaires" se succèdent d'un bout à l'autre de l'Occitanie, dans les villes "à arènes", autour de manifestations tauromachiques dont la principale et plus connue est bien sûr la corrida, la course "espagnole".

Ce "sport" consistant en la mise à mort d'un animal sans défense (mais qui soi-disant "aurait sa chance" sous prétexte qu'il pèse tout de même une demi-tonne de muscles et que des toreros sont parfois encornés) est régulièrement présenté par l'aile droite de l'idéologie francouille comme un "sympathique" folklore emblématique de "nos terroirs" méridionaux, et par son aile "gauche" comme la preuve que nous sommes de gros "beaufs", des culs-terreux arriérés et réactionnaires aux "traditions" barbares.

Tout cela, qu'il s'agisse de l'Occitanie ou des pays ibériques dans lesquels la pratique trouve son origine, ne tient cependant pas la route devant la plus petite analyse historique marxiste du phénomène.

La réalité c'est que :

- Depuis des temps immémoriaux existent en Occitanie des jeux taurins tels que la course landaise ou la course provençale "à la cocarde", les lâchers de vachettes dans les rues des villages (abrivadas) etc. etc., "combats" symboliques entre l'homme et le puissant bovin n'impliquant pas la moindre mise à mort de ce dernier, surtout lorsque l'on a à l'esprit la valeur que pouvait représenter cet animal dans la société rurale d'il y a encore un ou deux siècles. Il s'agit là d'un héritage du culte solaire de la Haute Antiquité (le taureau étant associé au Soleil, lui-même associé à la nature et au vivant en général), répandu dans toute la Méditerranée (on pense par exemple à la Crète minoenne), notamment chez les Ibères et les Ligures qui sont nos ancêtres (et non "les Gaulois" comme nous l'enseigne l'école de la Républiiique). C'est l'idée de "jeu égal" entre lo rasotaïre et lo buòu, de conflictualité mais aussi de complémentarité entre l'être humain et la nature (symbolisée par la bête) qui prédomine. Certes, nonobstant de fréquentes et cuisantes blessures, l'homme finit généralement par triompher car il a moins de puissance musculaire mais plus de capacité cérébrale de résolution de problèmes, d'anticipation et d'astuce. Mais il n'est pas question pour autant d'exprimer un suprématisme barbare sur l'animal (et la nature) et le mettant à mort pour le seul plaisir de voir le sang couler : dans la société où naît la "tradition" de la course taurine, on sait encore que l'écosystème n'est pas la propriété de l'espèce humaine mais l'inverse.

002

- La même chose se retrouvait bien évidemment dans la péninsule ibérique voisine. Cependant, à partir des derniers siècles du Moyen Âge (lorsque se consolide l'État moderne "espagnol") se développe la pratique de la corrida à cheval avec mise à mort, comme "joute" aristocratique censée montrer la "valeur chevaleresque" et la supériorité de l'homme sur l'animal et la nature, "valeur" qui émerge et se développe en même temps que les progrès du capitalisme et de la technique dans le cadre du "stade suprême" absolutiste de la féodalité. Il va de soi qu'une telle pratique n'avait pas sa place dans la lumineuse civilisation d'Al-Andalus (où se pratiquaient par contre, bien sûr, des jeux taurins comme au nord des Pyrénées, notamment ce qui deviendra la capea d'où provient la pratique de "leurrer" l'animal avec une pièce de tissu) ; pas plus d'ailleurs que dans celle d'Aragon-Catalogne-Òc ni dans l'Aquitaine des ducs-trobadors des 11e-13e siècles ; mais qu'elle relève bien au contraire de ses féroces annihilateurs, la grandeza castillane construisant l'"Espagne" à son image.  

La corrida prend alors solidement place dans la culture "espagnole" des élites du nouvel État, reflétant l'esprit "viril" et "conquérant" qui anime celles-ci et dont les indigènes et autres esclaves africain-e-s font parallèlement la sinistre expérience outre-Atlantique, comme avant eux les Moros et autres Juifs d'Andalus. On tue (mata -> matador) le taureau comme on tuait le Maure (matamoro -> "matamore") et l'on tue le "sauvage" du "Nouveau Monde", le "païen" et l'"hérétique" en général dans un État qui se veut le glaive de la foi catholique apostolique romaine (bien que pour le coup l’Église tente de limiter la pratique, qui rappelle un peu trop les jeux de cirques de la Rome païenne). Ce n'est d'ailleurs pas un hasard si, comme tout-e un-e chacun-e le sait, la terre de prédilection de la corrida est l'Andalousie "re"-conquise, annexion première et fondatrice de "l'Espagne" où règnent un système et une culture coloniale très spécifiques (masses populaires autochtones et grande propriété terrienne castillane implantée à la place de la féodalité maure), baignant dans cet esprit de "conquête" dont nous avons parlé et que les masses vont chercher à imiter en "réaction". Le petit Portugal voisin tend à copier la pratique, d'autant plus qu'il fait partie du Royaume d'Espagne de 1580 à 1640 ; dans la corrida portugaise cependant l'animal est tué hors de l'arène et des regards du public.

Anales de la plaza de toros de Sevilla 1730-1835 - portadaLe "loisir" se "démocratise" donc ensuite à partir des 17e-18e siècle dans une logique de massification de l'idéologie "espagnole" (société civile gramscienne), comme "emblème" de la culture "nationale" : la corrida à pied semble trouver ses origines (dès le 16e siècle) dans les abattoirs de Séville, comme "copie" populaire aliénée de la pratique aristocratique ("spectacle" dont était bien sûr exclu le petit peuple à cette époque). C'est en Andalousie (à Ronda) qu'en 1752 le torero à pied Francisco Romero "invente" la muleta (il ne fait en réalité que reprendre la pratique populaire de la capea) et demande à tuer lui-même le taureau d'un coup d'épée dans l'échine (estocade), donnant naissance à la corrida "moderne" : le picador à cheval passe au second plan et la mise à mort par estocade devient l'objectif en soi du "spectacle". À cette même époque la corrida est déjà largement devenue un opium pour les masses aliénées, au point d'engendrer de nombreux débordements dont les autorités s'émeuvent ; tandis que paradoxalement l'aristocratie qui en est à l'origine s'en désintéresse peu à peu. On a finalement là un peu le même phénomène qu'avec le football, inventé et pratiqué au 19e siècle dans les écoles d'élite de la haute société britannique puis devenu (en Angleterre comme dans le monde entier) une grande bacchanale "populaire" que la bourgeoisie fait mine de mépriser... tout en étant bien contente des milliards de profits qu'il génère et (surtout) de l'abrutissement de masse dont il est l'instrument. Bien que souvent issus de milieux populaires (ouvriers agricoles voire Gitans), les toreros à pied (matadores) étaient et sont généralement des gens conservateurs, réactionnaires, souvent franquistes sous ce régime. Par ailleurs le prix des places en arène (en "Espagne" comme en Occitanie), aujourd'hui encore, tend aussi à montrer que la "démocratisation" a ses limites et que la tauromachie veut garder un certain caractère "élitiste".

- En Occitanie, il n'existe pratiquement aucune corrida d'aucune sorte avant le 19e voire le 20e siècle [on signale des édits royaux d'interdiction en Gascogne, sur injonction de l'Église, au 17e siècle mais on ne sait pas bien s'il s'agissait de corridas "espagnoles" (influence d'outre-Pyrénées) ou de courses gasconnes (sans mise à mort) combattues par le clergé comme pratique "païenne"]. Il s'agit d'une complète importation dans le but 100% capitaliste de créer de toute pièce un "folklore local" lucratif en jouant sur la proximité de la péninsule ibérique, son influence culturelle historique sur notre pays et le terreau (supposément) "favorable" de la culture des jeux taurins. Ce serait à l'origine l'impératrice Eugénie de Montijo (comtesse castillane épouse de Napoléon "Badinguet" III... notre bourreau de 1851 !) qui aurait importé le "spectacle" au milieu du 19e siècle avec toute une flopée d'autres modes "espagnoles", à l'époque où nos Terres d'Òc commençaient également à devenir (chemin de fer aidant) la grande destination touristique qu'elles sont restées (l'impératrice elle-même "lançant" Biarritz et le "Sud-Ouest") : les deux phénomènes se sont combinés pour engendrer ce qui s'appelle tout simplement un marché. Mais ce n'est encore pas avant la première moitié du siècle suivant qu'apparaissent la plupart des ferias sous la forme que nous leur connaissons aujourd'hui. C'est Nîmes qui "ouvre le bal" à la fin du 19e siècle avec une longue bataille juridique de plusieurs décennies, marquée par la figure de l'avocat et manadier (grand propriétaire d'élevage) camarguais Bernard de Montaut-Manse qui voit là (à juste titre) matière à une juteuse rentabilisation des troupeaux, en mode "l'Espagne près de chez vous" pour le bourgeois venu de tout l'Hexagone, et qui met misérablement en avant la "méridionalité" contre "Paris" où la SPA faisait (déjà) pression sur le gouvernement pour qu'il interdise le sordide spectacle. C'est arene nimes6Blui qui arrache en 1921 un premier jugement en faveur de la corrida avec mise à mort, débouchant 30 ans plus tard (1951) sur la notion de (soi-disant) "tradition locale ininterrompue".

Voilà qui en dit long sur le mariage de grande notabilité locale (et "localiste"), voire de grande propriété foncière (bien à droite comme il se doit, la plaine camarguaise étant historiquement un bastion "blanc" réactionnaire) et de "loisir"-business capitaliste qui sous-tend la chose ; comme d'ailleurs tout le Disneyland touristique "couleur locale" que le capitalisme BBR a fait de nòstra Occitània et de toutes les terres provincialisées de son entité "France"... Malheureusement, beaucoup de gens croient que mettre en avant ce genre d'équivalents (culturels et de classe) provinciaux de la bourgeoisie compradore et de la féodalité terrienne semi-coloniale est une "affirmation occitane", une manière d'affirmer notre Peuple nié contre l’État négateur ; alors que ce sont en réalité des boulets qui permettent au système-"France" de nous maintenir emprisonnés malgré des siècles de résistance infatigable !

Les Fêtes de Dax (ville thermale déjà très touristique) se développent vers la même époque (les arènes actuelles sont construites en 1912-13), dans la foulée de "l'effet Eugénie" et dans le cadre d'une foire agricole - quant à elle - immémoriale (avec traditionnellement des courses gasconnes), tout comme celles de Mont-de-Marsan, tandis que celles de Bayonne n'apparaissent qu'en 1932 (il n'y a pas en Gascogne, en revanche, de grands élevages et les taureaux viennent généralement de la vallée de l'Èbre, outre-Pyrénées). Pour dire combien est "immémoriale" la "tradition" de la corrida en Occitanie, l'Union des Villes taurines françaises s'est constituée à la date antédiluvienne de... 1966.

Extirper la corrida de nos Terres d'Òc ne signifie donc nullement aller contre une "tradition ancestrale", mais bien contre une pure machine-à-fric "folklorique" totalement transplantée ; a fortiori lorsque l'on peut mettre en avant une tradition locale vraiment ancestrale (celle-là) de jeux taurins sans mise à mort, célébrant symboliquement l'unité relative des contraires (contradiction mais aussi complémentarité, indissociabilité) entre l'être humain et le reste du vivant, et non la  la-corrida-est-une-torturedomination brutale de la nature symbolisée par des heures de torture s'achevant sur un assassinat pur et simple (logique qui ne peut conduire qu'à la disparition de l'espèce humaine).

Dans l’État espagnol et au Portugal (ainsi que dans les pays hispaniques d'Amérique où elle a été exportée), en finir avec la corrida sera une conséquence de la lutte victorieuse contre une bourgeoisie de nature particulièrement aristocratique et oligarchique. La corrida n'y est d'ailleurs pas plus qu'ici une tradition "ancestrale" (comme d'ailleurs aucune tradition nulle part) : elle n'est que le produit et le reflet d'un processus historique, en l'occurrence celui de l'affirmation du capitalisme (avant son triomphe total aux 19e-20e siècles) dans le cadre de la féodalité absolutiste. Nier le résultat historique de ce processus (les systèmes capitalistes "espagnol" et portugais avec leurs États respectifs et les États semi-coloniaux compradores d'Amérique latine) aboutira inévitablement à nier tous les héritages (les "traditions") historiques charriés par lui ; héritages dont fait partie la corrida.


Partager cet article
Repost0
23 juin 2014 1 23 /06 /juin /2014 06:56

 

la faute au midi1 L'attentat de Sarajevo perpétré le 28 juin 1914 par un nationaliste serbe contre l'archiduc héritier d'Autriche-Hongrie est communément considéré comme le début d'une course à l'abîme militariste qui, en à peine plus d'un mois, allait précipiter l'Europe (surtout) ainsi que de nombreuses autres parties de la planète dans le pire cauchemar dont l'Histoire ait jamais accouché jusqu'alors. Il est pourtant possible de considérer (et nous considérons) que la Première Guerre mondiale avait en réalité déjà commencé plus de 15 ans auparavant (guerre hispano-américaine de 1898, guerre des Boers 1899-1902 puis guerre russo-japonaise 1904-05, guerres balkaniques 1912-13 etc.), dès lors que la grande crise capitaliste mondiale commencée au début des années 1870 (avec dès les années 1850 toute une série de conflits comme signes avant-coureurs) avait été "résolue" au prix d'une "saturation" coloniale totale de la planète, imposant une lutte sans merci entre les puissances impérialistes pour le repartage de  celle-ci ; et qu'elle s'étend encore au-delà de 1918 jusqu'au début des années 1920 (et, ne résolvant rien du tout, elle sera suivie d'une Deuxième Guerre du début des années 1930 jusqu'en 1945 voire 1948-49, puis d'une Troisième classiquement appelée la "Guerre froide" avec encore plus que la précédente un aspect d'affrontement mondial entre révolution et contre-révolution, et enfin depuis la fin de celle-ci une Quatrième Guerre mondiale pour le repartage de la planète après la défaite du camp soviétique).

2009 01 21 cimetiere douaumont inside

Nous avons déjà eu l'occasion de dire à de nombreuses reprises combien pour nous Occitans communistes (comme cela devrait l'être pour tous les Peuples emprisonnés/niés de l'entité francouille ainsi que bien sûr pour les "indigènes" colonisés intérieurs, dont les aïeux ont eux aussi plus que versé l'impôt du sang), cette Guerre de 14-18 est un élément fondamental de notre identité politique : elle montre dans toute son atrocité comment la chair à usine que le Capital et son État BBR ont fait de nos Peuples peut à tout moment être transformée en chair à canon pour "défendre les biens de ces messieurs-là" ; elle montre comment l'impérialisme stade suprême du capitalisme, ce même capitalisme ayant donné naissance aux États qui nous emprisonnent, c'est inévitablement la guerre et le fascisme qui en est la conséquence (plus que la cause) ; et elle montre toute la barbarie, le mépris et la négation des masses populaires par ce système infâme qui, bien qu'ayant permis sur les derniers siècles de notable progrès techniques et scientifiques pour l'humanité, n'en doit pas moins plus que jamais disparaître.

Le 11 novembre dernier, 95e anniversaire de l'armistice de 1918 ouvrant de fait les (hypocrites) commémorations "républicaines" de "l'année du centenaire", avait été l'occasion d'une déclaration de notre part à laquelle il n'y a pas grand-chose à ajouter :

Déclaration du 11 Novembre

Nous avions aussi relayé la tenue d'une très intéressante exposition à Aix-en-Provence, sur la condition de nos aïeux occitans sauvagement plongés dans l'horreur de ce conflit et souvent fusillés par la canaille-à-galons pour "manque de combattivité" sous la mitraille et les obus :

À la reconquête de notre mémoire, pour la Libération révolutionnaire de demain : exposition "La Faute au Midi" à Aix-en-Provence

Cette exposition se déroule jusqu'au 5 juillet (inclus), il est encore temps d'aller y faire un tour !

Guerre 14-18-Généraux Joffre et de Castelnau-1914

Concernant ce "manque de combattivité" occitan, accusation relayée y compris par d'innombrables TRAÎTRES "méridionaux" (les Joffre, Foch, Gallieni, Nivelle etc.), il faut bien admettre que oui, en effet, les ouvriers et les paysans d'Occitanie ont toujours été assez rétifs aux grands appels "patriotiques" à se faire trouer la peau (et à trouer celle des autres) pour la gloire du Capital... français, pour la grande bourgeoisie parisienne qui avec d'autres (Bretons, Basques, Corses, Catalans, Ch'tis/Picards, Lorrains, Comtois etc. et bien sûr tout "l'Empire" d'outre-mer et les colonies intérieures qui en sont issues) les a au fil des siècles annexés par le fer et le sang à son enclos hexagonal de force de travail, sous la botte de son appareil politico-militaire nommé "France". Ce n'est pas un hasard si l'une des rares voix à s'élever contre l'hystérie patriotarde (alors même que son parti comme toute la social-démocratie européenne allait commettre une trahison historique en ralliant "l'Union sacrée") fut celle du leader socialiste Jean Jaurès, nòstre Joan de Castres qui le paiera de sa vie, assassiné par un nationaliste d'extrême-droite le 31 juillet 1914. Tout comme ce n'est pas un hasard non plus si l'"ethniste" François Fontan devra, pour avoir rejeté la guerre d'extermination colonialiste en Algérie, s'exiler en 1959 dans les vallées occitanes du Piémont (État italien) où il mourra 20 ans plus tard sans avoir remis les pieds en "France"...

Ils se mobilisent en revanche sans faille lorsque lo païs est menacé d'invasion militaire (1870-71) et des atrocités qui vont avec, c'est-à-dire d'une botte encore plus effroyable que la tricolore (car se superposant à elle et dans tous les cas secondée par des francouilles toujours prompts historiquement, d'Adolphe Thiers à Pierre Laval, à oublier le "patriotisme" lorsqu'il s'agit de sauver leurs privilèges de classe) ; ou lorsqu'il est effectivement envahi et occupé et qu'à travers le fascisme sont piétinés à la fois leurs intérêts de classe et les valeurs démocratiques qui fondent leur culture populaire (1940-44) : il faut dire qu'ils y sont quelque peu habitués puisque leurs 800 ans d'histoire "en France" ne sont pratiquement que 800 ans de résistance au joug du pouvoir parisien, des faidits du Moyen Âge aux paysans du Larzac en passant par les Tuchins et les Croquants, l'Ormée et les Camisards, les "Fédéralistes" de 1793 et les Demoiselles ariégeoises du siècle suivant, les résistants démocrates-socialistes au coup d'État de Décembre 1851, les Communards de 1871 ou les vignerons languedociens de 1907.

Même lorsqu'un siècle avant la Grande Boucherie le Bassin parisien vibrait aux accents guerriers de "l'épopée" napoléonienne, voici la petite chanson populaire que l'on pouvait entendre dans les campagnes du Languedoc :

Ièu soi un paure conscrit
De l'an mil ueit cent dètz
Cal daissar lo Lengadòc
Per s'en anar a la mòrt.

Luènh d’aici, i a un país
De nèu blanca, de cèu gris
Nos i cal anar morir
Per l’Emperaire e son filh.

Lo rector e lo regent
Nos an parlat plan longtemps
Partirem fòrça contents
Serèm sus lo monument !

Mainatz-vos Lengadocians,
De faire d'autres enfants
N'auràn besonh dins vint ans
Negres o Republicans !
Je suis un pauvre conscrit
De l'an 1810
Faut quitter le Languedoc
Pour s'en aller à la mort

Loin d'ici il y a un pays
De neige blanche et de ciel gris [la Russie]
Il nous faut aller y mourir
Pour l'Empereur et son fils

Le curé et l'instituteur
Nous en ont parlé longuement
Nous partirons tout contents
Nous serons sur le monument !

Dépêchez-vous Languedociens
De faire d'autres enfants
Ils en auront besoin dans 20 ans
Noirs [cléricaux, royalistes] ou Républicains !

Il en a toujours été et il en sera TOUJOURS AINSI dans la Quatrième Guerre mondiale où nous nous trouvons, entre repartage impérialiste du monde après la fin du "système des blocs" et crise générale terminale du mode de production capitaliste, du Sahel à l'Afghanistan en passant par la Centrafrique, la Palestine, l'Irak ou l'Ukraine, que l'entité bleu-blanc-rouge soit impliquée ou non : les Occitans révolutionnaires, Pòble fièr e libre que nous sommes, auront toujours pour ennemi juré les Centres impérialistes rivaux qui font des Peuples leur chair à canon et pour camp irréductible le CAMP DES PEUPLES qui souffrent et meurent mais qui sont aussi "la lumière même du monde", "la fibre, la palpitation inépuisable de l'histoire" car quand ils parlent "tout tremble, l'ordre chancelle, les cimes les plus hautes s'abaissent, les étoiles changent de direction ; car les masses font et peuvent tout" !

Notre objectif est posé clairement et il tient en une phrase : EN FINIR AVEC LA FRANCE, appareil politico-militaire et idéologique issu de la concentration ultime des terres féodales ("stade suprême de la féodalité") et utilisé puis repris par la bourgeoisie pour affirmer son règne capitaliste du crime, Prison des Peuples, membre du G8 et membre permanent du Conseil de Sécurité de l'ONU, autrement dit pilier de l'ordre impérialiste mondial.

La seule guerre que veut le Peuple ouvrier et paysan d'Occitània, c'est effectivement la GUERRE À LA GUERRE et à CE QUI LA CAUSE : la guerre au Capital et à l’État moderne (ici dénommé "France") qui en est le fruit et le bras armé ; la GUERRE POUR SA LIBERTÉ qui à différents niveaux d'intensité n'a jamais cessé depuis la sanglante Conquista du 13e siècle.

Armé désormais d'une JUSTE COMPRÉHENSION COMMUNISTE de cette entité "France" dans laquelle il se débat et contre laquelle il lutte, le 21e siècle qui commence sera celui de sa VICTOIRE !

 

1MAM Aniane 31MAM Gentioux

 

Partager cet article
Repost0
19 juin 2014 4 19 /06 /juin /2014 09:26

 

Voici un texte des camarades du Front populaire indépendant de Rio de Janeiro (maoïste, "galaxie A Nova Democracia") revenant sur l'opposition de masse à la Coupe du Monde de foot au Brésil, cette gigantesque orgie capitaliste antipopulaire dont nous avons déjà plusieurs fois parlé. La traduction en français a été publiée par La Cause du Peuple, journal du FRAP.

 

Pourquoi crions-nous "IL N'Y AURA PAS DE COUPE DU MONDE ?"

Le football est le sport de la multitude ; un sport qui soulève les passions les plus intenses chez les gens du monde entier. Nous ne nions pas l'importance du football pour le Peuple brésilien et même le rôle du sport et des loisirs dans la société. Cependant, la Coupe du Monde de la FIFA n'est pas seulement un événement sportif.

Le cri de "NÃO VAI TER COPA - IL N'Y AURA PAS DE COUPE DU MONDE" est apparu dans les rues lors du soulèvement populaire de juin 2013, quand des milliers de personnes de différentes villes du pays se sont battues pour de meilleures conditions de vie et de travail. Crier "IL N'Y AURA PAS DE COUPE DU MONDE" c’est être contre la domination totale du pouvoir économique et de ses intérêts dans les décisions politiques, qui doivent être déterminées par le Peuple et axées uniquement sur ses besoins réels. Nous ne pouvons pas fermer les yeux sur les crimes commis au nom de la Coupe du Monde. Faire taire le cri "IL N'Y AURA PAS DE COUPE DU MONDE" c'est trahir le Peuple pauvre, c'est trahir la lutte contre les inégalités sociales. C’est TRAHIR la rue !

Pourquoi crions-nous "IL N'Y AURA PAS DE COUPE DU MONDE" ?

EXPULSIONS

Au nom de la Coupe du Monde et des Jeux Olympiques, les expulsions illégales et les pires violations des droits de l'homme ont été et sont commises. Des communautés entières ont été et sont rayées de la carte, mettant fin à la vie de milliers de personnes.

Les expulsions génèrent la douleur, la tristesse, l'abandon et la mort. L'ensemble du processus est de la torture, depuis le graffiti pour marquer les maisons à démolir (ce qui ressemble à des pratiques nazies) et de l’abjecte pression (avec intimidation et menaces) des fonctionnaires de la SMH (Secretaria Municipal de Habitação - Secrétariat Municipal du Logement) jusqu'à l’expulsion par la force, souvent avec la police brandissant des armes à feu pour sortir les gens de leurs propres maisons.

L'État bourgeois brésilien, connu comme un État "démocratique" et "de droit", nie le droit de chacun à des conditions de vie capables de garantir à elle / lui-même et à son / sa famille l'essentiel des services sociaux indispensables à la dignité humaine : santé, éducation, assainissement urbain, transport et LOGEMENT. Le droit à un toit est complètement nié par l'État bourgeois.

La Coupe du Monde reproduit l'exclusion sociale et raciale. Elle approfondit les problèmes sociaux et environnementaux jamais résolus.
Plus de 250 000 familles ont été expulsées et/ou vivent sous la menace de l’être. Les dépenses pour la Coupe du Monde au Brésil franchissent (pour l'instant) la barre incroyable des 30 milliards de réals [près de 9,8 milliards d’euros]. En comparaison, la somme des trois dernières Coupes du Monde atteint à peine 25 milliards.

ÉNORMES DÉPENSES PUBLIQUES ET ÉLEPHANTS BLANCS

Que sont les éléphants blancs ? Ce sont d’extrêmement coûteux, énormes, mais aussi COMPLÈTEMENT INUTILES travaux. En parler populaire, c’est le fameux "jeter l'argent par les fenêtres".

Les stades de Brasilia, Cuiaba, Manaus et Natal ne seront pas prêts pour moins de 3 milliards de réals au total. La subvention sera financée par la BNDES et les gouvernements des États, qui sont constitués de fonds publics, donc de notre argent.

Le stade Mané Garrincha à Brasilia, par exemple, a une capacité de 71 000 personnes. La contradiction saute aux yeux quand on regarde le public du premier match de la finale du championnat brésilien de l'an dernier : 1956 spectateurs. Le même scénario se répète dans les trois autres villes mentionnées.

À Manaus, l'absurdité est encore plus grande ! Le Groupe de contrôle du système pénitentiaire (Grupo de Monitoramento e Fiscalização do Sistema Carcerário), lié à la Cour d'Amazonas (Tribunal de Justiça do Amazonas), a émis l'hypothèse de transformer le stade nouvellement construit en une "prison" temporaire.

La rénovation du Maracanã a coûté près de 2 milliards de réals et seulement trois matchs de la Coupe du Monde s’y joueront. Il a été dépensé plus d’argent que pour la construction d'un nouveau stade ! Le nouveau stade, désormais une "arène", a effacé l'identité historique du Maracanã. Les supporters et même les joueurs de l'équipe nationale espagnole et italienne ont eu ces sentiments lorsqu’ils sont entrés dans le nouveau stade : "Où est le public ?", "Il est très européen", "Comme les autres stades, il a perdu sa mystique…".

LES OPPRESSIONS DE RACE ET DE GENRE

La Coupe du Monde de la FIFA perpétue les anciennes pratiques sexistes et encourage la marchandisation du corps.

Un exemple en sont les t-shirts vendus par Adidas, l'une des multinationales qui parrainent ce méga-événement. Sur les t-shirts sont imprimées des fesses de femmes, une allusion grossière pour renforcer l'oppression de genre et, en particulier, les agressions sexistes quotidiennes contre les femmes brésiliennes.

Ajouté à cela, il y a le racisme : la FIFA est muette sur les nombreux cas de racisme dans les championnats d'Europe et du monde ; un couple a été refusé par la FIFA, avec l'appui du gouvernement, pour la présentation du tirage au sort de la Coupe du Monde parce qu’ils étaient Noirs, avec le discours que le couple ne répondait pas aux "normes européennes".

La Coupe du monde ne fera que développer les sites de cyber-séduction qui profitent du marché de l'exploitation sexuelle. En Afrique du Sud, par exemple, le nombre estimé a augmenté de 100 à 140 milliards au cours du méga-événement 2010.

Le Brésil a l'un des niveaux les plus élevés d'exploitation sexuelle des mineurs dans le monde. Il y a de plus en plus de dénonciations de l'augmentation de l'exploitation sexuelle, y compris des enfants et des adolescents autour des stades et des grands travaux d'urbanisme de la Coupe du monde ; il a été révélé, par exemple, que des filles âgées de 11 à 14 ans se prostituent dans la région d’Itaquerão, dans le secteur Est de São Paul.

ÉLITISIME = SÉGREGATION DANS LES STADES

Les nouveaux stades, ou arènes, ne brillent qu'en apparence. Dans la pratique, il y a un effet secondaire tragique en cours : les coûts des nouvelles "arènes" (payées avec l'argent public, donc notre argent) sont intégrés dans le prix des billets, qui deviennent plus chers, créant une élitisation du football. Ceci est le résultat de la privatisation des espaces publics - entreprises capitalistes qui ne cherchent que leur profit en acquérant le contrôle des espaces publics.

Les supporters traditionnels, ceux de la classe ouvrière, la même qui a construit les stades ou arènes, sont privés de leurs droits : un travailleur ne peut pas se permettre un billet qui coûte l'équivalent de 50% (ou plus) du salaire minimum.

Une étude récente a montré que les billets du Championnat brésilien en cours dans les nouvelles arènes sont en moyenne 119% plus chers que dans l'ancien stade.

RÉPRESSION

Plus inquiétant que la campagne orchestrée pour discréditer ceux qui critiquent la Coupe du Monde est le mouvement orchestré par l'État brésilien pour développer l'appareil répressif visant à étouffer les protestations lors du méga-événement - et très probablement encore après.

Ce mouvement a agi sur deux fronts : législatif et apparent (militaire et policier). Les projets de loi qui visent à créer le délit de terrorisme au Brésil créent des failles juridiques de sorte que le pouvoir judiciaire puisse incriminer les mouvements sociaux et les manifestants comme des terroristes.

Le gouvernement fédéral envoie maintenant des troupes fédérales à Rio de Janeiro sous prétexte de lutter contre le trafic de drogue. Le trafic a toujours existé, il n’a jamais cessé. Pourquoi maintenant ? Il s'agit d'une action des gouvernements (fédéral, des États et municipaux) pour justifier l'arrivée des troupes fédérales en appui à l'invasion des favelas, à l’installation ou l'amélioration de l'UPP [Unités de Police de Pacification], amplifiant la domination et la répression d'État ainsi que le profit capitaliste puisque la première action de l'État est d'ouvrir la porte aux entreprises privées pour obtenir de nouveaux clients.

Dans un contexte d'indignation et de manifestations, les forces répressives augmentent avec l'objectif d'étouffer, de réprimer et de contrôler les luttes populaires, en particulier les soulèvements qui ont eu lieu dans les bidonvilles, lieux de nombreux foyers de résistance. En outre, c’est dans les bidonvilles que les pauvres et les Noirs sont persécutés, torturés et assassinés.

Ce qui est arrivé à Manguinhos était plus qu'une révolte populaire ! Une centaine de familles ont occupé un entrepôt (vide) derrière la bibliothèque Parque de Manguinhos. La police militaire a tenté de retirer de force les familles. Face à la résistance des habitants, la police a tiré des gaz lacrymogènes et des grenades assourdissantes ; la population a répondu par une grêle de pierres et de bouteilles. Ensuite, la police a commencé à tirer avec des armes à feu. Plusieurs personnes ont été blessées. Quatre jeunes gens ont été tués, un autre est dans un état grave. Il s'agit là d'une criminalisation de la pauvreté et des mouvements sociaux, des luttes et des occupations.

MANIFESTATIONS

Devant autant d’arbitraire, de violations des droits de l'homme, de processus d'exclusion sociale complète, d'appropriation des biens publics, de détournements des fonds publics, entre autres crimes contre le Peuple, manifester contre la Coupe du Monde de la FIFA au Brésil est non seulement légitime mais c’est également un devoir. Par conséquent, ne soyez pas intimidés par les menteurs et les discours de patriotisme aveugle, ou par les articles écrits par des journalistes et des intellectuels dont le véritable engagement est avec tel ou tel parti politique, ou pour leurs propres poche.

Les actions de la police contre les manifestations s'intensifient, un fait qui est devenu clair lors de la manifestation du 25 janvier, lorsque le manifestant Fabrício Proteus Chaves s’est fait tirer dessus à bout portant par la Police militaire (le conduisant aux portes de la mort). Cet acte lâche, courant dans les bidonvilles et les périphéries du Brésil, nous met en état d'alerte pour les futures manifestations.

Ni la violence de la police, ni le discours mensonger de dénigrement ne nous arrêteront. Nous faisons partie du Peuple, nous nous battons pour le Peuple et avec le Peuple. Rien ne nous empêchera de jouir du droit constitutionnel à manifester, notamment contre la Coupe du Monde plongée dans la pourriture et les crimes - qui a même conduit à l'arrestation et à la mort de personnes qui ont souffert des expulsions brutales ou du processus de "nettoyage" social.

Les manifestations contre la Coupe du Monde au Brésil représentent la lutte pour les intérêts du Peuple et la défense de la dignité humaine, bafouée par des lois d'urgence et le lâche processus de construction de cette Coupe du Monde de la FIFA.

FRENTE INDEPENDENTE POPULAR – RJ / FRONT POPULAIRE INDÉPENDANT – RIO DE JANEIRO


NÃO VAI TER COPA !!!


Partager cet article
Repost0
17 juin 2014 2 17 /06 /juin /2014 15:19


Voici une interview d'un leader en exil de l'Union Borotba ("Lutte"), Sergueï Kiritchouk, publiée sur Initiativ-online.org le 11 juin 2014, traduite de l'allemand par la revue Workers World et reprise sur Democracy and Class Struggle.

Elle permet de mieux connaître cette organisation et ses positions, les meilleures à ce jour et à notre connaissance en Ukraine, que nous avons maintes fois traduites et publiées et aussi parfois (gentiment) critiquées.

Depuis le début le mouvement Maïdan a soutenu l'accord de libre-échange avec l'Union européenne. Nous, au contraire, avons toujours été depuis le début contre l'UE, qui n'a d'autre objectif que de piller et détruire l'économie ukrainienne.”


sergeikirichuk


Initiativ : Quand et comment Borotba a-t-elle été créée ?

Sergueï Kiritchouk : Nous sommes une toute jeune, toute nouvelle organisation. Nous avons fondé Borotba en 2011 comme résultat d'une coalition de différents groupes d'extrême-gauche. Certains proviennent d'associations marxistes, d'autres viennent du Parti communiste d'Ukraine (KPU) ainsi que de son organisation de jeunesse.

Nous sommes des personnes différentes avec des parcours différents. Nous avons des stalinistes, des trotskystes, des maoïstes et des personnes d'autres parcours politiques dans notre organisation.

Nous en sommes arrivés au stade où nous avons réalisé que ces divisions n'étaient plus aussi importantes qu'elles ont pu l'être par le passé. Nous avons travaillé ensemble dans diverses campagnes et nous avons trouvé que ces différences n'étaient plus aussi significatives aujourd'hui.

Nous pouvons travailler ensemble pour construire quelque chose de neuf ; telle était l'idée fondamentale. Beaucoup de personnes ont participé à cette expérience. Pour être tout à fait honnête, ce sont principalement des personnes expérimentées et éduquées politiquement qui l'ont soutenue.

Mais des travailleurs sans expérience particulière l'ont aussi soutenue, ainsi que des figures extérieures au mouvement ouvrier. L'un d'entre eux vient de Kharkov. Il y a quelques jours, on a tenté de le kidnapper.

030314 borotbaBien que nous ayons été organisés et actifs depuis longtemps, nous étions numériquement une très petite organisation. Nous avions des bureaux régionaux dans toutes les grandes villes. Dans nos plus grands rassemblements il y avait plusieurs centaines de participants.

Lorsque la crise a commencé, que le mouvement Maïdan a débuté en novembre, nous avons été dès le départ contre ce mouvement.

C'était une position que beaucoup de personnes pouvaient facilement comprendre, en particulier des personnes de la classe ouvrière. Surfant sur cette vague, nous avons accru notre influence et sommes devenus l'une des forces de premier plan dans des villes comme Kharkov par exemple.

Après le coup d’État maïdaniste du 22 février, les fascistes ont détruit notre QG à Kiev.
Nos camarades de l'Ouest de l'Ukraine sont immédiatement entrés dans la clandestinité, tandis que nous continuions à mener des activités publiques dans l'Est, là où c'était encore possible.

La ville de Kharkov a été l'une des plus grandes cités industrielles de l'époque soviétique, après Moscou et Leningrad. C'est aujourd'hui encore l'un des principaux nœuds ferroviaires en Europe. C'est une ville avec une forte et ancienne tradition démocratique et de gauche. Il n'est donc pas surprenant que la mobilisation à Kharkov ait été et reste si forte contre le nouveau régime oligarchique putschiste.

Il y a eu d'immenses rassemblements, tous pacifiques, contre le nouveau gouvernement de Kiev et nous avons bien entendu gagné de nouveaux membres dans ce mouvement. Ainsi, par exemple, 300 personnes ont signé en un seul jour une déclaration comme quoi elles souhaitaient rejoindre notre mouvement. Ces personnes n'étaient évidemment pas toutes communistes, socialistes ou d'extrême-gauche : elles exprimaient leur accord avec une position politique particulière.

Mais ces 300 déclarations ont déjà une importance énorme. Elles montrent combien notre ligne est correcte.

Iv : Si quelqu'un vous demandait qu'est-ce que Borotba, que lui répondriez-vous ? Qu'est-ce qui vous différencie par exemple du KPU (PC d'Ukraine) ?

SK : Nous sommes une organisation communiste. Effectivement, l'organisation de gauche la plus connue en Ukraine est le KPU. Mais nous critiquons ce Parti très durement, nous sommes clairement contre leurs illusions parlementaristes.

Le KPU a fait partie du gouvernement oligarchique de Ianoukovitch. Mais bien entendu, si vous dites que vous êtes communistes, tout le monde pense que vous êtes du KPU.

1MaiBorotbaC'est pourquoi nous avons choisi le nom de Borotba. Ce nom signifie littéralement "Lutte" et évoque implicitement la tradition des communistes ukrainiens, qui avaient par le passé un journal nommé Borotba. Il y a aussi eu des organisations de ce nom autrefois.

Pour des Occidentaux, ce nom sonne étrangement mais il a d'authentiques racines ukrainiennes. Il est d'ailleurs ironique que ce soit un nom ukrainien. Dans les médias ukrainiens, nous sommes naturellement présentés comme des agents de Poutine et un parti pro-russe. Le problème est que nous militons aussi dans les régions majoritairement russophones sous le nom ukrainien de Borotba. Beaucoup auront du mal à expliquer pourquoi le parti pro-russe que nous sommes porte un nom ukrainien.

Iv : Dès le début vous avez pris position contre Maïdan. Pourquoi ?

SK : Dès le départ les manifestations de Maïdan n'avaient aucunes revendications sociales. Beaucoup de gens ont pu penser que Maïdan était une sorte de grand mouvement démocratique avec des revendications sociales.

Les forces fascistes sont apparues dans le mouvement comme une catastrophe naturelle, détruisant sa frange progressiste et se plaçant au premier plan.

Dès le commencement le mouvement Maïdan a soutenu l'accord de libre-échange avec l'UE, qui n'avait d'autre contenu que le pillage et la destruction de l'économie ukrainienne.

1391005999 984629 7D'un autre côté, l'idée de réussite individuelle a également exercé une grande emprise. Cela a culminé dans l'idée que le système ukrainien corrompu, dominé par les oligarques, pouvait être dépassé si nous entrions dans l'UE. Ceux qui veulent travailler dur pourraient réussir et devenir riches. Non seulement l'opposition libérale-nationaliste mais aussi le gouvernement Ianoukovitch lui-même ont répandu la même propagande dans les médias. "Regardez les Pays baltes", disaient-ils : ils ont fait des réformes, ils font partie de l'UE, ils sont prospères, ils sont riches. Nous devons suivre ce chemin nous aussi.

Mais les Ukrainiens sont capables de voir et de penser. Ils ont vu la crise dans l'Union européenne et, par exemple, ce qui est arrivé à la Grèce.

C'est ainsi qu'il y a eu une grosse campagne anti-grecque en Ukraine, avec ce genre d'arguments : en Grèce le socialisme est au pouvoir, les gens sont très riches et très paresseux, et maintenant ils doivent payer pour leur comportement. Je ne plaisante pas, ce sont vraiment les arguments qu'on entendait.

Pendant très longtemps, nous avons été la minorité d'une minorité. Par exemple lorsque j'ai pris part à un débat télévisé, j'étais le seul contre l'intégration européenne. Tous les représentants du régime Ianoukovitch comme de l'opposition étaient pour.

Et ils n'avaient évidemment aucun argument raisonnable contre ma position, car j'expliquais clairement ce que seraient les conséquences d'une zone de libre-échange. Ils ne pouvaient pas trouver un seul argument rationnel. Ils disaient "regardez l'UE, ils sont tous si riches" et lorsque j'ai clairement fait comprendre que je n'étais pas d'accord, ils ont rétorqué qu'ils ne voulaient pas entendre plus longtemps une telle propagande soviétique.

Iv : Pour quelles raisons Ianoukovitch a-t-il refusé de se soumettre aux diktats de l'UE ?

SK : Ianoukovitch a refusé de signé la déclaration avec l'UE parce qu'il y avait des pressions du côté russe. 

3484740777Le problème est que la Russie n'a pas été capable ni n'a eu la volonté de trouver un compromis qui aurait permis à l'Ukraine de coopérer avec elle aussi bien qu'avec l'UE.

D'un autre côté il y a eu de grandes pressions de la part des milieux d'affaires, en particulier ceux du secteur des hautes technologies, l'industrie qui produit des équipements pour les hélicoptères, les avions, les fusées spatiales ou les armes nucléaires : ils produisent pour le marché russe et non pour l'UE. La moitié du commerce extérieur ukrainien se fait avec la Fédération de Russie et l'autre moitié avec l'UE. Ianoukovitch était donc soumis à des pressions oligarchiques des deux côtés.

La différence est que l'Ukraine fournit beaucoup de matières premières à l'UE et que la valeur ajoutée de ces secteurs est faible, tandis que ce qui est vendu à la Russie est à haute valeur ajoutée, de la haute technologie. Le Grand Capital a exercé des pressions terribles et Ianoukovitch a finalement annoncé qu'il devait y avoir des négociations supplémentaires pour que l'Ukraine trouve un accord de libre-échange plus profitable. C'est la raison pour laquelle le mouvement Maïdan a débuté.

Ils ont tenté d'expliquer que la raison pour laquelle nous sommes si pauvres est que nous vivons en Union soviétique. L'URSS n'existe plus mais, ont-ils dit, nous avons toujours une mentalité soviétique et nous devons rompre avec cette mentalité pour rejoindre l'Union européenne. À Maïdan, ils ont bâti un mur symbolique : ils ont dit que nous vivions toujours en URSS et que si nous franchissions cette frontière pour faire partie de l'UE, nous romprions avec notre passé.

Iv : Quel était le programme politique concret de Borotba à ce moment-là ?

SK : Nous avons toujours, bien sûr, été fermement opposés au gouvernement Ianoukovitch. Mais nous avons aussi compris que l'opposition de Maïdan était tout aussi réactionnaire. Nous avons donc dirigé notre critique contre les deux bords. À cette époque, les camps politiques étaient encore très fortement polarisés entre Ianoukovitch et l'opposition pro-occidentale. Nous représentions alors la pensée d'une toute petite minorité de la société ukrainienne.

Certaines personnes ont alors commencé à comprendre ce qu'il se passait réellement lorsque le mouvement Maïdan a commencé à détruire les monuments de Lénine à travers tout le pays. Les gens ont alors pu très bien comprendre ce qu'il se passait : ces forces de Maïdan sont Ukraine-Crimea-pro-Russian-protestersréactionnaires, elles n'ont pas de revendications sociales progressistes, leur idéologie est d'extrême-droite et elles disent que la source de tous les problèmes peut être trouvée dans la personne de Lénine.

Après le coup d’État, les monuments de Lénine sont devenus d'importants symboles politiques. À Kharkov, par exemple, ils ont aussi tenté de détruire le monument ; mais des personnes de toute la ville sont venues pour le défendre, et seule une minorité était des militants communistes ou d'extrême-gauche. L'immense majorité étaient des gens ordinaires. Ils ont défendu le monument comme une expression de notre histoire, de notre histoire soviétique. C'est notre histoire et nous ne les laisserons pas nous l'enlever. [NDLR évidemment là les choses ne sont pas aussi "neutres" : ces symboles historiques ont une signification de classe, pour la conscience de classe et pour ce que Gramsci appelle le "bon sens" ou le "sens commun". Être attaché aux statues de Lénine est évidemment un signal intellectuel plutôt positif de conscience de ses intérêts de classe populaire et d'emprise du "bon sens". Il y a en "Espagne" des personnes opposées au retrait des symboles franquistes arguant elles aussi que "cela fait partie de leur histoire" ; mais là il s'agit d'un état d'esprit beaucoup plus négatif sous l'emprise du "sens commun" (suprématie idéologie de la classe dominante, "conscience" des intérêts... de ses exploiteurs et oppresseurs, l'"exploité heureux" en quelque sorte).]

Par exemple, il y avait une vieille dame à une manifestation avec une pancarte faite par elle-même où elle avait écrit : "Allez-vous détruire notre maison parce qu'elle a été construite à l'époque soviétique ?".

Iv : Quelle est la situation aujourd'hui ?

SK : Tous nos locaux ont été saccagés et détruits par la soi-disante "Garde nationale", qui est la couverture légale des groupes néo-nazis. Quand nos militants ont tenté d'y accéder ils ont vu des hommes en uniforme noir, armés d'AK-47 qui en empêchaient l'accès.

Ukr_redflagburning.jpgIls ont tout pris : drapeaux, sonos, ordinateurs et même les journaux. Il est facile de comprendre que dans ces conditions plus aucun travail légal et ouvert n'est possible.

Il y a deux semaines, il y a eu une tentative de kidnapper deux de nos camarades après une manifestation contre la guerre à Kharkov. À la fin de la manifestation des personnes armées d'AK-47 ont tenté d'entraîner nos camarades à bord d'une véhicule. Les passants ont réussi à les en empêcher.

La totalité de notre direction est désormais clandestine. Certains de nos membres ont dû quitter le pays. Les nazis ont par exemple attaqué le journaliste révolutionnaire très connu et membre de Borotba Andreï Mantchouk, rédacteur en chef du quotidien internet Liva.

Au final, nous avons été illégalisés et la direction a été contrainte à l'exil. Mais il y a quelques jours il y a eu un rassemblement improvisé à Kharkov, des personnes ordinaires se sont rassemblées sur une place et l'on a pu y voir de nombreux drapeaux de Borotba.

Iv : Vous parlez de solidarité avec la lutte de libération kurde, que voulez-vous dire par là ?

SK : Il faut clarifier cela. Si nous regardons le drapeau de Borotba, il présente en effet une grande similarité avec celui du Parti des Travailleurs du Kurdistan (PKK). Il n'avait pas été imaginé comme cela au départ, mais nous avons effectivement quelques membres d'origine kurde.

Et ce sont finalement des étudiants pro-capitalistes, néolibéraux, hostile envers nous qui par leurs pressions nous ont amené à choisir ce drapeau.

Ils ont écrit dans une déclaration que Borotba avait des liens avec le PKK et que celui-ci est considéré comme une organisation terroriste par l'Union européenne. Ils ont affirmé que l'un et l'autre formions un front terroriste contre l'UE. Nous assumons avoir toujours été solidaires de la lutte de libération des Kurdes.

Iv : D'où viennent les Kurdes ? Ont-ils immigré en Ukraine à l'époque de l'URSS ?

borotba antifascistSK : La majorité des Kurdes en Ukraine vivent dans le Sud, dans la région d'Odessa. Certains sont des étudiants, d'autres travaillent comme commerçants sur les marchés. Le gouvernement ukrainien a toujours travaillé en étroite coopérations avec l’État turc. Ce dernier fait pression sur lui pour prendre des mesures contre les Kurdes.

Auparavant, les autorités n'arrêtaient pas vraiment les Kurdes, ni ne voulaient déployer une grande répression contre eux. Mais les autorités universitaires faisaient pression, par exemple, sur les étudiants en disant qu'ils devaient seulement étudier et ne pas prendre part à des activités politiques. Les étudiants kurdes ont néanmoins organisé des meetings politiques.

La principale propagande répétée par les médias ukrainiens est que les Kurdes ne peuvent tout simplement pas vivre en paix, et que tant que la Turquie serait un pays si “démocratique” et “pacifique” les Kurdes commettraient des actes terroristes. Les médias demandent tout le temps “pourquoi viennent-ils en Ukraine ? ils ne savent pas vivre en paix”.

Iv : Que pensez-vous du concept de fédération démocratique ? Notamment en relation avec la situation concrète en Ukraine ?

SK : Le Peuple kurde doit décider par et pour lui-même quelle forme doit prendre l'autodétermination. En Ukraine, nous sommes pour un fédéralisme démocratique. Cela signifie l'autonomie budgétaire, politique et sociale pour le Sud-Est, qui doit être une partie de la Fédération ukrainienne. Et il faut évidemment la pleine égalité des communautés linguistiques.

Les gens sont fortement choqués par les mystifications historiques. Des collaborateurs des nazis deviennent soudainement des héros nationaux de l'Ukraine. Cette période est désormais considérée comme des pages positives de notre histoire. S'ils veulent maintenant élever des monuments à Bandera [collaborateur ukrainien d'Hitler], s'il vous plaît laissez-moi en dehors de ça. Les gens du Sud-Est ne veulent rien de tel. Ils disent qu'ils sont en train de construire à Lvov, dans l'Ouest, des urlmonuments pour les collaborateurs des nazis et nous, nous défendons nos monuments à l'Armée rouge soviétique.

Que cela se produise dans un même État ou dans deux États différents est maintenant la dernière question en date. Dans le Sud-Est, dans la République populaire du Donbass, il y a maintenant un débat : que doit-on faire ? Doit-on entrer dans une fédération avec l'Ukraine ou doit-on en être séparé ?

Iv : Comment la lutte va-t-elle se poursuivre, compte tenu de la nouvelle situation ?

SK : Nous avons toujours critiqué le KPU pour leur focalisation sur la lutte parlementaire. Nous nous sommes toujours concentrés sur la mobilisation de masse des travailleurs et de la jeunesse, des agents des services publics etc.

Mais nous étions dans l'illusion que nous allions encore vivre de nombreuses années sous une démocratie libérale bourgeoise, avec liberté de réunion et d'association.

Nous ne sommes pas aujourd'hui et nous n'avons jamais été préparés à cette nouvelle situation de guerre civile, de lutte armée. Nous n'avons pas d'infrastructure adaptée, ni d'armes ni d'expérience.

Cela a été une grande erreur de notre part.

Iv : La majorité des personnes qui luttent dans le Sud-Est du côté des Républiques de Donetsk et Lugansk est-elle constituée de Russes, comme l'affirment et le répètent les médias à l'Ouest ?

SK : L'immense majorité de ces personnes vient évidemment de la région elle-même. De même qu'il y a des personnes du Sud-Est qui luttent aux côtés de la junte de Kiev, il y a aussi quelques personnes venues de Russie qui luttent aux côtés des Républiques populaires.

Antifascist-Ukr - CopieIl n'y a pas d'influence russe significative dans le Sud-Est. Par exemple, il y a un citoyen russe qui est le leader de la résistance à Slaviansk. Kiev a évidemment clamé que c'était un membre des services secrets russes. Mais d'après l'enquête menée par des journalistes il ressort à présent qu'il s'agit d'un membre du mouvement “Rekonstructer”. Ce sont des gens qui portent des uniformes de l'époque tsariste, ils se retrouvent pour des démonstrations publiques et organisent des spectacles, etc.

Bref : il est devenu une figure dirigeante de la résistance à Slaviansk et de cela on a fait une influence russe. Mais il n'y a pas d'officiers expérimentés des services secrets russes qui dirigeraient et contrôleraient tout comme le présentent les médias.

D'autre part il y a des ressortissants russes dans le Sud-Est mais là encore, pas tels que les dépeint la propagande médiatique pro-occidentale : beaucoup ont une position clairement anti-Poutine.

Iv : Maintenant une dernière question au sujet de la Crimée. Quelle est la situation générale là-bas, et en particulier celle des Tatars ?

SK : Poutine avance maintenant ses pions. Il a donné quelques droits nationaux aux Tatars de Crimée. Ceux-ci sont représentés au Parlement local et au gouvernement. C'est exactement ce que les Tatars demandaient au gouvernement ukrainien depuis 20 ans.

140315231140-ukraine-donetsk-pro-russia-rally-scenes-from-tLorsque l'armée ukrainienne a quitté la Crimée, personne n'a voulu se battre contre l'armée russe. Tout le monde a plus ou moins accepté la nouvelle situation. Seuls les Tatars ont exprimé leur réticence. Les nationalistes ukrainiens ont appelé les Tatars à se joindre à eux dans cette lutte. Mais personne ne les a rejoint, ni les Tatars ni les autres.

Tout le monde en Crimée n'était pas satisfait de l'annexion à la Russie. Mais maintenant ils regardent la télé et voient le massacre d'Odessa, la guerre civile et les bombardements de barres d'immeubles à Donetsk, et ils se disent : "Dieu merci nous sommes en dehors de tout ça"...

 


Annexe

De même qu'existe sur la question palestinienne, depuis de nombreuses années, toute une pseudo-"extrême-gauche" pro-israélienne ou israélo-complaisante, force est de constater que le conflit en Ukraine a vu émerger toute une "extrême-gauche" pro-Maïdan basée exactement sur les mêmes méthodes de terrorisme intellectuel en mode "chasse aux (soi-disantes) connivences rouges-brunes", "celui qui a été vu avec untel qui a relayé le bouquin d'untel" etc. etc. L'Ukraine est donc manifestement devenue (après la Palestine) le second grand "théâtre d'opérations" de cette engeance qui dissimule à grand-peine son pro-impérialisme occidental sous un "ni-ni" dont la mince couche se craquelle à chaque détour de phrase (pour ce qui est du vrai "ni-ni" authentique et sincère nous le considérons comme une position schématique et abstraite mais pas comme une position antagonique ; nous ne traçons pas de ligne de démarcation entre ses tenants et nous).

Pour être l'organisation révolutionnaire la moins inconséquente au sujet de ce conflit qui déchire son propre pays (pays qui vivait en paix, rappelons-le, depuis 1944 !), Borotba a été tout particulièrement la cible de ces manœuvres. Celles-ci sont même parvenues jusqu'aux oreilles du grand parti de la "gauche de gauche" allemande, Die Linke, et ont conduit de sa part à un début de boycott de Sergueï Kiritchouk (réfugié en Allemagne).

Celui-ci a néanmoins eu (serait-ce là une vraie différence entre la fRance et l'Allemagne ?) l'occasion de s'expliquer dans une entrevue avec un blogueur député du parti :

http://www.andrej-hunko.de/7-beitrag/2120-they-hate-us-because-we-are-communists

Nous en avons traduit ci-dessous quelques passages, d'abord (bien que nous ayons déjà maintes fois abordé la question) sur la question de ce qu'il faut entendre par "pro-russe" et ensuite au sujet des accusations lancées depuis plusieurs mois contre l'organisation :

Dans les médias allemands, les forces des autoproclamées "Républiques populaires" de Donetsk et Lugansk sont dépeintes comme des "séparatistes pro-russes". Comment analysez-vous les différents acteurs politiques et quelles sont vos relations avec eux ?

Nous devons avoir à l'esprit que la contestation dans le Sud-Est s'est développée de manière très similaire à ce qu'il s'est passé à Maïdan. Les gens ont organisé de grandes manifestations dans les principales villes, exigeants droits et respect. Lorsque le gouvernement a ignoré leur contestation, ils ont occupé des bâtiments administratifs. La réponse du gouvernement "démocratique" issu de Maïdan a été d'envoyer la police anti-émeute et les forces spéciales. Des centaines de militants ont été arrêtés et emprisonnés alors même que les contestataires de Maïdan occupaient toujours des bâtiments administratifs à Kiev. Nous avons vu là un gouvernement faisant montre d'un terrible deux poids deux mesures.

Il est vrai que certaines personnes dans l'Est se sentent pro-russes. Mais ceci ne peut pas être simplement réduit à un sentiment criminel ! Il y a de nombreuses et très diverses raisons de se sentir pro-russe en Ukraine. Certaines personnes ressentent très fortement la communauté de langue et d'histoire, d'autres pensent simplement à une communauté de culture et de religion, mais beaucoup de gens sont simplement inquiets pour leurs emplois. Les régions du Sud-Est produisent par exemple beaucoup de haute technologie qui n'est pas autorisée à l'exportation vers l'Europe, et ne peut donc être exportée que vers la Russie et le marché asiatique. Beaucoup de jeunes travailleurs et ingénieurs hautement qualifiés veulent travailler dans ce secteur.

Les vrais séparatistes sont ceux qui siègent au gouvernement de Kiev. Ils ont divisé le pays avec leur décision de signer un accord de libre-échange (avec l'UE) dont la moitié du pays ne veut pas, avec leur abolition de la loi linguistique qui donnait quelques droits aux personnes de langue russe, et avec leur glorification des anciens collaborateurs du nazisme dans un pays dont un habitant sur cinq a perdu la vie sous l'occupation allemande.

Ainsi par exemple, à Kharkov, le mouvement de protestation a commencé comme une campagne pour protéger la statue de Lénine locale. Des milliers de personnes hommes et femmes, vieux et jeunes, travailleurs, chômeurs, étudiants et ingénieurs montaient la garde autour du monument jour et nuit. Les fascistes les ont parfois attaqués avec des gourdins et même des balles en caoutchouc. C'était le devoir de Borotba d'être avec eux et parmi eux.

La défense de la statue de Lénine a été un important moment de résistance. Nous avons ensuite appelé à une grande assemblée générale de toute la ville. Des milliers de personnes sont venues sur la grande Place de la Liberté et tous les groupes politiques ont tenté de faire valoir leur ligne. Nous avons ouvertement parlé de socialisme, d'internationalisme et de lutte anticapitaliste. À ce moment-là les nationalistes russes étaient une petite minorité au sein d'un vaste mouvement populaire. Ils ont pris beaucoup plus d'importance après que le gouvernement et les gangs néo-nazis aient attaqué et écrasé les forces progressistes.

Nous avons des conceptions politiques en tout point différentes des nationalistes, et nous avons même plus d'une fois croisé le fer avec eux. Russki Vostok (organisation nationaliste) a émis un communiqué nous accusant de la défaite du mouvement populaire à Kharkov. Certaines forces pro-russes disent que c'est une erreur de parler de lutte contre les oligarques. Mais notre position a toujours été très claire : il n'y a pas de lutte antifasciste sans lutte pour le socialisme.

Des groupes comme le "Syndicat des Travailleurs autonomes" (AST) accusent Borotba d'être "pro-russe" et affirment également que vous collaborez avec des organisations conservatrices, chauvines et même fascistes telles que Kommuna, le Shturmovoï Komitet ou Avtonomyi Opir. Que répondez-vous à ces accusations ?

L'AST est une petite secte invisible en Ukraine mais active sur la scène internationale. Je les décrirais comme des nationaux-libéraux mais ils se disent anarchistes. Ils ont soutenu Maïdan et tenté d'utiliser leur anticommunisme pour se faire accepter par les éléments d'extrême-droite du mouvement. Sur Maïdan ils avaient des pancartes montrant Lénine comme un boucher massacrant les révolutionnaires et ils ont fait la fête lorsque des activistes ont détruit le monument de Lénine à Kiev.

Comme les libéraux qu'ils sont, ils détestent tout ce qu'ils considèrent de gauche : la révolution bolivarienne au Venezuela, la Révolution cubaine et en Allemagne les communistes du DKP, ainsi que très certainement Die Linke à cause de son passé sous la RDA. Ils disent que l'Armée rouge qui a libéré l'Europe du fascisme était une armée d'occupation. Pour eux bolchévisme est égal à nazisme. Vous pouvez donc imaginer le genre de personnes qu'ils sont. L'un de leurs leaders était membre du "conseil civil" du Ministère de la Police !

Leur seul objectif est de discréditer les autres forces de gauche. Il faut savoir que Kommuna, le Shturmovoï Komitet et Avtonomyi Opir ont soutenu Maïdan et ont attaqué nos militants à Kiev lors des manifestations contre la guerre.

Nous avons une ligne politique totalement opposée à celle de l'AST, nous pensons que nous sommes déjà en guerre civile en Ukraine alors qu'ils pensent qu'il y a un conflit entre le gouvernement et des "terroristes". Comme je l'ai dit précédemment nous sommes membres de la Déclaration de Minsk contre la guerre [traduite ici en deuxième partie d'article NDLR] ; alors qu'ils soutiennent l'"opération anti-terroriste" du gouvernement.

L'un de leurs principaux activistes, Serhii Kutnii, a affirmé soutenir l'opération anti-terroriste et même qu'il soutenait l'idée d'un "petit incendie" à Donetsk en écho au massacre d'Odessa...

Des gens qui soutiennent l'idée d'un "petit incendie" à Odessa ne peuvent être pris sérieusement pour des critiques de gauche des mouvements progressistes.

Par rapport aux accusations lancées contre nous : nous ne sommes pas une organisation "pro-russe", nous nous battons pour les droits des travailleurs, des femmes et des jeunes. Ni le nationalisme russe ni le nationalisme ukrainien ne sont acceptables pour nous. Notre idéologie est l'internationalisme prolétarien. Nous détestons aussi bien les oligarques de Russie que d'Ukraine. Notre partenaire en Russie est le Front de Gauche, beaucoup de ses militants sont en prison à l'heure actuelle et nous avons montré notre solidarité avec eux.

Dans le même temps nous soutenons les droits démocratiques des citoyens d'origine russe en Ukraine. Ils ont le droit d'utiliser leur langue et de protéger leurs valeurs culturelles. Nous défendons l'idée d'égalité linguistique et nous nous opposons à celle d'un État ukrainien ethnique. Nous soutenons l'idée d'une fédération démocratique pour les Russes et les Ukrainiens, avec une large autonomie des régions, et nous voulons aussi des garanties pour les droits des minorités roumaine, moldave, grecque, bulgare, rom etc. 

Borotba a-t-elle participé à des évènements publics avec des organisations réactionnaires ? Par exemple, un article vous accuse d'avoir attaqué des manifestants pro-Maïdan à Kharkov aux côtés de "nationalistes russes" le 1er mars.

Nous avons toujours eu des affrontements avec des partisans de droite de Maïdan. Ils ont toujours tenté de nous attaquer. Certains camarades étaient dans la rue lors des affrontements du 1er mars, mais nos militants n'ont pas commis de violences. Nous avons émis par la suite un communiqué condamnant la violence politique de tous bords. Mais le Secteur Droit et les autres gangs néo-nazis ont poursuivi dans leur terreur politique contre nous. Nous n'avons pas commencé cette guerre, mais nous avons le droit de nous défendre !

Un autre supposé évènement public aurait été avec le Parti socialiste progressiste ukrainien (PSPU), accusé par les critiques d'être "antisémite, clérical et raciste". Quelles sont vos relations avec ce parti ?

Nous n'avons pas de relations avec le PSPU. Je ne sais pas s'ils sont racistes ou antisémites, mais ils sont en effet très religieux. Ils étaient par le passé une force politique assez importante, mais aujourd'hui ce n'est qu'une petite secte. Leurs conceptions politiques sont voisines de celles de Brigitte Queck [militante allemande proche du Réseau Voltaire NDLR]. Comme cette dernière, qui vient parfois à des meetings de Die Linkedes militants du PSPU sont parfois venus à des meetings où nous étions présents pour exposer leur point de vue. Mais nous ne travaillons pas sur une base politique avec eux.

Est-il vrai que vous avez des contacts politiques avec Alexandre Chalenko, qui serait selon vos critiques "en faveur du chauvinisme grand-russe" ?

Alexandre Chalenko est un des journalistes les plus connus en Ukraine. En tant que membre du cercle de journalistes autorisés de la Présidence [sous Ianoukovitch], il avait des liens avec les plus importants journalistes ukrainiens (pro-gouvernement comme d'opposition). Il y a beaucoup de photos de lui avec des ministres de Ianoukovitch ainsi qu'avec de futurs leaders de Maïdan. Il a organisé des centaines d'interviews avec des politiciens de tous les bords politiques. Nous avons souvent eu des débats avec lui. En règle générale, il nous a toujours fortement critiqués. Mais Borotba n'entretient pas de relations avec lui au-delà de ce type de débats.

Au sujet des alliances politiques en Ukraine, Borotba a été accusée de de coopérer avec l'"organisation séparatiste militante" Oplot qui serait "homophobe et antisémite". Qui sont-ils et quelles sont vos relations avec eux ?

Nous n'avons ni n'avons jamais eu aucune coopération ni lien avec Oplot. Je ne suis même pas sûr que cette organisation existe toujours à l'heure actuelle. Concernant les accusations d'homophobie contre nous, n'importe qui d'un peu familier avec la gauche en Ukraine sait que Borotba a toujours critiqué de telles positions conservatrices, y compris de la part du Parti communiste.

À Berlin vous avez invité deux auteurs russes, Stanislav Byshok et Alexeï Kochetkov, à présenter leur ouvrage "Maïdan et les néo-nazis". Il est apparu plus tard qu'ils avaient fait partie ou en tout cas eu des liens avec les néo-nazis russes par le passé, ce pourquoi la présentation a été annulée. Pourquoi avez-vous invité ces personnes et pourquoi n'avez-vous pas remarqué d'où elles venaient politiquement ?

En réalité je ne les ai pas invités. Ils m'ont contacté, m'ont dit qu'ils étaient en tournée en Europe pour présenter leur livre et m'ont demandé de les aider à en faire la promotion. Je leur ai demandé de m'en envoyer un exemplaire, ce qu'ils ont fait. J'y ai lu un très professionnel travail d'investigation sur le rôle des néo-nazis dans le mouvement Maïdan.

Lorsque j'ai reçu la lettre les accusant d'avoir un passé néo-nazi, j'ai annulé la présentation. Des militants ont par la suite mené leurs propres investigations sur les auteurs. Ils ont découvert et publié que l'un d'entre eux avait eu des liens avec l'extrême-droite par le passé.

Lorsque nous les avons confrontés à ces accusations, ils ont expliqué avoir rompu avec ces positions politiques et avoir dédié dès lors leurs connaissances et leur expérience à enquêter sur les structures néo-nazies de manière scientifique.

Je suis vraiment désolé de ne pas avoir enquêté sur le passé de ces personnes. C'est une erreur que j'ai commise, mais je ne m'attendais à quelque chose comme cela.

Il y a une photo de vous aux côtés d'un groupe de personnes incluant Israël Shamir. Il a été dit que cette photo prouvait vos liens avec cet antisémite et négationniste notoire. Travaillez-vous politiquement avec lui ?

Je n'ai pas de contacts avec Israël Shamir. Cette photo a été prise lors de la présentation de presse d'un film sur Julian Assange. Israël Shamir, moi-même et plusieurs centaines de personnes étaient invités par les organisateurs. Des journalistes très pro-Maïdan l'étaient également. Je pense donc que vous pouvez trouver des photos de moi "avec" à peu près tout le spectre politique ukrainien. Je pense qu'il n'est pas éthique d'utiliser des photos pour semer le doute quant aux conceptions politiques d'une personne sur une photographie donnée. Si quelqu'un est vraiment intéressé par mes idées politiques, il ou elle peut m'interroger et je répondrai de manière totalement ouverte.

En parlant d'antisémitisme, Borotba est aussi accusée d'avoir toléré l'antisémite Alexeï Blyuminov, qui est un éditeur de Vechernyi Lugansk. Quelles sont les relations de Borotba avec cette lui ?

Alexeï Blyuminov a aussi créé des problèmes dans d'autres organisations politiques. Il a été dans notre organisation un court moment, puis il a soutenu Maïdan et quitté notre mouvement, et maintenant il soutient les "séparatistes". Lorsqu'il était avec nous et par la suite, je n'ai jamais entendu parler de déclarations antisémites de sa part. Nous avons une tolérance zéro envers l'antisémitisme.

Certains camarades ont pu avoir une sous-culture nationaliste par le passé, mais ils sont désormais totalement dévoués aux idées du communisme et de l'internationalisme. Nous suivrons toujours une ligne politique prolétarienne et l'antisémitisme, la xénophobie ou le sexisme ne sont pas acceptables pour nous.

Nous faisons face à des accusations de la part du gouvernement, des médias et des libéraux-nationalistes. Ils nous détestent parce que nous sommes communistes, parce que nous défendons Marx, Lénine et le socialisme ! Nous nous tenons aux côtés de la classe ouvrière et de la jeunesse contre le racisme et le fascisme. Même dans des conditions de terreur nous avons organisé des actions de soutien aux syndicats de travailleurs.

Quelle est votre analyse sur le mouvement de Maïdan ?

Nous avons dit qu'il s'agissait d'un mouvement totalement réactionnaire dès le début. Nous étions totalement opposés à l'accord de libre-échange avec l'Union européenne, car cela menait droit à un scénario grec. Les manifestations de Maïdan développaient une culture de la réussite individuelle, il n'y avait aucune idée de gauche dans tout cela.

Bien sûr la totalité du mouvement n'était pas fasciste, mais dans tous les cas très anticommuniste : ils détruisaient les monuments de Lénine dans tout le pays. Ils proclamaient qu'une soi-disante "mentalité soviétique" nous empêchait de devenir libres et riches. Ils avaient même mis en place une frontière symbolique : lorsque vous entriez sur Maïdan, vous pouviez voir un panneau annonçant que vous quittiez l'URSS pour entrer dans l'Union européenne.

Mais leur compréhension des valeurs européennes était très particulière. Les fascistes étaient une minorité sur Maïdan au début, mais ils étaient tolérés par la majorité des contestataires. Ils sont ensuite devenus une minorité active et ont imposé leur agenda politique à tout le mouvement. Un mouvement sponsorisé par les personnes les plus riches du pays, à qui la victoire de Maïdan a largement bénéficié.

Ils ont appelé cela une "révolution de la dignité", mais maintenant les partisans de Maïdan à Kharkov ont créé un site internet pour collecter les données personnelles des militants anti-gouvernementaux, y compris les adresses personnelles et leurs lieux de travail.

Le résultat de la victoire de ce mouvement ce sont les armées privées des oligarques, un oligarque président, des oligarques et des fascistes au gouvernement, une faillite économique et la guerre civile en Ukraine.

L'on pourra encore lire ici (en anglais) la réponse d'une organisation trotskyste de Grande-Bretagne - Workers' Power - à ce type d'attaques par amalgame et raccourci que nous ne connaissons que trop bien en Hexagone, et dont les champions là-bas sont notamment l'organisation (également trotskyste) Workers' Liberty (qui est finalement - un peu - au trotskysme d'outre-Manche ce que le 'p''c''mlm' est au marxisme-léninisme et au maoïsme ici, ou "Confusionnisme.info" à l'"extrême-gauche" en général) : http://www.workerspower.co.uk/2014/11/smears-and-social-imperialism-the-politics-of-the-third-camp-on-ukraine/. Un simple passage mérite selon nous la traduction, car ne pouvant pas dire les choses plus clairement : "Pourquoi disons-nous des révélations soi-disant 'fracassantes' de Workers' Liberty qu'elles sont insignifiantes ? Pour la bonne et simple raison qu'aucun d'entre nous ne vit dans un 'vide interstellaire' politique. Toute organisation de gauche radicale sauf peut-être la plus sectaire, isolée et propagandiste passive dans sa pratique politique peut être amenée à entrer en relation (et par conséquent à discuter) avec toutes sortes de personnes, qui sont elles-mêmes en relation et parlent avec toutes sortes d'autres personnes"... CQFD.


***********************************

Comme nous l'avons dit plus haut, nous ne considérons pas les tenants d'un "ni-ni" révolutionnaire sincère comme des ennemis. Nous nous considérons (à vrai dire) nous-mêmes comme des "ni-ni" ; mais des "ni-ni" subtils et non schématico-abstraits, tentant de baser notre réflexion sur la réalité concrète des masses en nous mettant (ne vivant pas cette situation directement) à la place de ces dernières, y compris (même) à la place des partisans non-fascistes de Maïdan puis du nouveau régime. Nous considérons que le conflit a un clair aspect inter-impérialiste entre Russie et bloc atlantique occidental, aspect avec lequel nous n'avons rien à faire et surtout pas de parti à prendre ; mais qu'il a aussi - sur le terrain populaire concret des évènements - des "niches", des "poches" où se logent d'autres aspects : un certain esprit "soviétique" de coexistence des nationalités et de nostalgie pour la protection sociale d'avant 1991 s'opposant à une vision aussi violemment national-identitaire qu'ultra-libérale thatchérienne ; un affrontement non pas tant entre "Russes" (qui ne sont majoritaires nulle part sauf légèrement en Crimée) et Ukrainiens qu'entre un programme d'"Ukraine aux 'purs' Ukrainiens", qui ferait des non-Ukrainiens et des Ukrainiens "impurs" (ethniquement mixtes, principalement russophones ou encore "sales rouges") des citoyens de seconde zone voire des gibiers de "purification ethnique"... et les non-Ukrainiens et Ukrainiens "impurs" en question, qui ont le droit tout à fait légitime de s'autodéfendre !

Notre "solution idéale" pour l'Ukraine serait exactement la solution fédérative démocratique et anti-nationaliste que prône Sergueï Kiritchouk dans l'interview ci-dessus.

Ce qui est amusant c'est que si nous étions en 1993 ou 1994 et que nous écrivions sur la Bosnie, c'est très certainement dans le camp bosniaque que nous verrions (en partie) ces mêmes aspects dont nous venons de parler : l'idée "yougoslaviste" de défense d'une "Yougoslavie modèle réduit", de coexistence démocratique des nationalités contre le dépeçage ethnique orchestré par Milosevic et son frère ennemi croate Tudjman... Autrement dit dans le "camp du Nouvel Ordre Mondial américano-européo-otano-sioniste BHL" pour les "anti-impérialistes" campistes dont on nous accuse de faire partie aujourd'hui !

Telle est notre position et nous ne considérons pas les camarades qui s'arrêtent à l'aspect le plus visible et apparent des choses - celui d'un pur conflit entre impérialisme russe et impérialismes occidentaux - comme des ennemis politiques. En revanche nous considérons comme des ennemis les faux "ni-ni" suppôts de l'impérialisme et des fascistes pro-Kiev ; et le camp du terrorisme intellectuel n'est définitivement pas le nôtre.

 

Partager cet article
Repost0
12 juin 2014 4 12 /06 /juin /2014 09:37

 

Un texte d'une beauté à couper le souffle qui nous parle de la classe ouvrière de Lorraine, cette provincia (pays conquis) et périphérie quart-mondisée du système France, dont il faut rappeler qu'après avoir été un État (duché) semi-indépendant (comme tous les États) du Saint-Empire germanique puis complètement indépendant, elle ne fut progressivement annexée qu'à partir du milieu du 16e siècle ("chevauchée d'Austrasie" d'Henri II amenant dans l'escarcelle royale les Trois-Évêchés en 1552) et définitivement (non sans avoir connu les affres de la Guerre de Trente Ans et de toute une série d'occupations françaises, perdant peut-être les deux tiers de sa population...) en 1766 seulement (!), vingt-trois ans à peine avant la Révolution et trois ans avant la Corse, après avoir été pendant 30 ans une sorte de "protectorat" gouverné par le beau-père de Louis XV (Stanislas Leszczyński qui a donné son prénom à la célèbre place nancéienne). Lors de la création des départements en 1790, comme une ultime humiliation, on fera faire à sa frontière avec la Haute-Marne (département champenois) un détour de plusieurs kilomètres afin de lui arracher les vestiges de l'ancienne citadelle de La Mothe, dangereux symbole de sa résistance passée face aux tentatives d'annexion...

Elle devint alors très vite une périphérie populaire vouée à l'industrie lourde sous la houlette des tout-puissants De Wendel [firme familiale qui deviendra après-guerre Sacilor puis (après nationalisation) Usinor-Sacilor en 1986, Arcelor en 2002 et enfin Arcelor Mittal en 2006, la firme elle-même devenant une société d'investissement présidée par... Ernest-Antoine Seillière], se peuplant d'un prolétariat ouvrier de toutes les origines européennes puis extra-européennes, mais cadenassé dans un système paternaliste qui verra toujours un mouvement communiste historiquement assez faible et une large hégémonie du syndicalo-réformisme voire du syndicalisme cogestionnaire chrétien, et même d'une assez forte droite ouvrière (en Moselle surtout) donnant aujourd'hui de puissants bastions FN.

À la fin des années 1970 (nouvelle crise générale du capitalisme) la sidérurgie commence à être peu à peu démantelée, soulevant un mouvement de résistance populaire magnifique qui réussira même l'exploit d'assombrir l'"état de grâce" mitterrandien mais qui sera malheureusement défait ; le territoire devenant alors définitivement une vaste zone de relégation plongée dans le chômage et la désespérance, le désert de services publics, la pauvreté urbaine et rurale, l'alcoolisme et autres fléaux psycho-sociaux (avec toutes leurs conséquences sanitaires), le vote populiste d'extrême-droite etc. ; bien que parallèlement aux gesticulations du Montebourg succédant à celles de Sarkozy, les sacro-saints "z'élus locaux" tentent de restructurer cela en une "métropole dynamique et prospère au cœur de l’Europe" (dans le texte) qui d’Épinal jusqu'à la frontière luxembourgeoise compterait quelques 1,5 millions d'habitants et qui s'intégrerait à la "dorsale européenne" rhénane...

Espérance de vie parmi les plus basses d'Hexagone dans certains secteurs, augmentation de plus de 16% du nombre de suicides en 10 ans, taux de cancers nettement supérieur à la moyenne nationale (première cause de mortalité) : il y a là de ces crimes contre le Peuple que les forces de l'Histoire ne pardonnent pas, et qui recevront tôt ou tard leur juste châtiment !

Nous, communistes révolutionnaires d'Occitanie et d'ailleurs luttant pour la Libération des Peuples et pour jeter à bas la forteresse d'exploitation et d'oppression mondiale dénommée "France", nous travaillerons d'arrache-pied pour que tu deviennes, Lorraine, une forteresse rouge de la Guerre du Peuple !

Je suis né dans la Vallée des Anges

Je suis né dans la vallée des Anges, là où les chérubins nimbés côtoient les monstres d’acier et les titans de feu. Partout leurs masses se dressaient vers le ciel, comme les clochers des églises, comme les beffrois des hôtels de ville, comme autant de points de repères pour les habitants des lieux. Des confins des Ardennes au sud de Nancy, en passant par Thionville, Metz et Pont-à-Mousson, notre bassin prenait des airs d’Enfer lorsque les cheminées hululaient, crachant dans l’air des fumées sulfureuses. L’odeur de souffre emplissait les narines et on respirait à plein poumon un air gorgé de scories. Les vitres se recouvraient d’une pellicule de suie, et le ciel demeurait tristement gris.

Parfois, nous montions sur les crassiers, voir d’en haut les anciens lorsqu’ils coulaient la fonte. Des éclairs de feu jaillissaient et la lave serpentine fusait dans un bouillonnement d’or. Partout, la nuit ne laissait apparaître que le rougeoiement des hauts-fourneaux. Pareils à des dragons bienveillants, les mastodontes insomniaques entretenaient jusqu’à l’aurore, dans une pluie d’étincelles, le brasier ardent. Les enfants regardaient passer les wagonnets, leurs lumières et leurs cliquetis, semblables à ceux d’une fête foraine.

Gueules noires aux yeux bleus, les ouvriers ne comptaient pas leurs heures. Les cris, la chaleur et le grondement des gestes en cadence rythmaient les journées et les nuits. Quand nos pères rentraient le soir, il ne fallait pas faire de bruit. L’alcool coulait souvent jusque tard dans leurs gorges irritées par la poussière, soulageant leurs dos usés et leurs mains calleuses, attisant leur fatigue et calmant leurs angoisses. À table, on parlait parfois des De Wendel car ici, tout leur appartenait. C’était leurs murs, leurs usines, leurs échoppes et leurs bars. Nous étions leurs ouvriers, leur main d’œuvre, leurs gagne-pain. Pourtant, c’était nos pères qui se levaient chaque jour pour rejoindre les hauts-fourneaux et les chevalements, les mines de fer et la houille.

Les gens venaient de partout pour travailler ici. Algériens, Espagnols, Italiens, Polonais et Français. Tous se côtoyaient, effectuaient les mêmes taches dans les mêmes monstres d’acier, fréquentaient les mêmes épiceries, se rendaient aux mêmes sorties d’écoles, se retrouvaient dans le même bar PMU le dimanche matin et assistaient aux mêmes matchs de football le dimanche après midi. La vallée brassait toutes les populations, toutes les origines et toutes les cultures. Les gens savaient vivre ensemble et la richesse ne se trouvait que dans les cœurs.

Le ciel gris était le même pour tous et les petites maisons ouvrières s’alignaient dans tous les villages-rues de la vallée. Les légumes que l’on cultivait dans les jardinets, radis, carottes et salades, étaient mis à tremper dans de grandes bassines dont l’eau finissait par prendre la couleur de la rouille. Chaque jour les femmes balayaient la poussière épaisse, déposée par les fumées des usines sur les balcons et les parvis et plusieurs fois par semaine, il fallait nettoyer les vitres, noires de suie.

Puis, la rumeur a commencé à enfler. Les usines allaient fermer. Les laminoirs, les mines de fer et les trains à fil, les aciéries et les hauts fourneaux, bientôt, ne seraient plus. Le jour où ils ont arrêté la coulée, le ciel est devenu clair, on revoyait l’azur, mais cela ne présageait rien de bon. La poussière a peu à peu disparu, laissant apparaître le vert de la végétation foisonnante attisée par une pluie fréquente. Les sidérurgistes ont continué à travailler durement, mais l’envie n’y était plus. La résignation se voyait parfois sur leurs visages marqués par le labeur. Beaucoup se préparaient pour les manifestations futures tandis que d’autres démontaient déjà les ponts roulants et les installations d’acier, sous les regards désespérés.

L’appel à la grève générale, un mois d’avril morne et froid, avait été largement suivi. Les odeurs de pneus brûlés succédaient à celle du souffre. Les frontières avec l’Allemagne et le Luxembourg furent fermées, les routes bloquées, les rails occupés et les commerçants laissèrent clos leurs rideaux de fer. Plus rien ne circulait et partout dans la vallée, on se mobilisait. Les cloches des églises sonnaient à la volée, dans un écho funeste.

Les promesses des politiques n’ont jamais été tenues et la Vallée de la Fensch a été abandonnée. L’extraction et la fusion du fer ont laissé place à des usines désertes qui pointent toujours vers le ciel leurs carcasses de fonte. Au printemps, leurs silhouettes fantomatiques percent la brume aux premières lueurs du jour et l’automne, leurs lignes aiguisées se dessinent au bord des routes derrière l’épais brouillard. Les galeries vides et les effondrements du sous-sol ont remplacé l’effervescence des travailleurs. La région est endeuillée par le chômage et la misère, tandis que les nouvelles générations cherchent à partir au plus vite pour trouver du travail. Les villages-rues se sont transformées en cité-dortoir où la vie n’est plus.

Il y a eu du sang et des larmes ici. Des coups de grisou, des suicides. Et partout, la silicose qui ronge les poumons. La sirène retentissait quand un accident grave se produisait, et on priait pour qu’il ne s’agisse pas de notre père, de notre frère ou d’un proche. Malgré tout cela, la vallée abritait un vivier culturel, une clayère d’âmes et d’esprits. Les anciens étaient fiers de ce qu’ils faisaient, même si le labeur était éreintant. Leur savoir faire unique s’est envolé lorsque les usines ont fermé leurs portes et avec lui, des milliers d’emplois. Le ciel a retrouvé ses couleurs, la poussière ne se dépose plus sur la terre que l’on cultive, les fumées ferrugineuses ont disparu, mais plus personne ne souhaite en profiter.

Du bord de la route, je regarde les hauts fourneaux et leur allure spectrale qui me fascine tant. La nature y a repris ses droits et une herbe émeraude recouvre leurs pieds, tranchant avec les reflets argent des carcasses d’acier. Je dévisage ces titans figés dans un immobilisme immuable et je me souviens des odeurs de souffre, de la poussière et du bruit permanent. Je les observe mais, pourtant, ce sont eux qui aujourd’hui contemplent la région de leur majesté rouillée.

carnet1-1

Partager cet article
Repost0
12 juin 2014 4 12 /06 /juin /2014 07:49

 

Damien Camelio, anarchiste occitan du Groupe d'Action Directe Internationale (GADI) condamné à deux ans de prison ferme pour des attaques incendiaires contre une secte chrétienne servant de base arrière au Front National, une prison et un bâtiment militaire (communiqué reçu par le formulaire de contact) :

1Damien-CamelioC’est en solidarité avec Damien CAMELIO, prisonnier anarchiste, que nous dénonçons publiquement les difficiles conditions de détention ainsi que le traitement dégradant qu’il subit au centre pénitentiaire de Mont de Marsan (40).

Si les publications légales auxquelles Damien CAMELIO est abonné lui sont délibérément retenues plusieurs semaines avant de lui parvenir, celui-ci s’est également vu notifier par la direction de l’administration pénitentiaire un « refus pour entrées incessantes de livres » au motif qu’il n’a « pas à faire entrer des livres en quantité et à les remettre à [ses] codétenus une fois lus ».

Toutes ses demandes pour accéder aux salles de sport, réaliser des études ou de régime ouvert n’ont pas été étudiées ; Damien CAMELIO est le seul prisonnier politique de son bâtiment, cet isolement rend ses conditions de détention plus que difficiles.

Au mois de mai, après que l’administration pénitentiaire ait « ouvert par erreur » un courrier confidentiel d’un avocat, s’en sont suivis 6 nuits consécutives de privation de sommeil : flash de lumières, alarme en cellule, bruits incessants.
Dans son rapport du 19 avril 2012, le Comité européen de Prévention de la Torture (CPT) a dénoncé la pratique consistant à contrôler certains détenus en les réveillant plusieurs fois par nuit étant donné les « conséquences néfastes pour la santé des détenus ».

Dans le même sens, par une ordonnance du 18 avril 2014, le juge des référés du Tribunal administratif de Limoges a ordonné la suspension du régime de surveillance nocturne qui était imposé depuis le mois de juin 2013 à un détenu ayant le statut de « détenu particulièrement signalé » (DPS). Il a relevé que les contrôles nocturnes appliqués à l'intéressé, qui perturbent son sommeil et ont un impact sur sa santé, portent une atteinte grave et immédiate à sa situation. Il rappelle par ailleurs que l’inscription sur le répertoire des DPS ne saurait automatiquement entraîner l’application d’un tel régime de surveillance (Source OIP).

Le centre pénitentiaire de Mont de Marsan, inauguré en novembre 2008, fait partie de ces nouvelles prisons où les surenchères technologiques et sécuritaires déshumanisantes conditionnent le détenu en simple objet, engendrent de la violence et génèrent des drames humains. Dans sa dernière lettre, Damien CAMELIO le souligne tout particulièrement : «Les ailes probatoires sont réputées pour être les pires. Tout le monde veut se barrer de ces ailes, les gars préfèrent même l’isolement. Tous les morts ou presque, sont morts dans nos ailes. Un gamin de 19 ans est mort ici il y a peu, c’est le 5ème en deux mois. J’ai vu un mec s’arracher les veines parce qu’il n’a pas supporté le traitement qu’il a subit. Il y a un autre mec qui s’est coupé le doigt avec un couteau, il a fini de se l’arracher avec les dents pour l’envoyer au procureur pour qu’il bouge d’ici»

Pour soutenir Damien, vous pouvez lui écrire :
Damien CAMELIO
n° 5057
Centre de détention de Mont de Marsan
Chemin de Pémégnan
BP 90629
40006 MONT DE MARSAN CEDEX

201402071789-full

C'est donc manifestement par un régime carcéral digne de Guantánamo que la République vallsienne tente de briser cet "anarchiste entré en résistance".

N'oublions pas non plus le camarade indépendantiste de gauche breton Enguerrand Delanous, au cachot pour soi-disant "confection d'engins incendiaires" et "jets de pierres sur les forces de l'ordre" lors de la manifestation du 22 février contre l'aéroport de Notre-Dame-des-Landes (cliquer sur l'image pour la page de son Comité de Soutien).

1enguerrand naoned

On peut suivre aussi les communiqués de soutien et l'actualité le concernant ici : http://nantes.indymedia.org/groups/comité-de-soutien-à-enguerrand

Vous pouvez également lui écrire à :

Delanous Enguerrand
Écrou 59694
Rue de la Mainguais
BP 71636
44316 Nantes CEDEX 3

L'idéologie républicaine-bourgeoise francouille est un SYSTÈME TOTAL qui dans la crise générale du capitalisme et face à la contestation grandissante tombe de plus en plus ouvertement le masque "démocratique", conduisant au FASCISME ; les scores de plus en plus impressionnants du Front National sont un SYMPTÔME, un des symptômes de cela et non sa "cause". C'est l'idéologie républicaine-bourgeoise BBR qu'il faut dénoncer, combattre et détruire avec l'appareil politico-militaire qui la porte avant que demain sa dictature ne s'exerce de manière ouvertement fasciste, avec Marine Le Pen ou qui que ce soit d'autre au pouvoir ; et non, comme le prétendent de pseudo-"maoïstes", défendre sa version "républicaine" contre la version ouvertement fasciste.

Cette accumulation des emprisonnements fermes de militant-e-s par la justice "républicaine" est peut-être, pour ces "mao"-vallsistes, une "juste réponse" des Lumières-bourgeoises-à-défendre contre la "décomposition petite-bourgeoise d'ultra-gauche" ; mais en réalité, comme dans un tout autre registre le parcours intellectuel d'un Alain Finkielkraut aboutissant... à l'Académie française, elle révèle l'abandon croissant du masque "républicain-démocratique-droit-de-l'hommiste" par la dictature du Capital BBR et son idéologie française ; elle révèle le pourrissement réactionnaire de l'ordre bourgeois qui, achevé, pourra alors être nommé fascisme ; elle le révèle même de manière beaucoup plus significative que la montée du FN ou le succès des "Manifs pour tous" homophobes, autrement dit des gens qui ont toujours été des ultra-réactionnaires et des fachos. C'est cela, ce "retour de l'autorité", de "l'ordre et du travail" autrement dit la dictature "sans complexes" de l'ordre bourgeois sur les "masses dangereuses" que veut (que l'on a fait vouloir à) l'électorat FN ; le reste (sortir de l'Union européenne, revenir au franc, instaurer un certain protectionnisme commercial, sortir de l'OTAN et se rapprocher de la Russie, soutenir plutôt Poutine ou plutôt les nationalistes ukrainiens, plutôt Israël l'"avant-poste de l'Occident" ou plutôt Bachar el-Assad l'anti-"Nouvel Ordre mondial") il s'en fout un peu dans le fond, ce sont des préoccupations de cénacles intellectuels.

Ce ne sont pas les fascistes qui instaurent le fascisme, mais le ralliement des "démocrates" et des "républicains" bourgeois à leurs positions. C'est ce qui est en train de se produire à grands pas.


 

Partager cet article
Repost0

Présentation

  • : Servir Le Peuple : le blog des Nouveaux Partisans
  • : Retrouvez SLP sur son nouveau site http://servirlepeupleservirlepeuple.eklablog.com/ Servir Le Peuple est un média COMMUNISTE RÉVOLUTIONNAIRE, marxiste-léniniste-maoïste, visant par la RÉFLEXION, l'INFORMATION et l'ÉDUCATION POLITIQUE ET CULTURELLE de masse à favoriser la renaissance du mouvement communiste révolutionnaire dans l'État français et le monde francophone.
  • Contact

Les articles des derniers mois :

Retrouver Servir le Peuple sur son NOUVEAU SITE
servirlepeuple.eklablog

novembre 2014
octobre 2014
septembre 2014
août 2014
juillet 2014

Retrouver Servir le Peuple sur son NOUVEAU SITE
servirlepeuple.eklablog

DOSSIER PALESTINE (conflit de juillet 2014) :
Sionisme, islamisme et ennemi principal : quelques précisions
Post-scriptum important : le cas Feiglin
Le sionisme, "fils de France"
Au cas où il serait utile de le préciser...
Deux clarifications importantes
Flash info en direct : ils ont semé la hoggra, ils ont récolté l'Intifada !
Flash info - importance haute : la manifestation pro-palestinienne de demain à Paris est INTERDITE
Le problème avec la Palestine...
Grande manif contre les crimes sionistes à Paris (13/07)
Magnifique manifestation pour la Palestine à Tolosa, capitale d'Occitanie occupée
Petites considérations sur le sionisme et l'identification-"obsession" palestinienne
Considérations diverses : une mise au point nécessaire sur nos positions internationalistes et aux côtés des Peuples

juin 2014

POSITION DES COMMUNISTES RÉVOLUTIONNAIRES DE LIBÉRATION OCCITANE SUR LES ÉLECTIONS MUNICIPALES ET EUROPÉENNES DES PROCHAINS MOIS

L'affaire Dieudonné-Valls :
Plutôt bon article sur la ‘Déclaration de guerre de la République à Dieudonné’ (la pseudo-controverse réactionnaire entre l’antisémite dégénéré et les gardiens du temple républicain)
Quelques mises au point complémentaires (et conclusives) sur la ‘‘question Dieudonné’’ (et Dreyfus, le Front populaire, l’antisémitisme etc.)
Réflexion théorique : loi Gayssot, lois antiracistes et "mémorielles", "antifascisme" bourgeois etc., quelle position pour les communistes ?

Dossier Breizh :
Breizh : comment l'étincelle écotaxe a mis le feu à la lande
"Esclave", "identitaire", chouan, cul-terreux arriéré de service : pour paraphraser Césaire, "n'allez pas le répéter, mais le Breton il vous EMMERDE"
Considérations diverses – en guise de ‘‘petit debriefing’’ de ces derniers mois : Bretagne, fascisme, ‘‘Lumières’’ et Kaypakkaya… (point 1)
Considérations diverse (26/11/2013) : eh oui, Servir le Peuple a toujours quelques petites choses à vous dire ;-) (point 1)
Appel de la gauche indépendantiste bretonne (Breizhistance) pour le 30 novembre (avec notre critique de la position du ROCML)
Le Top Five des drapeaux qui n'ont PAS été inventés par un druide nazi  (mortel !)
Et en guise (provisoire) de conclusion : La Gauche indépendantiste bretonne revient sur la mobilisation de Karaez/Carhaix

Comité de Construction du PCR des Terres d'Òc : Déclaration du 11 Novembre

La phrase du moment :

"La tyrannie cessera parmi mon peuple ; il n'y aura que liberté, liberté toute nue, sans déguisement. Bouleversements d’États entiers : je les renverserai de fond en comble, il n'y aura rien de reste. Il va y avoir de terribles renversements de conditions, de charges et de toutes choses. Je veux faire un monde nouveau, je veux tout détruire. Je veux appeler à moi la faiblesse, je veux la rendre forte. Pleurez gens du monde, pleurez grands de la terre, vos puissances vont tomber. Rois du monde, vos couronnes sont abattues !"

Élie Marion, "prophète" et guérillero camisard cévenol, 1706.

Amb l'anma d'un Camisart, Pòble trabalhaire d'Occitània endavant !

 

Recherche

Liens

État français : 

Quartiers populaires - Colonies intérieures :

Peuples en Lutte (Hexagone) :

Autres pays francophones :

Internationalisme :

Castillanophones (État espagnol et Amérique latine) :

Lusophones (Brésil & Portugal)

Italophones :

Anglophones (Îles Britanniques & Amérique du Nord)

Germanophones et scandinaves : 

À l'Est, du nouveau : 

Grèce :

  • KOE ('maoïsant', allié à la gauche bourgeoise SYRIZA, en anglais) [dissous dans SYRIZA en 2013, publie maintenant Drómos tis Aristerás, en grec]
  • KKE(m-l) (marxiste-léniniste 'maofriendly', partie en anglais, le reste en grec)
  • ANTARSYA (Coordination de la gauche anticapitaliste pour le renversement, avec des trotskystes, des 'maos' etc., en grec)
  • ANTARSYA - France (site en français)
  • Laïki Enotita ("Unité populaire") - France (en français et en grec, scission anti-capitulation de SYRIZA, pour s'informer)
    EKKE (Mouvement communiste révolutionnaire de Grèce, 'maoïsant' et membre d'ANTARSYA, présentation en anglais, le reste en grec)

Karayib (Antilles-Guyane) & Larényon (Réunion) okupé : 

Monde arabe / Résistance palestinienne :

État turc / Kurdistan : 

  • Maoist Komünist Partisi (PC maoïste de Turquie/Kurdistan-Nord)
  • DHKP-C (ML, tendance 'guévariste')
  • TKP/ML (maoïste)
  • MLKP (ML, site francophone)
  • ATİK (Confédération des Travailleurs de Turquie en Europe, maoïste, en anglais)
  • Nouvelle Turquie (information et soutien à la Guerre populaire et aux luttes, en français) [ancien blog]
    Nouvelle Turquie (nouveau site)
  • YPG (Unités de Protection du Peuple, Kurdistan "de Syrie", en anglais)
    PKK (Kurdistan "de Turquie", site en anglais)
    PYD (Parti de l'Union démocratique, Kurdistan "syrien", site en anglais)
    ActuKurde (site d'information en français)

Afrique :

Asie & Océanie :

Antifa :

Action Antifasciste Bordeaux (plus mis à jour, mais "cave aux trésors")

AA Alsace (idem)

Union Révolutionnaire Antifasciste du Haut-Rhin (URA 68, page Facebook)

Collectif Antifasciste Paris - Banlieue

Action Antifasciste Paris - Banlieue

Montpellier Antifa

Collectif Antifasciste 34

Collectif Antifasciste Rennais (AntifaBzh)

Cellule Antifasciste Révolutionnaire d'Auvergne (CARA, page Facebook)

Carcin/Quercy Antifascista (page Facebook)

Occitània Antifascista (page Facebook)

Breizh Antifa (page Facebook)

Perpignan Antifa (page Facebook)

Action Antifasciste de Pau

Union Antifasciste Toulousaine

Ipar Euskal Herria Antifaxista (Pays Basque du Nord antifasciste)

REFLEXes - site d'informations antifascistes

La Horde, portail d'information antifa

Rebellyon - rubrique "Facho"

Redskins Limoges

Droites extrêmes - blog Le Monde (site d'information bourgeois bien fourni, parfait pour le "watch")

Document : Ascenseur pour les fachos (série de 6 vidéos Youtube, Antifascisme.org, site social-démocrate)

 

Guerre pop' - Asie du Sud :

Inde Rouge (nouveau site "officiel" francophone)

Comité de Soutien à la Révolution en Inde

Comité de solidarité franco-népalais

Fil d'actu "Inde - Népal" du Secours Rouge - APAPC

J. Adarshini (excellent site en français)

Revolution in South Asia (en anglais)

Maoist Resistance (guérilla maoïste indienne - en anglais)

NaxalRevolution (Naxalite Maoist India, en anglais)

Banned Thought (en anglais)

Indian Vanguard (en anglais)

The Next Front (Népal - anglais)

Signalfire (sur la GPP en Inde et aux Philippines, le Népal et les luttes populaires dans le monde - en anglais)

Communist Party of India (Marxist-Leninist) Naxalbari (a fusionné avec le PC d'Inde maoïste le 1er mai 2014)

New Marxist Study Group (maoïste, Sri Lanka)

Parti communiste maoïste de Manipur (page Facebook)

 

Guerre pop' - Philippines :

Philippine Revolution (en anglais)

The PRWC Blogs

(tous deux remplacés apparemment par ce site CPP.ph avec notamment les archives d'Ang Bayan, l'organe officiel du Parti)

Solidarité Philippines

Fil d'actu "Philippines" du Secours Rouge - APAPC

 

Guerre pop' & Luttes armées - Amérique latine :

CEDEMA - actualité des mouvements armés en Amérique latine (+ qqs documents historiques)

 

Nuevo Peru (Pérou, basé en Allemagne, en castillan et allemand principalement)

Guardias Rojos (Pérou, page FB)

Fil d'actu "Amérique latine" du Secours Rouge - APAPC

Archives

Autres documents théoriques

 

Récapitulatif des "grandes thèses" de Servir le Peuple


À lire également, les Considérations Diverses, petits "billets" trop courts pour faire un article et donc regroupés par trois, quatre ou plus, exprimant notre CONCEPTION DU MONDE sur toute sorte de sujets. 


Même étude sur l'État espagnol (1 et 2) ; le Royaume-Uni (1 et 2) et l'Italie.

 

APRÈS 8 SÈGLES… (Huitième centenaire de la bataille de Muret 1213 & DÉCLARATION FONDATRICE de notre Comité de Construction du PCR-Òc)

 

 






 

 

 


 


 

 

Le 'centre mlm' de Belgique, la Guerre populaire et le (n)PCI (sur la stratégie révolutionnaire en pays impérialiste) ; et dans la continuité :

Gramsci et la théorie de la Guerre populaire en pays capitaliste très avancé (1ère partie)

et Gramsci et la théorie de la Guerre populaire en pays capitaliste très avancé (2e partie)

 

 

 

EXCLUSIF : Lotta Continua - "Prenons la Ville !" (1970) [avec un salut rouge et fraternel à l'AA Bordeaux ]

Manifeste Programme du (n)PCI

Présentation

du chap. 1 du Manifeste pour les lecteurs/trices francophones (valable pour tout le Manifeste)

 

(Chapitre I): PDF - WORD

 

 

 MANIFESTE COMPLET

(version non-définitive ; chap. 4 et 5 pas encore validés par les camarades italiens)

 

IMPORTANT pour la compréhension du Manifeste :

La crise actuelle, une crise par surproduction absolue de capital (en PDF)

article de 1985 paru dans Rapporti Sociali n°0

[en bas de la page en lien, icône
PDF - Télécharger le fichier pour télécharger le document]

Autres analyses d'actualité









Situation décisive au Népal 

En matière de conclusion sur la situation au Népal, et ses répercussions dans le Mouvement communiste international 

Questions-réponses sur la situation au Népal

 

Discussion sur la "gauche" en Amérique latine et la bourgeoisie bureaucratique

 

Sur la liquidation réformiste en Euskal Herria : l'analyse d'un communiste abertzale

Sur la liquidation réformiste en Euskal Herria, 2e partie

Sur la liquidation réformiste en Euskal Herria, 3e et dernière partie  

 

 

 

 


Considérations diverses 03-2013 - et un peu de polémique/critique, ça fait pas de mal ! (sur Chavez, le 'bolivarisme', le 'fascisme' de celui-ci et autres choses...)

Autres articles historiques

 

25 avril 1945 : le Peuple italien terrasse le fascisme

 

 


 




Et en guise de récapitulatif/synthèse : Considérations diverses sur les États, les Nationalités, la Subsidiarité et le Pouvoir populaire ; ici (point 1) : Considérations diverses – fin octobre 2013 : État et révolution bourgeoise et ici : Considérations diverses : 1/ Le cœur des nations est aujourd’hui le Peuple