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17 octobre 2014 5 17 /10 /octobre /2014 11:18

 

thCOMPLOCRATIE- Le conspirationnisme consiste à voir dans tous les mécanismes de domination "cachés", "sournois", "détournés", fondés non sur la répression ni sur la persuasion franche des consciences populaires mais sur leur manipulation ou leur "apprivoisement", des "complots" alors qu'ils ne sont que des instruments parmi d'autres de la domination de classe. Cela sous-entend qu'il y aurait de "bons" mécanismes de domination, ceux qui sont "francs" et "ouverts", et des "mauvais" - ceux qui sont "occultes". Autrement dit qu'il y aurait une bonne et une mauvaise domination (aujourd'hui que le capitalisme domine le monde : un bon et un mauvais capitalisme). Tel est réellement le fond de la pensée des conspirationnistes. C'est bien sûr complètement utopique et idéaliste : le mensonge et la manipulation des consciences individuelles sont des mécanismes absolument indispensables à quelque domination de classe que ce soit, théorisés - pour l’État moderne au service du Capital - dès le 16e siècle avec Machiavel, voire avant. Toujours dire la vérité en "toute transparence" et réprimer (on suppose) les personnes qui n'accepteraient pas cette réalité des faits (sur laquelle on ne les aveuglerait pas) "tiendrait", comme mode de gouvernement, au maximum une dizaine d'années - a fortiori depuis qu'une théorie scientifique (le marxisme) est à la disposition de l'émancipation des exploité-e-s et des opprimé-e-s. Prétendre qu'un système capitaliste "éthique" pourrait exister sans mentir, dissimuler et manipuler est une imposture intellectuelle.

S'y ajoute généralement un besoin de vision binaire du monde avec un "camp du Bien" et un "camp du Mal", refusant de voir la complexité des choses, les contradictions, les transformations en cours ou possibles : un exemple typique est par exemple l'affirmation que "les djihadistes sont une fabrication de l'Occident pour servir de prétextes aux guerres" (comme si l'impérialisme, occidental ou pas d'ailleurs, avait besoin de tels prétextes) alors qu'ils sont en réalité le produit de situations dans lesquelles l'impérialisme occidental joue certes un rôle, mais aussi bien d'autres facteurs et dans tous les cas, "islamisme" et "djihadisme" sont avant tout des phénomènes endogènes aux sociétés musulmanes. Mais comme ils sont "inclassables", s'opposant à TOUS les blocs et toutes les puissances impérialistes ("Croisés") et à toutes les forces qui ne partagent pas leur (très particulière) vision de l'islam sunnite, et qu'il faut bien (malgré tout) les faire rentrer dans un "camp" (en l'occurrence celui du "Mal"), alors...

Il faut dire que très souvent, les "conspis" sont des gens qui militent pour que l’État où ils vivent renonce à son alignement atlantiste (pro-américain, favorable à Israël etc.)* et se tourne plutôt vers la Russie, la Chine, les régimes "nationalistes" arabes ou sud-américains, l'Iran etc. Des régimes incarnant selon eux le "bon capitalisme" (qu'ils appellent parfois, pour certains, "socialisme") et qui, c'est bien connu, ne dissimulent ni ne déforment "jamais" aucun fait (voilà qui illustre bien l'imposture intellectuelle dont nous parlons plus haut).

Il est donc absolument clair que nous, communistes, sommes résolument opposés au conspirationnisme. Nous combattons le conspirationnisme car nous combattons tout ce qui altère la conscience politique révolutionnaire du Peuple et la juste compréhension communiste (scientifique) des choses, condamnant dès lors à l'impuissance (parce que pour ses "dénonciateurs" - Thierry Meyssan et compagnie - le "Grand Complot" est évidemment "surpuissant" et "invincible", tout ce que l'on peut faire c'est les écouter nous le "dévoiler" et éventuellement voir en eux et/ou en Poutine et Assad des "contre-pouvoirs" - et surtout acheter leurs livres). Pour prendre l'exemple le plus connu, les théories à la mords-moi-l'nœud sur le 11 Septembre empêchent de comprendre correctement la guerre mondiale non déclarée que traverse le monde depuis la fin de la "Guerre froide" ; guerre dans laquelle il y a (entre autres) un Capital arabe sur-accumulé qui "étouffe" dans ses petits États semi-coloniaux et qui se "rebelle" donc contre l'impérialisme occidental pour tenter d'instaurer un "califat" comme base d'accumulation adaptée (ces théories font au demeurant bien rire les "islamistes" eux-mêmes, qui revendiquent au contraire fièrement l'opération de "cheikh Oussama" contre "les Juifs et les Croisés").

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- La "chasse aux conspis" consiste non pas à lutter contre ce glissement sémantique de "mécanismes détournés de domination" à "complots" et cette idée qu'il y aurait une "bonne" et une "mauvaise" domination ; mais à asséner l'argument massue de "théorie du complot" devant chaque remise en cause, chaque voile levé sur les mécanismes de domination. Il n’y a pourtant nul besoin de croire en une quelconque "théorie du complot" pour constater l’existence de stratégies de la part des classes dominantes pour orienter l’opinion, pour masquer des réalités, pour imposer des choix en les présentant comme souhaitables et nécessaires. C'est que les gens qui croient aux théories du complot (nous ne parlons pas, bien sûr, de ceux qui les émettent), tout au moins, se posent des questions - auxquelles ils apportent ensuite de mauvaises réponses, celles que leur concoctent les théoriciens conspirationnistes et qui font partie des "défenses immunitaires" du "système". Les "chasseurs de conspis", au contraire, donnent souvent une lamentable impression d'acceptation bêta du monde tel qu'il est, de confiance ovine en tout ce qui se dit et se fait - du moins dans ce qu'ils appellent les "démocraties".

Dans les faits, consciemment ou en mode "idiots utiles", les "chasseurs de conspis" sont en réalité les agents et les défenseurs de l'alignement géopolitique atlantiste et pro-israélien que combattent les "conspis" (l'on peut consulter ici - pas inintéressant - une petite "cartographie" de cette nébuleuse politique "néocon" dans laquelle les plus médiatiques/"gauche bourgeoise" d'entre eux trouvent pleinement toute leur place). Il est d'ailleurs notable qu'ils n'ont aucun problème à dénoncer les "média-mensonges" (qu'ils appellent pour le coup des hoax**) lorsque ceux-ci émanent des agences de presse d’États ou de forces anti-occidentales (Russie, Chine, Iran, Hezbollah ou islamistes sunnites) ou d'agitateurs qui (en Occident même) leurs sont liés. Seules sont "conspirationnistes", pour eux, les dénonciations de mensonges et autres mécanismes de dominations émanant du bloc impérialiste occidental.

Le vrai problème, en définitive, de ces "chasseurs de conspis/confusionnistes" tellement indignés que l'on puisse balancer 4 vérités à la gueule de leur magistère intellectuel, c'est qu'ils ne sont pas là pour lutter contre le confusionnisme ; en d'autres mots ils ne sont pas là pour lutter contre les idées fausses, "pourries", "puantes" ou tout ce que l'on voudra, ce qui pourrait être fait très simplement en y opposant des idées justes, en apportant de bonnes réponses et analyses aux questions soulevées : non, ils sont là pour défendre leur conception du monde qui ne vaut guère mieux (qui n'est en dernière analyse que l'aile extrême-gauche de l'idéologie républicarde francouille universaleuse) et imposer celle-ci par le terrorisme intellectuel en faisant taire les bonnes questions auxquelles les "confusionnistes" apportent de mauvaises réponses. 

On retrouve d'ailleurs (et c'est intéressant) la même chose quant à nos luttes d'affirmation de Peuples (il se trouve pour le coup que "conspis" et "anti-conspis" nous vouent une même haine féroce). Pour les "conspis", généralement hostiles à l'Union européenne et à ce qu'ils appellent le "mondialisme", nous sommes des "euro-balkanisateurs" qui veulent détruire leurs si chers États-"nations". Mais pour les "anti-conspis", c'est encore plus "simple" : chaque fois que nous démontons une falsification historique, un mécanisme faisant qu'à l'heure actuelle (c'est un constat de fait) 90% des habitant-e-s de l'Hexagone se sentent "Françai-se-s", nous faisons de la "théorie du complot" ce qui est somme toute "bien normal" pour les "sales natios" que nous sommes. Car nos chers "anti-conspis" confondent, bien sûr, le phénomène infrastructurel et objectif que les marxistes appellent nation avec les "nations" que PRÉTENDENT être les États bourgeois (entendu dans ce sens, il est clair que nous sommes tout le contraire : nous sommes les theorie-du-complot.1261399536antinationaux par excellence !)... Et ils se font finalement (là encore) les idiots utiles de ces États-"nations" qu'ils appellent à "dépasser" (de manière totalement abstraite) "vers l'universel" au lieu d'en briser les murs et d'en libérer les Peuples (= les nationalités sans leurs bourgeoisies) qui pourront ensuite se fédérer, s'unir, éventuellement fusionner etc.

À l'arrivée, il est intéressant et même - pour tout dire - amusant de voir cette "chasse au conspi rouge-brun antisémite" déboucher sur une véritable... "théorie du complot complotiste" (!), suivant exactement les mêmes "raisonnements" et méthodes (d'amalgame, d'"untel connaît untel qui - parfois plusieurs années en arrière - a repris un article d'untel sur son site" etc. etc.) que les "conspis" et autres "chasseurs" de "sionistes partout" qu'ils prétendent dénoncer, comme le conclut fort bien ce petit collectif socialiste dans sa réponse à Yves Coleman (l'un des "gourous" de cette petite mouvance).

Nous recommandons de lire à ce sujet ce (très bon comme d'habitude) petit article de Quartiers Libres : Problèmes d’orientation chez les chasseurs de confusionnistes

Il résulte de tout cela que nous, communistes et a fortiori communistes révolutionnaires de Libération des Peuples, ne sommes clairement pas "chasseurs de conspis" non plus. Pour donner un exemple, nous avons déjà fait part de notre jugement peu amène quant à l'"opération antifasciste" dirigée en juin 2013 contre le "conspi" Michel Collon à Lille. Michel Collon n'est pas un "conspi tendance dure", quelqu'un qui verrait un "cénacle mondial secret" (illuminati, juif ou autre) derrière toutes les "mauvaises choses" de la planète (on a ici un aperçu de sa position de fond sur le sujet). En réalité, issu du PTB (pro-Deng Xiaoping et très anti-soviétique à sa création en 1979...), il a suivi l'évolution "vieille-stal"/brejnévienne et "campiste" de cette organisation belge depuis la fin de la Guerre froide (la Chine elle-même, soumise à des "déstabilisations" - "Printemps de Pékin" etc., tournant alors le dos à son alignement pro-occidental des 15 années précédentes). "Orphelin" de l'URSS et des "démocraties populaires" disparues en 1989-91, il se bricole à partir d'un agglomérat de pays (Russie, Chine, Iran et alliés, pays de l'ALBA avec bien sûr Cuba) un "nouveau camp de l'Est" (du Bien) de substitution qu'il oppose au "camp du Mal" occidental (relativement inchangé, quant à lui, depuis les années 1980 de Reagan & co). Autrement dit, il a une vision extrêmement binaire et simpliste d'un monde en réalité beaucoup plus complexe, ce qui l'oblige à invoquer les "(média-)mensonges", la "manipulation" et l’œuvre des services secrets occidentaux derrière tout ce qui ne rentre pas dans ses schémas d'analyse ou tout ce qui a deux aspects (comme typiquement les soulèvements populaires en Libye ou en Syrie, devenus guerres "atlantistes" contre ces pays) mais dont il ne veut voir qu'un seul. C'est donc une vision du monde révisionniste ("stalinienne" diront les anarchistes et les trotskystes) qu'il est utile et nécessaire de contredire et combattre... Mais encore faut il avoir (dans sa petite tête) le matériel idéologique pour cela, ce qui aurait (carrément, même) rendu l'opération "coup de poing" très intéressante. Ce n'était malheureusement pas le cas ; et se contenter de hurler au "Collon conspi", "Collon fasciste" etc. et d'étaler ses "accointances" avec tel ou tel spécimen plus gratiné que lui dans le conspirationnisme, sans lui apporter la moindre contradiction sur le fond, n'a eu qu'un effet contre-productif auprès des personnes de classe populaire (et souvent "non-blanches" !) présentes. La "Coordination antifasciste de Lille" s'est tout simplement montrée incapable de la moindre confrontation d'idées (qui aurait fait avancer la compréhension communiste du monde) avec le journaliste belge. Pourquoi la controverse, la polémique, n'ont-elles pas été assumées de la sorte ? "Parce qu'on ne discute pas avec les fascistes", nous disent-ils/elles. Ah d'accord... Mais alors, dans ce cas-là, depuis quand va-t-on dans un meeting fasciste pour y lire une déclaration puis (compter) s'en aller tranquillement ?? Les meetings fascistes s'attaquent casqués et armés de barres de fer !!! Bref, tout cela ne tient tout simplement pas debout ; et l'"antifascisme" dans ce style ne sert clairement pas la cause révolutionnaire.

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* Cet anti-américanisme virulent des "conspis" européens est d'autant plus cocasse lorsque l'on connaît... l'origine essentiellement nord-américaine des théories du complot, que l'on retrouve très largement dans une myriade de films (JFK d'Oliver Stone et autres thrillers politiques à la chaîne) et de séries télévisées (X-Files, Le Caméléon, Prison Break etc. etc.) archi-connues. C'est - tout simplement - que les États-Unis sont sans doute LE pays où l'hégémonie intellectuelle du capitalisme est la plus forte et où l'idée communément admise qu'il est "indépassable" et ne "peut pas être mauvais en soi" est la plus largement répandue dans les masses. Dès lors, comme le capitalisme en tant que mode de production ne "peut pas" être remis en cause mais que les masses populaires US (comme tout le monde) voient bien que "quelque chose ne va pas", celles-ci vont alors chercher la main de "groupements occultes" et autres "consortiums" de riches-et-puissants mal intentionnés derrière "ce qui ne va pas". Ces théories, qui ne peuvent évidemment être anti-américaines puisqu'on est en Amérique, sont assez souvent dirigées contre l'État fédéral ("bureaucratique", "étranger au peuple", "représentant des grandes multinationales et des banques" et "assassin des libertés") ; ce qui est une ligne constante de l'"anticapitalisme" populiste et (donc) de l'extrême-droite là-bas.

** Nous aurons l'occasion de revenir un jour prochain sur cette question des hoax, qui est encore différente. En somme et synthétiquement : le hoaxing consiste à FABRIQUER des faits qui viennent "confirmer" une certaine vision des choses lorsque les VRAIS faits manquent voire - pire - contredisent cette vision. Un exemple typique - et récent - est l'"information" relayée par la mouvance soralienne comme quoi des CRS auraient mis l'arme au pied et pris la tête d'une manifestation pro-palestinienne : Quand le fantasme sert de réalité aux soraliens...
Dans le même veine (mais cette fois ouvertement antisémite), on peut citer l'"information" qu'ont fait courir les agences de l'axe Iran-Hezbollah (mais aussi parfois des islamistes sunnites hostiles à Daesh) comme quoi le dirigeant de l'"État islamique" Abu Bakr al-Baghdadi serait un "agent du Mossad du nom de Shimon Eliott, de père et mère juifs" : manipulation indispensable à leur vision binaire du monde. Il faut dire que depuis les années 1980 où il régnait sans partage sur le "réveil islamique" du monde musulman, le régime de Téhéran s'est considérablement fait damer le pion par ses rivaux sunnites saoudiens et du Golfe ! Voilà qui a très certainement de quoi provoquer son ire, et qui "justifie bien" que sa propagande qualifie ces redoutables adversaires de "créatures du Grand Satan occidental" et surtout du "sionisme", dans une région du monde où "sioniser" l'adversaire est le strict équivalent (différence de "centralité du Mal" oblige...) de le "nazifier" dans la propagande occidentale [dans la même veine, plus tard en 2015, il y a eu l'histoire de ce "général israélien capturé par l'armée irakienne à la tête d'une unité de l'EI" ; "fait" dont la seule source est l'armée irakienne en question et ses auxiliaires des milices chiites, leur allié/parrain iranien et ici la "soralosphère"...].

Le hoax est très usité par le bloc Russie-Chine-Iran-ALBA (ou les islamistes) et, comme nous l'avons dit, les "anti-conspis" sont très dévoués à lui donner la chasse dans ce cas ; mais il faut aussi rappeler que le camp occidental/"atlantiste" ne s'en prive pas : quel plus grand hoax (aujourd'hui totalement dévoilé) dans l'histoire que les prétendues "armes de destruction massive" en Irak, ou encore les "charniers de Timișoara" lors de la chute du despote révisionniste roumain Ceaușescu (1989), les couveuses de bébés prématurés soi-disant débranchées par les Irakiens lors de l'invasion du Koweït en 1990 etc. etc. (pour ne parler que de hoax aujourd'hui communément admis... car attention, l'on a vite fait de se faire traiter de "conspi" si l'on dénonce un hoax occidental pas encore établi !).


Post-Scriptum : Une polémique a récemment éclaté au sujet de la mise en avant par Quartiers Libres d'une conférence de l'universitaire "marxiste-léniniste" italien Domenico Losurdo, qui relève (à très peu de choses près) du même courant de pensée que Collon. C'est-à-dire qu'il a des positions et des analyses intéressantes (voir notamment une présentation sur ce site) comme lorsqu'il réfute (comme nous le faisons) la thèse du fascisme/nazisme "accident"/"anomalie"/"bug" de l'histoire - ou carrément produit... de la Révolution bolchévique d'Octobre 1917 ! - pour le placer au contraire dans la stricte continuité des idéologies capitalistes et impérialistes occidentales des trois derniers siècles (logique impériale-coloniale que le "tort" d'Hitler serait d'avoir appliquée au cœur même de l'Europe) ; analyses qui ne sont au demeurant ni son exclusivité ni une nouveauté puisqu'elles sont partagées par bien d'autres (Enzo Traverso, Rosa Amelia Plumelle-Uribe etc.) et remontent aux combats intellectuels anti-coloniaux de Césaire et Fanon ; bref, lorsqu'il réfute l'idée d'un fascisme ou carrément d'un "totalitarisme" (fascisme et marxisme "jumeaux") d'origine externe et "prenant d'assaut" la démocratie capitaliste, système qu'il s'agit évidemment pour les tenants de ces thèses (BHL et autres "nouveaux philosophes", Nolte, Furet, Sternhell) de défendre. Et puis il a des positions pourries comme lorsqu'il part en mode "campiste" sur la défense de la Chine actuelle (100% capitaliste et impérialiste) et autres régimes "résistants" à l'impérialisme occidental (pléonasme selon lui : il n'y a d'impérialisme que occidental) comme la Syrie, l'Iran ou hier la Libye de Kadhafi ; à grand renfort de théories du complot made in Réseau Voltaire (auquel il contribue occasionnellement : on suppose que si ses textes sont repris par le site c'est avec son autorisation) puisqu'il faut forcément la "main de la CIA" pour expliquer que les classes populaires puissent se soulever contre de tels régimes du "camp du Bien" (même si bien sûr, le soudain intérêt et soutien de l'Occident à ces soulèvements quand tant d'autres sont qualifiés de "terrorisme" ou d'"instabilité" peuvent et doivent poser question).

Losurdo fait tout simplement partie de ces "vieux ML" (il s'offre même le luxe de se réclamer beaucoup de Mao...) pour qui la Chine est "évidemment" socialiste vu qu'en 1949 "c'était le Moyen Âge" et qu'aujourd'hui elle envoie des taïkonautes dans l'espace ; la Libye kadhafiste d'hier et la Syrie baasiste d'aujourd'hui sont des "États nationaux" dont l'"opposition" à l'Occident et à Israël est supposée annuler les contradictions internes, etc. etc. "Progrès" économique fulgurant + proclamations "socialistes" et "révolutionnaires" = socialisme et peu importent les rapports de production et les rapports sociaux en général ; c'est aussi simple que cela pour lui. Pure théorie "vieux ML" des "forces productives"... Au nom du "front uni" contre l'ennemi principal qui est (selon lui) le "nouveau colonialisme", l'interventionnisme militaire "néolibéral" (c'est-à-dire le versant occidental de la guerre non-déclarée de repartage du monde en cours depuis 25 ans), il est possible d'"encourager la prise de position contre la guerre [en Syrie] qu’a assumée Marine Le Pen" sans pour autant "renoncer à soumettre celle-ci à une critique idéologique et politique serrée", les communistes devant "garder fermement leur identité" (autrement dit le courant anti-atlantiste de l'impérialisme français peut être un "possible interlocuteur d’un moment déterminé") : il l'a affirmé ouvertement au sujet des menaces d'intervention en Syrie l'année dernière, aux côtés d'Annie Lacroix-Riz qui appartient elle aussi plus ou moins à ce courant de pensée. Quant à nos luttes pour l'affirmation de nos Peuples (niés par les grands États capitalistes modernes), on suppose que sa position est celle de cette "mouvance-là" (PRCF, URCF etc. etc.) : l'accusation d'"euro-balkaniser" les sacro-saints "États-nations" n'est pas loin...

Bien évidemment, c'est l'occasion pour l'habituelle petite clique "anti-antisioniste"/"anti-anti-impérialiste" (ou mieux dit les néocons-sionards masqués) de crier haro sur ce site haï ; mais de nombreuses réactions négatives ont également surgi dans leur entourage habituel : "comment pouvez-vous mettre en avant un rouge-brun pote du fasciste Meyssan ?", "vous me décevez" etc. etc. Il semble en fait pour tous ces gens que nos petits cerveaux de prolos et de "gauchistes" soient trop étriqués pour faire la part des choses, pour FAIRE DES TRIS : il ne serait pas à notre portée intellectuelle de dire "voilà, dans la pensée d'untel il y a telle et telle chose intéressante et telle et telle autre beaucoup plus critiquable pour ne pas dire puante, il y a à prendre et il y a à laisser". Le commentaire d'un intervenant est particulièrement évocateur : "il n'y a que des gens politisés comme vous, Quartiers Libres, qui sauront faire la part des choses"... Quelle vision élitiste de la lutte des classes !!! D'aucuns nous rétorqueront "et avec Soral, vous faites pareil, vous faites le tri ?"... Eh bien OUI, TOUT À FAIT, nous faisons le tri sauf que dans ce cas cela va très vite : une fois retiré le "vernis" des portraits du Che, de Lumumba, de Fidel Castro ou encore Sankara en devanture du site, il ne reste plus grand chose sinon un mélange de planisme et d'"association Capital-Travail" corporatiste Rerum novarum à la De Gaulle, Pétain ou Salazar, le tout baignant dans l'huile rancie du "complot juif international". Il y aura aussi des "matérialistes" (.com, tout est dans le .com !) pour nous expliquer qu'une fois qu'untel a des idées de merde toutes ses idées le sont (rien à prendre et tout à laisser), "tout est lié" dans le "mouvement éternel de la matière vers le communisme", autrement dit il ne peut pas y avoir de lutte de lignes, d'affrontement entre idées justes et idées fausses à l'intérieur même de chaque individu - bonjour le matérialisme !

Pour notre part, nous pouvons effectivement considérer cette mise en avant de Losurdo (sans autre commentaire que "c'est un penseur atypique") comme un faux pas ; mais un faux pas qui n'efface en aucun cas l'IMMENSE TRAVAIL de Quartiers Libres pour "dé-dieudonniser" intellectuellement les quartiers populaires tout en restant CLAIRS ET FERMES sur les sujets où l'absence de clarté et de fermeté a (justement) fait le terreau de Dieudonné, à commencer par la Palestine ; ce qui leur vaut évidemment la haine féroce des tenants (y compris d'"extrême-gauche") de l'alternative "reconnaître la légitimité d'Israël ou être un antisémite soralien"...

[PS 2 - Rebelote quelques mois plus tard, à plus grande échelle encore, avec cet excellent article : https://quartierslibres.wordpress.com/2015/04/27/problemes-dorientation-chez-les-chasseurs-de-confusionnistes/]


Peut-être le "mot de la fin" (commentaire sur FB) :

Pour dire les choses clairement : ce que vous appelez "confusionnisme" ne peut tout simplement pas être appréhendé, et encore moins combattu sans notions de dialectique marxiste.

Parce que ce que vous appelez "confusionnisme" c'est tout simplement l'expression des CONTRADICTIONS qui traversent CHAQUE INDIVIDU comme elles traversent toute la société, entre idées progressistes/révolutionnaires et idées réactionnaires, influence des idées d'avenir (le communisme, vers lequel doit aller l'humanité) et aliénation du peuple par les dominants (détenteurs des moyens de "faire l'opinion"... au service de la préservation de leurs intérêts).

Tout(e) un(e) chacun(e) est traversé(e) par ça !! Pas seulement les organisations politiques - les marxistes-léninistes/maoïstes (enfin, plus les maoïstes que les ML quand même lol) avec leur "lutte de lignes", les trotskystes avec leurs "tendances", les anars avec leurs "sensibilités", et même les partis bourgeois avec leurs "courants" (mais bon eux on s'en fout un peu, ce sont toujours les points de vue contre-révolutionnaires qui dominent). Les individus aussi.

Alors après, qu'il y en ait qui fassent "COMMERCE" de la "confusion", cela oui on peut l'admettre. Mais même ces gens-là (comme Pierre Rabhi, au hasard) peuvent aussi être "sincères" : persuadés d'avoir trouvé "la voie de la vérité", prêchant celle-ci et contents de voir que plein de gens (tout aussi confus qu'eux dans leurs têtes) les reconnaissent comme les "génies" qu'ils "sont". Puisque "ça marche", c'est donc la "preuve" qu'ils ont "raison"... Qui ne profiterait pas de l'occasion de faire ainsi son beurre, ou même simplement de se sentir "famous" s'il en avait ainsi la possibilité ? Très peu de gens en vérité - peut-être les vrais révolutionnaires qui ont appris à "penser collectif"... et encore, cet apprentissage est-il vraiment parfait et chez tout le monde ? Pas sûr, lorsque l'on voit comment certains défendent "leur" "boutique" politique ! Les "marchands" d'idées confusionnistes existent... parce qu'il existe un "marché" pour ces idées !

Donc en réalité, la seule vraie lutte contre le confusionnisme... c'est de dégager, définir, élaborer et compiler les idées justes/progressistes (celles qui vont vers l'émancipation, vers le communisme), grâce à l'outil scientifique qu'est le marxisme, et de les diffuser, de mener la bataille pour elles (et d'identifier, combattre et écraser les idées fausses/réactionnaires). Lutter pour que la contradiction interne à chaque personne que l'on rencontre se résolve en faveur d'une conscience progressiste/révolutionnaire ; ce que Gramsci appelle la "bataille d'hégémonie"... et faire ainsi disparaître l'"offre" confusionniste par disparition de la demande, tout simplement !

"Traquer" le "confusionnisme" d'untel ou untel ne sert strictement à rien : vous ne faites, dans le cas des "penseurs", que mettre à jour leur "offre"... qui est précisément ce que des gens demandent ; et dans le cas de tartempion, mettre à jour une "demande" de réponses sans y apporter les BONNES (réponses), face à une offre de MAUVAISES que l'on sait colossale. Ceci pour ne parler que d'une traque "propre", en laissant de côté les procédés à vomir...

 

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31 juillet 2014 4 31 /07 /juillet /2014 08:40

 

0 Pal2Pourquoi la question palestinienne soulève-t-elle tant de passions dans "notre" État français ? Le moins que l'on puisse dire est que ces dernières semaines, avec l'"exécution électronique" de deux comptes Facebook successifs, nous ont plus que donné l'occasion de nous pencher sur la question.

Nous aurions pu alors tomber dans la même erreur qu'un Dieudonné M'Bala M'Bala et des milliers d'autres avec lui : considérer que c'est là la main d'un "lobby sioniste" qui se serait "emparé de la République" et qui serait le "vrai fascisme", et de là sombrer dans les tréfonds du délire antisémite. Mais nous avons réfléchi et nous en sommes arrivés à une toute autre conclusion. Nous en sommes arrivés à la conclusion que le problème avec la question du sionisme et de la Palestine c'est qu'elle ne touche justement pas qu'au sionisme, à l'État d'Israël ni à la fraction fana-israélienne de la bourgeoisie hexagonale (le "lobby sioniste" ou "crifiste" selon Dieudonné et consorts), qu'elle ne touche pas seulement à l'actuelle montée du fascisme (dont il "faudrait" débattre pendant des heures si la menace est principalement pro-sioniste ou "antisioniste"), mais qu'elle touche l'Occident impérialiste dans ce qu'il a de plus profond, dans sa nature impérialiste et colonisatrice même et quelle que soit la forme de gouvernement, y compris "démocratique" et pas seulement "fasciste" (mutation réactionnaire ultra, terroriste) ; bref, dans le centre légitime de sa conception du monde. On n'insistera jamais assez : le centre légitime des idéologies guidant l’État sioniste se trouve en "Occident chrétien" (Europe et Amérique du Nord) et non l'inverse (ce seraient Israël et/ou un fantasmagorique "talmudisme international" qui "dirigeraient" ce dernier). De ce "centre légitime", les Juifs (bien avant le 20e siècle et la Shoah) ont longtemps été plutôt les victimes ; avant que les "Lumières" (surtout pour des couches relativement bourgeoises et des communautés de petite taille comme en "France") puis (surtout) le sionisme ne les y "intègre" (le nazisme ayant "au passage" exterminé la moitié des Juifs d'Europe).

palestine_couppourcoup.jpgL'Occident impérialiste... et en particulier l’État impérialiste dénommé "France". Car il est possible de dire en réalité que le sionisme comme idéologie, bien que fondé par des Européens de l'Est (Yehoshua Stampfer de Hongrie, Léon Pinsker d'Odessa, Theodor Herzl de Budapest), est "fils de France" - une idéologie colonialiste profondément française.

Le sionisme originel est un pur produit idéologique de la France des vingt dernières années du XIXe siècle, elle-même aboutissement de siècles de construction par la conquête et la négation des Peuples (transformés en force de valorisation du Capital dont le sommet de la pyramide se trouve à Paris) ; la France de la IIIe République bourgeoise née sur les cendres des Communes, de l'expansion coloniale "universaliste" et "civilisatrice" et de l'affaire Dreyfus, cette affaire de "trahison" militaire et d'erreur judiciaire frappant un officier juif innocent, qui voit ressurgir avec une rare virulence la "question juive" plus d'un siècle après que la révolution bourgeoise leur ait accordé (non sans hésitations et virulents débats) l'égalité civile (1791).

De fait, l'idée sioniste apparaît légèrement avant l'affaire (fin des années 1870) mais dans un contexte d'antisémitisme (hexagonal et continental) déjà lourd de celle-ci [certaines sources (y compris des sionistes eux-mêmes) font même remonter l'idée d'un retour juif en Palestine à la "révolution" bourgeoise anglaise de Cromwell  au milieu du 17e siècle (pour les Puritains anglais le rassemblement du "Peuple d'Israël" sur la terre de Sion aurait été le signal déclencheur du retour du Christ - première venue du Messie pour les Juifs - et des "Derniers Temps"), mais des sources plus sérieuses semblent plutôt indiquer le contraire : Cromwell aurait au contraire favorisé l'installation des Juifs en Angleterre et donc leur dispersion, vue comme la condition (et non le rassemblement en Palestine) du retour christique - l'idée que les Juifs doivent être rassemblés en Palestine pour le retour du Christ est cependant (aujourd'hui) l'un des arguments des fondamentalistes protestants anglo-saxons pour soutenir le sionisme, mais cela n'a été que très peu significatif jusqu'aux années 1980 et n'a donc certainement joué aucun rôle dans la genèse du phénomène] [il y a également une rumeur, aux sources mal étayées et peu sûres, d'un "appel" de Napoléon Bonaparte en ce sens en 1799 : http://www.kountrass.com/napoleon-erets-israel-lappel-aux-juifs/].

Le mouvement des Amants de Sion, créé en Russie et financé (notamment) par quelques grands bourgeois juifs de l'État français comme Edmond de Rotschild, organise l'implantation des premières colonies juives européennes en Palestine (Petah Tikva, Rishon LeZion etc.). La question d'un "État juif" ne semble toutefois pas très claire à cette époque ; il semble plutôt être question d'implantations en mode "phalanstères" fouriéristes et surtout, via le judaïsme et son attachement à la "Terre promise" biblique, d'établir petit à petit une sorte de protectorat sur cette province ottomane qu'est alors la Palestine comme l'avait déjà fait (via les chrétiens maronites) Napoléon III au Liban [cela apparaît nettement dans les clauses additionnelles du Congrès de Berlin consacré à l'Empire ottoman vaincu par la Russie en 1878 (année même de la fondation de la première colonie) : l'Angleterre - déjà - tend à se poser en protectrice des Juifs (autochtones... et sionistes), la France est "confirmée" sur les maronites libanais et la Russie sur les Arméniens, les Grecs et les orthodoxes en général]. L'esprit est au tout départ Herzl.stamp.JPEG(avec Stampfer et les premiers Amants) assez mystico-religieux, puis les conceptions sécularistes et modernistes s'imposent vers 1890 - en partie sans doute sous l'influence des financements français.

Mais c'est réellement le procès du capitaine Dreyfus et le déchaînement antisémite vs "philo"sémite qu'il déclenche qui vont agir en "révélation" sur le jeune journaliste austro-hongrois Theodor Herzl ; une "révélation" qui a le "mérite" de concilier les deux positions : les Juifs doivent être respectés et traités comme des êtres humains à part entière, MAIS cela n'est pas réalisable en Europe, en tout cas sans un État à eux (permettant de se réaliser comme nation à part entière) qui ne peut exister qu'hors d'Europe, où les Juifs seront toujours un "corps étranger". Une fois l'idéologie sioniste "définitive" synthétisée par lui (l'ouvrage L’État des Juifs est publié en 1896 et l'Organisation sioniste mondiale fondée en Suisse l'année suivante), les pogroms de Russie (années 1900) se chargeront de "fournir" les premières grandes vagues d'émigration (même si l'immense majorité des Juifs ashkénazes de l'époque émigre encore vers l'Europe de l'Ouest et, surtout, l'Amérique du Nord).

On a souvent dit que Herzl et le mouvement sioniste initial avaient envisagé d'autres options que la Palestine pour fonder leur "État juif" ; il semble toutefois que de telles options (si elles ont réellement existé) aient été rapidement abandonnées, seul le mythe biblique de la "Terre promise" palestinienne pouvant assurer une mobilisation et (donc) une émigration suffisante (bien que marginale, on le répète, au sein de l'émigration juive d'Europe de l'Est).

Et puis bien sûr, en se "réalisant" comme "nation à part entière" hors d'Europe, le Juif idéal de Herzl devait se "réaliser" bien sûr comme colon, comme "pionnier"... idée qui avait plutôt le vent en poupe à une époque où les puissances européennes se partageaient la dépouille du vieil Empire ottoman (où commençait déjà à flotter l'odeur du pétrole) : il était évident que le mouvement sioniste apporterait de jolis dividendes à quiconque saurait intelligemment investir dedans.

Kibboutz-un-siecle-pour-batir-Israel_article_popin.jpgLe mouvement sioniste proclame la Palestine "terre sans peuple pour un peuple sans terre" : c'est bien évidemment là de la propagande pour motiver les premiers volontaires parmi les braves habitant-e-s semi-illettré-e-s des shtetl de Mitteleuropa, qui ne se sentent pas forcément l'âme d'un Buffalo Bill affrontant les Comanches. Les premières terres ont été achetées à l'Empire ottoman près de 20 ans auparavant et il est impensable qu'un journaliste éduqué et globe-trotter comme Herzl croie réellement la Palestine "sans peuple". Très vite, dans tous les cas, tout le monde sait que la Palestine est peuplée et même très peuplée, d'une population sédentaire sur une terre relativement fertile pour la région ; bref qu'elle n'est nullement un "désert à Bédouins". Peu importe pour Herzl et ses compagnons : ils parleront alors de "les inviter à aller s'installer plus loin" - on connaît la suite. Et puis surtout naît le grand argument-massue : les sionistes font "fleurir le désert" ! Ne vous semble-t-il pas avoir déjà entendu quelque chose dans la même veine, du genre "ces Arabes ils se plaignent mais ils sont bien gentils : avant nous il n'y avait rien dans leur pays, quatre chèvres, trois ânes, des gourbis autour d'un puits, des chemins caillouteux, pas une route, pas un canal d'irrigation, pas un immeuble en dur, rien" ? Mais oui bien sûr : des francouillasses parlant de l'Afrique du Nord, comme un certain Alain Soral par exemple [1] !!! La filiation idéologique est ici totale.

TelAviv-paam4.jpgPour mobiliser les masses populaires ashkénazes qui sont le grand "réservoir" de candidats à l'alyah, l'idéologie sioniste (plutôt "républicaine" à la française au départ) se mâtine d'idées "progressistes" et même "socialistes" alors très répandues au sein de ces populations ; elle vend la colonisation sous un emballage collectiviste et phalanstérien (les fameux kibboutzim) sans oublier la sacro-sainte "Marche du Progrès". Ces idées sont extrêmement présentes, pour ne pas dire hégémoniques dans toute la phase précédant la création de l’État et même par la suite ; ainsi (par exemple) les héroïques résistants du ghetto de Varsovie sont très majoritairement bundistes mais comptent aussi une très importante minorité sioniste de gauche, plus importante peut-être que la minorité marxiste-léniniste. Parmi les premiers sionistes, certains se proclament même... "anarcho-communistes" comme Joseph Trumpeldor, qui meurt au combat en 1920 contre des insurgés druzes et dont se réclamera par la suite... le Betar. Voilà quelque chose que les "anti-antisionistes" d'"extrême-gauche" ne manquent jamais une occasion de rappeler, et pour cause : ce sionisme "socialiste" ou même "anarchiste" est la démonstration par A + B que la "gauche" et même l'"extrême-gauche" en Europe n'ont jamais été incompatibles avec le colonialisme et le suprématisme "civilisé", bien au contraire ! [de fait c'est seulement le maoïsme et le marxisme-léninisme des Hô Chi Minh, Guevara ou Cabral qui commenceront à marquer la vraie rupture avec cela, jusqu'à théoriser que la Révolution mondiale avait plutôt vocation (au contraire) à se déployer depuis le "tiers-monde" vers les pays impérialistes ; ce que nous avons ensuite systématisé au niveau de chaque État, de chaque continent et de la planète entière comme un déploiement de la lutte révolutionnaire depuis les Périphéries vers les Centres - ce dont le trotskysme "orthodoxe" est par exemple l'antithèse absolue].

Par la suite, l'impérialisme britannique ayant assumé l'essentiel de l'effort de guerre pour conquérir le Machrek sur l'Empire ottoman (et ayant obtenu le "mandat" sur la Palestine), c'est surtout lui (déclaration Balfour etc.) qui va "porter" le mouvement sioniste dans la phase d'entre-deux-guerres qui jette les bases du futur État ; non sans contradictions cependant, l'alliée première ayant tout de même été l'aristocratie arabe (qu'il faut continuer à ménager, surtout que les premières révoltes éclatent dès 1920).

Ces contradictions explosent à la veille et surtout à l'issue de la Seconde Guerre mondiale, avec une véritable guerre contre les Anglais qui voit tomber quelques 338 soldats de Sa Majesté. C'est donc contraint et forcé que l'Empire britannique remet en 1947 son mandat sur la Palestine aux Nations Unies, qui décident alors de la fameuse partition entre un État juif et un État arabe. Il fournira même, dans la guerre qui suivra contre les Palestiniens et les États arabes voisins, l'un de leurs meilleurs stratèges militaires à ces derniers : John Bagot Glubb dit "Glubb Pacha"... Celui-ci ne parviendra cependant pas à empêcher la victoire sioniste et la tragédie de tout un peuple : la Nakba, nettoyage ethnique de près de 800.000 Palestiniens ponctué par des milliers d'assassinats racistes pour "décider les indécis".

colonisation sioniste palestine

Londres, qui s'était abstenue lors du vote du premier plan de partage, se rallie alors bon gré mal gré au nouvel État contre le nationalisme arabe qui menace le Canal de Suez... aux côtés de l'impérialisme BBR version IVe République, qui avait quant à lui voté pour et dont le nationalisme arabe menace les colonies du Maghreb. On peut d'ailleurs s'interroger sur son rôle dans l'émigration massive vers Israël des Juifs du Maroc et de Tunisie, pays qu'il contrôlait alors et dont c'était un moyen (comme un autre) de nuire à la toute proche et inéluctable indépendance. Puis, comme chacun-e le sait, avec De Gaulle la France prendra quelque peu ses distances au moment de la Guerre des Six-Jours et l'impérialisme US prendra le relais comme grand (et quasi indispensable) tuteur de l'entité sioniste.

Pour autant, la filiation idéologique totale du sionisme avec l'idéologie française, républicarde bourgeoise à la fois dreyfusarde et anti-dreyfusarde et (surtout) coloniale "civilisatrice" et "universaliste" explique le caractère passionné que prend la question palestinienne en Hexagone. Nous allons montrer ici comment le fait d'être (pardonnez-nous mais il faut employer les mots) un con de Français s'exprime dans le soutien à l'État d'Israël, ou du moins dans le rejet de la mobilisation pro-palestinienne, mais aussi hélas dans le soutien à celle-ci. 

interdiction-des-manifestations-pro-palestiniennes-il-ne-pe.jpgIl y a celles et ceux qui (1), d'héritage plutôt dreyfusard et jules-ferryen, soutiennent le sionisme pour toutes les raisons que nous venons de voir : "universalisme" impérial "civilisateur" et triomphe des "Lumières" sur la "barbarie", républicanisme bourgeois colonial et même "gauche-coloniale" car il faut bien dire les choses : la question du sionisme touche beaucoup plus profondément, dans son "cœur" idéologique, la "gauche" bourgeoise BBR que la droite (qui a finalement une approche plus "pragmatique" qu'autre chose, à l'exception de la droite bourgeoise juive bien entendu). Sur cette "vieille histoire" du soutien de la "gauche" tricolore au sionisme et plus largement de sa position "universaliste impériale" sur le colonialisme, il faut lire l'article de l'OCML-VP : "Une vieille histoire - le PS et le soutien inconditionnel à Israël". Mais il y aussi celles et ceux qui (2), d'héritage plutôt anti-dreyfusard (n'aimant pas les Juifs et leur fantasmé "pouvoir occulte"), voient néanmoins dans la défense d'Israël une défense de l'Occident et (surtout) une "revanche" par procuration sur le nationalisme arabe (qu'il soit "laïc" ou, comme aujourd'hui, principalement religieux) qui leur a donné du fil à retordre en Afrique du Nord - énormément d'anciens pétainistes étaient dans ce cas. Dans tous les cas, même si l'on est pas un "fan" inconditionnel du sionisme et d'Israël, cette irruption "sauvage" d'affirmations "indigènes" et "tiers-mondistes" dans la rue est tout simplement le "comble de l'inadmissible" (au "mieux" signifiera-t-on aux ultra-sionistes de ne pas "en rajouter" avec leurs provocations). Tout cela va donner le camp pro-israélien - ou, en tout cas, "anti-antisioniste".

Et puis il y a celles et ceux qui (3), d'héritage anti-dreyfusard, refusent catégoriquement le "compromis" de Herzl et l'existence d'un État pour les Juifs (qui ne peut être selon eux qu'une "base" pour leurs "plans de domination mondiale") et préfèrent encore soutenir les Arabes de Palestine et du Proche-Orient (à l'appui de cela peut venir la présence de nombreux chrétiens et des lieux "saints" de la chrétienté dans la région, ainsi que la forte et étroite alliance entre Israël et l'impérialisme rival US, dans un esprit "gaulliste"). Ils ne perçoivent pas l'intérêt de ce pion stratégique pour la "civilisation occidentale" sur l'échiquier mondial. Il faut dire qu'à la droite de la droite il y a toujours eu des grincheux, comme ces nationalistes qui (à l'époque même où naissait le sionisme) ne comprenaient pas que Jules Ferry et consorts aillent "civiliser" l'Afrique en "échange" de ses richesses, plutôt que de reconquérir l'Alsace et la Moselle.

4010807_gaza-manif.jpgOu encore il y a celles et ceux qui (4), plutôt d'héritage dreyfusard en principe, transfigurent sur le conflit du Proche-Orient leur mauvaise conscience vis-à-vis du passé colonial... et du présent néo-colonial de l’État français ; choses sur lesquelles la "gauche" (y compris "radicale" !) a été à l'époque... et reste aujourd'hui encore plus minoritairement claire que sur la Palestine - il faut dire que la "projection anticoloniale" sur cette dernière ne mange guère de pain, puisque ce n'est pas l'impérialisme BBR qui opprime ou alors de manière très indirecte et avec les "condamnations" de circonstance qui vont bien. Bien sûr, il y a aussi en Hexagone une mauvaise conscience par rapport au passé antisémite et notamment au régime de Vichy, lorsque l'on sait que celui-ci a envoyé à la mort plus de Juifs que l'Italie alliée d'Hitler ou le Danemark lui aussi totalement occupé et que des rafles eurent même lieu à l'été 1942 en zone dite "libre", c'est-à-dire sans la présence ni la pression du moindre uniforme allemand (cas unique en Europe) ; mais cette mauvaise conscience peut aussi être contournée en présentant les Israéliens en "nouveaux nazis" et les Palestiniens en "nouveaux juifs" (compréhension ridiculement exagérée du problème qui n'aide donc nullement à penser correctement la solution).

Il est également possible (5), dans un esprit dreyfusard, d'être antisioniste en disant (ce qui n'est pas complètement faux) que le sionisme reprend les postulats antisémites d'inassimilabilité et de séparation des Juifs, et de prôner contre cela "l'intégration des Juifs dans la République", le refus de "tous les communautarismes y compris juif" (en pointant du doigt l'important phénomène de binationalité franco-israélienne, des réservistes de Tsahal etc. etc.) voire un supposé "deux poids deux mesures dans la dénonciation du communautarisme" (ce qui supposerait que "les Juifs ont de l'influence"). Ce n'est pas un courant intellectuel si marginal que cela... puisque ce n'était ni plus ni moins que la position de Dieudonné au début des années 2000, avant son sketch chez Fogiel et sa rencontre avec Soral (clairement, quant à lui, sur la position 3). C'est aussi la base de la position "ni-ni" (ni pro-sioniste ni pro-palestinien) que l'on va retrouver dans toute la gauche "radicale" et l'"extrême-gauche" libertaire comme marxiste, pour qui la question ici comme là-bas va se résumer à un affrontement de "communautarismes" et de "nationalismes religieux" face auxquels il faut prôner qui le "vivre-ensemble citoyen", qui la "fraternité des travailleurs".

BtAh7vGIgAE4Ky4.jpg-large.jpgIl y a les populations colonisées intérieures de l'entité "France" (6) qui se considèrent quant à elles, non sans arguments valables, exemptées de la culpabilité européenne vis-à-vis des Juifs et qui voient elles aussi dans la Palestine un "match retour" des luttes anticoloniales de leurs propres pays d'origine, dans lesquelles leurs aïeux ont beaucoup souffert pour des "indépendances" largement mutilées voire complètement bidon - néocolonialisme dont leur présence en Hexagone (dans le racisme, l'exclusion économique et le traitement sécuritaire et "social" d'exception) est d'ailleurs l'une des conséquences. Cette "projection" est très compréhensible d'un point de vue historique, mais néanmoins pétrie de grandes ambigüités. Ainsi, elle a souvent pour conséquence d'"éviter" la mise en cause des responsables locaux de la mutilation de l'indépendance : les bourgeoisies bureaucratiques-compradores et les castes politico-militaires vendues ; ou en tout cas de "déconnecter" la question palestinienne de cette mise en cause alors que les deux font pourtant partie de la même réalité : l'impérialisme post-1945, postérieur aux grands empires coloniaux ; ce qui revient dans tous les cas à "redorer le blason" de ces classes dominantes néocoloniales. Le discours va souvent relayer celui de ce "nationalisme" bourgeois (tant "laïc" que religieux, on n'insistera jamais assez) devenu oligarchie vendue ou qui le deviendra aussitôt pris le pouvoir ; jusque dans sa compréhension fantasmée des choses confinant à l'antisémitisme (sionisme "maître" de l'Occident et non l'inverse, etc.) : nous savons tou-te-s que la bourgeoisie, même "nationaliste" dans des pays dominés, est incapable d'une compréhension correcte des choses, incapable d'une analyse en termes marxistes (les seuls corrects) et ne peut donc que répondre par le fantasme et l'élucubration aux questions posées par la réalité. Les bourgeoisies "nationalistes" qui irriguent idéologiquement le sentiment pro-palestinien des colonies intérieures hexagonales sont incapables de poser le problème en termes de sionisme = "chien d'attaque" que l'Occident lâche et retient en fonction et seulement en fonction de ses intérêts. Elles vont le poser en termes de "l'Occident doit cesser de soutenir Israël et nous accorder ses faveurs" et donc "l'Occident doit se libérer de l'influence du lobby sioniste", ce qui glisse inévitablement vers l'antisémitisme ("Protocoles des Sages de Sion" largement diffusés par d'anciens nazis dans les pays arabes). À l'inverse, une authentique Guerre de Libération du Peuple n'attend aucune "faveur" de l'impérialisme et le combat dans toutes ses manifestations, soutien à Israël comme soutien aux régimes arabes et autres "processus de paix"/"solutions négociées"/"transitions démocratiques". Elle sait que dans le Machrek arabe les prolétaires israélien-ne-s, pour être actuellement sous un uniforme ennemi, ont vocation à faire à terme partie de la solution contre leur paris-lors-d-une-manifestation-en-soutien.jpgpropre bourgeoisie sioniste ("effondrement du front intérieur"), et non indéfiniment partie du problème. C'est la différence, finalement, entre être un concurrent du sionisme (pour les "faveurs" de l'impérialisme et/ou le contrôle des forces productives palestiniennes) et être son ennemi - le combattre comme bras armé de l'impérialisme en Palestine et dans les pays alentours.

Tout cela forme, malheureusement, une grande partie du camp pro-palestinien dans lequel, ne nous voilons pas la face, l'internationalisme authentique sur une base révolutionnaire prolétarienne (anticapitaliste) reste une minorité, d'autant plus que sa base s'est élargie (qu'était-ce que le camp pro-palestinien en 1980 ?) à mesure que le mouvement communiste (au niveau planétaire) reculait.

On ne connaît que trop bien (hélas) la "puissance de feu" intellectuelle des sites soraloïdes, conspirationnistes à la Thierry Meyssan & co ou néo-gaullistes (sur l'"anti-impérialisme" gaulliste voir ici et ici...) dès lors qu'il est question de la Palestine sur le devant de l'actualité, sites souvent relayés en toute bonne foi par des progressistes sincères ; mais ceci est aussi la conséquence d'une "gauche" et d'une "extrême-gauche" INCAPABLES (par "universalisme" gauche-coloniale et "anticléricalisme des imbéciles" anti-musulman) d'avoir une position claire et nette et non dégoulinante de paternalisme sur le sujet en direction des masses populaires qui se sentent concernées, position que les antisémites et autres défenseurs de l'impérialisme français ou russe feignent alors d'assumer : il est tout simplement hallucinant que des informations relayées le plus tranquillement du monde par la presse bourgeoise anglo-saxonne ne se trouvent ici QUE sur ce genre de sites (ou des sites liés à l'islam politique), qui déforment bien sûr les choses "à leur sauce" dans un silence radio assourdissant du web progressiste et "révolutionnaire".

Nous avons en tout cas là, du "côté" d'Israël comme de celui des Palestiniens (à l'exception des colonies intérieures que nous venons de voir, et encore, non sans passerelles), autant de dérivés de la même matrice idéologique bleu-blanc-rouge elle-même expression idéologique du règne des monopoles ; monopoles BBR dont l'intérêt dans l'absolu (et la position le plus souvent) est de ménager la chèvre et le chou au Proche-Orient tout en combattant vigoureusement "l'importation du conflit" en Hexagone - "importation" qui n'est pas dangereuse par rapport à ce qu'il se passe là-bas, mais par rapport aux questions et contradictions qu'elle risque de mettre à nu ici.

201407161648-full.jpgLa question palestinienne en "France" fait d'autant plus de bruit qu'il est difficile d'y faire entendre la position internationaliste prolétarienne, celle du mouvement communiste lorsqu'il était fort : le sionisme est une création bourgeoise longtemps rejetée (d'ailleurs) par l'immense majorité du prolétariat juif organisé ; il est devenu à partir de la Première Guerre mondiale (déclaration Balfour) un instrument de l'impérialisme au Proche-Orient et ce rôle s'est renforcé à mesure que, sous la pression des luttes de libération, l'impérialisme a dû accorder l'indépendance formelle aux pays arabes ; le résultat d'un siècle d'activité sioniste concrète est une situation coloniale de type apartheid où le colon (venu d'un peu partout, mais la composante européenne est dominante) et l'indigène (arabe palestinien) forment deux sociétés distinctes avec des droits distincts, ainsi que le "nettoyage" ethnique de près de 800.000 personnes entre 1947 et 1950 et encore 300.000 en 1967, desquelles descendent près de 5 millions de réfugiés entassés dans des camps (devenus de grands bidonvilles) dans tous les pays de la région [2] ; et cela aucune personne s'affirmant communiste et/ou révolutionnaire ne peut l'accepter et une lutte révolutionnaire doit le balayer, ce qui débouchera sur une Palestine réunifiée dont tous les habitants de la Méditerranée au Jourdain seront égaux (en droit ce serait déjà bien et socialement, encore mieux !).

Nous soutenons la lutte des Palestiniens pour leur dignité et leur libération parce que nous sommes des prolétaires, des personnes de classe populaire et que notre "bon sens" (cf. Gramsci) nous dit, tout simplement, que nous n'aimerions pas être ne serait-ce qu'une semaine à leur place ; et lorsque nous poussons la réflexion un peu plus loin, nous nous rendons compte que leur tragédie ressemble à celle de nos ancêtres (que l'on soit d'Hexagone, d'origine immigrée européenne ou d'outre-mer) tout simplement parce qu'elle consiste en le même phénomène très simple : une bourgeoisie capitaliste qui à l'aide de divers agents (fussent-ils eux aussi de pauvres bougres) se taille un territoire comme base d'accumulation dont elle exploitera les forces productives et/ou la force de travail humaine... Et les braves gens qui l'habitent, ce territoire donné, ils vont se faire foutre ; on les prive de tous leurs moyens de production et reproduction des conditions d'existence, on les réduit en esclavage ou on leur fait "suer le burnous", on les dégage, on les extermine ou un peu de tout cela dans des proportions variables. Selon qui nous sommes, on nous a affiche-22juin3.jpg"juste" transformés en pure force de travail productrice de plus-value et consommatrice de marchandise (pour réaliser ladite plus-value) et on a transformé nos pays en "provinces" (d'où nous sommes ensuite allés grossir les "banlieues" ouvrières) ; ou bien on nous a constatés "barbares" (pré-capitalistes) et épidermiquement trop foncés ce qui méritait bien l'esclavage ou quelque chose de similaire, faisant de nous des colonies ; ou alors on a carrément décrété que nous n'avions rien à faire sur la terre en question, vouée à l'agriculture et à l'industrie "civilisée", et que nous devions en débarrasser le plancher avec nos pieds ou six pieds sous terre (cas des "Indiens" d'Amérique, des "Aborigènes" d'Australie... et d'une bonne partie des Palestiniens). À l'arrivée, sous des formes variées qui font toute la subtilité de la chose, nous avons une société capitaliste dotée d'un État bourgeois. Il y en a (là où le processus est ancien) des monopolistes-impérialistes comme celle où nous vivons en Hexagone et (là où il est plus récent et impulsé de l'extérieur, de là où il était plus ancien) des "semi-coloniales semi-féodales" avec un capitalisme bureaucratique-comprador selon la terminologie maoïste ; mais la logique de base est la même : valorisation du capital par l'exploitation, et quelle que soit notre situation actuelle, à l'endroit du monde où nous nous trouvons et d'où que nous venions, elle en est le résultat. Nous réalisons cela et nous réalisons que derrière notre situation de prolétaires ("blancs" ou colonisés intérieurs) ici et la tragédie des Palestiniens là-bas (où l'on en exploite une partie mais on essaye carrément d'en faire dégager une autre pour mettre des "civilisés" à la place), il y a la même main : non pas "les Juifs" (puisqu'ici ils ont plutôt souffert du processus) mais LES MONOPOLES, le Grand Capital (qui utilise, là-bas, des Juifs comme force de frappe en effet).

C'est en cela que "nous sommes tous des Palestiniens". Et c'est ainsi que nous prônons comme solution, ici comme là-bas, l'expropriation du Capital et la destruction de ses appareils politico-militaires appelés les États, et leur remplacement par la propriété collective des moyens de production, le bénéfice commun et égalitaire de la richesse produite et le Pouvoir du Peuple. Au demeurant, avec la fin de l'oppression coloniale contre les Palestiniens, le prolétariat israélien verrait disparaître le secret de son impuissance [3] - on peut d'ailleurs en dire autant du prolétariat d'Hexagone avec la Françafrique... Mais en attendant, ici, c'est de tout ce que porte ce "nous sommes tous des Palestiniens" que le gouvernement républicain bourgeois, monopoliste et impérialiste veut empêcher à tout prix l'irruption sur la scène publique (en particulier de ce que cela porte pour les colonisé-e-s intérieur-e-s) ; bien plus que d'une contestation de la politique israélienne qui, par définition, ne le concerne pas directement.

2506917997Là-bas, sur le théâtre même des combats, les choses prennent une tournure assez particulière avec une espèce de fuite en avant ultra-nationaliste israélienne, principalement incarnée par le Likoud de Netanyahu et qui prétend se moquer voir se passer de l'appui des Occidentaux (en les envoyant paître), ce qui est évidemment suicidaire - mais une bourgeoisie aux abois a-t-elle encore conscience de ce qui est suicidaire ? Un tel courant a toujours existé : ce sont les éléments ("révisionnistes" de Jabotinsky et Birionim d'Ahiméir, Irgoun, Lehi, bref les ancêtres du Likoud...) qui dès les années 1930 et surtout après-guerre prônaient l'affrontement ouvert avec les Anglais (et assumaient parfois explicitement... leur admiration pour le fascisme italien et même le nazisme allemand !). Mais rien de décisif pour le projet sioniste n'avait jamais été obtenu par eux : c'est le sionisme "respectable", le sionisme "à la Barnavi" en quelque sorte, le sionisme de négociation avec l'impérialisme qui avait jusqu'à présent assuré l'existence de "l’État juif". Et pourtant, c'est ce sionisme "jusqu'au-boutiste" qui semble désormais (clairement) hégémonique en Israël... La société israélienne se polarise : les pacifistes se font tabasser par des hordes d'ultra-nationalistes portant les mêmes vêtements que les fascistes ici, des centaines de personnes vont "admirer" du haut d'une colline le massacre des Gazaouis par les missiles de Tsahal, une députée d'extrême-droite assume des propos génocidaires et le vieux militant anticolonialiste Michel Warschawski affirme avoir aujourd'hui peur pour la première fois depuis 45 ans. Mais dans le même temps, de plus en plus de jeunes refusent de servir dans l'armée et de participer à l'oppression des Palestiniens, ce qui était encore impensable (en tout cas très marginal) il y a encore 20 ou 30 ans - à l'époque, on s'acquittait de ses obligations militaires tout en cherchant à militer "de l'intérieur" pour une armée "morale". Cela leur vaut la prison et l'opprobre pour toute leur vie, voire l'exil (on en retrouve beaucoup, à travers le monde, autour de la culture musicale "transe") et pourtant ils et elles font ce choix. Tout cela s'appelle tout simplement l'explosion d'une société sous ses contradictions.

manifestation-pro-israelienne-a-marseille.jpgQue feront les ultra-nationalistes si, malgré la pression de l'extrême-droite fondamentaliste chrétienne, l'impérialisme US se lasse d'eux ? Il existe peut-être autour du fasciste Avigdor Lieberman, allié de Netanyahu venu de Moldavie en 1978 et dont le parti Israël Beïtenou mobilise la très importante communauté venue d'ex-URSS, l'option d'un rapprochement avec la Russie. Beaucoup commencent à l'envisager, dans les pas de Lieberman qui en faisait déjà son cheval de bataille lors de la deuxième guerre de Tchétchénie, invoquant la "communauté d'intérêts" contre le "terrorisme islamique". Mais cela obligerait Moscou à un sérieux revirement géopolitique, après des décennies de soutien au nationalisme arabe "socialiste" puis à "l'axe chiite" Iran-Syrie-Hezbollah (+ Hamas jusqu'en 2011), sans être non plus inenvisageable si (par exemple) cet "axe chiite" devait s'effondrer sous l'offensive du djihadisme sunnite (dans lequel les Caucasiens, susceptibles de revenir ensuite frapper la Russie, sont nombreux).

Mais tout cela concerne finalement peu l'Hexagone où la question palestinienne, pour y être d'une force passionnelle rare, existe plus en définitive par ses "projections" symboliques que par ses enjeux réels. De fait on peut pratiquement dire que le sionisme "fils de France" est mort en "Terre promise", ce que déplore même à demi-mots Alain Soral ("avec le sionisme comme projet de Herzl, j'aurais aucun problème") ; en revanche il vit toujours - de manière "fantôme" - en Hexagone, comme "centre" de toute approche politique du problème.

drapeau-djihad-2

[1] "Plus je vois la merde noire (corruption, intégrisme, généraux…) dans laquelle l’Algérie s’enfonce un peu plus chaque jour, plus je découvre en images que les seules choses qui tiennent encore debout là-bas (infrastructures, urbanisme…) sont celles que la France coloniale y a construites, et plus je me dis que leur seul espoir c’est qu’on y retourne." - "Abécédaire de la bêtise humaine", 2002

[2] Et ce quels qu'aient été les idéaux généreux voire "socialistes" dont le sionisme a pu se parer à l'origine et le caractère ultra-opprimé des Juifs quittant l'Europe pour s'installer en "Terre promise" (toutes choses qu'aiment tant mettre en avant ses défenseurs "de gauche" voire "d'extrême-gauche") : de fait, il ne POUVAIT PAS DEVENIR AUTRE CHOSE que ce qu'il est devenu aujourd'hui. Car ce qui compte en dernière analyse, c'est le déséquilibre des forces productives entre l'arrivant et l'autochtone (raison pour laquelle d'ailleurs, n'en déplaise à l'argumentaire des Le Pen et Zemmour et consorts, l'immigration n'est PAS une "colonisation inversée") et non le caractère opprimé de l'arrivant dans son pays d'origine.

Pour nous, Occitans, le fait que des opprimés partis vers une terre lointaine puissent s'y transformer en oppresseurs n'a rien de surréaliste puisque la communauté afrikaner d'Afrique du Sud REGORGE de descendants de huguenots occitans chassés par les persécutions de Louis XIV : le nazi Eugène Terre'Blanche (originaire de Provence), le docteur Malan (un fondateur et idéologue de l'apartheid) ou encore le "Docteur la Mort" Wouter Basson (le Mengele sud-africain...)... C'est sans états d'âme que leurs ancêtres, victimes d'une répression atroce dans leur pays natal pour avoir représenté (l'espace d'un siècle) un intolérable contre-pouvoir occitan face à l'État centralisateur parisien, se transformèrent une fois au pays des "Cafres" en colons impitoyables persuadés de leur "droit divin" (persuadés que la "Divine Providence" leur avait "offert" cette terre...). 

L'on pourrait encore citer l'Australie où la plupart des colons massacreurs d'Aborigènes étaient des sous-prolétaires anglais, irlandais ou écossais déportés là-bas pour avoir enfreint les lois de leurs exploiteurs et (dans le cas des Irlandais, Écossais ou Gallois) de leurs occupants. Et c'est sans même parler du cas (peut-être) le plus sidérant et emblématique : celui des esclaves afro-descendants libérés aux États-Unis et "renvoyés" en Afrique pour y fonder le Libéria, un protectorat colonial (de fait) pour leurs anciens maîtres et tortionnaire, dédié notamment à l'extraction du caoutchouc et où ils formeront la caste dominante de cette "république" proclamée en 1847, privant les autochtones de tout droit civique...

Dans la plupart des colonies "françaises", l'appareil de domination était très largement constitué d'agents issus des Peuples "provincialisés" et périphérisés de "métropole" (Occitans, Corses, Bretons, Basques etc.), presque aussi méprisés (lorsqu'ils "montaient" travailler à Paris) que les immigrés maghrébins ou africains aujourd'hui mais se transformant tout naturellement en "race supérieure civilisatrice" (pour reprendre les mots de Jules Ferry, d'ailleurs lui-même lorrain, Peuple annexé et "provincialisé" à la fin du 18e siècle) lorsqu'ils abordaient les rivages d'Algérie, du Gabon ou du Tonkin.

L'on peut citer à ce titre l'(assez marxisant) historien belge Jacques R. Pauwels, parlant de l'Empire colonial de son pays : "Les gens trop pauvres, on pouvait s’en débarrasser en les envoyant dans les colonies. L’impérialisme était donc aussi une manière de résoudre les problèmes sociaux. Les pauvres pouvaient faire carrière dans ces colonies. De la sorte ils se muaient en patriotes, au lieu de rester des emmerdeurs. En les laissant intervenir de façon agressive dans les colonies, ils ne posaient plus le moindre problème dans la métropole. Il y avait par exemple pas mal de fils de fermiers sans travail, et ce du fait que l’agriculture devenait trop productive. Ces gars, on pouvait les envoyer au Congo comme missionnaires. On a expédié là-bas une vingtaine de missionnaires de chaque bled agricole flamand. On leur a collé un uniforme sur le dos et, dès lors, ils ont pu aller jouer au patron chez les Noirs."

Tout simplement parce que le statut d'opprimé, de relégué, de périphérisé voire pratiquement... de colonisé (Irlandais) du colon dans son pays d'origine est inopérant (à de rares exceptions près) une fois arrivé dans le pays à coloniser : c'est le rapport de force découlant de la possession (ou de la capacité d'appropriation rapide) de forces productives qui détermine la constitution mentale en "race supérieure" et (par conséquent) celle de l'autochtone en "race inférieure" (tout ceci s'enrobant par la suite d'"argumentaire" tant religieux que "scientifique"). Les États "métropoles" puis les Empires capitalistes, en tant que bases d'extraction de plus-value, se sont ainsi construits et développés en cercles concentriques de périphéries autour des Centres du pouvoir bourgeois ; et tant que les masses n'ont pas compris cela, un "cercle" de périphérisation plus proche du Centre peut se montrer (en apparence) plus oppresseur vis-à-vis d'un cercle plus "lointain" que le Centre en question lui-même, qui s'abrite confortablement dans ses tours d'ivoire et délègue les basses besognes.

[3] "L'ouvrier anglais moyen déteste l'ouvrier irlandais en qui il voit un concurrent qui dégrade son niveau de vie. Par rapport à l'ouvrier irlandais, il se sent membre de la nation dominante et devient ainsi un instrument que les aristocrates et capitalistes de son pays utilisent contre l'Irlande. Ce faisant, il renforce leur domination sur lui-même. Il se berce de préjugés religieux, sociaux et nationaux contre les travailleurs irlandais. Il se comporte à peu près comme les blancs pauvres vis-à-vis des nègres dans les anciens États esclavagistes des États-Unis. L'Irlandais lui rend avec intérêt la monnaie de sa pièce. Il voit dans l'ouvrier anglais à la fois un complice et un instrument stupide de la domination anglaise en Irlande.
Cet antagonisme est artificiellement entretenu et développé par la presse, le clergé et les revues satiriques, bref par tous les moyens dont disposent les classes dominantes. Cet antagonisme est le secret de l'impuissance de la classe ouvrière anglaise, malgré son organisation. C'est le secret du maintien au pouvoir de la classe capitaliste, et celle-ci en est parfaitement consciente." - K. Marx dans une lettre à deux socialistes allemands émigrés aux États-Unis (1870)

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28 avril 2014 1 28 /04 /avril /2014 09:20

 

partisans1. Il n'y a rien de pire que l'apathie et la résignation ou (surtout) le légalisme, le respect fanatique de l'ordre établi, des lois, des institutions et des "dépositaires de l'autorité" (en Hexagone l'immense majorité de ce que l'on appelle indistinctement "extrême-droite" ou "fascisme" consiste strictement en cela et si elle est "révoltée", c'est par la perte de ces "valeurs").

Au-delà commence ce que l'on appellera la "conscience révoltée", c'est-à-dire la non-acceptation systématique du monde qui nous entoure.

À partir de là, l'histoire a montré que cette "conscience révoltée" peut suivre différentes directions :

- la "révolution réactionnaire" qui est ce que l'on appelle le fascisme au sens strict ;

- mysticisme, explication ésotérique du monde, millénarisme religieux (auquel on peut rattacher le djihadisme musulman) ;

- réformisme radical : l'ordre des choses est mauvais mais perfectible en "luttant", en "revendiquant", en "faisant entendre sa voix" ; ou alors il est "trop tôt" pour parler de révolution et il faut donc se contenter d'améliorations et de petites "conquêtes" par la lutte, ce qui revient au même ;

- enfin, la conscience révolutionnaire proprement dite : il faut renverser par une lutte radicale l'ordre établi des choses, et en construire un autre plus juste.

Ceci étant bien sûr non exhaustif : il existe encore une multitude de voies moins importantes, ou de dérivatifs des quatre ci-dessus (par exemple, lorsque des listes "associatives militantes" des quartiers populaires s'associent aux centristes de l'UDI contre des municipalités PS ou PC, c'est la même logique réformiste que celle qui a longtemps lié ces milieux associatifs à la gauche bourgeoise, même si dans la plupart des esprits "réformisme" est associé à "social-démocratie", "keynésianisme" etc.) ; et surtout de nuances, de "zones grises" entre elles.

Ce qui revient souvent dans les débats, au sujet de Dieudonné ou autres, et que nous avons déjà maintes fois affirmé, c'est que la première tâche des communistes n'est pas la dénonciation des mille et un bourgeonnements non-communistes, réformistes ou même réactionnaires/fascistes (comme le dieudonnisme), mais la FORTIFICATION DE LEURS PROPRES POSITIONS IDÉOLOGIQUES. Face à un mouvement communiste fort avec une ligne en acier trempé, très peu de réformistes, de mystico-religieux et même de fascistoïdes sont par principe "irrécupérables" - à condition de mener inlassablement le travail d'agitation et de propagande. À l'inverse, une ligne "communiste" aussi erronée qu'arrogante agit en "repoussoir" et va favoriser le bourgeonnement idéologique de démarches "rupturistes" antimarxistes (ou assumant une forte distance avec le marxisme). Par exemple, face à la ligne du PCF de Maurice Thorez sur la question algérienne (du milieu des années 1930 jusqu'à l'indépendance), c'est ce que l'on a observé dans le mouvement de libération nationale de ce pays, où l'hostilité aux idées communistes était forte avec des gens comme Messali Hadj ou Malek Bennabi (et le PC algérien fut très rapidement marginalisé par les nationalistes et le FLN, puis dissous lors de l'indépendance).

Front popCela peut nous amener à nous pencher sur une autre question importante : lorsque l'on parle de Front populaire antifasciste, la première question à se poser (nous semble-t-il) devrait être "où est la social-démocratie, où est la SFIO de notre époque ?".

Eh bien, notre conclusion est que cet équivalent actuel de la SFIO des années 1930, autrement dit le mouvement militant ouvrier-populaire qui ne s'est pas encore suffisamment emparé de la science marxiste... c'est précisément cette "extrême-gauche anarcho-trotskyste" sur laquelle d'aucuns tapent à tour de bras et à longueur d'articles  (à laquelle il faut ajouter les troupes progressistes sincères - et non-chauvinardes - du Front de Gauche ou des Verts et bien sûr les gauches d'affirmation des peuples niés comme Breizhistance etc.), alors que dans le même temps ils prônent l'alliance "antifasciste" ou plutôt anti-Dieudonné (ne disant pas un mot du nouvel manifestation antifasciste"immortel" Finkielkraut par exemple !) avec le PS de Valls quand ce ne sont pas carrément l'UMP et le CRIF toulousains de Moudenc et Yardeni ! Autrement dit avec l'équivalent actuel du Parti radical des années 1930 (quand ce n'est pas carrément de la Fédération républicaine qui donnera à la "Révolution nationale" ses Vallat et Henriot), avec lequel le PC de Thorez s'allia certes, mais ce fut justement la pire erreur qu'il ait commis ! Si "main tendue" à une fraction de la bourgeoisie il devait y avoir, ce serait à la rigueur à la bourgeoisie  démocrate sincère, "libérale" au sens politique, et non républicaine ce qui n'est pas du tout la même chose...

Manifestation-Clement-Meric10Une "extrême-gauche anarcho-trotskyste" présentée comme un ramassis d'"antisémites" et de rouges-bruns "nationalistes révolutionnaires" honteux, une véritable "antichambre du fascisme" alors que Valls et compagnie seraient au contraire des "forteresses des Lumières, de la culture et de la civilisation"... On retrouve notamment cela dans un article de nos "maoïstes" crypto-sionards consacré à Dieudonné, où ils reprennent encore une fois leur vieille thèse (empruntée à leur idole le sioniste Sternhell) selon laquelle le fascisme naîtrait de "la gauche et (de) l'extrême-gauche refusant le matérialisme dialectique" ; thèse évidemment absurde et totalement contraire au matérialisme dialectique en question. Il faut réaffirmer encore une fois les choses haut et fort :

- Que des RÉFORMARDS (car là est le premier postulat erroné : dire que Dieudonné était "d'extrême-gauche" c'est à dire révolutionnaire au début des années 2000, alors que c'était un putain de républicard intégrationniste !) finissent parfois par tomber dans le mobilisation de masse fasciste, c'est une réalité incontestable du moment qu'ils voient bien que cela "ne tourne pas rond", serment1934que "rien ne va plus" mais qu'ils sont intellectuellement incapables d'envisager un véritable renversement révolutionnaire de l'ordre existant ;

- Mais se trouve le CENTRE de la mobilisation réactionnaire en question, qui finit par les attraper dans son orbite ? Le marxisme-léninisme nous l'enseigne : il se trouve dans la fraction la plus réactionnaire, agressive, terroriste, ne "reculant devant aucun crime" du Grand Capital monopoliste. Nullement dans "la gauche et l'extrême-gauche refusant le matérialisme dialectique", même si certains de ses membres peuvent se révéler des proies faciles et même devenir des agents de premier plan de la mobilisation réactionnaire de masse. Mussolini venait en effet du Parti socialiste italien ; mais l'élément déterminant dans son émergence comme tribun politique fasciste n'a pas été cette origine socialiste : cela a été, d'abord, la volonté d'une fraction du Grand Capital italien (et les valises de billets des services français et britanniques...) pour en faire un chef de file de la mobilisation pour l'entrée en guerre de l'Italie aux côtés des Alliés ; puis ensuite les monopolistes, financiers, industriels et autres propriétaires fonciers qui en ont fait leur "homme" dans leur entreprise (à la fois) de modernisation radicale du capitalisme italien et d'écrasement du mouvement révolutionnaire. L'un des buts premiers du fascisme italien était d'"affirmer" l'impérialisme "faible" de cet État bourgeois face aux grandes puissances de l'époque ("France", Angleterre, Allemagne etc.) selon la théorie de la nation prolétaire émise peu avant 1914 par l'ultra-belliciste Enrico Corradini... un homme profondément de droite ! Hitler n'a jamais appartenu d'aucune manière à la gauche allemande, pas plus que Franco à la gauche espagnole etc.

10169283 234461056744161 475018343 nCeux qui auraient pris le Dieudonné de 2000-2002 pour une sorte de Malcolm X "à la française" et le voient aujourd'hui frayer avec les Le Pen, Gollnisch et autres Ayoub ne comprennent pas ce qu'il leur arrive ; mais c'est tout simplement qu'il n'ont pas compris quel "républicain" idéaliste petit-bourgeois était en réalité Dieudonné à cette époque, alors que cela transparaissait pourtant clairement dans un débat de 2005 (au tout début de son "partage en vrille") avec l'"indigène" Pierre Tevanian : "le corps sain c'est l'utopie, pas la République dans laquelle nous vivons. Moi, je vous parle d'un projet qui n'a jamais été réalisé, d'une utopie qui est aujourd'hui vérolée par le sionisme" ; "Vous me voyez comme un homme noir mais je ne suis ni noir ni blanc, je n'ai pas de communauté. Pour moi il y a une utopie républicaine et je n'ai pas d'autre projet que cette utopie" ; "Le corps sain, c'est l'utopie : on va à l'école, on travaille, on paye nos impôts, etc. Moi je n'ai pas de communauté autre que ce projet. Qu'est-ce que vous voulez que je fasse ? Que je donne du fric aux Noirs, aux Arabes ? Non, moi je sers, je travaille pour un projet qui est la République. Je ne sais pas ce que c'est mais, en tout cas, si je n'y crois plus, c'est la guerre civile, donc j'y crois", etc. etc. Ce qu'il s'est simplement passé, c'est qu'à cette "utopie républicaine" Dieudonné est allé chercher un "ennemi intérieur" dans "les sionistes du CRIF" là où l'immense majorité des républicards à la Finkielkraut allaient le trouver dans le "musulman-racaille-allogène-inassimilable". Il n'a pas fait le choix mainstream et il l'a payé chèrement, mais il a également fini par en profiter car, en tant que "fausse alternative antisystème" (alternative pourrie), il trouve lui aussi toute sa place dans le dispositif de fascisation rampante actuellement à l'œuvre.

6fev3412Il n'en allait pas différemment dans les années 1930... Doriot est un cas assez particulier : exclu du Parti communiste en juin 1934 pour avoir prôné... le Front populaire qui allait être adopté comme ligne officielle quelques mois plus tard, il s'est vendu au plus offrant (Banque Worms de Gabriel Le Roy Ladurie) pour rester une figure politique "importante" et donner naissance à une sorte de "parti ouvrier anticommuniste". Mais des cas comme ceux de Louis Sellier, de Ludovic-Oscar Frossard (premier secrétaire du PC de 1921 à 1923) ou encore du Parti ouvrier et paysan français constitué par les anciens parlementaires communistes passés à la "Révolution nationale" ne prouvent rien d'autre... que ce que nous affirmons depuis des années : le régime de Vichy avait une base politique et sociale beaucoup plus large que les seules "ligues factieuses" fascisantes des années 30 (dont beaucoup de membre passeront d'ailleurs à la "France libre" dès 1940 !), et cette base socio-politique était tout simplement L’IDÉOLOGIE RÉPUBLICAINE bleu-blanc-rouge, incluant le "socialisme républicain français". Quant au syndicalisme révolutionnaire, dont il faut tout de même rappeler que l'immense majorité sera antifasciste jusqu'au bout (c'est-à-dire dans bien des cas jusqu'à la mort), s'il a engendré des fascistes comme Georges Valois ce n'est pas en tant que syndicalisme révolutionnaire, mais bien en tant que "socialisme" sans-culotte républicard... Forcément, lorsque l'on a pour modèle une "expérience révolutionnaire" (1793-94) qui s'est finalement révélée être un vaste enfumage, mobilisant (en l'occurrence) le "petit peuple" au service de la grande bourgeoisie pré-monopoliste parisienne contre la bourgeoisie moyenne de "province", il ne faut pas s'étonner de se retrouver 150 ans (ou 220 ans, aujourd'hui) plus tard dans le même cas de figure : servir le Grand Capital au nom de la "révolution" [la référence à (17)"93" était au demeurant directement assumée par le Rassemblement national populaire (RNP) de Marcel Déat, comme... "préfiguration du national-socialisme"] !

Printemps-Francais-LOLIl faut encore une fois réaffirmer les choses clairement : le nazisme en Allemagne reposait TOTALEMENT sur l'idéologie "allemande" présidant à l’État impérial depuis sa fondation dans les années 1860-70 : pensée völkisch, pangermanisme etc. ; idéologie simplement "rehaussée" de "socialisme national" pour faire contrepoids aux très puissants mouvements social-démocrate et communiste. En "France" l'idéologie dominante de l’État est l'idéologie républicaine (ou plutôt bonapartiste sans Bonaparte) et il n'y a pas de fascisme sans qu'une fraction majoritaire de cette idéologie passe sur cette option.

C'est la France comme système qui (lorsque les circonstances le réclament) abandonne la pseudo-"démocratie" et devient ouvertement fasciste ; et non le fascisme comme force "extérieure" et "révolutionnaire" qui "prend d'assaut" le système-France pour lui imposer sa loi.

La fascisation est un dispositif qui, de manière non réellement pensée ni coordonnée, se met petit à petit en place ; car l'histoire montre que lorsque l'affrontement entre révolution et contre-révolution est à l'ordre du jour (par les circonstances objectives et l'existence de deux centres de mobilisation révolutionnaire et réactionnaire se faisant face), tous les faits et gestes jusqu'aux plus minimes et moins conscients ou coordonnés se "goupillent", se combinent dans un dispositif concourant à l'accomplissement de l'un ou de l'autre (et aujourd'hui c'est l'option contre-révolutionnaire brutale qui est intellectuellement hégémonique). Les fausses "alternatives antisystème" à la Dieudonné-Soral font partie du dispositif de fascisation, dans lequel prennent place aussi bien les "partis du système" ("UMPS") qu'ils dénoncent que les "extrêmes" (FN et "gauche antilibérale") auxquels ils ramènent toujours en définitive ; car la ligne de démarcation qu'ils se gardent justement bien de franchir, c'est celle d'une remise en cause totale du système socio-politique "République française" ! Pour autant, ils ne sont pas le centre de la mobilisation réactionnaire fasciste de masse... 

[Addendum écrit "à chaud" après les résultats des régionales 2015 :

"Le Front populaire de 1936 (référence absolue, bien sûr, de tous les partisans y compris pseudo-"maoïstes" du "vote barrage") n'est absolument pas entré dans l'histoire pour avoir fait barrage au fascisme ; puisque déjà en 1938-39 le "Parti social français" (ex-ligue des Croix-de-Feu) cartonnait aux élections et se rapprochait même... du Parti radical au pouvoir (pour qui le "Front antifasciste" tel que "compris" par Thorez avait souvent conduit à voter, et qui avait 110 députés) ; et qu'en 1940 la catastrophe majeure de la débâcle militaire verra s'instaurer le régime de Vichy et la "Révolution nationale" sans que rien ne puisse s'y opposer (et surtout pas... les élus du Front populaire en question, de l'Assemblée élue en mai 1936, dont 80 seulement voteront contre !).

Le Front populaire est entré dans l'histoire pour les immenses conquêtes sociales qu'il a permises ; des choses aussi inimaginables à l'époque... que leur inexistence le serait aujourd'hui (congés payés, temps de travail maximum hebdomadaire, la sécurité sociale attendra 1945 et le salaire minimum les années 1950 mais l'idée était déjà dans les tuyaux). Il est entré dans l'histoire comme un grand moment de mobilisation populaire progressiste radicale et révolutionnaire, préparant la Résistance antifasciste qui en sera un autre (et dont l'issue victorieuse verra la mise en place définitive de ces réformes sociales) ; l'un de ces grands... et rares moments de mobilisation populaire révolutionnaire des 200 dernières années. Et la vraie problématique d'aujourd'hui est finalement moins les scores du FN que la non-possibilité d'une telle mobilisation.

Que ceux qui lancent des incantations au "Front populaire" commencent donc par le commencement, à savoir rendre possible de tels nouveaux 1936 ! Le Front populaire comme évènement tutélaire de l'histoire prolétarienne hexagonale n'a JAMAIS consisté en un simple "vote barrage" à l'extrême-droite !"]

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Villas Corse

2. Une nouvelle qui a fait quelque peu couler l'encre, ces derniers jours, est le "vœu" de l'Assemblée territoriale de Corse (présidée par le notable radical-de-gauche - assez "corsiste" - Paul Giacobbi, mais où les autonomistes et les indépendantistes comptent 30% des sièges) proposant de réserver l'accès à la propriété dans l'île aux personnes justifiant de 5 ans de résidence permanente. À ce jour, les résidences secondaires représentent en Corse plus de 40% du parc immobilier et les habitants (corses "depuis l'éternité" mais aussi d'adoption, originaires du Maghreb, d'Italie, du Portugal ou encore... du continent "français") sont confrontés à une "implosion" de l'offre et à une flambée des prix et des loyers absolument démentielle [quelques éléments à ce sujet ici, sur le blog d'un militant historique de la lutte de libération nationale (LLN)].

541474-le-dirigeant-du-parti-inseme-per-a-corsica-ensemble-Bien entendu, les classiques réactions fusent comme des gimmicks au point qu'on les connaît désormais par cœur et qu'il n'est presque plus besoin de les présenter : "c'est xénophobe, discriminatoire, pire que Le Pen sauf que là personne ne dit rien" [curieusement on n'entend pas les mêmes cris d'orfraie lorsque des personnes vivant et travaillant en Hexagone depuis plus de 40 ans sont privées de droit de vote voire... d'une retraite décente, ou lorsque les droits culturels musulmans sont bafoués dans l'espace public par l'interdiction du voile, l'absence de lieux de culte etc.] ; et puis bien sûr le fameusissime "ils sont tout de même bien contents, ils feraient quoi sans notre tourisme et tout le pognon qu'on leur donne, s'ils veulent leur indépendance qu'ils la prennent !" [à ce sujet lire ici]... Les ailes droite et gauche de l'idéologie républicarde bleu-blanc-rouge se lèvent ici comme un seul homme, ou plutôt comme une seule fRrance qu'elles sont en réalité ; et le Conseil constitutionnel devrait d'ailleurs balayer le "vœu" d'un revers de main sur le premier argument (c'est "discriminatoire").

Alors certes, nous sommes d'avis que la formulation idéologique nationaliste bourgeoise de la proposition (démarche clairement inséparable des très gros scores nationalistes aux municipales, où Gilles Simeoni a notamment remporté la mairie de Bastia) peut prêter le flanc à de telles confusions et attaques. Nous n'aurions certainement pas présenté les choses de cette façon. Mais nous partageons à 300% l'idée de fond sur laquelle  elle repose : le logement en priorité à ceux et celles qui en ont BESOIN pour vivre et travailler ; et non en priorité (les moyens financiers donnant facilement ce genre de priorité-là) à ceux et celles pour qui c'est un loisir, un "fun", un "extra", un signe extérieur de richesse etc. etc.

FLNP-prouvenço-libreCe qu'il est vrai de dire, en revanche, c'est qu'il "n'y a pas que les Corses dans cette situation" : on retrouve en effet le même problème de colonisation immobilière touristique (avec ses mêmes conséquences pour les classes populaires locales) sur les côtes provençale ou basque, en Bretagne, dans les îles poitevines et charentaises (Noirmoutier, Ré, Oléron) où des retraité-e-s au minimum vieillesse se retrouvent (par la valeur foncière prise par leur petit terrain) assujettis à l'ISF, et même... à Paris, où le problème se pose peut-être avec plus d'acuité que partout ailleurs : il est clair que tant les oligarques russes ou les émirs du Golfe que les "capitaines d'industrie" "bien d'chez nous" (les Arnault, Lagardère, Bolloré etc.) y possèdent et monopolisent des dizaines de milliers de mètres carrés où il ne mettent pratiquement jamais les pieds, pendant que des placards à balais de quelques mètres carrés se retrouvent loués pour plusieurs centaines d'euros mensuels par des marchands de sommeil et que des squats insalubres prennent feu régulièrement, tuant des dizaines de personnes dont des enfants. Mais justement : va-t-on reprocher aux Corses de ne pas vouloir en arriver là et de se donner par la lutte les (maigres) moyens de mettre, au moins, le problème sur la table !? Bien sûr que non, et il faudrait au contraire souhaiter que les Bretons, les Occitans, les Basques, les Poitevins-Saintongeais et les classes populaires parisiennes se les donnent aussi, et bien plus encore ! Voilà qui donnerait encore au petit bourgeois francouille - n'ayant en tête que sa "retraite au soleil" - quelques bonnes raisons de s'étrangler d'indignation...

Car nous sommes bel et bien là dans une problématique DE CLASSE et de modèle de société : le logement est une NÉCESSITÉ VITALE qu'il faut sortir de la logique de marchandise, et une telle mesure ne peut être qu'une mesure révolutionnaire socialiste. Il est évident que telle n'est agence immo-jpbpas la volonté ni la nature de la proposition de l'Assemblée de Corse, vouée de toute façon à être vertement rejetée par la République du Grand Capital (avec laquelle il faudrait commencer par rompre, condition sine qua non).

Une véritable politique révolutionnaire du logement, par exemple, ne mettrait pas en avant comme critère une durée de résidence (5 ans ou plus ou moins) mais le besoin concret de se loger, justifié par exemple par la détention d'un contrat de travail (ou une inscription locale à Pôle Emploi). On se doute bien que la propriété n'est pas trop notre tasse de thé, et nous ne limiterions donc pas seulement l'accès à la "propriété" mais au logement en général, point à la ligne (les notions de propriétaire et de locataire auraient de toute façon disparu, le travailleur serait disons "titulaire" d'un logement), car la location de pur loisir fait aussi flamber les prix ; et dans l'hypothèse actuelle, qu'est-ce qui empêcherait par exemple que se mette en place un sinistre marché noir des prête-noms (résidents de plus de 5 ans laissant ensuite l'usage du bien - contre rémunération bien sûr - à des non-résidents), des société immobilières bidons mais domiciliées en Corse etc. etc. ?

un toitPour autant, le fait qu'un tel "vœu" ait été émis montre bel et bien deux choses : 1°/ la réalité prégnante du problème et 2°/ la poussée irrésistible d'une volonté politique populaire d'en finir avec ce problème, indissociable en Corse de la volonté d'en finir avec la France que traduisent les scores nationalistes de plus en plus importants à chaque élection dans l'île (idem au Pays Basque notamment, avec une véritable vague abertzale aux dernières municipales).

Trois mois de véritable fréquentation touristique par an ne peuvent pas mettre 300.000 personnes présentes à l'année face à un véritable parcours du combattant pour bénéficier d'un toit. Nous ne sommes pas pour un "socialisme" de caserne façon pays de l'Est 1975 et nous ne sommes pas contre le droit au voyage et aux vacances, nous déplorons bien au contraire que des millions de personnes en Hexagone n'aient pas ce droit faute de moyens, mais il y aussi un droit irrévocable à avoir un toit (décent) au-dessus de la tête et il n'est pas possible (car fatal) de mélanger ces deux marchés... à vrai dire, ni l'un ni l'autre ne devraient être un marché ! Et pour les personnes qui souhaiteraient découvrir la magnifique Corse, ce que personne  à ce jour n'a songé à interdire (à notre connaissance), on peut envisager des logements ne dépassant pas le format studio ou à la rigueur T1 (une salle + une chambre + coin cuisine et salle de bain) dans des espaces strictement prévus à cet effet, des parcs de petits bungalows etc. ou tout simplement... le camping, y compris sauvage, très bien accepté à condition de respecter quelques conditions (laisser les lieux propres, faire attention au feu etc.) et les habitants des alentours. "Ah oui, mais il y a des bêtes" nous répondront certain-e-s. Ah oui, en effet...

EuskalHerria spécu immo

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27 mars 2014 4 27 /03 /mars /2014 13:43

 

check pointL’État d'Israël opprime, exproprie, arrache les arbres fruitiers et rase les maisons, nie et tue le Peuple palestinien avec une bonne conscience rare ; totalement dans le cadre du "droit" (volonté des dominants faite loi, ainsi que nous l'enseigne le marxisme) et la préoccupation "légitime" de la "sécurité de ses citoyens". C'est là quelque chose de très intéressant à étudier pour comprendre, hors de Palestine occupée, le sionisme "de gauche" et l'"antisionisme" de droite.

Car les "gauches" bourgeoises occidentales, finalement, peuvent retrouver dans cette situation palestinienne, par sionistes interposés, leur BONNE CONSCIENCE COLONIALE et "civilisatrice" de l'époque de Jules Ferry, désormais quelque peu "gênée aux entournures" par le "politiquement correct" en Occident. Lorsque l'apartheid est tombé en Afrique du Sud (et que la fin de la Guerre froide a supprimé l'excuse anti-soviétique), il a tout de même fallu épargner à cette bonne conscience un poids trop lourd pour elle et c'est ainsi que l'impérialisme a poussé à la "solution" au Proche-Orient, débouchant sur les Accords d'Oslo (1993) entre Arafat et Rabin. Mais comme le Hamas, le Jihad islamique, le FPLP et quelques autres (comme le Hezbollah au Liban) ont refusé ces accords de capitulation, une nouvelle excuse a vite été toute trouvée pour poursuivre la colonisation et l'apartheid sioniste en toute bonne conscience : la lutte contre le "terrorisme" et "l'islamisme" bien sûr !

palarrestedathowaracheckpoint c rD'ailleurs, pour tout Occidental un peu impérialiste dans l'âme (il y en a beaucoup...), Israël avec ses braves juifs (de bons juifs, vraiment, pas des apatrides crasseux, fourbes et gauchistes comme avant) représente ce petit quelque chose qu'on croyait disparu à tout jamais depuis un bon demi-siècle : un morceau d'Occident hors d'Occident, avec ses autoroutes et ses buildings flambant neufs, sa "modernité" et sa "civilisation". Un imaginaire suprématiste occidental qui va bien au-delà des "classiques" milieux réactionnaires-racistes "primaires", bien au-delà en réalité de ceux que la plupart des gens "de gauche" imaginent concernés ; un imaginaire imprégnant parfois... jusqu'à ces gens "de gauche" eux-mêmes (culte du "progrès" entretenu par un certain "marxisme" mal digéré, etc.). Ici trouve son explication L'EXISTENCE du sionisme et du crypto-sionisme "de gauche", plus ou moins conscients et assumés.

Alors qu'à droite, on va plus facilement trouver des gens qui s'énervent : "À nous, la dictature du politiquement correct nous ordonne sans cesse de nous repentir pour notre œuvre coloniale civilisatrice auprès de ces bougnoules et de ces négros, alors que ces Juifs, hein ma bonne dame, eux ils font ce qu'ils veulent et personne ne leur dit jamais rien, on se demande vraiment pourquoi !" ("question" dont l'interlocuteur est supposé immédiatement connaître la réponse : "ils contrôlent tout", "de la banque aux médias", bien entendu…). Le discours d'un Soral n'est typiquement rien d'autre que celui-là. Nous avons là le fond intellectuel de l'"antisionisme" de droite.

FPLP-et-PC-Libanais 2523La relativement basse intensité du conflit palestinien peut d'ailleurs aussi – au demeurant – expliquer l'IDENTIFICATION à celui-ci de millions de personnes opprimées à travers le monde. En Palestine, lorsque ce n'est pas l'Intifada de chez Intifada ou une opération de bombardement sur Gaza, c'est finalement "juste" un gros apartheid ethno-social, de l'injustice casquée faisant office de loi, un Uzi dans une main et un ordre administratif d'expulsion dans l'autre. Pour beaucoup de gens ghettoïsés (de classe et/ou de "race") en Europe et dans le monde, a fortiori de culture arabe ou musulmane dans des pays qui majoritairement ne le sont pas, mais pas seulement, c'est finalement juste "un cran au-dessus" de la situation qui est déjà la leur. Il suffirait de décréter des "zones dangereuses" (ne parle-t-on pas déjà de "territoires perdus de la République" ?), de construire de grands murs autour, d'installer des checkpoints et des passeports intérieurs et on y serait. L'expropriation des maisons palestiniennes pour faire place à des lotissements israéliens fait écho pour beaucoup de gens, en juste un peu plus "brutal", à la gentryfication de nombreux quartiers populaires urbains (ou à la villégiaturisation de nombreuses zones rurales), aux destructions de "barres" d'immeubles (certes affreuses) pour faire place à des logements classe-moyenne pas forcément accessibles aux habitant-e-s d'origine, etc. etc. dans nos pays "démocratiques" capitalistes.

692466-846432Alors que la guerre en Syrie, par exemple, c'est une toute autre affaire, une toute autre dimension. On se fout sur la gueule à l'arme lourde. Le régime massacre la population pour la seule et unique raison qu'il est régime et que le peuple est peuple, et qu'un peuple arabe n'a pour seul "droit" que d’obéir à son régime. L'opposition, régime de demain et même déjà d'aujourd'hui dans de nombreuses zones, raisonne de la même façon. Des centaines de personnes meurent chaque jour sous les obus de mortier ou de char. C'est abominable, tout le monde est d'accord là-dessus. Mais c'est une "autre planète". On se dit que pour en arriver là, notre société "démocratique" occidentale a encore "de la marge". L'apartheid sioniste en Palestine est peut-être notre demain immédiat  (ce que semble même confirmer ouvertement le fasciste Zemmour...) tandis qu’une guerre civile comme en Syrie apparaît comme un possible beaucoup plus lointain ou tout simplement un impossible, quelque chose qui ne "peut pas arriver ici". Ci-gît, pulvérisé, un grand et classique argument crypto-sioniste "de gauche" : la prétendue "obsession israélo-palestinienne" alors qu'il y aurait "des tas de conflits beaucoup plus meurtriers dans le monde".

Bethlehem-11176La Palestine est une ligne de front directe entre "Nord" et "Sud", théâtre d'une confrontation entre Occident impérialiste et "Tiers-Monde" IMMÉDIATE au sens propre du terme ("sans intermédiaire"), comme il n'en existe peut-être pas ailleurs sur la planète sinon à la frontière mexicaine des États-Unis (mais ce sont d'autres problématiques et d'autres méthodes). Quelque part, on peut presque dire que c'est le monde impérialiste d'aujourd'hui qui se trouve là en modèle réduit sur 26.000 km2 : le Goush Dan ("Grand Tel-Aviv") ressemble à n'importe quelle métropole occidentale, mais à quelques dizaines de kilomètres commence le "Tiers-Monde", tenu en respect par Tsahal et les colons. Une ligne de front "riches"/"pauvres" aussi (même s'il y aura toujours des coupeurs de cheveux en quatre pour venir nous expliquer qu'il y a des Israéliens pauvres et des Palestiniens riches, comme si on était con à ce point et qu'on ne le savait pas, voyez-vous) ; ligne de front qui se retrouve finalement à moindre intensité autour de tous les territoires de relégation des pays "développés" (Europe, Amérique du Nord) ou "en développement" (Brésil, Amérique latine en général, Afrique du Sud), surtout si ces territoires abritent des "colonies intérieures", des non-"blancs" face à des "blancs" sociaux (faut-il s'étonner, par exemple, de voir le drapeau palestinien flotter au Brésil où l'on dénonce le "nettoyage social" massif des quartiers pauvres en prévision de la Coupe du Monde et des JO, dans des (ex)actions qui n'ont guère à envier à celles de Tsahal ? ou encore de voir les Premières Nations d'Amérique du Nord y identifier tellement leur propre tragédie ?) [sur ce sujet d'"Israël-Palestine comme microcosme des rapports Nord-Sud", l'on peut voir ici une traduction résumée de l'idée-force de cet article en anglais].

Pour citer par exemple Sadri Khiari du PIR, au sujet de ce que peut être la solidarité (le "nouvel antisémitisme" diront les connards de service) ici dans les quartiers populaires : "Soutenir les Palestiniens, c’est se soutenir soi-même, en tant qu’Arabes indigénisés. Proclamer, à la face du Blanc, « Je suis Arabe ! », « Je suis musulman ! », « Je soutiens les Arabes parce qu’ils sont Arabes et les musulmans parce qu’ils sont musulmans ! », ce n’est pas essentiellement défendre une « ethnie » ; c’est dire : « Nous, les peuples victimes du racisme et du colonialisme, nous sommes unis par un destin commun ». C’est une proclamation éminemment politique. Manifester sa solidarité avec le peuple palestinien, affirmer son arabité et son islamité, s’accrocher à une culture que la République raciste veut éradiquer procèdent d’une seule et même volonté. »."

Voilà pourquoi les ghettoïsé-e-s de tous les pays s'identifient à la Palestine et pas au Kurdistan écrasé par l’État turc et le nationalisme arabe ou aux Tamouls massacrés par les chauvinistes cinghalais au Sri Lanka ; situations où des "sudistes" (vendus, tirailleurs du "Nord" certes) massacrent des "sudistes" – ces oppresseurs et égorgeurs "sudistes" (ou d'Europe de l'Est) se retrouvent d'ailleurs plus qu'à leur tour à répondre de leurs crimes devant un tribunal international, ou du moins inculpés par lui ; et dans tous les cas voués aux gémonies devant le "tribunal de l'Histoire" en bonne place aux côtés d'Adolf Hitler... mais JAMAIS les dirigeants israéliens qui ne font (soi-disant) que "défendre leurs citoyens contre la barbarie terroriste" (Poutine ou Assad disent-ils autre chose ?), quelles que soient les centaines voire les milliers de victimes de leurs bombardements, de leurs mitraillages et autres exactions : avec les impérialistes US et bleu-blanc-rouge (directement ou par valets et mercenaires interposés), Israël fait partie des trois grands impunis de la mort violente planétaire ; un peu comme ces nobles de jadis qui pouvaient tuer un roturier et s'attirer tout au plus une remontrance de leurs pairs ou une amende.

Ici vole en éclat un autre argument supposé "massue" des crypto-sionistes de gauche voire d'"extrême-gauche" ("Pourquoi parlez-vous tout le temps de la Palestine et pas des Kurdes, des Tamouls etc. etc. ? Parce qu’en Palestine l’oppresseur est juif et que vous êtes antisémites, bien sûr !!!").


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27 janvier 2014 1 27 /01 /janvier /2014 13:13


À présent que nous avons clos le "dossier Dieudonné-Valls" avec une jubilation certaine ; c'est-à-dire ni dans le sens de ceux qui voudraient utiliser les crimes de l'Allemagne nazie il y a 70 ans pour "clore" tout débat sur ceux de l’État français en 8 siècles d'existence, ni dans celui de leurs jumeaux qui, dans la foulée de Vergès défendant Klaus Barbie, voudraient utiliser ces derniers comme "arguments" pour réhabiliter le nazisme ; et ni dans le sens de la fraction impérialiste BBR qui joue la carte "tiers-mondiste" anti-US et anti-Israël pour "tendre la main" aux régimes réactionnaires arabes (ou iranien) ni dans le sens de celle (comme cette droite-de-la-droite du PS autour de Valls) qui a choisi le "pacte d'acier" avec Washington et ses alliés (dont Tel-Aviv) ; nous pouvons passer à autre chose.


réforme régions1. Parmi l'actualité dans le genre importante, c'est-à-dire dans le genre supposée impacter la vie des masses populaires au quotidien, dans la manière dont l’État du Capital BBR administre sa chiourme, il y a la réforme envisagée des collectivités territoriales. Le souhait du gouvernement serait de réduire le nombre de régions, ces découpages administratifs 100% au service du Grand Capital (centrés sur une "métropole" locale et n'ayant rien à faire de l'histoire, de la culture populaire etc.), de 26 actuellement (avec les dernières colonies d'outre-mer) à "une quinzaine". Une réduction du nombre de départements a également été envisagée par certains... mais là c'est plus compliqué car en dehors de cas réellement aberrants (comme les "Pyrénées-Atlantique" avec le Pays Basque et le Béarn), les départements créés en 1790 ont tout de même tenté de respecter les "provinces" et les "pays" séculaires (fut-ce en regroupant les petits et découpant les très grands), et en 223 ans d'existence ils ont parfois engendré des identités populaires très fortes : on se dit fièrement "Ardéchois" ou "de la Loire" (surtout face aux arrogants Lyonnais :D), "Gersois" ou "Landais", "Corrézien" ou "Aveyronnais" etc. etc., les Bretons aiment préciser qu'ils sont "Finistériens" (surtout) ou autres, bref. On avait bien vu ce que cela avait donné quand il s'était agi (en conformité avec les normes européennes) de faire disparaître les numéros des plaques d'immatriculation... Cela fait partie de la "dignité du réel" comme diraient les autres, et recouvre parfois une claire dimension sociale comme l'affirmation d'être "du 9-3" face à Paris et à la Couronne Ouest, de Savoie et non de Haute-Savoie (ce à quoi ces derniers, au niveau de vie moyen bien plus élevé, répondent que "c'est comme la couture et la haute couture"), etc. etc. Finalement, Hollande-le-président-normal s'est prononcé contre car "issus de la Révolution, c'est un bon acte de naissance" ; ce qui est finalement traduire ce que nous venons de dire en bonne (nov)langue "républicaine" (et s'éviter une fronde populaire sur un sujet qui n'en vaut sans doute pas la peine). Le "patron" ayant parlé, on peut penser que le débat est clos... Mais la réforme des régions, elle, est bel et bien sur la table.

Alors bien sûr, il est évident que venant de la classe au pouvoir ce qui s'annonce est un grand bidouillage, on-prend-par-ci-on-recolle-par-là, comme un enfant jouant avec des Lego : la recomposition "régionale" de notre Hexagone va évidemment servir les intérêts capitalistes et eux seuls en cherchant à accommoder ceux des grands monopoles BBR avec ceux d'une bourgeoisie de "chalandise" plus locale ; les grands caciques locaux à la Ayrault, Gaudin, Collomb, Devedjian, Huchon ou Queyranne venant bien sûr mettre leur grain de sel, en ‘‘arbitres’’ ou en défense de ‘‘leur’’ région, département ou métropole. Les intérêts des masses populaires qui bossent pour engraisser tout ce beau monde : peau de balle, comme cela va de soi ! D'ailleurs, malgré le soutien massif tant des grosses machines UMP et PS que des forces "autonomistes" et même "indépendantistes" bourgeoises, ce que recueille généralement ce genre de bidouillage administratif est le rejet des masses populaires, qui ne voient en rien ce que cela va changer à leurs préoccupations quotidiennes et y voient même un "risque" pour les divers rapports de clientèle entretenus avec les collectivités locales (eh oui ! faute de perspective révolutionnaire, soutirer du pognon à l'État est encore ce qui se fait de mieux et une collectivité de moins, forcément...) : rejet de la fusion des départements corses en 2003 et du même projet en Alsace l'an dernier, rejet de la fusion département-région dans les dernières colonies directes caribéennes (2003 et 2010) etc. etc. Mayotte a accepté (par plus de 95% des suffrages) de devenir un département en 2011 car cela donnait plus de droits aux masses populaires que le statut "bâtard" antérieur... malheureusement, les prix à la consommation se sont immédiatement alignés sur ceux d'un département "français" sans que les revenus ne suivent ; et quelques mois plus tard éclatait une mémorable révolte contre le coût de la vie. Bref : inutile d'en dire plus, ce projet de "nouvel acte" de la "décentralisation" est tout sauf ce qui va susciter un début d'intérêt pour les communistes révolutionnaires de Libération du Peuple que nous sommes. Nous préférons encore (de loin) ergoter sur la ligne idéologique du FLNP, qui a encore mené une action la semaine dernière contre les sangsues du fisc à Aix !

Une série de cartes circule même depuis quelques semaines, laissant penser... qu'une réunification de la Bretagne serait peut-être à l'ordre du jour ; ce qui est assez curieux puisqu'autant pour Ayrault dernièrement que pour les gouvernements (UMP) qui l'ont précédé de 2002 à 2012 ("Acte 2" de la décentralisation), c'est catégoriquement non... Une "psychorigidité" qui, comme pour l'autre "serpent de mer" institutionnel qu'est le département basque (absolument pas à l'ordre du jour de la réforme), est absolument incompréhensible pour le logiciel économiste qui régit historiquement la gauche "radicale" hexagonale, et plus largement pour quiconque n'a pas compris la manière dont s'est construit et (donc) fonctionne l'État français : il s'agit en fait, tout simplement, de "briser" de cette manière les Peuples au "particularisme" (caractère national) le plus affirmé. Rappelons ainsi que la Corse avait été dans un premier temps (1960) rattachée à la région PACA : ce n'est que 10 ans plus tard, face à un large mouvement de contestation et (déjà) à l'émergence de la réaffirmation en tant que Peuple, qu'elle avait été érigée en région en tant que telle.


2. Dans la même veine de "blocage existentiel" pour l’État français, il y a le fameux débat sur la Charte des langues minoritaires et régionales qui revient en ce moment même au Parlement. Cette convention internationale du Conseil de l'Europe (et non de l'UE) a été signée par l’État français en 1999, comme par une bonne trentaine d'autres États, mais il ne l'a jamais ratifiée (comme l'Islande, l'Italie ou... la Russie) car elle contreviendrait à l'article 2 de sa Constitution qui stipule que "la langue de la République est le français". C'est justement cette disposition qu'il est question d'amender par une majorité des 3/5èmes (60%) de l'Assemblée et du Sénat réunis en Congrès ; ce qui était une promesse électorale de Hollande réactivée par Ayrault... non sans lien avec la situation de bouillonnement "régionaliste" en Bretagne depuis l'automne dernier. Mais cela ne va pas sans blocages et l'on voit se dessiner ici deux camps bourgeois que l'on retrouve assez souvent dans divers débats, à commencer par ceux sur l'Europe : les "démocrates", les "libéraux" plus ou moins conservateurs ou "sociaux" qui vont de l'aile "gauche" de l'UMP (ceux qui viennent de l'ancienne UDF) aux Verts en passant par l'UDI, le Modem et une bonne partie du PS ; et les "républicains" ce qui n'est pas du tout la même chose et regroupe la droite de l'UMP, le FN, les "souverainistes" de tout poil et le Front de Gauche - on se souvient des tirades mémorables de Mélenchon sur la question. Grosso modo, l'on peut dire qu'il y a d'un côté ceux qui ne voient pas dans ces "langues régionales" un danger pour le capitalisme, voire même pensent qu'il y a moyen de "rentabiliser" la chose (développer des liens économiques avec l'Allemagne en Alsace, la Catalogne et le Pays basque "espagnol" dans le "Sud" etc. etc.) ; et de l'autre ceux qui y voient une menace pour l'"unité" et la stabilité de l’État, donc pour le Capital, en particulier pour les monopoles centralisés à Paris.

europe-langues-ueCe type de blocage est assez unique en Europe, ce qui tient aux particularités historiques de l’État BBR. Dans la plupart des États (Allemagne, Autriche, Scandinavie, Europe de l'Est) d'abord, les langues "minoritaires" sont un phénomène assez marginal consistant essentiellement en des "débordements" de la nationalité principale d'un État voisin sur leur territoire, suite à des découpages malheureux. Il y a une langue "standard" et des dialectes "régionaux", mais ceux-ci forment un diasystème (ils sont largement intercompréhensibles). Le Royaume-Uni, lui, s'est toujours considéré comme une union de nations différentes sous une même couronne royale. D'ailleurs, lorsqu'une possession de la Couronne veut se "faire la malle", Londres est connue pour ne guère "batailler" et réorganiser rapidement sa domination par d'autres biais (compradores locaux) : il y a eu de courtes guerres en Irlande, au Kenya ou encore en Malaisie (contre les communistes, l'indépendance en elle-même étant déjà actée) mais jamais de "guerre d'Inde" par exemple, comme il y a eu une guerre d'Algérie, d'Indochine etc... La Suisse est dans un schéma comparable et l’État fédéral existe à vrai dire surtout pour la défense et la diplomatie, en dehors de quoi chaque canton "fait sa vie" autour de la place bancaire qui assure son existence. L'Italie a conscience que son unité comme État a été tardive et qu'à côté de l'"italien" (le toscan académisé) les dialetti font partie du patrimoine "national" populaire. La Belgique gère comme elle peut sa binationalité (plus une petite minorité germanophone) depuis 40 ans ; mais enfin, si elle venait à se diviser en deux, ce serait (de toute façon) la fête chez les bourgeois flamands et pas non plus la mort en Wallonie (qui pourrait par exemple frapper à la porte de la "France"). L’État espagnol a suivi le "modèle français" depuis qu'un petit-fils de Louis XIV est monté sur le trône en 1700 (Paris devenant de fait "suzerain" de l’État ibérique), mais il a dû lâcher du lest après la mort de Franco pour assurer sa propre survie dans une situation qui devenait explosive. Il ne reconnaît d'ailleurs que trois langues nationales (euskara, catalan et galicien), les plus nettement différentes du castillan... Aragonais, Andalous, Canariens, Asturiens etc. passent gaiment par pertes et profits.

Ceci rejoint d'ailleurs ce que nous avons maintes fois dit et répété : une langue, c'est un patrimoine populaire et un "critère" important, mais ce n'est pas la seule chose à même de définir une réalité nationale. De nombreuses nationalités parlent la même langue qu'une ou plusieurs autres (ne serait-ce que les Américains, les Canadiens anglophones, les Australiens et les Anglais ; les Brésiliens et les Portugais etc.) ou une langue différant très peu de celle d'une autre (comme les Turcs et les Azéris, les Iraniens et les Kurdes etc.). De nombreuses autres ont simplement adopté la langue de la nation qui les domine, perdant (totalement ou quasi) leur langue originelle et développant une variante populaire locale. C'est ainsi qu'en Bretagne par exemple il y a le gallo, variante populaire bretonne de l'oïl du Val du Loire (lui-même source principale du français académique...) qui a peu à peu, du 12e au 16e siècle, pénétré le duché pré-moderne jusqu'à Vannes et Saint-Brieuc en "effaçant" le brezhoneg celtique à l'est de ces deux villes. De même qu'en Irlande, le gaélique est la langue officielle et apprise par les enfants à l'école mais n'est réellement utilisé dans la vie de tous les jours que dans quelques comtés de l'Ouest : 95% des Irlandais parlent au quotidien un "anglais populaire d'Irlande".

À vrai dire, même la question "nationale" (masses populaires laborieuses + bourgeoisie exploiteuse), au fond, compte peu pour nous. Ce qui nous intéresse, ce sont les PEUPLES, construits autour d'une conscience (un "bon sens") populaire et d'une mémoire  qui sont le résultat d'une histoire. Pour la classe dominante (depuis le 18e siècle, la bourgeoisie seule), cette mémoire est un danger car elle contient le souvenir de la gigantesque usurpation, de la gigantesque spoliation de forces productives qu'a été le développement du capitalisme. Il faut donc l'"effacer", et par conséquent priver les Peuples de leur conscience d'être. Il faut faire croire aux Peuples que leur "identité" c'est celle de leurs exploiteurs ; qu'ils sont "français", "britanniques", "espagnols", "italiens" etc. etc. Dans l’État français, ce phénomène est particulièrement marqué. Cela tient à la psychologie de classe de la bourgeoisie dominante, sur laquelle il nous faudra sans doute revenir dans de prochaines publications : en 1789, lorsqu'éclate la "révolution" bourgeoise, la France est incontestablement la première puissance européenne et donc mondiale. La bourgeoisie élimine les derniers restes de féodalité, prend le pouvoir pour elle seule et se lance alors à la conquête du monde sous le drapeau de la "liberté". Malheureusement, si les idées (les "Lumières") submergent effectivement la planète, au niveau de la PUISSANCE concréto-concrète c'est un échec, définitivement scellé sur le champ de bataille de Waterloo. La France ne sera plus jamais la première puissance mondiale, dès lors toujours devancée par l'Angleterre, puis les États-Unis et d'autres (à présent la Chine). Il en résulte un profond sentiment de "grandeur" perdue, et une classe dominante fondamentalement aux abois. Les pertes de prestige successives après la déroute de 1870, puis après chaque guerre mondiale n'ont fait qu'aggraver les choses. Ce sentiment d'avoir produit des idées qui ont parcouru et changé la face du monde, mais d'avoir "en échange" perdu la "grandeur", la puissance géopolitique et le rayonnement intellectuel du 18e siècle structure profondément la pensée dominante "française" ; et qui n'étudie pas cela (ce que nous tentons de faire) ne comprend pas l'ennemi et ne peut donc efficacement le combattre (tombant dans ses pièges, le plus connu étant le social-"patriotisme" revendiqué dernièrement par Montebourg par exemple).

Toutes les "rigidités" psychologiques de la bourgeoisie BBR, sur les "langues régionales" comme des dizaines d'autres sujets, s'expliquent pour beaucoup par là : un manque de confiance en soi de la bourgeoisie monopoliste "centrale", en quelque sorte. Les États-Unis, par exemple, arrivent (pour le moment) à "gérer" les douloureuses réminiscences de leur histoire : esclavage puis ségrégation des Afro-descendants, génocide et spoliation des Natifs, conquête de 30% du territoire actuel sur le Mexique alors que les Latinos sont désormais près de 20% de la population, etc. Les films ‘‘grand public’’ sur ces questions se sont multipliés depuis une trentaine d'années ; ni l’esclavage ni le génocide indigène, ni la ségrégation et le racisme dans le Sud ni le maccarthysme ne sont des sujets tabous ; il y a même un film sur les San Patricios (donc la sanglante conquête de la moitié du Mexique) dont nous avons parlé... Les premiers films sur le Vietnam (ou séries sur l’Irak !) sont sortis avant même la fin de la guerre : combien de temps a-t-il fallu pour voir dans les salles de "France" quatre films mièvres et bien-pensants sur la guerre d'Algérie ; combien d'années Avoir 20 ans dans les Aurès de René Vautier ou La Bataille d'Alger de Pontecorvo ont-ils été bannis des écrans ? Certes, il faudra sans doute attendre encore un peu pour voir au cinéma US un soldat désertant devant les horreurs de l'occupation et rejoignant la résistance irakienne ou afghane (enfin si, cela existe - Homeland - mais pas dans le beau rôle) ; mais bon...  La bourgeoisie US "gère" autant que possible, du moment que la majorité de la population reste solidement ancrée dans les valeurs réactionnaires rednecks (notamment religieuses) et le culte du drapeau et qu'une minorité liberal considère que le système est certes imparfait et perfectible, mais qu'il n'y en a pas de meilleur au monde : ‘‘Dieu bénisse l’Amérique’’ ! La bourgeoisie BBR, à tort ou à raison, ne pense pas pouvoir "gérer" ainsi ; et n'a pour seul mot d'ordre à la bouche que de "clore le débat" : circulez, y a rien à voir ! Dans les revendications pour les langues "régionales", la réunification de la Bretagne ou un département basque, elle voit non sans raison une double menace : celle de bourgeoisies locales tentées par le "parti de l'étranger" (se tourner économiquement vers les États voisins, se détourner du Centre monopoliste francilien) ; et celle de Peuples se réappropriant leur mémoire et donc prêts à briser les chaînes hégémoniques de l'idéologie BBR et à partir à la reconquête de leur destin. Et l'arsenal contre cela se déploie de la droite de la droite (1-2-3-4) jusqu'à l'"extrême-gauche" y compris "anarchiste" (CNT-AIT) et même "maoïste" ('p''c''mlm') !

Nous, notre position est claire. Nous ne voulons pas d'une "réforme"-réorganisation administrative de l’État BBR du Capital ; nous voulons le renversement du capitalisme, la libération révolutionnaire des Peuples et leur organisation politique démocratique et socialiste sur la base de la COMMUNE POPULAIRE. Nous nous FOUTONS BIEN, aussi, d'une "reconnaissance" des langues "régionales" jetée aux masses populaires comme un nonos à ronger par la frange "libérale" de la bourgeoisie : "République" des monopoles, nous ne sommes pas tes "régions" (et encore moins tes "provinces" !!!), pas même pour "avoir du talent" ! Nous voulons pour les Peuples d'Hexagone, dont notre Peuple occitan, la reconquête révolutionnaire de leur mémoire et de leur conscience. Nous voulons renverser le Capital et nous savons que dans cette lutte prolongée, l'affrontement physique de masse entre révolution et contre-révolution est déjà la phase finale : avant d'en arriver là, il faut briser les murailles idéologiques dont s'entoure la classe dominante. Reconquérir cette mémoire et cette conscience, c'est (entre autre choses) contribuer à briser ces murs.

Au sujet de cette organisation sociale territoriale du futur Hexagone socialiste que nous voulons, refusant le maintien ou la restauration ‘‘rouge’’ de la prééminence parisienne, nous avons maintes fois évoqué l'exemple de ce que la jeune URSS du début des années 1920 a tenté d'être mais n'a hélas point été car l'esprit suprématiste petit-bourgeois de la nation dominante russe, parfois incarné plus que tout autre dans des ‘allogènes’ (non-russes) ‘russifiés’ (l'assimilé n'est-il pas l'arme suprême des nations dominantes depuis la nuit des temps ? quel meilleur "anti-communautariste" qu'un "Arabe" "républicain", "laïc" blablabla blablabla ?), a fini par revenir au galop. Eh bien voilà : nous vous livrons ci-après les mots de Lénine lui-même sur cette question, face aux évènements qui se déroulaient alors dans le Caucase. S'il y a bien des écrits méconnus de Vladimir Illitch, ce sont ceux postérieurs à son attaque cérébrale de mai 1922 ; et pour cause : après sa mort, par (soi-disant) "respect" pour la "diminution" du dirigeant au moment de leur rédaction, ils furent lus à huis clos au 13e Congrès du PCbUS (mai 1924) puis... enterrés et jamais officiellement rendus publics jusqu'en 1956. L'utilisation qui en fut faite par Trotsky et (plus que lui peut-être) ses partisans, qui publièrent clandestinement ces notes en 1926 pour affirmer que Lénine aurait "désigné" Trotsky comme son "successeur", puis par Khrouchtchev lors de la "déstalinisation" achevèrent de les discréditer ; au point que parmi les défenseurs-fétichistes les plus acharnés du Grand Moustachu géorgien il s'en trouvera sans doute encore, en 2014 après Jésus-Christ, pour affirmer que ce sont des "falsifications" trotskystes ou khrouchtchévistes grossières (ce que le Moustachu lui-même, après l'avoir affirmé en 1926, a pourtant démenti l'année suivante). Le texte qui suit porte pourtant l'empreinte intellectuelle incontestable du leader bolchévik, et le montre au demeurant en pleine possession de sa lucidité et de sa combattivité. Vu, en outre, comme il va très largement à l’encontre de la pensée de Trotsky comme de la pratique de Khrouchtchev et Brejnev sur la question, il est infiniment improbable qu’il soit le fruit d’une ‘falsification’ lors de la republication du ‘‘testament politique’’ en 1956. Il consiste en la succession de trois notes rédigées fin décembre 1922 (les passages surlignés en gras et les annotations entre crochets en rouges sont de nous) :

La question des nationalités ou de l'"autonomie"


lenineJe suis fort coupable, je crois, devant les ouvriers de Russie, de n'être pas intervenu avec assez d'énergie et de rudesse dans la fameuse question de l'autonomie, appelée officiellement, si je ne me trompe, question de l'union des républiques socialistes soviétiques.

En été, au moment où cette question s'est posée, j'étais malade, et en automne j'ai trop compté sur ma guérison et aussi sur l'espoir que les sessions plénières d'octobre et de décembre [2] me permettraient d'intervenir dans cette question. Or, je n'ai pu assister ni à la session d'octobre (consacrée à ce problème), ni à celle de décembre ; et c'est ainsi que la question a été discutée presque complètement en dehors de moi.

J'ai pu seulement m'entretenir avec le camarade Dzerjinski qui, à son retour du Caucase, m'a fait savoir où en était cette question en Géorgie. J'ai pu de même échanger deux mots avec le camarade Zinoviev et lui dire mes craintes à ce sujet. De la communication que m'a faite le camarade Dzerjinski, qui était à la tête de la commission envoyée par le Comité central pour «enquêter» sur l'incident géorgien, je n'ai pu tirer que les craintes les plus sérieuses. Si les choses en sont venues au point qu'Ordjonikidzé s'est laissé aller à user de violence, comme me l'a dit le camarade Dzerjinski, vous pouvez bien vous imaginer dans quel bourbier nous avons glissé. Visiblement, toute cette entreprise d'«autonomie» a été foncièrement erronée et inopportune.

On prétend qu'il fallait absolument unifier l'appareil. D'où émanaient ces affirmations ? N'est-ce pas de ce même appareil de Russie, que, comme je l'ai déjà dit dans un numéro précédent de mon journal, nous avons emprunté au tsarisme en nous bornant à le badigeonner légèrement d'un vernis soviétique ?

Sans aucun doute, il aurait fallu renvoyer cette mesure jusqu'au jour où nous aurions pu dire que nous nous portions garants de notre appareil, parce que nous l'avions bien en mains. Et maintenant nous devons en toute conscience dire l'inverse ; nous appelons nôtre un appareil qui, de fait, nous est encore foncièrement étranger et représente un salmigondis de survivances bourgeoises et tsaristes, qu'il nous était absolument impossible de transformer en cinq ans faute d'avoir l'aide des autres pays et alors que prédominaient les préoccupations militaires et la lutte contre la famine.

Dans ces conditions, il est tout à fait naturel que «la liberté de sortir de l'union» qui nous sert de justification, apparaisse comme une formule bureaucratique incapable de défendre les allogènes de Russie contre l'invasion du Russe authentique, du Grand-Russe, du chauvin, de ce gredin et de cet oppresseur qu'est au fond le bureaucrate russe typique. Il n'est pas douteux que les ouvriers soviétiques et soviétisés, qui sont en proportion infime, se noieraient dans cet océan de la racaille grand-russe chauvine, comme une mouche dans du lait.

Pour appuyer cette mesure, on dit que nous avons créé les commissariats du peuple s'occupant spécialement de la psychologie nationale, de l'éducation nationale. Mais alors une question se pose : est-il possible de détacher ces commissariats du peuple intégralement ? Seconde question : avons- nous pris avec assez de soin des mesures pour défendre réellement les allogènes contre le typique argousin russe ? Je pense que nous n'avons pas pris ces mesures, encore que nous eussions pu et dû le faire.

Je pense qu'un rôle fatal a été joué ici par la hâte de Staline et son goût pour l'administration, ainsi que par son irritation contre le fameux «social-nationalisme» [‘‘identitaires de gauche’’ diraient certains aujourd’hui…]. L'irritation joue généralement en politique un rôle des plus désastreux.

Je crains aussi que le camarade Dzerjinski, qui s'est rendu au Caucase pour enquêter sur les «crimes» de ces «social-nationaux», se soit de même essentiellement distingué ici par son état d'esprit cent pour cent russe (on sait que les allogènes russifiés forcent constamment la note en l'occurrence), et que l'impartialité de toute sa commission se caractérise assez par les «voies de fait» d'Ordjonikidzé. Je pense que l'on ne saurait justifier ces voies de fait russes par aucune provocation, ni même par aucun outrage, et que le camarade Dzerjinski a commis une faute irréparable en considérant ces voies de fait avec trop de légèreté.

Ordjonikidzé représentait le pouvoir pour tous les autres citoyens du Caucase. Il n'avait pas le droit de s'emporter, droit que lui et Dzerjinski ont invoqué. Ordjonikidzé aurait dû, au contraire, montrer un sang-froid auquel aucun citoyen ordinaire n'est tenu, à plus forte raison s'il est inculpé d'un crime « politique». Car, au fond, les social-nationaux étaient des citoyens inculpés d'un crime politique, et toute l'ambiance de cette accusation ne pouvait le qualifier autrement.

Ici se pose une importante question de principe : Comment concevoir l'internationalisme ?[3]

Lénine

30.XII.22.

Consigné par M.V.

sovietunited.jpgSuite des notes.

31 décembre 1922.

J'ai déjà écrit dans mes ouvrages sur la question nationale qu'il est tout à fait vain de poser dans l'abstrait la question du nationalisme en général. Il faut distinguer entre le nationalisme de la nation qui opprime et celui de la nation opprimée, entre le nationalisme d'une grande nation et celui d'une petite nation.

Par rapport au second nationalisme, nous, les nationaux d'une grande nation, nous nous rendons presque toujours coupables, à travers l'histoire, d'une infinité de violences, et même plus, nous commettons une infinité d'injustices et d'exactions sans nous en apercevoir. Il n'est que d'évoquer mes souvenirs de la Volga sur la façon dont on traite chez nous les allogènes : le Polonais, le Tatar, l'Ukrainien, le Géorgien et les autres allogènes du Caucase ne s'entendent appeler respectivement que par des sobriquets péjoratifs, tels «Poliatchichka», «Kniaz», «Khokhol», «Kapkazski tchélovek».

Aussi l'internationalisme du côté de la nation qui opprime ou de la nation dite «grande» (encore qu'elle ne soit grande que par ses violences, grande simplement comme l'est, par exemple, l'argousin) doit-il consister non seulement dans le respect de l'égalité formelle des nations, mais encore dans une inégalité compensant de la part de la nation qui opprime, de la grande nation, l'inégalité qui se manifeste pratiquement dans la vie. Quiconque n'a pas compris cela n'a pas compris non plus ce qu'est l'attitude vraiment prolétarienne à l'égard de la question nationale : celui-là s'en tient, au fond, au point de vue petit-bourgeois et, par suite, ne peut que glisser à chaque instant vers les positions de la bourgeoisie.

Qu'est-ce qui est important pour le prolétaire ? Il est important, mais aussi essentiel et indispensable, qu'on lui assure dans la lutte de classe prolétarienne le maximum de confiance de la part des allogènes. Que faut-il pour cela ? Pour cela il ne faut pas seulement l'égalité formelle, il faut aussi compenser d'une façon ou d'une autre, par son comportement ou les concessions à l'allogène, la défiance, le soupçon, les griefs qui, au fil de l'histoire, ont été engendrés chez lui par le gouvernement de la nation «impérialiste».

Je pense que pour les bolchéviks, pour les communistes, il n'est guère nécessaire d'expliquer cela plus longuement. Et je crois qu'ici nous avons, en ce qui concerne la nation géorgienne, l'exemple typique du fait qu'une attitude vraiment prolétarienne exige que nous redoublions de prudence, de prévenance et d'accommodement. Le Géorgien qui considère avec dédain ce côté de l'affaire, qui lance dédaigneusement des accusations de «social-nationalisme» (alors qu'il est lui-même non seulement un vrai, un authentique «social-national», mais encore un brutal argousin grand-russe), ce Géorgien-là porte en réalité atteinte à la solidarité prolétarienne de classe, car il n'est rien qui en retarde le développement et la consolidation comme l'injustice nationale ; il n'est rien qui soit plus sensible aux nationaux «offensés» que le sentiment d'égalité et la violation de cette égalité, fût-ce par négligence ou plaisanterie, par leurs camarades prolétaires. Voilà pourquoi, dans le cas considéré, il vaut mieux forcer la note dans le sens de l'esprit d'accommodement et de la douceur à l'égard des minorités nationales que faire l'inverse. Voilà pourquoi, dans le cas considéré, l'intérêt fondamental de la solidarité prolétarienne, et donc de la lutte de classe prolétarienne, exige que nous n'observions jamais une attitude purement formelle envers la question nationale, mais que nous tenions toujours compte de la différence obligatoire dans le comportement du prolétaire d'une nation opprimée (ou petite) envers la nation qui opprime (ou grande).

Lénine

Consigné par M.V.

31.XII.22.

Suite des notes.

31 décembre 1922.

1123px-SovietCentralAsia1922.svg.pngQuelles sont donc les mesures pratiques à prendre dans la situation ainsi créée ?

Premièrement, il faut maintenir et consolider l'union des républiques socialistes ; il ne peut exister aucun doute sur ce point. Cette mesure nous est nécessaire comme elle l'est au prolétariat communiste mondial pour combattre la bourgeoisie mondiale et pour se défendre contre ses intrigues.

Deuxièmement, il faut maintenir l'union des républiques socialistes en ce qui concerne l'appareil diplomatique. C'est d'ailleurs une exception dans notre appareil d’État. Nous n'y avons pas admis une seule personne quelque peu influente de l'ancien appareil tsariste. Dans son personnel les cadres moyens comme les cadres supérieurs sont communistes. Aussi a-t-il déjà conquis (on peut le dire hardiment) le nom d'appareil communiste éprouvé, infiniment mieux épuré des éléments de l'ancien appareil tsariste, bourgeois et petit-bourgeois que celui dont nous sommes obligés de nous contenter dans les autres commissariats du peuple.

Troisièmement, il faut infliger une punition exemplaire au camarade Ordjonikidzé (je dis cela avec d'autant plus de regret que je compte personnellement parmi ses amis et que j'ai milité avec lui à l'étranger, dans l'émigration), et aussi achever l'enquête ou procéder à une enquête nouvelle sur tous les documents de la commission Dzerjinski, afin de redresser l'énorme quantité d'irrégularités et de jugements partiaux qui s'y trouvent indubitablement. Il va de soi que c'est Staline et Dzerjinski qui doivent être rendus politiquement responsables de cette campagne foncièrement nationaliste grand-russe.

Quatrièmement, il faut introduire les règles les plus rigoureuses quant à l'emploi de la langue nationale dans les républiques allogènes faisant partie de notre Union, et vérifier ces règles avec le plus grand soin. Il n'est pas douteux que, sous prétexte d'unité des services ferroviaires, sous prétexte d'unité fiscale, etc., une infinité d'abus de nature authentiquement russe, se feront jour chez nous avec notre appareil actuel. Pour lutter contre ces abus, il faut un esprit d'initiative tout particulier, sans parler de l'extrême loyauté de ceux qui mèneront cette lutte. Un code minutieux sera nécessaire, et seuls les nationaux habitant la république donnée sont capables de l'élaborer avec quelque succès. Et il ne faut jamais jurer d'avance qu'à la suite de tout ce travail on ne revienne en arrière au prochain congrès des Soviets en ne maintenant l'union des républiques socialistes soviétiques que sur le plan militaire et diplomatique, et en rétablissant sous tous les autres rapports la complète autonomie des différents commissariats du peuple.

Il ne faut pas oublier que le morcellement des commissariats du peuple et le défaut de coordination de leur fonctionnement par rapport à Moscou et autres centres peuvent être suffisamment compensés par l'autorité du Parti, si celle-ci s'exerce avec assez de circonspection et en toute impartialité ; le préjudice que peut causer à notre État l'absence d'appareils nationaux unifiés avec l'appareil russe est infiniment, incommensurablement moindre que celui qui en résulte pour nous, pour toute l'Internationale, pour les centaines de millions d'hommes des peuples d'Asie, qui apparaîtront après nous sur l'avant-scène historique dans un proche avenir. Ce serait un opportunisme impardonnable si, à la veille de cette intervention de l'Orient et au début de son réveil, nous ruinions à ses yeux notre autorité par la moindre brutalité ou injustice à l'égard de nos propres allogènes. Une chose est la nécessité de faire front tous ensemble contre les impérialistes d'Occident, défenseurs du monde capitaliste. Là il ne saurait y avoir de doute, et il est superflu d'ajouter que j'approuve absolument ces mesures. Autre chose est de nous engager nous-mêmes, fût-ce pour les questions de détail, dans des rapports impérialistes à l'égard des nationalités opprimées, en éveillant ainsi la suspicion sur la sincérité de nos principes, sur notre justification de principe de la lutte contre l'impérialisme. Or, la journée de demain, dans l'histoire mondiale, sera justement celle du réveil définitif des peuples opprimés par l'impérialisme et du commencement d'une longue et âpre bataille pour leur affranchissement.

Lénine

31.XII.22.

Consigné par M.V.


Les notes rajoutées par l’éditeur sont signalées par [N.E.]


[1] Autonomie, projet d'organiser toutes les républiques formant la R.S.F.S.R. sur les bases d'autonomie [NDLR en clair : que les différentes nationalités forment des républiques "autonomes" (à quel point... à voir !) dans la Fédération soviétique de Russie, ce qui assurait clairement la domination russe ; et non des républiques nationales réunies en Union des Républiques socialistes, système qui sera lui aussi dévoyé avec le temps, mais enfin le premier était bien pire]. Le projet d'"autonomie" fut déposé par Staline. Lénine le critiqua sévèrement et proposa une solution foncièrement différente à cette question: formation de l'Union des républiques socialistes soviétiques englobant des républiques égales en droit. En décembre 1922 le 1er Congrès des Soviets de l'U.R.S.S. prit la décision de former l'Union des Républiques Socialistes Soviétiques. [N.E.]

[2] Il s'agit des sessions plénières du C.C. du P.C.(b)R. qui eurent lieu en octobre et décembre 1922 et qui délibérèrent du problème de la formation de l'U.S.S.R. [N.E.]

[3] Plus loin, dans les notes sténographiées, la phrase « Je pense que nos camarades n'ont pas suffisamment compris cette importante question de principe » est barrée. [N.E.]

[Sur cette même question, et tendant à prouver l'authenticité (parfois contestée) de ce que dit Lénine, lire aussi :
"Il importe infiniment plus de maintenir et de développer le pouvoir des Soviets qui constitue la transition au socialisme. Tâche difficile, mais parfaitement réalisable. Pour pouvoir s'en acquitter avec succès, il importe par-dessus tout que les communistes de Transcaucasie comprennent les particularités de leur situation, de la situation de leurs républiques, différente de la situation et des conditions de la République socialiste fédérative soviétique de Russie ; qu'ils comprennent la nécessité de ne pas copier notre tactique, mais de la modifier, après mûre réflexion, en fonction des différentes conditions concrètes." (...)]

[NDLR la citation de référence de Lénine sur toute ces questions est la suivante : présentant le programme du Parti en 1917, Lénine dit que “Nous voulons la libre union des nationalités, c'est pourquoi nous devons leur reconnaitre le droit de se séparer : sans la liberté de se séparer, aucune union ne peut être qualifiée de libre”. Précisons ici que dans le même texte de référence, Lénine dit aussi que "Mais, d'autre part, nous ne souhaitons nullement la séparation. Nous voulons un État aussi grand que possible, une union aussi étroite que possible, un aussi grand nombre que possible de nations qui vivent au voisinage des Grands-Russes ; nous le voulons dans l'intérêt de la démocratie et du socialisme, en vue d'amener à la lutte du prolétariat le plus grand nombre possible de travailleurs de différentes nations. Nous voulons l'unité du prolétariat révolutionnaire, l'union et non la division"... ce que saisiront bien sûr au vol tous les jacobinards, espagnolistes et autres "britannistes" "rouges" pour alimenter et "confirmer" leurs "arguments" pourris ; alors que Lénine ne fait qu'exprimer là son internationalisme, son souhait (et c'est bien le moins que l'on puisse attendre de lui...) de voir le "maximum" de Peuples travailleurs unis autour de la révolution prolétarienne pour la libération de l'humanité et le communisme (et l'Empire tsariste, avec ses presque 22 millions de km² et ses 180 millions d'habitant-e-s à cheval sur deux continents, était bien sûr le cadre géographique "rêvé" pour cela), et nullement un quelconque centralisme jacobin conforme à leurs fantasmes (ou, mieux dit, à leur râtelier historique) de petits bourgeois et/ou d'aristocrates ouvriers. Il s'agit bien d'une union "la plus large et étroite possible" mais qui, comme on l'a dit, ne peut être qu'une union LIBRE, "librement" c'est-à-dire démocratiquement consentie et non forcée comme celle des 130 départements de la "France" "révolutionnaire" bourgeoise des années 1790-1800 ; une union d'ailleurs uniquement possible dans le cadre d'un système supérieur socialiste ("la révolution sociale met à l'ordre du jour l'union des seuls États qui sont passés au socialisme ou qui marchent vers le socialisme") ; et pour laquelle Lénine est d'ailleurs même prêt à "perdre" des Peuples au profit de la Réaction (Pologne, Finlande) au nom de ce principe supérieur de liberté d'union ou de séparation (une vision plus "jacobine" autoritaire était peut-être celle de Staline et de quelques autres ; ainsi que très certainement de Trotsky, Rosa Luxemburg et autres "hochets" perpétuellement agités par les "anti-staliniens" en réalité anti-léninistes ; mais elle fut - comme on peut le voir ici - impitoyablement combattue par Lénine jusqu'à son dernier souffle et le temps est révolu de faire dire à Vladimir Illitch tout et n'importe quoi - et surtout ce qui nourrit ses propres fantasmes de pathétique "soldat de l'an II" avec 220 ans de retard, d'"universaliste" impérial etc. etc.). Une telle union "libre" (démocratique) de Peuples marchant vers le communisme, il est bien évident que nous aussi la souhaitons la plus large possible, la plus "solide" au sens de détermination des Peuples associés à ne pas "lâcher" le projet révolutionnaire commun, et d'ailleurs pas (nous ne voyons pas pourquoi) limitée aux frontières hexagonales de l’État "français" légué par la bourgeoisie (les gens ne puent pas, à notre connaissance, au-delà de celles-ci).]

[Précision importante suite à des réactions "fana-staliniennes" auxquelles il fallait s'attendre : il est bien question ici d'une mission (Dzerjinsky-Ordjonikidzé) envoyée par le Comité central "pansoviétique" de Moscou auprès du PARTI COMMUNISTE BOLCHÉVIK géorgien ; les "social-nationalistes" en question ne sont nullement des nationalistes bourgeois revêtus de thèses menchéviques comme il en existait un fort courant en Géorgie à l'époque (mais peu ou prou totalement écarté en 1922) ; c'est bien aux COMMUNISTES géorgiens* qu'est imposé (contre les conceptions de Lénine, malade et impuissant) un brutal hégémonisme grand-russe. Quant à l'idée (là encore il fallait s'y attendre !) d'une "falsification" de ces notes de Lénine republiées ("comme par hasard" diront-ils...) en 1956, connaissant le "grand-slavisme" russo-ukrainien de Khrouchtchev et consorts, nous en voyons mal l'intérêt... S'il y a bien un point sur lequel Khrouchtchev ne rompt pas avec Staline mais au contraire aggrave la tendance, c'est bien celui-là (d'ailleurs en cette même fatidique année 1956, une ville d'Ukraine était renommée... Ordjonikidzé) ! Et pour ce qui est des éructations de "SLP trotskyyyste" que nous voyons déjà (d'ici oui oui) germer dans certaines têtes qui ne se donnent pas pour autant la peine de nous lire, la réponse est ici : Sur la "révolution permanente" et le trotskysme. Il n'y a tout simplement pas de théoricien marxiste des années 1920-30 plus contraire à notre vision des choses que Trotsky !

* Parmi eux, Mdivani connaîtra par la suite la répression du fait de sa proximité avec l'Opposition de Gauche trotskyste, quoi qu'il ait été un temps réhabilité dans les années 1930 et ait même occupé à nouveau des fonctions importantes à ce moment-là ; en revanche, Makharadzé ne sera jamais "victime de la répression stalinienne" et au contraire dirigera la Transcaucasie puis la Géorgie soviétique jusqu'à sa mort en 1941, devenant même peu avant vice-président du Soviet suprême de l'Union... De fait, les communistes géorgiens de l'"affaire" auront subi une défaite par la fusion de la Géorgie, pour un temps (jusqu'en 1936), avec l'Arménie et l'Azerbaïdjan dans une grande république fédérative de Transcaucasie, ce qu'ils refusaient ; mais également remporté une victoire puisque cette Transcaucasie sera bien une république soviétique fédérée aux autres dans l'URSS, et non absorbée comme simple "république autonome" dans la Russie soviétique.]

Sur la question spécifique du rapport de la Révolution bolchévique avec les musulmans (10% de la population de l'ex-Empire tsariste devenu URSS), nous pouvons aussi vous inviter à lire le texte suivant :

Marx, Lénine, les bolchéviks et l’islam


Tant la source (Investig'Action de Michel Collon) que l'auteur (Bruno Drweski, intellectuel tendance "Comité Valmy" parfois repris par la mouvance Asselineau-UPR/Cercle des Volontaires) sont sulfureux mais s'il vous plaît faites l'effort de lire, sur le plan des faits historiques c'est très intéressant (et d'ailleurs très largement "pompé" de sources marxistes tout à fait potables comme celle-ci par exemple, l'intérêt étant finalement d'en faire une "synthèse"). On y voit notamment comment Lénine a dû lutter contre les mêmes conceptions laïcardes et "civilisatrices" qui dominent aujourd'hui encore le débat politique hexagonal à "gauche" ; et pire encore contre des éléments qui se peignaient de "rouge" pour perpétuer leur domination coloniale... Cessons (nom de dieu !) de paralyser la réflexion communiste au nom de la dénonciation formaliste de "la souuuuurce" !!! C'est tout simplement faire insulte à l'intelligence individuelle, comme si les gens n'étaient pas capables de "prendre" le "bon" d'un texte (surtout si ce sont des faits historiques objectifs, authentiques peu importe qui les énonce !) et de "laisser" le "mauvais", les conclusions "rouges-brunes" (terme qui veut tout dire et rien dire, répétons-le encore une fois) qu'en tire l'auteur... [bien sûr nous éviterions de mettre en lien un texte aux propos ouvertement antisémites, racistes etc. mais ce n'est pas le cas ici].

LIRE AUSSI ABSOLUMENT ces deux textes de Safarov, bolchévik historique qui fut chargé autour de 1920 d'asseoir le pouvoir soviétique en Asie centrale en s'y confrontant à la fois à la résistance nationaliste anticommuniste locale (basmashis) et à la tendance au chauvinisme grand-russe de trop nombreux cadres "révolutionnaires" ; s'engageant notamment dans une polémique avec l'autre haut responsable dans la région Mikhaïl Tomsky ; polémique dans laquelle il aura le soutien de Lénine :

L'évolution de la question nationale

L'Orient et la Révolution

Sur la question des langues "régionales", lire aussi : Comment les langues du Peuple ont été rendues illégitimes - très bon article d'une occitaniste universitaire montpelliéraine rappelant ces évidences que "la Révolution de 1789 est une révolution bourgeoise, et les républiques qui l’ont suivie le sont tout autant" (ce qui fait toute sa différence avec la Révolution bolchévique de Lénine, ouvrière et paysanne) ; et que "ce qui est en jeu est fondamentalement d’ordre social" : "supprimer le « patois », c’est ôter un écran entre les masses et la parole normative des nouveaux maîtres", lesquels pensent "non sans naïveté" que "quand ils (les masses travailleuses) parleront comme nous (les bourgeois), ils penseront comme nous et ne bougeront que dans les limites que nous leur fixerons"...


jour-colere-2377989-jpg_2043841.JPG3. Autre actualité ‘‘phare’’ du week-end écoulé, la manifestation d’ultra-droite ‘‘Jour de Colère’’ à Paris. Avec (selon les estimations les plus sérieuses) une grosse vingtaine de milliers de manifestant-e-s, contre plusieurs centaines de milliers (voire un million) pour les ‘‘Manifs pour tous’’ du début 2013, le ‘‘Mai 68 de droite’’ (formule bien trouvée, pour le coup !) que traverse le processus hexagonal de fascisation rampante (à l’œuvre depuis au moins 12 ans) semble être dans le creux de la vague, en repli tactique et réorganisation…  ce qui ne veut pas dire qu’une nouvelle déferlante plus terrible encore ne va pas se lever bientôt ; le contraire est même certain, vu la merde social-libérale qui sert de politique à Hollande et ses comparses !

On ne reviendra pas en long, en large et en travers sur les revendications de la cinquantaine d'associations et collectifs appelants (homophobie, anti-IVG, "sécurité", "immigration", "identité nationale"), qui ne sont que de grands classiques de la droite-de-la-droite : identitaires, nationalistes, nationaux-catholiques et autres intégristes, petits entrepreneurs poujadistes, "Printemps français" etc. auxquels se sont joints, actualité oblige, des dieudonnistes pour la "liberté d'expression" antisémite de leur idole, bien que ce ralliement n'ait visiblement pas fait l'unanimité parmi les autres participants (1 - 2 ; "Résistance républicaine" de Christine Tasin a même finalement retiré sa participation). Le nom lui-même était sans équivoque, car "Jour de Colère" en latin se dit Dies Irae, ce qui est le nom d'un poème religieux catholique du 11e siècle mais aussi... d'un groupe national-catholique bordelais connu pour son extrême radicalité !

Ce qui retiendra notre attention, en revanche, c'est plutôt la manière dont ce type de mouvement, malgré la faune haute en couleur de ses organisateurs, parvient tout de même à mobiliser. Ils jouent notamment sur la bonne vieille corde sensible poujadiste, le sentiment de VIE DE PIGEON, de vie de VACHE À LAIT qui habite une grande partie des masses populaires et qui ne se résume nullement aux impôts directs et encore moins aux ‘‘charges’’ sur les petits entrepreneurs : il suffit de penser aux 20% de TVA sur chaque produit alimentaire ou autre, aux 60% de TIPP sur le moindre litre de carburant, à la taxe d’habitation que tout le monde paye en fonction de la valeur de son logement et non de ses revenus, aux prix des transports, de l’électricité, du gaz, de l’eau etc. etc. Quand à un ménage populaire, aux revenus de (deux fois) 1 à 1,5 SMIC de l’heure, il ‘‘reste à vivre’’ 20% de ses revenus annuels, on peut dire qu’ils peuvent déboucher le champagne ! Certes, il est normal que chacun et chacune participe aux frais de la collectivité… mais pour quoi en retour ? Services de merde et mépris du peuple en permanence, cadeaux fiscaux au CAC 40 et comptes en Suisse de ministres, bureaucratie et parcours du combattant pour les prestations ou allocations les plus élémentaires (alors que tout travailleur a cotisé 25% de son salaire brut chaque mois pendant des années !), et on en passe et des meilleures. Comment s’étonner que ce sentiment aille nourrir une mobilisation réactionnaire fasciste… qui est la SEULE à y répondre ?

Car si pendant longtemps, pour le mouvement révolutionnaire (marxistes comme anarchistes), il n’y avait pas d’équivoque et les travailleurs avaient raison de ne pas vouloir financer la forge de leurs propres chaînes ; si les choses étaient encore ainsi claires en Italie dans les années 1970 voire (pour certaines organisations) aujourd’hui ; l’hégémonie idéologique ‘‘républicaine’’ a depuis longtemps phagocyté le ‘‘peuple de gauche’’ hexagonal et aborder ces thèmes n’arrache désormais que soupirs et haussements d’épaules ou cris rageux de ‘‘poujadisme !’’. Enfin bref…

La manifestation réactionnaire a vu, comme il fallait s’y attendre, profusion des fameux bonnets rouges devenus signe de ralliement ; avec la présence des Bonnets rouges… ‘‘frontaliers’’ (… la Bretagne n’a aucune frontière terrestre avec un autre État) ou des Bonnets rouges… ‘‘69’’, ce qui n’a aucun sens et s’appelle même une supercherie totale, puisque la Révolte des Bonnets rouges (1675) est une référence historique BRETONNE qui n’a de sens que dans la culture populaire bretonne ! Afin que les choses soient claires, vu que l’amalgame grossier est ce qui fait office d’arguments lorsqu’il n’y en a pas (mais qu’il faut bien défendre l’unité de la République ou de la ‘‘construction nationale historique bourgeoise-donc-progressiste France’’), les VRAIS Bonnets rouges bretons (collectif ‘Vivre, travailler et décider en Bretagne’, dont chacun-e est libre par ailleurs de penser ce qu’il/elle veut) n’ont pas participé à la manifestation et se sont même clairement exprimés là-dessus : ‘‘Les Bonnets Rouges, représentés par le Collectif « Vivre, décider et travailler en Bretagne », ne s’associent pas à la manifestation du 26 janvier prochain à Paris. Cette manifestation intitulée « Jour de Colère » ne correspond ni aux objectifs ni aux valeurs des Bonnets Rouges tels qu’ils sont exposés dans la charte des Bonnets Rouges (http://bonnetsrougesbzh.eu/charte-des-bonnets-rouges/)". À bon entendeur (et à titre préventif)… 


4. En tout cas, un autre enseignement de ce ‘‘Jour de colère’’ (suffisamment massif, malgré tout, pour cela) aura été de montrer clairement le caractère hétéroclite à l’extrême de la ‘‘droite radicale’’ et autres ‘‘nationalismes’’ ‘‘révolutionnaires’’ ou pas. À voir la multiplicité de ses ‘‘sensibilités’’, il apparaît plus clair que jamais que ce qu’il lui faut n’est pas même un(e) ‘‘rassembleur(se)’’ mais un(e) ARBITRE : une force qui non seulement réprime (on s’en doute) les révolutionnaires, progressistes et autres ‘‘ennemis intérieurs’’ désignés, mais soit prête à ‘‘sortir la boîte à claques’’ contre les groupes fascistes eux-mêmes, lorsqu’ils ne voudront pas se plier à de-gaulle-a-disparugaulle-massu-.jpgla discipline monopoliste élémentaire. Et cette force ne peut être que l’État ; sous une forme militaro-policière instaurée par ‘‘coup de force’’. C’est là que l’on voit toute l’erreur de considérer le fascisme comme un phénomène principalement extra-étatique, qui ‘‘prendrait’’ l’État ‘‘d’assaut’’ ; ce qu’il n’a d’ailleurs pratiquement jamais été dans l’histoire sauf (en apparence) en Allemagne et en Italie… face à des États particulièrement déliquescents (et encore… à un moment donné, il s’est bien trouvé des éléments à l’intérieur de l’État pour en ouvrir les portes aux chemises noires et brunes !). En réalité, nous en sommes de plus en plus convaincus, le ‘‘plan’’ pensé-sans-l’être est de laisser foisonner (dans certaines limites bien sûr) les ‘‘extrémismes’’ en tout genre que la crise générale du capitalisme engendre spontanément, les révolutionnaires communistes (marxistes ou libertaires) qui sont la bonne réponse à ladite crise mais aussi les MAUVAISES réponses réactionnaires, fascisantes, religieuses sectaires ou communautaristes (islamisme, sionisme), dieudonnistes et compagnie jusqu’à ce qu’enfin l’État militaro-policier intervienne pour ‘‘éviter la guerre civile’’… Il n’y aurait là rien que de très classique. Cet État fort ‘‘sauvant la France de la guerre civile’’ devrait en principe ‘‘trouver visage’’ dans une personnalité supposément ‘‘en dehors’’ et ‘‘au-dessus des partis’’, qui ne soit pas un(e) ‘‘politicien(ne)’’ (ce qui exclurait Marine Le Pen elle-même). Traditionnellement, de Mac Mahon après l’‘‘année terrible’’ des Communes (1871) à De Gaulle en 1958 en passant par Pétain et déjà De Gaulle (l’option ‘‘accepter le nouvel ordre européen nazi’’ contre l’option patriotique à outrance) en 1940, c’était souvent un militaire ; mais aujourd’hui, avec la fin du service militaire comme passage obligé de toute jeunesse masculine, la figure d’un galonné pourrait être beaucoup moins mobilisatrice (surtout qu’après le putsch, raté celui-là, d’Alger en 1961, l’Exécutif a beaucoup fait pour que les hauts cadres militaires deviennent de purs bureaucrates sans ‘panache’ ni ambitions politiques). On ne peut que se perdre en conjecture, mais ce n’est finalement qu’un aspect secondaire du processus qu’il importe, selon nous, d’avoir saisi.

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13 décembre 2013 5 13 /12 /décembre /2013 11:39

 

1386860786381Les derniers évènements en Catalogne, avec l'annonce "surprise" d'une consulta (référendum) sur la souveraineté pour le 9 novembre 2014, peuvent finalement se résumer en ces quelques mots qui suivent : l'exemple-même de tout ce que nous ne VOULONS PAS, de tout ce pourquoi NOUS NE NOUS BATTONS PAS. Une démarche 100% BOURGEOISE, institutionnelle, négociatrice façon épicier-du-bas-de-l’immeuble, chauviniste-égoïste aussi, l'argument n°1 étant que "l'Espagne" (sous-entendu, les "régions" pauvres et "assistées" de l’État espagnol) "vole" la Catalogne, "communauté autonome" au PIB et à la croissance la plus forte ; absolument 0% libération révolutionnaire dans le feu de la Guerre du Peuple.

En réalité, le président reconduit (par les dernières élections fin 2012) de la Generalitat, Artur Mas, aussi ultra-libéral que populiste, ne fait que tenir une promesse électorale qui lui a permis de sauver de justesse son fauteuil (son parti la CiU a perdu près de 8% et 12 sièges), main dans la main avec ses alliés (de circonstance) de la "gauche" catalaniste dont l'opportunisme n'est plus à démontrer : l'ERC (Gauche républicaine) qui a quant à elle (fortement) progressé, gagnant 6,7% et 11 sièges, ce qui l'a fait passer devant le PSC (PSOE local). Face à un État espagnol qui s'enfonce tous les jours un peu plus dans la crise, les nationalistes bourgeois croient enfin voir leur heure arrivée : celle d'une Catalogne capitaliste indépendante qui serait enfin un "Danemark de la Méditerranée" (un petit pays impérialiste de ce "gabarit"-là, nécessairement subordonné aux "gros" impérialismes européens : Allemagne, "France" etc.) et non plus (tel qu'ils le conçoivent) une "vache à lait" d'un État espagnol obligé d'"assister" tous les miséreux de son vaste territoire déshérité.voluntat-poble-lema-campanya-CiU EDIIMA20121109 0142 5

Pour dire un peu le niveau politique de ce nationalisme bourgeois : il veut farouchement (et apparemment une majorité de Catalan-e-s derrière lui) se séparer de l'"Espagne"... mais voudrait par contre absolument rester dans l'UE ! Manque de bol, l'annonce de la consulta s'est faite au moment précis où le chef du gouvernement "espagnol",  Mariano Rajoy, se trouvait avec le "président" européen Herman Van Rompuy ; lequel a aussitôt précisé que non, ça ne marche pas comme ça et qu'en cas de nouvel État indépendant, les traités européens seraient caducs envers lui et il ne serait pas automatiquement membre de l'Union... Ce qui a certainement dû en "doucher" plus d'un(e) dans la piétaille électorale de la CiU comme de l'ERC !

En réalité, tout cela n'est que pure mascarade et opéra-bouffe. Tout d'abord, la consulta est inconstitutionnelle, illégale et quel que soit son résultat, il n'aura aucune valeur juridique, ce qui pose tout de même un petit problème pour une démarche bourgeoise, se voulant "respectable" et légaliste. La consulta n'est pas le fruit d'un accord bipartite, comme la partition de la Tchécoslovaquie en 1992 ou les référendums québecois de 1980 et 1995 (qui auraient pu déboucher sur une indépendance effective) ; c'est une initiative unilatérale rejetée par Madrid. Ensuite, de toute façon, front popularla question de constitutionnalité ne se pose même pas, puisque la question n'est pas "La Catalogne deviendra un État indépendant et souverain, internationalement reconnu (tel jour à telle heure) - OUI/NON", et le jour dit la Catalogne serait indépendante ; mais une absurde question en deux temps, une sorte (en réalité) d'enquête d'opinion mais obligeant à se déplacer aux isoloirs : "Souhaiteriez-vous que la Catalogne soit un État - OUI/NON", puis "Si oui, souhaitez-vous qu'elle soit un Etat indépendant - OUI/NON". Autrement dit, en cas de (fort possible) victoire du OUI aux deux questions, que se passera-t-il ? Rien du tout, sinon de pouvoir agiter ce résultat comme une muleta sous le mufle furibond de Madrid ; pour une nouvelle fois négocier et essayer de gratter le plus possible de "prérogatives souveraines" (fiscales etc.) : un outil de plus dans le chantage permanent auquel se livre, depuis plus de 30 ans, la bourgeoisie catalan(ist)e contre la bourgeoisie castillane et "espagnoliste" qui tient l’État. Il est évident qu'arracher cette "indépendance" (qu'elle dit vouloir) "by all means necessary", autrement dit dans une démarche révolutionnaire seule manière de RÉELLEMENT LIBÉRER un Peuple aujourd’hui, n'est pas seulement au-delà de ses moyens matériels et intellectuels, mais tout simplement étranger à sa nature de classe. Mais voilà : Mas aura tenu sa promesse, et pourra espérer que les électeurs lui en soient gré au prochain scrutin. Quant aux électeurs sincèrement progressistes d'ERC ou encore des CUP (Candidatures d'Unité populaire, gauche catalaniste plus "radicale" qui soutient également la consulta), ils n'auront été que les coïons de cette pitoyable farce !

La seule chose amusante, finalement, dans cette affaire, aura été les réactions de la caste et du système espagnoliste : le front perlé de sueur et les yeux plus exorbités qu'à l'accoutumée de Rajoy ; la dirigeante du parti ultra-espagnoliste UPyD qualifiant de... dangereux "révolutionnaire" ce libéral catho-janséniste bon teint de Mas ; le "socialiste" RuGALcaba parlant de "voie sans issue" ou encore manifestation-barcelone pics 809ce "débat" sur TVE (la télévision publique "espagnole") présentant la singulière particularité... de n'inviter aucun(e) réel(le) partisan(e) de la consulta ! Voilà qui démontre, s'il le fallait, le caractère aux abois de cet État faible, aux mains d'une bourgeoisie "espagnoliste" (principalement castillane, léonaise, aragonaise etc.) incomparablement moins dynamique que ses comparses nationalistes basque ou catalane, et qui tente désespérément de faire tenir debout son fragile édifice de 1978. Mais, on l'a déjà dit de nombreuses fois ici, ce "pacte" de 1978 repose sur une contrepartie : l’État espagnol offre aux différentes bourgeoisies nationales, y compris les plus puissantes (basque et catalane), le potentiel militaire et policier d'un pays de 47 millions d'habitant-e-s ; et il n'est pas dit que cet aspect ne pèse pas lourdement au moment du choix décisif devant l'urne, faisant capoter la "naissance d'une nation" d'une courte tête comme au Québec en 1995.

De notre côté des Pyrénées, il y en a certainement ici et là (pour ne nommer aucun "parti", si l'on peut appeler ainsi ces clubs de boys scouts) pour rêver que la Catalogne "libérée" d'Artur Mas vienne à la rescousse de Nostra Patria comme Pierre d'Aragon en 1213, mais avec plus de succès cette fois-ci : c'est le bon vieux mythe de la "Cataloccitània" qui a ses partisans d'un côté comme de l'autre de la majestueuse chaîne ; les uns (plutôt au Sud...) cherchant des débouchés pour leurs capitaux et leurs marchandises ; les autres (plutôt au Nord...) se cherchant des maîtres, dont ils ne savent (au fond) pas se passer. Nous, nous avons toujours tenu pour clair que nous ne nous battons pas pour que Barcelone remplace Paris ; et si d'ailleurs notre lutte, dans ses spécificités, doit ressembler à une autre, c'est moins à la très particulière question catalane qu'aux luttes des très périphérisés Andalous ou Canariens, Asturiens ou Galiciens !

Tant que l’État-Prison "espagnol" tiendra le Peuple catalan comme les autres dans ses chaînes, aucun de "ses" Peuples ne saurait être libre ; mais tant que la bourgeoisie catalane même la plus "sang et or" qui soit EXPLOITERA et servira avant tout ses intérêts capitalistes en "Espagne" et dans le monde, la Catalogne ne saurait l’être non plus !

Que les Peuples se dressent contre le Système-"Espagne" comme les doigts d’un Poing Uni !

puño con banderas


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26 novembre 2013 2 26 /11 /novembre /2013 09:37

 

1. Notre position sur le mouvement en cours en Bretagne aura, nous l'avons déjà dit, surpris plus d'une personne. Nous aurons défendu un mouvement dans lequel (sans qu'il s'y résume !) la présence d'éléments réactionnaires est avérée, et le moins que l'on puisse dire, c'est que la "gauche" hexagonale en aura pris plein la gueule. Comment expliquer cela ?

Eh bien, pour comprendre cela, il faut avoir compris ce qu'est le système républicain bourgeois "français" né dans l'égorgement des Communes de 1871. Un système pratiquement unique au monde, où l'Armée idéologique du Capital possède DEUX AILES, "gauche" et "droite" alors que dans la plupart des pays cette distinction est relativement cosmétique (certains, comme l'Italie jusqu'en 1992, ne s'embarrassaient même pas de l'illusion d'un bipartisme, sans parler de l'"Espagne" qui était une dictature ouverte jusque fin 1975, de l'Allemagne où "sociaux-démocrates" et "chrétiens-démocrates" n'hésitent pas une seconde à former une Große Koalition si nécessaire, de l'Autriche où c'est même la norme, etc. etc.). charliehebdobonnetsrougesEt donc, le Capital avance l'une ou l'autre aile de son armée idéologique en fonction des circonstances. Lorsque "ça pète" dans les villes "rouges", comme en 1871, ou dans les "banlieues à racaille islamisée" comme en 2005, le Capital mobilise la "France profonde" conservatrice, la "France" de "la terre et (des) morts" ; c'est ainsi que des Bretons ou des Mayennais encore plus affamés que les ouvriers parisiens ou marseillais s'en allèrent gaiment massacrer ces derniers, et qu'aujourd'hui des CRS et des BACeux venus de toutes les périphéries possibles matraquent, flash-ballent et taserisent sans états d'âme tandis que le "soldat opinion" vit dans la terreur de ces "zones de non-droit", qu'il imagine comme un mélange de Ciudad Juarez et de Bagdad. Mais lorsque "ça pète" justement chez les "ploucs" de ces périphéries profondes, normalement pourvoyeuses de flics, de gendarmes et de "gens bien-intentionnés", alors le Capital mobilise toute la gôôôôche des jacobinards, républicards-laïcards et autres "libres-penseurs" (du genre lecteurs de Marianne), le "jacobinisme populaire" ("sans-culotte") syndical et partidaire, et bien sûr tout le mépris bobo-hipster-bords-de-Seine pour les "culs-terreux" de la "France-Jean-Pierre-Pernaut", l'arrogance intellectualoïde des lecteurs du Monde, de Charlie Hebdo, de Libé et (en bien moins grand nombre bien sûr) des "Materialistes.com". Et cela fonctionne : sur l'actuel mouvement breton, le gouvernement était bien emmerdé car c'était précisément surtout dans les "classes moyennes" (premier point d'appui, en principe, de toute classe dominante) que se développait une certaine solidarité avec les "Bonnets rouges" contre le "matraquage fiscal". Mais après qu'Ayrault ait annoncé la suspension de l'écotaxe (à laquelle se résume évidemment, vu la manipulation médiatique, le "problème breton" pour 90% de la population), dès le 9 novembre une majorité considérait que le mouvement devait cesser. Une majorité assise sur le bon-vieux-sacro-saint (et assez unanime) légalisme "républicain" (rejet des "violences" et des "destructions" qui accompagnent le mouvement), mais largement centrée à "gauche" contre un mouvement perçu comme "poujadiste" voire "séparatiste".

En fonction des circonstances et de quelle aile (de son armée) le Grand Capital met en mouvement, nous sommes donc obligés de porter le fer dans l'une ou l'autre direction. Il en ira de même pour les guerres et autres manœuvres impérialistes : mobiliser contre un Assad ou un Kadhafi (ou un Milosevic hier) fonctionnera mieux dans l'aile "gauche" de l'armée idéologique (l'aile "droite", de manière générale, n'aime pas trop ces grandes interventions avec Rafales, tambours et trompettes, elle aime les guerres qu'on ne voit pas, celles par "sauvages" interposés, celles des mercenaires à la Bob Denard, des forces spéciales et autres barbouzes etc.). Il est toutefois souvent possible de faire consensus (contre les z'islamiiiistes au Mali par exemple, et sur la question de l'islam et des musulmans en général).

Charlie.03NOV2013.005Ainsi va le système "républicain" bleu-blanc-rouge : c'est en fait un système qui peut connaître une fascisation potentiellement puissante, autour d'un "centre d'agrégation" de la mobilisation réactionnaire ultra (comme le FN aujourd'hui, le mouvement gaulliste dans les années 1960 ou les Ligues dans les années 1930) ; un système policier par nature depuis sa naissance dans le sang des Communes et même depuis Napoléon avec son Fouché ; mais où le fascisme ouvert, de type hitlérien, ne survient que dans des circonstances vraiment exceptionnelles (catastrophe de 1940 et occupation nazie), et d'ailleurs lorsque cela arrive, le fascisme en question se "fabrique" une droite et une "gauche" (RNP de Déat... qui assumait d'ailleurs totalement la référence à "(17)93" et au jacobinisme, PPF de Doriot etc.) et affirme (Pierre Pucheu, Ministre de l'Intérieur 1941-42) lutter contre les "extrêmes" de droite (gaullistes) comme de gauche (communistes) : on l'ignore souvent, mais le régime de Vichy était absolument multipartiste ! Comme situations plutôt graves surmontées (et mobilisations réactionnaires de masse assurées !) sans abandonner les apparences "démocratiques" libérales-parlementaires et sans mettre en place un régime "totalitaire", la Grande Guerre de 1914-18, la guerre d'Algérie ou Mai 68 et les années suivantes sont d'assez bons exemples. D'autres pays peuvent également, aujourd'hui, connaître ce type de "démofascisme", comme typiquement les États-Unis sous Bush et Cheney après le 11-Septembre, mais même depuis l'America is back de Reagan en 1980, l’État espagnol depuis la Transition de 1975-78 ou Israël depuis l'origine (mais particulièrement depuis 2000) ; mais la "France" a réellement été précurseuse en la matière. C'est en effet l'un des pays où la pensée dominante bourgeoise est l'une des plus anciennes et puissantes ; alors que l'Allemagne "jetée" dans la "démocratie" libérale parlementaire (telle que nous la concevons) en 1918, l'Espagne de même en 1931, et l'Italie (système bourgeois censitaire jusqu'en 1912) ou encore le Japon (monarchie de droit divin) ne l'ayant alors jamais connue, ont dû face à la crise générale du capitalisme et à la menace révolutionnaire avoir recours au fascisme ouvert, "totalitaire".

En réalité, il est impossible de comprendre la question des langues, cultures, "décentralismes" et autres affirmations "minoritaires" (nationales) si l'on se place dans une vision strictement "mécaniste classiste" des choses. Pour comprendre, il faut être (et nous le sommes !) GRAMSCIENS. Il faut en effet avoir lu (et compris) Gramsci pour comprendre qu'il y a là une tranchée idéologique du système de défense du Capital : le capitalisme français s'est construit en construisant l'amnésie collective des Peuples d'Hexagone, l'oubli de ce qu'ils sont, de leur histoire ; car la mémoire de cela mettrait forcément à nu la manière dont ledit capitalisme français s'est construit (sous les "grands rois", la "révolution", Napoléon et les régimes successifs jusqu'à la définitive république des monopoles de 1870), et ferait très certainement le "lien" avec les situations "régionales" actuelles. D'autres États ont fait différemment ; mais l’État français a fait comme cela, et pas autrement. Et aujourd'hui ? Et bien, en soi, le Capital BBR n'aurait sans doute aucun problème avec un modèle étatique fédéralisé : l'Allemagne fonctionne "très bien" avec ses länder, l’État espagnol avec ses "autonomies", le Royaume-Uni avec ses "dévolutions" etc. etc. Mais il est tout simplement trop tard pour faire machine arrière... C'est un peu comme le type qui aurait menti à sa famille pendant des années entières et qui, lorsque la vérité émergerait enfin, n'aurait d'autre solution que de tuer tout le monde puis de tenter de se suicider : extrémités qui dans le champ social s’appellent la guerre civile et auxquelles, on s'en doute, le Capital BBR veut à tout prix éviter d'arriver. L’État français est en fait prisonnier de sa propre idéologie fondatrice qui veut depuis plus de 200 voire 300 ans qu'il n'y ait "que des Français", que les réalités nationales ne soient que des "moyenâgeries" obscurantistes de bouseux clouant des chouettes sur leurs portes, de châtelains cravachant leurs gueux, de curés affirmant que la Terre est plate et aujourd'hui de "petits patrons et de paysans identitaires poujadistes". Là est la fonction fondamentale, au service du Grand Capital, des Mélenchon, Chevènement, Françoise Morvan, PRCF, POI-poï, ROCML, "Arrière-Garde ouvriériste", "pcmlm" et consorts ; bref de tous les JACOBINARDS DE MERDE de droite comme de "gauche" !

francoise-morvanQui n'a pas compris cela n'a pas compris la herse de "société civile" qui défend le donjon des monopoles "français", et ne peut donc pas la briser et faire tomber ce foutu donjon. C'est la raison pour laquelle, par exemple, au risque de choquer, SLP se veut radicalement anti-maçonnique. Nous savons qu'au début du mouvement ouvrier, entre 1848 et 1940, beaucoup de ses cadres (comme Ernest Ferroul de notre Grande Révolte occitane de 1907) ont appartenu à la franc-maçonnerie (au Grand Orient, la loge athée/agnostique et "progressiste") et nous reconnaissons la valeur historique de leur action. Les francs-maçons ont été persécutés (les loges "de gauche" en tout cas...  encore que) par le fascisme dans les années 1930-40, ici sous le régime de Vichy et l'occupation nazie, et cela en faisait alors des alliés objectifs dans la Résistance antifasciste (beaucoup de kollabos venaient cependant du Parti radical ou de l'aile droite de la SFIO, ce qui à l'époque voulait presque automatiquement dire francs-maçons). Mais aujourd'hui, nous considérons que l'on ne peut pas être franc-maçon et faire partie d'une organisation révolutionnaire conséquente. Les loges maçonniques sont un état-major de l'Armée idéologique du Capital, de son aile "gauche" (Grand Orient, Libre-Pensée) mais aussi d'une grande partie de son aile droite (GLF et GLNF qui abritent notamment - entre autres - les satrapes africains). La "France" est connue pour être un État policier, or la plupart des cadres de la police sont francs-maçons (les cadres militaires et gendarmes étant plutôt, eux, dans des fraternités catholiques : Opus Dei, Civitas/ICHTUS ex-Cité catholique etc.). Nous, communistes, ne sommes pas pour la "libre pensée" mais pour la JUSTE pensée : la CONCEPTION COMMUNISTE (matérialiste, marxiste, scientifique) DU MONDE. Aux chiottes, les "libres" idéologues de ce système de merde ! C'est pourquoi être réellement communiste implique forcément de rejeter la franc-maçonnerie ; c'était d'ailleurs un principe de l'Internationale communiste dans les années 1920* (mais en "France" il ne fut jamais vraiment respecté). Parmi les "frères" maçons très "visibles" en ce moment, il y a notamment un certain Jean-Luc Mélenchon... Mais cela n'enlève rien, en revanche, à notre position sur les troupes de la gauche bourgeoise, sur le "peuple de gauche", le "petit peuple progressiste" qu'il faut œuvrer à amener à la révolution.

carte des traites2. On ne peut résoudre un problème que si on le COMPREND : évidence que connaît même un écolier confronté à un exercice de maths. Le capitalisme engendre pour les masses populaires toute une série de problèmes, qu'il n'est pas possible de résoudre si l'on ne comprend pas qu'ils viennent du capitalisme, ou même si l'on dit simplement que "c'est le capitalisme" sans compréhension plus poussée. Et il n'est pas possible de comprendre un problème si l'on ne comprend pas le CADRE dans lequel il se pose ; or dans chaque "grand bassin économique de vie populaire" le capitalisme se manifeste de manière différente, et génère des problèmes différents. Chaque "cadre" des problématiques capitalistes est une création de l'activité capitaliste elle-même. Il faut analyser et comprendre la création de ce cadre pour comprendre les problèmes qu'il contient, et pouvoir envisager de les résoudre. C'est tout le sens de notre démarche depuis maintenant bientôt 3 ans ; démarche qui se découvre maintenant (sans s'en être jamais inspirée...) des parallèles avec les travaux de "socio-géographes" universitaires (Christophe Guilluy etc.), même si nous n'en partageons évidemment pas les conclusions réformistes (Guilluy et consorts se rêvent sans doute en successeurs de Rosanvallon et de son "Nouvel âge des inégalités", qui fut le "petit livre rose" du jospinisme en 1997-2002), ni certaines déductions socio-politiques**.

Déterminer et comprendre, déterminer pour comprendre les différents "cadres" (qui sont des constructions historiques) dans lesquels se pose le problème capitaliste au sein de l’État français (qui est lui-même un "cadre", étudié et compris comme tel), voilà tout notre propos. En l'absence d'une telle étude et compréhension, on ne peut que pérorer sur des situations comme celle que connaît actuellement la Bretagne. Les soi-disant "socialistes", "marxistes" ou "anarchistes" qui crachent sur les "Bonnets rouges esclaves" qui "manifestent avec leurs patrons" n'ont, tout simplement, strictement rien compris au cadre nommé "Bretagne" de la question sociale, et au cadre nommé "France" dans lequel, pourtant, ils vivent et prétendent lutter au quotidien pour "en finir avec le capitalisme"...

3. Nous avons parfois pu entendre que "les petites nations ne sont pas vouées à avoir un rôle déterminant dans la lutte révolutionnaire à venir"... Ceci est, d'abord, une mal-compréhension de notre propos, car ce que nous disons c'est que ce sont les PÉRIPHÉRIES, les territoires de relégation qui sont voués à être les "campagnes" de la Guerre populaire en Europe ; simplement, nous constatons qu'en "France" cette "périphérisation" recoupe très souvent le territoire d'une nationalité annexée au cours de la formation de l’État, depuis le 13e jusqu'au 19e siècle.

Langues de la France1Ensuite, cela nous semble soulever une sérieuse question : c'est quoi, une "petite nation" ? La "France" approche au total les 66 millions d'habitants. Retirons les presque 3 millions d'ultramarins (DOM et COM) : restent 63 millions. Retirons les populations du "Midi" : Occitanie, Arpitanie, Pays Basque, Roussillon (Catalogne-Nord), Corse (soit les régions Rhône-Alpes, PACA, Languedoc-Roussillon, Midi-Pyrénées, Auvergne, Limousin, Aquitaine et Corse) : on approche les 23 millions. Restent 40 millions. Retirons la population de la Bretagne à 5 départements (3,2 millions + 1,3 pour la Loire-Atlantique) : 4,5 millions. Restent 35,5 millions. Retirons la population du "Grand Ch'Nord" ou "Grande Picardie", de l'aire linguistico-culturelle PICARDE, soumise seulement entre les règnes Louis XI et (pour l'essentiel du Nord-Pas-de-Calais actuel, les "Pays-Bas français") de Louis XIV : Picardie sauf le sud de l'Oise et de l'Aisne (grosso modo) : 1,5 millions environ ; et Nord-Pas-de-Calais (4 millions) : 5,5 millions. Régions auxquelles on pourrait ajouter, en raison de sa grande proximité socio-économique, culturelle et historique, le département des Ardennes (dont la partie nord - 1-2-3 - n'a été conquise, elle aussi, qu'au 17e siècle) : 280.000 habitants. Bref, grosso modo 5,8 millions pour le "Peuple des Brumes" : restent moins de 30 millions. Il faut encore retirer la Lorraine (annexée, pour la majeure part, en 1766 seulement !) : 2,3 millions ; l'Alsace (annexée seulement sous Louis XIV, voire seulement en 1798 pour la région de Mulhouse) : 1,9 millions ; et la Franche-Comté, stable dans ses frontières ("comté de Bourgogne") depuis l'époque carolingienne et annexée en 1678 après avoir subi une guerre d'extermination de 10 ans (1634-44) qui vit disparaître... les 2/3 de la population : 1,1 millions. Il reste, pour la "vraie France" dont parlait au 19e siècle Jules Michelet, quelque chose comme 24,5 millions de personnes : 37% seulement des 66 millions de départ !!! Sans oublier que dans ce restant, les peuples poitevin-vendéen-saintongeais (entre Loire et Gironde, sorte d'"Arpitanie de l'Ouest" intermédiaire avec le "Midi" d'Òc), "grand-berrichon" (entre Loire et Massif central), bourguignon ou encore normand ont plus que leurs particularismes ; et qu'il faut en outre soustraire, sur tout l'Hexagone + la Corse, 7 à 10 millions de "colonisé-e-s intérieur-e-s" qui pour la plupart ne se sentent nullement "français" et même (et nous reprendrons en chœur avec eux), "niquent la France"... OÙ EST LA PETITE NATION ? [au demeurant le terme même de "petites nations" semble être né sous la plume d'Engels à la fin des années 1840 dans un de ces délires antipopulaires assez indéfendables dont il était alors coutumier, auxquels les faits ont cinglamment donné tort et avec lesquels le marxisme actuel a heureusement pris des distances astronomiques...]

la-pyramide-du-systeme-capitalisteEn définitive, il n'y a peut-être de véritables "français" que la BOURGEOISIE et ses affidés : ceux et celles dont le système-France sert les intérêts et/ou fonde l'existence. En dessous, les ENGRAISSANT à la sueur de leurs fronts, il y a DES PEUPLES. Même le Bassin parisien (au sens géographique) peut être subdivisé en (grosso modo) 6 peuples : la "Grande Île-de-France" dans un polygone Beauvais-Soissons-Provins-Sens-Orléans-Chartres-Vernon, la "Grande Picardie" dont nous avons déjà parlé (Nord de la région Picardie, Nord-Pas-de-Calais, éventuellement Ardennes), le "Grand Berry" (Berry, Bourbonnais/Allier, Nivernais/Nièvre), le "Grand Val-de-Loire" (Blois, Touraine, Maine, Anjou), la Normandie et la Champagne...

Alors après, on peut toujours s'"amuser" à nier cela en faisant semblant de ne rien comprendre à ce que nous disons, comme lorsque "certains" font remarquer que la Mayenne connaît une situation économique et sociale tout à fait similaire à celle de la Bretagne. Mais évidemment ! Nous n'avons jamais dit le contraire ! Ce que nous disons, c'est qu'il y a une opposition fondamentale entre des CENTRES (un Grand Centre formant un trapèze Tours-Rouen-Reims-Auxerre et une bonne vingtaine de "centres-relais") et des PÉRIPHÉRIES, et que SOUVENT ces périphéries "recoupent" des QUESTIONS NATIONALES, car ce sont des Peuples qui ont été conquis au cours de la formation de l’État par et pour le capitalisme. Évidemment que la contradiction Centres/Périphéries ne suit pas strictement la frontière de la Bretagne, puisque cette "province" abrite deux "centres-relais" (Rennes et Nantes) et un "phénomène Côte d'Azur" sur sa côte sud (ou encore vers Perros-Guirec, Saint-Malo ou entre Saint-Brieuc et Plouha)*** tandis que des secteurs avoisinants sont profondément relégués, en Mayenne mais aussi dans le Maine-et-Loire (Anjou) ou (surtout) dans la Manche (Cotentin), ou encore en Vendée. Ce qui est relégué/périphérisé à l'ouest de l'Hexagone c'est en fait une "Grande Armorique" qui comprend quasiment toute la Basse-Normandie avec le Cotentin, le Maine, l'Anjou, le Bas-Poitou (Vendée et Deux-Sèvres) et la Bretagne ; tout le Massif armoricain en réalité. Mais cela ne veut NULLEMENT DIRE qu'au sein de cette "Grande Armorique" la question nationale bretonne n'existe pas ! Et une Bretagne LIBRE ET SOCIALISTE (dieub ha sokialour !) serait évidemment, pour toute cette "Grande Armorique" périphérisée, une BASE ROUGE que l’État français, en vérité, ne pourrait tout simplement pas gérer : ce ne serait ni plus ni moins que sa fin...

 


* De Trotsky ("hérésiiiiiiie !!!" gueulera qui voudra...), mais néanmoins TRÈS JUSTE : lire ici.

la-france-en-face.jpg** Ainsi, le fort vote FN et plus largement le vote "droitier populaire blanc" ne se trouve pas tellement dans les périphéries profondes (en bleu foncé), mais plutôt à la marge des zones "métropolitaines" en blanc : en mettant côte à côte les deux cartes, on voit clairement le vote pour Marine Le Pen (premier tour 2012) entourer les grandes taches blanches métropolitaines (Paris, Lyon, Aix-Marseille, Nice-Côte-d'Azur, Toulouse, Bordeaux, Nantes et Rennes, Lille) ou carrément... en faire partie, et border (Nord, Nord-Est, "Rhône-Alpes") la Suisse, l'Allemagne et le Bénélux (la "métropole européenne"). En Corse, ce sont clairement les alentours d'Ajaccio, Bastia, Calvi, Propriano et le Sud-Est (Porto-Vecchio, Bonifacio) ainsi que le secteur de la base de Solenzara (vote des militaires ?) : les secteurs les plus peuplés, touristiques et socialement inégalitaires (ce qui n'est pas la même chose que "pauvre", à ne pas confondre !). La Corse "profonde" (en particulier le secteur de Corte, bastion nationaliste) ne vote pratiquement pas FN. "Pixelisé" par bureau de vote, le résultat serait encore plus éloquent... "Socio-géographiquement", ce n'est pas tant un vote de relégation réelle (prolétariat et paysannerie pauvre, périphéries profondes) que de sentiment et de peur de celle-ci ("très-petite-bourgeoisie"). Ce ne sont en fait pas tant des "exclus" qui votent FN que des gens ayant un fort "ressenti" d'exclusion aux abords d'un grand "centre d'inclusion" ("métropole mondialisée") ; sentiment associé à celui de faire vote le pen 2012"tampon" avec plus exclus qu'eux (la "ZUS du coin", un camp de Roms etc. etc.). Comme l'ont toujours analysé les marxistes conséquents, le populisme d'extrême-droite, le fascisme, vise précisément à livrer bataille à l'idéologie prolétarienne dans les "couches en déclassement" de la société, pour éviter que celles-ci ne deviennent révolutionnaires (ce qui serait fatal au système). Là où ce sentiment disparaît, tout simplement par l'absence de grand "centre-relais" capitaliste (ni bobo centrurbain ni ZUS à l'horizon, donc), le vote FN tend également à disparaître. Les zones de "grand bleu" sur la carte des "fragilités sociales" (Bretagne et "Grande Armorique", Massif "central", Alpes, Pyrénées, Gascogne) se caractérisent plutôt, tout comme les "cœurs" des grandes métropoles, par leur blancheur ou leur jaune très clair sur celle du vote FN ; et même si celui-ci monte inexorablement, il monte "partout pareil" c'est à dire que les zones de gros scores "historiques" le restent (mais désormais à 30 voire 35% et non plus 20-25%) et celles de scores historiquement faibles le restent également, même si ce ne sont plus 5-10% mais 10-15% ou 15-18%. [NDLR : le 'p''c''mlm' part exactement des mêmes postulats erronés sur "la classe ouvrière principalement périurbaine et votant massivement FN", alors que cela n'est vrai que dans le Nord du Bassin parisien, en Lorraine et Alsace, dans le couloir Saône-Rhône, en Provence et Languedoc côtier.]

*** Les principales poches de relégation/périphérisation/précarité en Bretagne (à 5 département of course) sont :

- le Poher et la Haute-Cornouailles : centre-est du Finistère (entre Arrée et Montagnes Noires), sud-ouest des Côtes d'Armor et nord-ouest du Morbihan (Gourin, Guéméné-sur-Scorff, Le Faouët etc.).

- le nord de la Loire-Atlantique (pays de la Mée).

- la baie du Mont-Saint-Michel (Pleine-Fougères, Antrain etc.) et le secteur extrême-nord de l'Ille-et-Vilaine (Louvigné-du-Désert).

- le sud-est des Côtes d'Armor et l'extrême-nord-est du Morbihan : Porhoët, Mené.

 

communisme

 

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18 novembre 2013 1 18 /11 /novembre /2013 09:59

 

1. La première chose (mais assez éloignée dans le temps) à laquelle on peut comparer les actuels évènements qui secouent la Bretagne, c'est bien sûr notre Grande Révolte occitane de 1907. D'autres parallèles pourraient encore être tracés, comme avec le grand mouvement lorrain de 1979-80 ("Lorraine Cœur d'Acier") contre le démantèlement de la sidérurgie, pilier de l'économie locale comme l'est l'agroalimentaire en Bretagne. Mais ces évènements peuvent aussi être rapprochés d'autres beaucoup plus récents.

Manifestation-pour-l-emploi-en-Bretagne-le-2-novembre-2013-.jpgLe mouvement des "Bonnets rouges" en Bretagne s'inscrit en réalité dans la totale continuité du LKP (Lyannaj kont Pwofitasyon) en Caraïbe, début 2009 : c'est en fait un "LKP métropolitain" ; c'est le vent de la remise en cause du système-France, dont le LKP était une première expression ultramarine, qui vient de toucher les côtes "métropolitaines" porté par le Gulf Stream !

Bien sûr, les gens à courte vue s'écrieront : "meuuuh nooooon, n'importe quoi, rien à voir, pas du tout les mêmes acteurs sociaux, pas du tout la même idéologie, le LKP était de gauche (comme d'ailleurs la révolte languedocienne de 1907 ou le mouvement lorrain de 1979) alors que les Bonnets rouges sont ultra-ambigus, il y a le patronat et les fachoooos..." etc. etc. (rappelons quand même que le LKP fut lui aussi violemment attaqué, en son temps, pour son soi-disant "racisme anti-blancs"). Pas vraiment les mêmes acteurs sociaux ? Certes. Mais si l'on y regarde de plus près, on s'aperçoit que les acteurs des deux mouvements ont en fait un grand dénominateur commun : les uns comme les autres sont les PILIERS de la vie économique et sociale locale. En Bretagne, plus que d'une classe, c'est d'un secteur productif qu'il s'agit : l'agroalimentaire, patrons et salariés réunis. Et c'est précisément ce secteur... qui faisait que la péninsule armoricaine n'était plus, ces dernières années, la terre de misère qu'elle était il y a encore 60 ans. Aux Caraïbes, en 2009, c'était le petit emploi public... c'est-à-dire précisément ce qui fait que Gwadloup et Matinik ne sont pas Haïti ou la Jamaïque. Autrement dit, les secteurs sociaux qui FONT que la relégation périphérique, coloniale dans un cas (de type particulier, "départementale") et provinciale dans l'autre, est "masquée" ; qui font que l'on peut "quand même s'estimer heureux d'être en France", qu'il y a "plus à plaindre"... et qui sont les premiers à s'effondrer lorsque la crise, mondiale, finit par rattraper la contrée, se retrouvant alors propulsés en première ligne de la révolte. Imparable... C'est là le formidable moteur de mobilisation du DÉCLASSEMENT, bien plus puissant en fait que la pauvreté elle-même, même si, comme disait Lénine, il apporte avec lui son lot de "fantaisies réactionnaires", nostalgie du "bon vieux temps" oblige.

Octana54 2Les "Bonnets rouges" sont donc, on le répète, un LKP ayant accosté en "métropole" hexagonale ; comme le mouvement antillais, les problèmes qu'il soulève ne sont pas l'affaire de telle ou telle mesure gouvernementale : ils touchent à l'organisation même de l'État français comme cadre économico-politique de production, de valorisation du Capital. Ce qu'il soulève, même si certains points "cristallisent" la colère (ici l'écotaxe, comme hier le prix du carburant en Gwadloup), ce sont les problématiques  fondamentales d'un territoire Octana54 4G dans le cadre du système-France, cette construction par et pour le Capital vieille de 8 siècle ; d'où son caractère DE MASSE, cet "interclassisme" qui fait renâcler les "révolutionnaires" de campus (qui s'imaginent sans doute qu'une révolution, du moment que c'est sous un drapeau rouge ou/et noir, peut se faire uniquement avec des ouvriers d'usine... ou des fonctionnaires et employés publics, ou des étudiants). Bien sûr, entendons nous bien : pour nous, l'intérêt de ce mouvement (comme du LKP avant lui) sera  827509 voteslistesgauched'avoir existé. Pas ce à quoi il aura mené, car pour qu'il mène à quelque chose (d'intéressant) il est encore trop tôt. Ce n'est pas, on l'a dit, un mouvement autour d'une revendication précise (pas même l'écotaxe) mais une convergence d'intérêts très divers voire au premier abord contradictoires : pour l'unifier dans une même direction cohérente et aller de l'avant, il faudrait un Parti révolutionnaire conséquent, or il n'y en a pas encore actuellement en Bretagne. Il est donc probable que les divers intérêts et revendications soient "mis à la découpe" et traités au cas par cas, "corporation" par "corporation", satisfaisant voire réjouissant les uns, laissant aux autres le goût amer de l'échec et de la trahison, l'objectif étant de "dégonfler" à tout prix la mobilisation, de "désamorcer la bombe" pour ne plus laisser sur le champ de bataille que quelques desperados. C'est ce qu'il s'est toujours passé dans l'Histoire, en Occitània en 1907 comme en Karayib en 2009.

Mais ce mouvement des nouveaux Bonnets rouges aura existé et au delà de toutes ses contradictions et ambigüités, il aura lancé, confirmant toutes nos thèses, un petit défi au système-France ; le défi (plus que de ses bonnets rappelant davantage le commandant Cousteau qu'une révolte du 17e siècle...) de sa marée de drapeaux bretons flottant sur Kemper le 2 novembre... Un Peuple reprenant conscience de lui-même, ce qui est fondamentalement insupportable pour un système fondé depuis 800 ans sur la construction d'un grand "lager économique" hexagonal (puis également colonial ultramarin) où les travailleurs du peuple soient de simples pions et variables d'ajustement... Car pour que cela fonctionne, il faut absolument que les masses populaires ne manifestation-bonnets-rouges-contre-ecotaxe-defense-emploi-sachent plus qui elles sont, d'où elles viennent, n'aient plus aucune conscience d'elle-même, car ce serait automatiquement mettre à nu toute la construction historique et le fonctionnement actuel de la machine capitaliste, et le début de la remise en cause fatale. C'est cela qui aura fait trembler et s'étrangler de rage, outre les hauts dignitaires dudit système (même ceux qui font semblant de "comprendre le ras-le-bol", boulot d'opposition oblige*...), toute une foule de personnages a priori inattendus... a priori, sauf pour qui a une analyse et une compréhension profonde des forces sociales en présence dans ce "cher" Hexagone. Quant au fait que ce mouvement ait eu pour chefs de file des "petits patrons productivistes-pollueurs", que les fameux bonnets aient été fournis par Armor-Lux-de-la-marinière-à-Montebourg, qu'il y ait eu des fascistes ou autres "socialistes français poujadistes" dans la foule de Quimper ou d'ailleurs, pour dire les choses clairement, on s'en tape comme de l'An 40 exactement comme du fait que 1905 en Russie ait commencé derrière un pope orthodoxe agent du tsar (Gapone). À ce sujet, lisez ici... oui ? Eh bien non ! Ce ne sont pas "lesmaterialistes.com", c'est Françoise Morvan, une "petite célébrité" des colonnes de l'Huma, de Marianne, le Monde, Libé etc., une mélenchonarde connue pour sa haine viscérale et sa reductio ad hitlerum systématique de toute affirmation populaire bretonne. Enfin bon, pour une fois que "lesmaterialistes.com" font penser à autre chose que Dreuz.info...

Disons-le en toute franchise : la jouissance de voir combien ce mouvement des Bonnets rouges bretons, et nos prises de position dessus, FONT CHIER est bien réelle... Mais elle ne serait rien sans la compréhension scientifique marxiste de POURQUOI cela fait tant chier ; en particulier une certaine "bonne France" pseudo-"rouge" qui fait totalement partie du paysage, qui est, dira-t-on, la "partie rouge du drapeau tricolore" ! Tout ce qui bouge n'est pas rouge ? Certes, en effet... Tout ce qui bouge n'est pas AUTOMATIQUEMENT rouge : cela dépend de quelle(s) force(s), quelle(s) classe(s) en prennent la tête. Mais tout ce qui bouge est POTENTIELLEMENT rouge si un Parti révolutionnaire conséquent réussit à se mettre à la tête du mouvement, au moins d'une partie ; en tout cas s'il y joue son rôle de Parti révolutionnaire. À la décantation des forces révolutionnaires de Bretagne de s'opérer, pour donner naissance à un tel Parti !

Poent eo stagan Bretoned, gant stourm meur ar vro !

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Lire ici (ou faudrait-il se l'interdire ??) une mise au point par des libertaires ayant participé au mouvement : Une autre vision des Bonnets rouges

Ou encore ce "coup de gueule" d'une militante "zadiste" présente elle aussi le 2 novembre à Kemper/Quimper : Front de Gauche et écolos, vous avez insulté les Bretons, faudra pas venir pleurer

OU ENCORE cette Lettre ouverte du syndicat CGT de Damen BREST au secrétaire CGT régional de Bretagne et à la secrétaire CGT générale départementale du Finistère ; qui a passablement fait du reuz (bruit, "boxon" en langue-de-l'obscurantisme) dans la Confédération...

 

2. La fascisation rampante, la mobilisation réactionnaire de masse se poursuit à toute vitesse d'un bout à l'autre de l'Hexagone, entre droitisation toujours plus assumée de l'UMP (c'est désormais le réputé "modéré" Fillon qui appelle à "ne pas choisir" entre FN et PS...) et montée d'un FN "dédiabolisé" que de récents sondages annoncent maintenant en tête aux européennes. Les bruns nuages continuent à s'amonceler dans le beau ciel hexagonal, qui avait pourtant résisté aux nuages radioactifs de ces cons de cocos russes.

4445771-guillaume-peltier-responsable-de-la-620x345-1En réalité, la vraie question est peut-être la suivante : QUI, de la "droite décomplexée" de l'UMP ou du FN, MÈNE LA DANSE ? Au regard des constats depuis bientôt 30 ans, il peut sembler que c'est bien le Front lepéniste qui dicte son discours à la droite et même à une partie de la "gauche", en les obligeant à courir désespérément après ces électeurs qu'il "vampirise". Mais ce pourrait n'être qu'une apparence... Ce pourrait très bien être en réalité la droite "républicaine" qui oblige en permanence le FN à se positionner par rapport à elle, soit pour rester plus à droite (sur les questions de société, l'immigration, la sécurité etc.) soit pour paraître... plus "à gauche" (sur l'Europe, la "mondialisation", le "libéralisme" etc.), tout en se réservant toujours le beau rôle, celui de gens "responsables" et "modernes", qui ne font pas "qu'agiter des peurs" mais "proposent des solutions"... Partant du pari que 1°/ l'électeur "central", urbain-éduqué, aujourd'hui quasi-majoritaire, se tournera toujours vers des "gens responsables" et rejettera les "aventuriers populistes", 2°/ même l'électeur "populaire-périphérique-relégué", s'il peut exprimer un "coup de gueule" en votant FN (ou en disant qu'il va le faire), se tournera lui aussi suffisamment souvent, devant l'urne décisive, vers des gens "responsables" et "qualifiés".

6508866.jpgEn d'autres termes, la "droite décomplexée", qui s'est quelque peu dépouillée des oripeaux du gaullisme mais voudrait bien occuper la même position hégémonique que celui-ci dans les années 1960-70, cherche peut-être à faire du FN ce qu'était le PC de Thorez, Waldeck, Duclos et Marchais pour De Gaulle et Pompidou : un mélange d'épouvantail-repoussoir et d'efficace gardien des masses populaires dans une position inoffensive, avec l'avantage supplémentaire d'être réactionnaire sur toute la ligne (et de ne pas être lié à une grande puissance étrangère).

Le petit problème, c'est que tout cela est un jeu aussi risqué que de jouer avec un briquet dans une station service... Il y en a déjà eu à qui le "joujou" a glissé des mains ; on pense notamment à une certaine droite italienne du début des années 1920 (Giolitti, Bloc national) ou une certaine droite allemande du début des années 1930 (Von Papen & co). D'ailleurs, à ce sujet, on notera que si la référence absolue de nos z'amis "Lesmaterialistes.com" (l'israélien Zeev Sternhell) décrit l'Allemagne comme "la patrie de l'orthodoxie marxiste" (enfin bon, pour les ML, classiquement, c'est plutôt le berceau du révisio-réformisme et aussi d'un certain gauchisme), cela n'a (force est de constater) pas vraiment empêché le triomphe du nazisme, qui reste à notre connaissance la pire forme de fascisme de tous les temps, loin devant quelque "socialisme français" que ce soit... 

3. Toujours sur le sujet du fascisme et de l'antifascisme ; dans leur violent article contre la question nationale bretonne (digne, cf. ci-dessous, des révisionnistes turcs pourfendus par Ibrahim Kaypakkaya), "Lesmaterialistes.com" nous disent que l'affirmation populaire bretonne d'être un Peuple est "identitaire" et que, dénonçant le jacobinisme, elle rejette "l'apport des Lumières", ce qui explique son actuel "poujadisme" dans la droite ligne du "socialisme français". Pour eux, le fascisme et spécifiquement le fascisme "français" (le discours "national et social" etc.) est un rejet des Lumières (c'est la thèse de Sternhell, qui est leur référence). Or, selon nous, ceci est erroné ou en tout cas inexact ; et entre en contradiction (sans qu'ils s'en rendent compte) avec leurs propres analyses d'il y a quelques années.

D-apres_Maurice_Quentin_de_La_Tour-_Portrait_de_Voltaire-_.jpgEn effet, s'il doit rester quelque chose de l'activité antifasciste du 'p''c''mlm' (peut-être leur seul apport à la pensée communiste), c'est que la "France" est la terre du CONFUSIONNISME idéologique, du "ni droite ni gauche", des petits "Voltaires de Prisunic" politiquement "inclassables" à la Jean-Edern Hallier, Philippe Val, Régis Debray, Philippe Sollers, Jacques Vergès, Michel Onfray ou (plus bas-de-gamme encore) Alain Bonnet de Soral. Mais justement ! Si la "France" est une telle terre de confusionnisme, c'est PARCE QUE c'est le "pays des Lumières", PARCE QUE cette ambivalence est celle des "Lumières" elles-mêmes... C'est en "France" que la pensée bourgeoise a connu son plus haut développement, les "Lumières", alors que dans les autres pays elle reste profondément marquée par le féodalisme "moderne" antérieur.  Même en Angleterre, le radicalisme bourgeois avorta très rapidement après Cromwell (1658) et par la suite, la bourgeoisie se caractérisera par singer le style de vie et les "valeurs" aristocratiques, décrocher un titre de "sir" décerné par la reine étant l'aboutissement absolu d'une carrière. Ce radicalisme était de toute manière très imprégné de conservatisme religieux ; et l'on peut considérer que c'est cette même idéologie qui a finalement "réussi" aux États-Unis un siècle plus tard. Le plus haut degré de la pensée bourgeoise, donc... autrement dit, de la pensée d'une classe ambivalente par nature et, finalement, vouée à être transitoire dans l'histoire de l'humanité ; produisant en permanence de l'humanisme, car le capitalisme implique la propriété du producteur sur sa personne, sur sa force de travail, et le "libre" usage ou louage de celle-ci... pour aussitôt le piétiner, car le capitalisme implique aussi la concurrence féroce entre entrepreneurs (propriétaires de moyens de production) et la violente réduction du producteur à sa SEULE force de travail. Ce n'est donc pas le "rejet des Lumières" WEB CHEMIN 40785 1298375052qui, sévissant avec une acuité particulière dans leur pays-berceau, engendrerait tous ces "rouge-bruns", ces républicards, ces poujadistes, ces social-fascistes ou encore ces "libéraux-libertaires", ces "gaucho-thatchériens" (à la BHL, Glucksmann etc.) qui ne valent guère mieux (mais ceux-là seraient plutôt des "défenseurs" des Lumières pour le 'p''c''mlm'). C'est au contraire leur pur héritage** ! C'est le voltairisme, dénominateur commun absolu : "on ne mettra pas ma pensée dans une case, droite ou gauche", "ce qui compte c'est la vérité", "je suis un esprit libre", etc. etc. Voltaire : la référence absolue de Philippe Val, libéral-libertaire devenu idéologue néoconservateur et islamophobe assumé ; Voltaire qui a donné son nom à deux initiatives ouvertement fascistes : le "Réseau" de Thierry Meyssan (complotiste ouvertement lié à l'impérialisme russe) et le "Boulevard" lepéniste de Robert Ménard, ancien défenseur de la "liberté de la presse" (Reporters sans Frontières) surtout (dans les années 1980-90) quand il s'agissait de régimes "communistes" ou anti-occidentaux, un autre de ces insupportables "libres-penseurs" médiatiques... 

C'est pourquoi, à Servir le Peuple, nous assumons totalement le "rejet les Lumières", cette pensée de la bourgeoisie, PAR ET POUR LE CAPITAL, dont l'hypocrisie dépasse même le dogme catholique, c'est dire ! Aux chiottes les "Lumières" !!! Comme chantait Pino Masi dans les années 1970 : la cultura dei borghesi non ci frega più, l'abbiamo messa nella fossa ("la culture des bourgeois on n'en a plus rien à f***, nous l'avons mise à la fosse") !

4. Voici la traduction du passage d'Ibrahim Kaypakkaya (La Question nationale en Turquie) que nous avons évoquée dans notre critique de l'article jacobin du 'p''c''mlm'. Elle est en partie basée sur le texte en français du site "Étoile rouge" (le 'p''c''mlm' du début des années 2000) et en partie sur la version anglaise que l'on peut trouver sur Kasama ou A World to Win, car la version d’Étoile rouge comporte selon nous (volontairement ou pas) des travestissements importants : 

KaypakkayaCertains "messieurs je-sais-tout" considèrent que les grands propriétaires terriens ne font pas partie de la nation. Mieux encore, ces messieurs vont jusqu'à répandre le mythe que les Kurdes ne constituent pas encore une nation, du fait de l'existence de ces grands propriétaires dans le pays kurde. C'est là une position horriblement démagogique et un sophisme. [NDLR : remplacez "grands propriétaires" par "bourgeois intégrés au capitalisme français" et vous avez la position du 'p''c''mlm' sur la Bretagne.]
Ces grands propriétaires ne parlent-ils donc pas la même langue ? Ne vivent-ils pas sur le même territoire ? Ne participent-ils pas d'une même unité de vie économique et d'une même formation psychique ?
D'autre part, les nations émergent non pas lorsque le développement du capitalisme touche à son aboutissement, mais à l'aube du capitalisme. Lorsque le capitalisme pénètre dans un pays et y unifie le marché dans une certaine mesure, les communautés possédant déjà les autres conditions
[de Staline NDLR] sont considérées comme une nation.
S'il en était autrement, toutes communautés stables situées dans des pays ou régions arriérées, où le développement du capitalisme est très limité, ne pourraient pas être considérées comme des nations. En Chine, jusqu'aux années 1940, existait encore un fort état de morcellement féodal ; donc, dans cette logique, il aurait fallu nier l'existence de nations en Chine auparavant. Jusqu'à la Révolution de 1917, la féodalité restait fortement implantée dans les campagnes profondes de Russie ; ce raisonnement  devrait donc conduire à rejeter l'existence de nations en Russie
[il entend par là "Empire russe du tsar", NDLR].
En Turquie, par exemple, durant la Guerre de Libération [la guerre menée par Kemal Atatürk contre le dépeçage de la  Turquie par le Traité de Sèvres en 1920 NDLR], la féodalité était beaucoup plus forte qu'aujourd'hui, il faudrait donc en conclure qu'il n'y avait pas de nations en Turquie à cette époque. En Asie, en Afrique et en Amérique latine, la féodalité existe toujours à différents degrés : il faudrait donc rejeter l'existence de nations sur ces continents.
Il est évident que ces thèses proclamant que les Kurdes ne forment pas une nation sont clairement absurdes de A à Z, contraires à la réalité des faits ainsi que nuisibles en pratique. Nuisibles, car de telles thèses ne servent que les classes dominantes des nations exploiteuses et oppresseuses. En effet, celles-ci trouvent là-dedans une justification à tous les privilèges et inégalités en leur faveur, et une légitimation à l'oppression nationale et à toutes les souffrances qu'elles infligent aux minorités nationales opprimées et subjuguées. 
La lutte que le prolétariat doit livrer pour l'égalité des nations et pour en finir avec toute oppression nationale, privilèges etc. devrait être jetée par dessus bord. Le droit des nations à l'autodétermination devrait être enfoui aux oubliettes.
La colonisation impérialiste des nations moins avancées, l'intervention dans leurs affaires internes et autres violations perfides du droit des nations à l'autodétermination devraient toutes être légitimées, partant du postulat que celles-ci ne constituent pas des nations. De même que devraient être légitimées, dans les États multinationaux, toutes les formes d'oppression et d'humiliation des minorités nationales par la nation dominante.

CQFD…

 


* Regardez par exemple ici le gribouillis du site d'extrême-droite (républicard, ultra-jacobin, "anti-communautariste" et islamophobe) Riposte Laïque : c'est assez ressemblant en effet, sauf... euh... comment dire... quelque chose... ben les drapeaux, en fait. Les vraies manifs des Bonnets rouges sont 100% gwenn ha du et bon courage pour y entrevoir un BBR... Il y a quelques temps une égérie de la mouvance, Christine Tasin, ultra-jacobine au point que l'on peut se demander si elle plaisante (ou pas), avait participé à un meeting contre "l'islamisation" en Bretagne avec notamment Adsav, extrême-droite... indépendantiste ! Autant dire que cela valait son pesant de grotesque, tant du côté république-une-et-indivisible que du côté "celtomaniaques descendus d'Avalon sur le cheval du roi Arthur"... Vous pouvez voir un compte-rendu de l'épisode ici, page 12.

** Combien n'a-t-on pas entendu, par exemple (et pas seulement du 'p''c''mlm'), que "Maurras et l'Action française, c'est le rejet des Lumières"... ? ARCHI-FAUX : Maurras et l'Action française se revendiquaient du POSITIVISME (dont on dit souvent, en "France", que "le marxisme s'inspire" alors que dans toute son œuvre Marx consacre peut-être trois paragraphes à Auguste Comte pour dire que c'est un triple crétin...) ; autrement dit des "Lumières", de la pensée bourgeoise et du "scientisme" du 19e siècle. À l'origine RÉPUBLICAINS de tendance conservatrice, anti-socialiste et chauviniste revancharde, souvent agnostiques (comme Maurras) ou en tout cas très "séculiers", ils se tourneront par pur pragmatisme vers l'idéologie national-catholique (comme "ciment" du "nationalisme intégral") et le principe monarchique... mais choisiront pour monter sur le trône la branche d'Orléans, celle de Louis-Philippe (Monarchie de Juillet) et du régicide Philippe "Égalité" (qui avait voté la mort de son cousin Louis XVI à la Convention), autrement dit la branche capétienne acquise aux "idées nouvelles" et aux "Lumières". Ce que voulaient simplement les maurrassiens, c'était un État fort et même "en acier trempé" au service du Capital ; et ils pensaient qu'aucun système républicain (forcément parlementaire dans leur esprit) ne pouvait l'assurer en termes de légitimité : il fallait donc un roi (comme en avaient d'ailleurs tous les États européens à l'époque où naissait l'AF, sauf la France et la Suisse). Ils n'avaient absolument aucun projet d'"effacer" toute la pensée bourgeoise produite au long des 16e, 17e et 18e siècles (celle qu'apprécie tant le 'p''c''mlm')... De même, parmi les théoriciens racialistes du 19e siècle qui seront repris sous toutes les coutures par le fascisme au siècle suivant, Joseph Arthur de Gobineau, certes légitimiste à l'origine, était un protégé de Tocqueville, tandis que Paul Bert était profondément "libre-penseur", positiviste, républicain et anti-clérical ; il est même considéré comme l'un des "pères fondateurs" de "notre" école républicaine publique et laïque... Comme "hommes des Lumières", il est difficile de faire mieux !

 

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28 octobre 2013 1 28 /10 /octobre /2013 15:16

 

SermentPaume-copie-1.jpg1. Il faut bien faire la distinction entre la nation en soi, infrastructurelle, sur des critères objectifs, et la nation POUR SOI, autrement dit OÙ est le CŒUR de la nation, sa CONSCIENCE.

À partir du moment où apparaissent les nations en Europe (11e-12e siècles, apparition du capitalisme sur des caractères déjà préexistants depuis les 8e-9e siècles), et à travers toute la construction de l’État moderne jusqu'aux "révolutions" (restructurations radicales de ces États par la bourgeoisie), soit jusqu'au 19e siècle, ce 'cœur' est la classe qui 'fait l'histoire' à cette époque : la BOURGEOISIE (parfois associée à une certaine aristocratie 'moderne', devenue capitaliste de fait). N'oublions pas que de 1789 à 1848, pour toute une partie de la bourgeoisie, majoritaire en fait, dite CENSITAIRE, la citoyenneté active, le droit de vote, était réservé aux personnes payant un certain impôt, donc possédant un certain patrimoine : autrement dit, la 'Nation' c'était la bourgeoisie et elle seule...

Mais, outre la lutte contre la masse des producteurs (qu'il s'agissait de déposséder, de séparer des moyens de production pour les jeter dans le salariat), qui mérite largement d'être appelée guerre d'extermination, ceci a forcément donné lieu à une lutte ENTRE BOURGEOISIES NATIONALES dans les grands royaumes qui étaient plurinationaux, pour savoir laquelle d'entre elles aurait la prééminence. Comme l'expliquait Kaypakkaya, citant Lénine et Staline, au sujet de l’État (de construction beaucoup plus tardive, accélérée et génocidaire) turc : "Quel est l'objectif de l'oppression nationale ? Cet objectif, de manière très générale, est de maîtriser la richesse matérielle de tous les marchés du pays sans avoir de rivaux, pour gagner de nouveaux privilèges, étendre les limites des privilèges actuels et s’en servir. Dans ce but, la bourgeoisie et les propriétaires issus de la nation dominante, afin de conserver les frontières politiques du pays font d’énormes efforts pour empêcher par tous les moyens les régions dans lesquelles vivent plusieurs nationalités de se séparer du pays. Dans les mots du camarade Staline : “Qui dominera le marché ?” [ici en Hexagone : la bourgeoisie du Bassin de la Seine ou occitane, lyonnaise, de Flandre-Artois, ou encore anglo-normande ? les foires de Champagne ou du Languedoc ? etc.]. C’est l’essence de la question. (...) L’oppression des travailleurs des peuples minoritaires acquiert de cette manière une double qualité : premièrement il y a l’oppression de classe utilisée contre les travailleurs afin d’exploiter et d’éradiquer la lutte de classe ; deuxièmement, il y a l’oppression nationale mise en œuvre pour les objectifs mentionnés plus haut contre toutes les classes des nations et des nationalités minoritaires.

Évidemment, la bourgeoisie de la capitale royale, liée au pouvoir monarchique, partait avec un avantage certain et ce fut généralement elle qui remporta la course. Ainsi, par les Actes d'Union de 1707 contre l’Écosse et 1800 contre l'Irlande, la haute bourgeoisie et aristocratie agro-capitaliste anglaise achève de 'mettre au pas' ses congénères de ces nations (la bourgeoisie irlandaise, rappelons-le, était alors quasi-exclusivement protestante et l'ancêtre du parti loyaliste actuel, mais à l'époque elle contestait le centralisme anglais ; Wolfe Tone était l'un de ces bourgeois protestants).

En Hexagone, les luttes sont nombreuses et aiguës pendant tout l'Ancien Régime, avec une acuité particulière pendant les Guerres de Religion et les régences entre Henri IV et Louis XIII et (surtout) entre Louis XIII et Louis XIV (Mazarin). En 1793-94, l'on peut dire que la bourgeoisie de 'province' mène sa 'dernière croisade' : contrairement aux idées reçues, c'est plutôt elle qui a lancé le processus révolutionnaire, entre logique assimilationniste de 'mêmes droits pour tous' (toutes les bourgeoisies) et refus de l'autoritarisme centraliste de la monarchie ; les principaux 'ténors' de la Constituante, les Mirabeau et autres Barnave, sont des 'provinciaux'. Il y a véritablement eu un 1789 de province (s'il n'est pas carrément possible de dire que 1789 est un mouvement de province avant tout) très largement jailli des affrontements entre le pouvoir central (monarchie) et les pouvoir locaux (Parlements, États provinciaux, municipalités) en défense de ces derniers, après des épisodes comme la Journée des Tuiles à Grenoble. En 1790 sont institués les départements, dotés chacun d'un Conseil départemental ; mais il est vraisemblable que personne à la Constituante ne voyait strictement de la même manière les pouvoirs de ces assemblées face à l’État central : pour beaucoup, la France devait être en dernière analyse une fédération de départements - on appellera ce courant les fédéralistes, qui se confondront dans une certaine mesure avec le parti de la Gironde. La grande bourgeoisie francilienne va alors reprendre la main en déployant une 'social-démocratie avant l'heure' en direction du petit peuple (ouvriers, indépendants pauvres) de Paris et en s'appuyant (également) sur une petite/moyenne bourgeoisie et paysannerie aisée 'racheteuse' de 'province', qui94 n'aime pas les 'gros' patriciens de ces mêmes provinces (qui étaient justement les ténors de la Constituante/Législative et de la Gironde) : ce sera le parti de la Montagne... éliminé aussitôt sa mission historique accomplie, un certain 9 thermidor an II (27 juillet 1794, après un peu plus d'un an de pouvoir)[1]. En 1848-51 (vote républicain 'radical' et 'démocrate-socialiste', résistance au coup d’État bonapartiste) et encore en 1870-71 (dans les Communes), la bourgeoisie 'provinciale' tentera de se réaffirmer face à Paris (ou Versailles lorsque Paris lui-même est aux mains des ouvriers), mais ce sera un combat d'arrière-garde, au sens où ce sera un combat livré à la remorque du prolétariat et du petit peuple travailleur.

Dans le Nord de l’État espagnol, au 19e siècle, il y aura une alliance de classe entre les masses populaires (principalement paysannes) et les 'forces du passé' (Église, fueros - lois locales - et leurs 'gardiens' notables) contre le centralisme madrilène, qui cherche à supprimer (1833) les autonomies régionales, et que les bourgeoisies nationales tendent alors à soutenir. Dans ces pays 'point de départ' de la 're'-Conquête, la Castille ne s'est pas montrée au cours des siècles précédents particulièrement oppressive (envers les élites, s'entend...), contrairement à ce qui a pu se produire en Aragon et (surtout) Catalogne, et évidemment dans le Grand Sud. À présent que la Cour de Madrid mène une politique bourgeoise, pense donc la bourgeoisie, elle lui sera tout aussi favorable, elle ne se heurtera qu'à ses adversaires, les nobliaux, les curés et autres potentats forales... Elle déchantera plus tard, sous l'ère alphonsine, à la toute fin du 19e siècle, et naîtront alors le Parti nationaliste basque et d'autres forces autonomistes. Les masses, elles, 'flairèrent' avec leur 'bon sens' gramscien que tout ceci allait mal tourner pour elles, et préférèrent s'accrocher à ce qu'elles connaissaient : l'autonomie locale, les fueros, même si s'accrocher au passé est toujours une erreur dans la lutte des classes. Cette erreur sera réparée dès les années 1930 (naissance de l'ANV, puis du PC d'Euskadi sous l'impulsion du Komintern, mouvement révolutionnaire ouvrier asturien etc.) et dès lors, les masses populaires avancées seront très clairement dans le camp de la révolution mondiale (notamment la gauche populaire abertzale).

www.mineros con las banderas de Asturiias y León 2Dans le Sud de la péninsule en revanche, où l'aristocratie terrienne est justement un 'greffon' castillan (ou aragonais-catalan), où les masses sont les descendantes des paysans d'Al-Andalus et la bourgeoisie ce qu'il reste de ses anciennes élites économiques (souvent des juifs et des musulmans convertis de force), cette bourgeoisie va être aussi 'libérale avancée', démocratique, qu'anti-centraliste et favorable à une large autonomie des provinces. Les masses, elles, se tourneront très tôt vers les forces de la révolution prolétarienne (anarcho-syndicalisme, socialisme, communisme marxiste), sur une ligne tout aussi anti-centraliste. Il en ira de même dans les Pays catalans, où la haute bourgeoisie déjà puissante au Moyen Âge a toujours mal supporté le joug de Madrid et a finalement été 'brisée' par les décrets de Nueva Planta autour de 1715 (ceci favorisant, au demeurant, une moyenne bourgeoisie jusque-là écrasée par la grande, oligarchique) ; mais la ligne sera là un peu plus conservatrice, moins démocrate en direction des masses (son idéologie se retrouve globalement dans la CiU actuellement au pouvoir en Catalogne). Car là se trouve une clé du problème 'espagnol' : la Castille a acquis (définitivement au 16e siècle) la prééminence politique, mais sa bourgeoisie et ses 'élites' en général n'ont pas su en profiter, pas plus que de l'exploitation pourtant sauvage des Amériques, pour devenir dominantes économiquement. Son capitalisme est toujours resté derrière le catalan, et même les capitalismes du Nord, émergés plus tard (18e-19e siècles), voire le tout jeune capitalisme agro-alimentaire et touristique du Sud (dans les dernières décennies du 20e !) l'ont rapidement supplanté en dynamisme. La dernière solution en date (et sans doute la dernière carte...) qu'a trouvé l’État 'espagnol' castillan à cela, est le système des autonomies consacré par la Constitution de 1978.

En Allemagne, dans les années 1870 (Kulturkampf), il y aura encore une lutte entre le junkerisme (agro-capitalisme) prussien, de confession luthérienne, et la bourgeoisie rhénane d'esprit catholique libéral, c'est-à-dire les deux principales forces qui ont unifié le nouvel État entre 1864 et 1871. Très vite cependant, face à la montée du mouvement ouvrier socialiste, tout le monde se réconciliera...

En Italie, l'Unité sera faite par la bourgeoisie piémontaise alliée à la Maison de Savoie, qui s'est déjà inféodée la Sardaigne (acquise en 1720) et la Ligurie (acquise en 1815), et la bourgeoisie lombarde qui est allée la trouver pour se libérer de l'Autriche. Elle se subordonnera les bourgeoisies du Nord-Est (Vénétie, acquise en 1866) et du Centre (Émilie, Romagne, Toscane, Ombrie, Rome) et BRISERA ce qui avait pu émerger de bourgeoisie moderne dans le royaume de Naples (assez fortement dans la ville même, très moderne à l'époque) et en Sicile, plongeant définitivement ces terres et ces peuples dans une arriération qu'avait déjà entretenue, depuis le 16e siècle, la Contre-Réforme, la Papauté et la domination espagnole ; maintenant l'emprise de masse de l’Église (forte dans tout l’État au demeurant, en tout cas jusqu'aux années 1970-80), de la grande propriété foncière et de la "petite féodalité" mafieuse ('protection' contre 'taxe', héritage de la clientèle romaine), exactement comme dans une colonie.

BAT-Les-presidents-de-la-Ve-Republique.jpgMais tous ces évènements du 19e siècle furent dans tous les cas les derniers feux, progressistes ou non, de l'activité historique de transformation sociale déployée par la bourgeoisie depuis le 13e siècle ; et donc la fin de la bourgeoisie comme 'cœur' de ces différentes nations. CE CŒUR PALPITANT, CE SONT DÉSORMAIS LES MASSES POPULAIRES TRAVAILLEUSES et leur 'noyau dur', le PROLÉTARIAT. Il faut en réalité comprendre que les nations 1°/ se composent schématiquement (historiquement), comme nous l'avons déjà expliqué, d'une masse des producteurs (produisant et vivant de cet usage productif de sa force de travail) et d'une classe possédante-dominante qui exploite et vit de la force de travail de la première, et 2°/ qu'elles sont en réalité comme des espèces vivantes animales ou végétales : elles ne 'naissent' et ne 'meurent' pas, elles se TRANSFORMENT continuellement à travers le long processus de l'histoire. Il est évident pour tout le monde (sauf pour quelques Identitaires neuneus) que les nationalités de notre Hexagone actuel ne sont pas les peuples gaulois d'il y a 2000 ans : les Occitans d'Auvergne ne sont pas des Arvernes, les Provençaux ne sont pas des Celto-Ligures etc. Mais il n'y a pas un jour 'J' et une heure 'H' où nous aurions cessé d'avoir des Gaulois pour avoir des Français, des Occitans, des Bretons etc. ; pas plus qu'il n'y a un jour et une heure précise où l'on a cessé d'avoir des australopithèques pour avoir des humains : c'est une longue transformation qui s'est effectuée à travers les siècles et les siècles (en fait, pratiquement de la conquête romaine jusqu'à l'époque moderne, au 16e ou 17e siècle !), avec évidemment des apports (des 'fécondations') externes, 'par en haut' (envahisseurs se greffant en nouvelle classe dominante) comme 'par en bas' (immigration de travail, esclaves lorsque cela se pratiquait etc.) ; néanmoins, le moteur principal du processus est interne et c'est, comme pour tout processus historique, la lutte des classes entre dominants et dominés, exploiteurs et exploités. Lorsque la bourgeoisie luttait contre les seigneurs féodaux, les évêques etc. elle était (cette lutte était) ainsi le moteur de la transformation des communautés humaines sur leurs territoires donnés, de ce qu'elles étaient en l'An 1000 vers ce qu'elles sont de nos jours. Mais nous avons vu aussi que souvent, alors que le pouvoir féodal se concentrait en grands domaines monarchiques, la bourgeoisie de telle ou telle ville pactisait avec le 'lointain' monarque contre le seigneur local, tandis que de son côté la bourgeoisie de la région dudit monarque le poussait à s'emparer des terres (donc des forces productives) de ses rivaux ; processus inévitable dès lors que le capitalisme, sorti de son stade élémentaire, n'est plus une libre relation entre producteurs libres (ce que voulait ressusciter Proudhon au 19e s.) mais voit se différencier une grande bourgeoisie, une moyenne, une petite etc. : c'est cette 'rencontre' entre la tendance féodale à l'accumulation de domaines et ces aspirations bourgeoises qui donne en réalité naissance aux États modernes que nous connaissons aujourd'hui. Et puis pour finir, après avoir accompli sa dernière grande tâche historique de prendre le pouvoir pour elle seule et mener à bien la 'révolution' industrielle (18e-19e siècles), nous savons que la bourgeoisie a cessé mondialement de jouer tout rôle historique progressiste.

Dans la lutte qui se livre désormais (principalement) entre la bourgeoisie capitaliste et le prolétariat/'peuple travailleur', c'est ce dernier qui est devenu le moteur de la transformation historique de la communauté humaine appelée 'nation'. Désormais, tout État englobant plusieurs nations (tous les grands États européens, sauf peut-être l'Allemagne, à discuter) est un système dans lequel les bourgeoisies nationales ont fini par trouver leur place, plus ou moins subordonnée à la dominante. Même si ici et là une bourgeoisie peut se juger suffisamment forte pour faire sécession (Flandre, Catalogne, Pays Basque, Italie du Nord, Québec en Amérique du Nord), elle restera indirectement dans ce 'système' par le biais de structures capitalistes supra-étatiques comme l'UE ou l'ALENA par exemple, et la situation ne changera pas d'un iota pour les masses exploitées. La question 'nationale' est donc désormais une question POPULAIRE. C'est pourquoi, plutôt que de parler de 'Nation occitane', nous préférons parler de PEUPLE occitan, au nom duquel nous menons notre lutte. La 'Nation' d'Òc est plutôt un référent des rares nationalistes bourgeois de notre pays, aux perspectives de succès si mince, fut-ce d'un 'système autonomique' à l''espagnole', qu’elles ne valent pas la peine qu'on s'y attarde. 'France fédérale', 'autonomie' façon État espagnol ou italien ou 'indépendance' dans le cadre ou non de l'UE, leur action politique s'inscrit de toute manière dans un champ de références BOURGEOIS qui n'est pas le nôtre : c'est une autre planète, en quelque sorte. Nous, nous luttons pour le Peuple occitan qui, 'sa' bourgeoisie ayant été soit 'francisée' soit liquidée (en 700 ans de luttes il y a eu le temps...) pour ne laisser que les 3% d'autonomistes et les 0,5% d'indépendantistes actuels, se trouve être quant à lui une PÉRIPHÉRIE de l’État français, SUREXPLOITÉE, certes pas à la manière d'une colonie d'outre-mer (DOM ou TOM), encore moins d'une néo-colonie 'indépendante' d'Afrique, mais surexploitée quand même, comme l'attestent les taux de pauvreté en milieu urbain ou rural (nous avons la carte des taux par département, mais il en faudrait une par commune, car quelques communes peuvent grandement 'tirer' un département vers le haut), le taux de chômage ; il faudrait peut-être, ce serait intéressant, calculer l'IDH (indice autrement plus fiable) par département ou par commune, en faisant par exemple se 'dégrader' du rouge vers le vert les communes de l'IDH le plus bas au plus élevé : ce serait sans doute édifiant, même si les variations seraient évidemment minimes par rapport à celles qui peuvent exister entre 'France' et Afrique – nous avons un léger doute qu'une telle 'bombe' soit un jour publiée [MÀJ un récent documentaire toutefois, "La France en face", basé sur les études de "géo-sociologues" tels que Serge Guérin et Christophe Guilluy, a produit une carte des fragilités sociales dans un esprit assez proche (revenu moyen, chômage, taux d'emploi précaire et autres indices, par commune) : l'on peut y voir nettement apparaître (en blanc) la "vraie France" de Michelet autour de Paris et entre Seine et Loire (une sorte de trapèze Tours-Rouen-Reims-Auxerre, les fameux "dix départements (payant) autant d'impôts que le reste de la France" dont parlait le fasciste Céline en 1938), "mouchetée" de taches bleu sombre (les ghettos urbains et périurbains, la grosse tache au nord-est de Paris étant bien sûr la Seine-Saint-Denis) ; les "métropoles-relais" de "province" (avec leurs petites taches-ghettos) ; les régions "favorisées" par la proximité de l'Allemagne ou de la Suisse (Haute-Savoie, Alsace) et enfin les territoires de relégation où vivent... 60% de la population (cela rejoint un peu les "scores de fragilité" mis en place depuis peu par l'INSEE, ici par exemple en région Rhône-Alpes)].

1 8f6foCe sont ces chaînes-là que nous voulons briser, et non celles d'un 'cadre institutionnel' qui serait 'trop centralisateur' ; car bien sûr qu'il l'est, mais ceci n'est qu'un reflet, une SUPERSTRUCTURE politique de la base, de l'INFRASTRUCTURE économique et sociale fondée sur des Centres et des Périphéries. Ce qui est d'ailleurs loin d'être un lien automatique puisque, en laissant de côté le très particulier cas 'espagnol', un État peut tout à fait être 'décentralisé' et pourtant dominé par des Centres qui oppriment des Périphéries : il suffit de voir le Royaume-Uni après les 'dévolutions' des années 1990, l'Italie avec son système très 'régionaliste' depuis 1970, ou encore les États-Unis fédéraux, où les Centres (Nord-Est de Boston à Washington en passant par New York, côte Ouest et Chicago) sont très nets et certaines Périphéries majoritairement peuplées de Noirs ou de Latinos, comme la Nouvelle-Orléans ou le Nouveau-Mexique, sont dignes du Tiers-Monde... Ils se sont simplement construits historiquement comme cela, ne serait-ce que pour gérer l'immensité du territoire. L'Allemagne s'est construite comme cela (et de manière très polycentrique, ce qui attention ne veut pas dire pas de contradiction centres/périphéries) parce que le meilleur moyen trouvé par la Prusse pour former l'Empire allemand à son profit a été d'en faire une sorte de confédération maintenant les États antérieurs (et leurs souverains). Après la chute du nazisme, la République fédérale a repris le modèle, avec cependant des États plus 'rationnels' au sens bourgeois. L'Italie et (à partir du 17e siècle) le Royaume-Uni se sont par contre construits de manière très centralisatrice, puis ont 'lâché du lest' à la fin du 20e siècle devant la montée... des revendications en ce sens (bourgeoises locales comme populaires). L'organisation politique centralisatrice 'française' prend sa source dans le Consulat et l'Empire, sous Napoléon Bonaparte qui a poussé à son paroxysme cette gouvernance autoritaire depuis Paris, déjà pratiquée aux 17e-18e siècles par Louis XIII et Richelieu, Louis XIV etc. : c'était tout simplement la 'meilleure' manière de 'refaire l'unité' de la prétendue 'nation' (l’État) après sa quasi-explosion dans les années 1790, période n'ayant rien à envier aux Guerres de Religion auxquelles avait succédé le centralisme autoritaire du 17e siècle... Elle est restée ainsi par la suite, à travers différents régimes et la république bourgeoise définitive depuis 1870, comme garantie de cohésion, d''unité' dans un État secoué (jusqu'en 1871) par d'importantes luttes de classe et ayant en outre tendance à se vivre comme entouré d'ennemis, encore aujourd'hui d'ailleurs, même si la guerre est désormais économique (quid si les États voisins 'phagocytent' des régions 'trop' autonomes qui seraient 'libres' de leur politique économique et commerciale ?). Il s'est néanmoins beaucoup décentralisé (à mesure qu'il cessait un peu, avec l'Europe, de se penser en forteresse assiégée), depuis les années 1960-70 et surtout depuis 1982... sans que cela ne change d'un iota les problématiques populaires locales auxquelles cela était censé répondre. Bienheureux, et sans doute pas encore né(e) est celui ou celle qui nous démontrera en quoi 'plus' de prérogatives 'régionales' résoudrait 'mieux' ce que déjà 'pas mal' de ces prérogatives n'ont pas résolu. Fin de la discussion-digression sur les élucubrations autonomistes : nous ne raisonnons pas dans le même champ politique, nous ne parlons donc pas la même langue, pour faire court.

Ce qui ressort (et qu'il faut retenir) en résumé de ce que nous venons de dire, c'est qu'aujourd'hui la vie et le devenir des communautés nationales (ce devenir fusse-t-il de fusionner dans une grande République humaine planétaire) et donc, le cas échéant, leur libération des griffes d'un État ou d'un quelconque appareil d'oppression qui les maintient emprisonnées ne relèvent plus de la bourgeoisie dite "nationale" (comme l'ont souvent pensé les marxistes-léninistes du siècle dernier, dans une logique d'"étape") mais du prolétariat à la tête du peuple travailleur (personnes vivant exclusivement des revenus de leur force de travail et non de celle d'autrui) ; et s'inscrivent totalement dans le cadre de la Révolution prolétarienne mondiale dont les États actuellement existants sont l'objectif militaire à détruire (les États plurinationaux et prisons des peuples étant littéralement assis sur des barils de poudre). Ce que deviendront dans les siècles à venir nos nations occitane, bretonne, corse, basque etc., l'avenir le dira et il n'est sans doute pas possible de l'affirmer clairement aujourd'hui (pas plus que qui que ce soit ne sait réellement à quoi ressemblera le communisme). Mais ce qui est certain, c'est que cet avenir quel qu'il soit est à présent entre les mains des masses travailleuses sous la direction du prolétariat ; et que conquérir cette direction est la première et actuelle tâche de celui-ci.

C'est la raison pour laquelle, en même temps que par le maoïsme nous voulons dépasser les limites du mouvement communiste (marxiste-léniniste) du siècle dernier, nous considérons le moment venu de dépasser le concept de libération nationale par celui de LIBÉRATION RÉVOLUTIONNAIRE DU (ou des) PEUPLE(s) (LRP).

[L'on peut trouver une très bonne illustration de ce qui vient d'être (longuement) expliqué dans un texte de l'organisation communiste basque EHK datant de l'an 2000 (avant la dérive pro-réformiste de cette organisation, bien connue des militants révolutionnaires locaux), qu'avaient publié en leur temps les camarades de Libération Irlandehttps://liberationirlande.wordpress.com/euskal-herria/ehk-le-marxisme-et-la-question-nationale/

"Beaucoup d’anti-communistes interprètent de travers la phrase du Manifeste communiste “Les ouvriers n’ont pas de patrie. On ne peut pas leur enlever ce qu’ils ne possèdent pas” (Le Manifeste du Parti Communiste - il y a beaucoup d’éditions disponibles, nous avons employé celle des Œuvres Choisies des Éditions du Progrès, Moscou, 1973, p. 127).

[Ce que cela signifie en réalité c'est que] Sous le capitalisme les ouvrier-e-s n’ont pas de patrie ni pouvoir ni moyens de production ni rien ; ils sont la classe opprimée et pour se libérer ils doivent “en premier lieu conquérir le pouvoir politique, s’élever à la condition de classe nationale, se constituer en nation, s’élever à la condition de classe nationale”. Marx et Engels aspirent à des sociétés où la Nation ne s’identifie pas avec les castes gouvernantes ou avec des oligarchies puissantes, mais avec la classe travailleuse. Marx répète à nouveau cette idée centrale dans une autre des ses œuvres : “Le développement du prolétariat industriel dépend en règle générale du développement de la bourgeoisie industrielle. C’est seulement sous la domination de celle-ci qu’il accède à cette existence d’ampleur nationale qui lui permet d’ÉLEVER SA RÉVOLUTION À UNE HAUTEUR NATIONALE”  (Les luttes de classes en France de 1840 à 1850, éd. du Progrès, Moscou, 1979, p. 38).

En abolissant le capitalisme exploiteur on abolit l’oppression nationale : “Dans la même mesure qu'est abolie l’exploitation d’un individu par un autre, sera abolie l’exploitation d’une nation par une autre. En même temps que l’antagonisme des classes à l’intérieur des nations, disparaîtra l’hostilité des nations entre elles”."

Eh oui ! Les pseudo-gauchistes et vrais universalistes abstraits ne citent systématiquement de Marx que la première affirmation qui les arrange ; celle qui leur permet, en niant les réalités nationales des travailleurs, de nier le Peuple travailleur lui-même pour lui substituer leur magistère petit-bourgeois. La citation complète est en réalité : "Les ouvriers n'ont pas de patrie. On ne peut leur ôter ce qu'ils n'ont pas. Comme le prolétariat de chaque pays doit d'abord conquérir le pouvoir politique, s'ériger en classe dirigeante de la nation, devenir lui-même la nation, il est encore par là national ; mais ce n'est pas au sens bourgeois du mot." – exactement ce que nous venons de dire ci-dessus...]

bandeau CC PCR-Òc

2. Qu’est-ce qu’un pays/État impérialiste ? Quels pays/États sont-ils impérialistes ou ne le sont pas ? Les ‘BRICS’ ou le petite et ambitieux Qatar, dont on nous rebat les oreilles en ce moment, sont-ils impérialistes ? Depuis que l’impérialisme a été caractérisé par Lénine, le débat agite le mouvement communiste.

En réalité, il ne faut pas confondre deux choses. Un pays impérialiste est un pays qui se caractérise par l'exportation dominante de capitaux, c'est-à-dire, schématiquement, par la prépondérance des investissements directs à l'étranger (IDE 'sortants') sur les investissements étrangers dans le pays (IDE 'entrants', sachant qu'en quantité absolue ceux-ci sont très importants... dans les pays impérialistes justement). Ce n'est pas toujours évident à déterminer. Ainsi, nous avons tendance à penser que la Chine (+ Hong Kong), qui a toujours nettement plus d'IDE 'entrants' (195,7 milliards de $ en 2012) que 'sortants' (168,2 milliards), 'triche' à travers des 'écrans de fumée', des 'paradis fiscaux' ou encore la diaspora chinoise en Asie et dans le monde (qui immatricule éventuellement ses entreprises dans le pays d'accueil) pour rester 'non-impérialiste', afin (peut-être) de conserver la crédibilité interne et internationale du Parti pseudo-'communiste' ou peut-être pour ne pas trop IDE_out_stock_2009.JPGalarmer ses rivaux, les puissances impérialistes 'installées'. La Russie reçoit elle aussi toujours un peu plus (de l'ordre de 10 milliards de $) d'investissement étrangers que ce qu'elle investit à l'extérieur, sauf en 2012 où l'on parvient 'enfin' à l'équilibre (51 milliards et des brouettes entrant comme sortant) ; il convient pourtant de la considérer comme un pays impérialiste, mais affaibli depuis la défaite stratégique de l’URSS en 1989-91. Il en va d'ailleurs de même... pour le Royaume-Uni. Ces données sont aussi variables : ainsi en 2005 la Belgique est à peu près à l'équilibre entrant-sortant, en 2010 et 2011 en revanche elle est le 3e 'récepteur' mondial mais n'apparaît pas dans les 10 premiers investisseurs en 2010 et n'est que le 5e en 2011, et enfin elle n'est dans les 10 premiers ni de l'un ni de l'autre en 2012. Il faut donc sans doute regarder des périodes plus longues, de l'ordre de 10 ou 15 ans ; et tenir compte de l'influence mondiale d'un pays qui ne se 'résume' pas à la masse de capitaux exportés ('investissements').

Un pays récurrent dans les 10 premiers 'receveurs' comme dans les 'investisseurs', en revanche, ce sont... les îles Vierges britanniques (petite colonie semi-autonome des Caraïbes), qui comptent environ... 60.000 habitant-e-s. C'est très clairement un 'paradis fiscal', un 'pays-banque' et un 'pavillon de complaisance' pour grands capitaux. Nous avons là un exemple très clair du genre de choses qui 'faussent' l'étude des données brutes.

Mais il faut aussi tenir compte, nous l'avons souvent dit, du distinguo entre impérialisme comme état de fait concret et comme PROGRAMME POLITIQUE, comme volonté politique agissante : la politique visant à devenir un État impérialiste, ce qui par contre caractérise sans problème la Russie post-soviétique (redevenir, dans ce cas) et la Chine ; ou de manière plus soft power (moins visiblement agressive) le Brésil, l'Inde voire l'Afrique du Sud.

usine-renault-Tanger-Maroc.jpgIl y a des pays qui sont globalement 'à l'équilibre' ou sans guère beaucoup plus d'investissements étrangers par décennie que d'investissements à l'extérieur : nous avons cité la Belgique, nous pourrions ajouter l'Italie ou l’État espagnol (porté par les capitalismes basque, catalan, asturien et cantabre) : nous pouvons parler là de 'petits impérialismes', qui sont dans un rapport de subordination, de 'vassalité' avec les grands (USA, Grande-Bretagne, Allemagne, 'France').

C'est peut-être aussi le cas, en Asie, de la Corée du Sud, qui est dans un rapport de vassalité très net vis-à-vis des USA (mais c'est aussi le cas... du Japon). Les 'grands vaincus' de 1945, Allemagne et Japon, sont très rapidement et clairement redevenus des pays impérialistes de premier rang en termes capitalistiques, mais leur défaite leur interdit toute capacité militaire autonome et leur impose un lien de subordination diplomatique aux États-Unis (que l'Allemagne a toutefois rompu, en s'appuyant sur la France dans la construction impérialiste UE).

Un autre indice peut être la balance commerciale : un État très fortement exportateur a de grandes chances d'être un pays semi-colonisé (sa population, pauvre, consomme peu mais en revanche produit beaucoup pour les monopoles et les sociétés de consommateurs du 'Nord'), tandis qu'un État fortement importateur va souvent être impérialiste (ses monopoles 'importent' ce qu'ils sous-traitent ou pillent dans les semi-colonies). Mais des États impérialistes qui ont gardé une industrie de pointe en leur sein même vont tout de même rester fortement exportateurs (Allemagne, Japon), d'autant que l'on compte en valeur monétaire et que leurs produits... valent cher.

En revanche, il y a des pays qui ne sont selon nous clairement pas impérialistes, où la masse des capitaux investis est écrasante par rapport aux capitaux sortants ; mais qui sont malgré tout des pays avancés, industrialisés, qui ne sont pas caractérisés par la semi-féodalité et le capitalisme bureaucratique dans une économie à dominante agricole et extractive (primaire) vouée à l'exportation, qui ne sont pas plongés dans une grande misère, avec un problème de la terre (celui-ci peut toutefois encore exister même dans des pays très avancés, comme la Grande-Bretagne !) et des masses urbaines formant une 'plèbe informelle' etc. etc. C'est par exemple le cas de la Grèce, du Portugal, de l'Irlande (Nord occupé comme 'République d'Éire') ou des nouveaux membres de 2010sl'UE depuis 2004 ('pays de l'Est', Malte, Chypre). Dans ces pays, il est possible de dire que de par le niveau des forces productives et la morphologie socio-économique, la révolution a vocation à être immédiatement ou quasi-immédiatement socialiste.

Car voilà : contrairement à la grande majorité des marxistes-léniniste (maoïstes ou non), nous pensons que ce n'est pas le caractère impérialiste ou pas d'un pays qui détermine le caractère socialiste ou 'démocratique de nouveau type' de la révolution, mais le niveau de ses forces productives et (mais c'est en lien) l'importance de la semi-féodalité dans l'organisation sociale (l'impérialisme s'en est généralement accommodé et l'a maintenue, ou l'a modernisée en capitalisme bureaucratique). Selon nous, pour prendre un exemple emblématique, le Pays Basque souffre d'une oppression nationale : dans l’État espagnol, il est un 'pilier' économique mais il est, de manière pour ainsi dire 'parasitaire', sous la botte politico-militaire de Madrid (Castille) ; tandis que dans l’État français il s'inscrit (comme l'Occitanie, le Roussillon catalan et la Corse) dans le cadre plus large de la 'question méridionale'. Pour autant, de par le niveau des forces productives, la révolution au Pays Basque ne comporte QU'UNE SEULE tâche démocratique : l'autodétermination, la dé-périphérisation, la LIBÉRATION des chaînes 'espagnoles' et 'françaises'. Ce qui est en quelque sorte 'instantané' puisque soit la révolution assure cela, soit ce n'est PAS une révolution. Par la suite, toutes les tâches sont socialistes (mais découlent de cette condition préliminaire, car pas de socialisme digne de ce nom envisageable sans briser le cadre étatique bourgeois et la 'périphérisation' dans ce cadre). Il en va exactement de même en Occitanie.

Il existe encore d'autres situations particulières, comme celles de ces pays qui, comme le Brésil, l'Argentine voire le Mexique, l'Afrique du Sud, l'Inde voire la Malaisie ou l'Indonésie, la Turquie ou l'Iran, ne sont (clairement) pas impérialistes au niveau mondial... mais si l'on 'réduit' le 'champ de vision' à leur région du monde (Amérique latine, Afrique, Asie du Sud, Proche/Moyen-Orient etc.), on s'aperçoit qu'ils le 'sont' : ils exportent beaucoup plus de capitaux vers les pays de la région qu'ils n'en reçoivent d'eux. On peut parler d'expansionnismes régionaux... Il s'y pose souvent la question d'un déséquilibre entre une région (celle des Détroits en Turquie, le Sud-Est au Brésil, la Plata en Argentine etc.) au niveau de vie 'européen', avec toutefois des ghettos de relégation populaire très importants autour des grandes villes (les favelas au Brésil, les townships issus de l'apartheid en Afrique du Sud), et un hinterland où c'est clairement le 'tiers-monde'.

dubai.jpgIl y a aussi des pays, généralement minuscules (on peut parler de 'cités-États'...) qui, comme les monarchies du Golfe ou le Bruneï (ou encore les États de Malaisie), reposent sur des 'mines d'or' (d'or noir en l'occurrence), ce qui apporte à leur caste féodale une fortune considérable : dans les pays du Golfe, c'est pratiquement toute la population autochtone (bédouine) qui est devenue richissime, et s'est entourée d'une main d’œuvre de serviteurs venue des pays arabes pauvres, d'Iran, d'Asie du Sud ou du Sud-Est, d'Afrique etc. À un moment donné, pour ces Bédouins devenus milliardaires (ou millionnaires pour les plus 'pauvres' !), va se poser la question de réinvestir tout cet argent, très largement supérieur au nécessaire pour une vie de luxe ; d'autant plus que la source de ces revenus (le pétrole, le gaz) va un jour se tarir... C'est la fameuse et aujourd'hui récurrente 'question du Qatar' (qui n'est que le plus emblématique de ces pays, car cette politique y est portée par l’État lui-même). Mais c’est aussi sur la base d’une telle manne pétrolière qu’a pu se baser la volonté d’émergence internationale du Venezuela, laquelle s’est combinée avec la ‘satisfaction’-canalisation des mouvements sociaux qui agitaient le pays à la fin du siècle dernier pour endosser le costume rouge du ‘socialisme bolivarien’.

tours-petronas.jpgD'autres pays, comme Singapour mais aussi l'émirat de Dubaï, jouent un rôle de 'plaques tournantes' et de concentrations de capitaux de toute la région (que les grands capitalistes considèrent, peut-être, 'peu en sécurité' dans leurs propres pays). En Extrême-Orient, lorsque ce n'est pas le pétrole (Malaisie, Bruneï), ces 'places fortes' capitalistes sont souvent héritées de la Guerre froide, où elles faisaient face aux États révolutionnaires (Chine, Vietnam, Corée du Nord), accueillaient leurs émigrés bourgeois etc. À la fin du siècle dernier, deux d'entre elles (Macao et Hong Kong) ont fini par rejoindre avec un 'statut spécial' la Chine 'populaire', désormais totalement capitaliste, qu'elles ont 'boostées' de leurs capitaux.

En Europe même existent également de petits États, que l'on peut qualifier de 'résidus' de l'organisation politique pré-moderne, ayant survécu par divers aléas historiques, et qui jouent ce rôle de concentrations capitalistiques et de 'paradis fiscaux' (devenant, du coup, des 'investisseurs' impérialistes complètement disproportionnés à leur poids démographique et économique réel) : Liechtenstein, Andorre, Monaco, îles anglo-normandes (Jersey, Guenersey) ou encore île de Man, qui ne font pas partie du Royaume-Uni, Luxembourg (au 19e siècle le Bénélux faillit former un seul et même État sous la couronne néerlandaise, mais le clivage protestants/catholiques et la sécession belge le firent capoter) et bien sûr, les cantons suisses. 'Coffres' à capitaux pour les bourgeoisies des grands pays voisins, ils ont leur rôle dans le système impérialiste européen et mondial ; et comme dans les cités-États arabes ou asiatiques, le seul véritable prolétariat y est généralement la main d’œuvre étrangère, immigrés ou travailleurs frontaliers des États voisins (à Monaco, les rares autochtones - 20% - sont cependant généralement les classes populaires).

Pour en revenir à une problématique abordée plus haut (et en point 1), le très particulier cas ‘espagnol’ repose en fait sur un ‘deal’, un donnant-donnant : l’État espagnol ne serait PAS impérialiste sans les ‘communautés autonomes’ du Nord (Catalogne, Pays Basque, Cantabrie avec son Banco Santander, Asturies) ; mais celles-ci, indépendantes, seraient des pays impérialistes de rang très mineur, de l’ordre du Danemark, de la Norvège, de l’Autriche ou de la Belgique – l’État espagnol leur offre donc ce ‘poids’ sur la scène internationale qu’elles n’auraient pas autrement. D’autant que dans les (très importantes) institutions européennes, ce n’est pas le PIB ni le PNB qui compte, mais simplement la population. Or l’État espagnol compte quelques 47 millions d’habitant-e-s (5e population donc ‘poids’ politique dans l’Union), tandis que la Catalogne n’en compte que 7,5 millions, le total Vascongadas + Navarre (Pays Basque ‘espagnol’) 2,8 millions, les Asturies un peu plus d’un million et la Cantabrie… moins de 600.000 (c’est pratiquement la cité-État de Santander). Autant dire que le calcul est vite fait. Même en Catalogne, où la bourgeoisie ressent le plus durement le ‘parasitisme’ de Madrid, il existe un fort courant hostile à la sécession, ne souhaitant pas se retrouver un pays impérialiste au rang du Danemark plutôt que de ‘profiter’ du relatif ‘poids’ international de l’‘Espagne’, 5e pays de l’UE, ‘invité’ permanent du G20 etc. Ce courant pourrait bien l’emporter en cas de référendum d’indépendance (comme il l’a systématiquement emporté au Québec, en 1980 comme en 1995 d’une très courte tête – le Québec indépendant n’aurait certainement pas fait partie du G8, contrairement au Canada).

 


[1]  Lire : http://servirlepeuple.over-blog.com/2018/11/annexe-a-l-etude-en-finir-avec-la-france-quelques-verites-sur-la-grande-revolution-bourgeoise.html

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21 octobre 2013 1 21 /10 /octobre /2013 08:49

 

1. La question de la révolution bourgeoise et de son rapport à l'État. C'est une question toujours problématique au regard de la théorie marxiste-léniniste (et donc maoïste) de l'État et de la révolution. Il faut prendre les choses dans l'ordre. La définition de la révolution selon Lénine, ce n'est pas la prise de l'État de classe existant par la classe révolutionnaire, mais sa DESTRUCTION pour ne pas en laisser pierre sur pierre. Problème : la révolution bourgeoise (1630-1690 en Grande-Bretagne, 1789-1870 dans le reste de l'Europe), ce n'est pas vraiment cela... Alors les marxistes-léninistes vont nous expliquer que "oui, mais c'est pas pareil, il s'agissait de remplacer une classe dominante par une autre, pas de supprimer à terme la division en classe, donc la bourgeoisie pouvait prendre l'État monarchique et le faire fonctionner à son compte, par contre le prolétariat lui doit détruire l'État bourgeois". C'est la pirouette par laquelle on s'en sort en général, y compris chez des gens de très haut niveau comme le regretté général Giáp (ici point 5) ou le (n)PCI. Passons. NOUS NE SOMMES PAS D'ACCORD.

provincesPour nous, l'accumulation VRAIMENT primitive du Capital ne s'effectue pas, comme le dit Marx, à partir du 16e siècle, mais bien au début du millénaire dernier, entre le 11e et le 15e siècle, dans les républiques urbaines d'abord, puis dans les domaines seigneuriaux et autres tenures libres de riches laboureurs à la campagne qui, impactées par le capitalisme urbain, tendent vers l'agro-capitalisme (la terre n'est plus un prestige et une subsistance, mais devient un fonds à rentabiliser). À partir de là, le capitalisme va d'abord devoir se doter du cadre politico-militaire adéquat, et celui-ci va être l’œuvre d'une fraction ‘traître’ de l'aristocratie, celle qui autour de quelques grandes familles régnantes va mettre en place, entre grosso modo le début du 13e et la fin 17e siècle, l'État moderne, la monarchie ‘forte’ ou absolue. C'est cet État monarchique ‘fort’ qui va laminer et balayer le système politique antérieur (médiéval), c'est-à-dire cette confédération de fiefs aristocratiques ou ecclésiastiques avec leur suzerain qui a lui même son suzerain etc., le tout ‘saupoudré’ d'une ‘constellation’ de villes-républiques oligarchiques ; déblayant la voie au capitalisme ‘en grand’ contre les usages et obscurantismes féodaux et religieux rétrogrades. Par exemple, en ‘France’, contrairement aux idées reçues (voire aux falsifications historiques bourgeoises), c'est la monarchie qui va LUTTER contre la ‘guerre de tranchée’ que livrent les aristocrates rétrogrades aux aristocrates modernes sur le thème de la dérogeance : se livrer à une activité commerciale capitaliste (avec profit) était ‘déroger’ à sa noblesse (s'en exclure). De nombreux édits royaux viendront autoriser les nobles à ‘faire négoce’ sans ‘déroger’. C'est également sous la protection et l'impulsion royale que va pouvoir se développer la grande entreprise capitaliste, fusionnant fabrication et commerce de la marchandise, ce qui était rigoureusement empêché jusqu'en 1789 par le régime des corporations (c'est aussi ce qui explique l'importance de l'industrie rurale, des villes nouvelles industrielles surgies au milieu des champs, des faubourgs et autres banlieues échappant aux lois des villes, alors clairement délimitées par leurs murs). Aucune autre autorité ne pouvait en effet ‘envoyer chier’ les corporations.

C'est ce cadre qui va permettre, à partir de 1500 environ, l'accumulation que Marx appelle ‘primitive’ et nous PRÉ-INDUSTRIELLE. Et dire, comme il le dit dans le Capital (Livre I, section 8), que "les chevaliers d'industrie n'ont supplanté les chevaliers d'épée qu'en exploitant des événements qui n'étaient pas de leur propre fait", c'est évacuer un peu vite l'importance et l'influence des très nombreux bourgeois (ou nobliaux ‘embourgeoisés') entourant et ayant l'oreille des monarques.

C'est seulement lorsque ce cadre de l'État monarchique va se trouver historiquement obsolète, lorsque les forces productives ‘poussant’ comme une dent de sagesse vers la ‘révolution’ industrielle vont se trouver ‘bloquées’ par cette ‘gencive’ qu'il va falloir ‘percer’, que va intervenir la ‘révolution’ bourgeoise, en réalité restructuration radicale des États légués par les siècles précédents. Certaines dynasties vont se trouver être des obstacles à cela, et être éliminées (Capétiens Bourbons, Stuarts, et bien sûr les États allemands et italiens devenus trop petits), mais d'autres vont s'adapter et accompagner le processus jusqu'au bout, étant encore en place au début du 20e siècle (Hohenzollern de Prusse, Habsbourg, Piémont-Savoie) voire aujourd'hui (Bourbons d'Espagne, Orange-Nassau des Pays-Bas, monarchies scandinaves etc.).

france departments 1791Les grosses ‘machines’ monarchiques étaient devenues des freins à l'‘appel’ des forces productives, ‘appel’ à la révolution industrielle, et même dans les ‘républiques’ qu'étaient alors les grandes villes ou des territoires ruraux comme les Escartons alpins, ou encore bien sûr les cantons suisses, les Provinces-Unies néerlandaises et les cités-États italiennes le pouvoir était devenu oligarchique, monopole de quelques grandes familles dominant les corporations, et empêchait les nouvelles couches bourgeoises, tournées vers la modernité, de se développer pleinement. Il fallait donc un ‘changement radical’ et ce furent les ‘révolutions’ bourgeoises de 1789 à 1871 environ ; mais ce ne furent pas de véritables révolutions au sens où un mode de production (le capitalisme) en aurait renversé un autre (la féodalité) régnant alors sans partage, et n'aurait réellement pu exister qu’ainsi. Cette véritable révolution-là, c'est la construction monarcho-grande-bourgeoise des États modernes qui l'a menée (et les révolutions républicaines oligarchiques de Suisse, des Pays-Bas, des cités italiennes aux 13e-14e siècles etc.). C'est ce qui explique les grandes ambiguïtés de cette période 1789-1871, le jeune prolétariat et la paysannerie pauvre, eux, voulant mener ce ‘changement radical’ jusqu'au bout, c'est-à-dire au socialisme (hélas pas encore théorisé scientifiquement comme tel), et ne récoltant généralement que des volées de plomb… Et c'est ce qui explique les grandes dérives opportunistes du mouvement socialiste ensuite, puisque cela menait souvent à déduire que quelque part, le socialisme existait ‘déjà’ dans le capitalisme comme le capitalisme existait dans la ‘féodalité’ (l’État monarchique moderne des 13e-18e siècles), qu'il n'y avait qu'à se débarrasser d'une ‘cupule’ parasitaire, de ‘200 familles’ grand-capitalistes, etc. 

La révolution bourgeoise, dans le champ de l'État c'est à dire le seul qui intéresse les marxistes, c'est donc la révolution RAMPANTE qui construit l'État moderne depuis le 13e siècle jusqu'au 17e, puis le restructure aux 18e et 19e (17e en Grande-Bretagne). Le précédent ‘séisme’ politique de cet ordre, en Europe et Méditerranée, c'est l'effondrement de l'État romain au 5e siècle, et son remplacement par des royaumes ‘barbares’ qui petit à petit se décomposeront à leur tour pour donner le système confédéral et subsidiaire médiéval du 8e au 12e siècle, cadre du mode de production FÉODAL proprement dit : c'est la ‘révolution’ qui a remplacé l'esclavagisme antique par la féodalité (avec son servage plus ou moins libre et ses petites républiques urbaines). Le précédent encore, c'est l'instauration de l'État romain sur les formes politiques antérieures (généralement des cités-États ou des petits royaumes plus ou moins ‘asiatiques’ ou hilotistes). Etc. etc. Ici apparaît de manière plus claire le caractère prolongé de l'instauration du socialisme (et a fortiori, de parvenir au communisme). Elle devrait, cependant, être plus rapide que celles du capitalisme et de la féodalité, car 1/ c'est un processus conscient, guidé par une théorie scientifique, 2/ c'est un processus organisé et collectif (alors que chaque bourgeois ou féodal suivait avant tout ses propres intérêts, concurrents de ceux des autres), 3/ comme disait Marx, il ne s'agit pas "de l'expropriation de la masse par quelques usurpateurs" (la séparation du travailleur et des moyens de production, menée du Bas Moyen Âge jusqu'au 19e voire 20e siècle), mais de l'expropriation de quelques usurpateurs par la masse.

558349-000 par76872862. Encore une fois sur les personnes migrantes. L'affaire de l'expulsion (OQTF, ‘reconduite à la frontière) de deux jeunes gens, Leonarda Dibrani (rom kosovare, avec sa famille) et Khatchik Katcharian (arménien), a fait la une des médias bourgeois ces derniers temps ; et comme il fallait s'y attendre, le ‘p’‘c’‘mlm’ s'est fendu d'un article sur la question. Nous aurions volontiers oublié ce groupuscule, comme beaucoup nous l'ont conseillé, mais cet article, outre certains passages gerbants, attaque l'une de nos positions et nous oblige donc à réagir. Soyons justes, cet article ne dit pas QUE des conneries : il est évident, pour toute personne un minimum révolutionnaire, que ces mobilisations autour de Leonarda et Khatchik sont (principalement en raison de leurs promoteurs) imbibées d'idéologie républicaine-de-gauche comme un pochtron de vinasse ; qu'il est extrêmement dérangeant (et nous a dérangé) de voir soudain une telle mobilisation autour de deux personnes alors qu'il y a des dizaines d'arrestations, de rétentions et d'expulsions par jour (36.000 en 2012, soit 100 par jour...), sur le discours qu'il et elle seraient ‘intégré-e-s’, une ‘chance pour la France’ etc. etc. ; qu'il y a évidemment des luttes internes à la bourgeoisie derrière tout cela, en l'occurrence de la ‘vraie’ gauche bourgeoise social-démocrate (Front de Gauche, gauche du PS, Verts, NPA) contre le ‘nouveau réac’ Valls, qui ‘sait parler’ à un ‘peuple de droite’ désormais hégémonique et représente donc une ‘résistible ascension’ inquiétante ; que dans ces manœuvres les cadres de cette gauche bourgeoise, souvent profs, ont depuis de nombreuses années l'habitude de jeter dans la rue (comme contre Allègre il y a 15 ans, et contre l'UMP de 2002 à 2012) des lycéen-ne-s qui ne comprennent souvent pas grand chose aux enjeux, l'objectif étant de se préparer une piétaille électorale et non de former de véritables militant-e-s, même réformistes ; que pour beaucoup de ces lycéen-ne-s n'importe quel prétexte est bon du moment qu'il s'agit de ne pas aller en cours (mais dire cela implique, au minimum, d'interroger cette perception de l'école par ceux et celles qu'elle est censée ‘servir'), etc. etc. Pour autant, nous avons toujours eu l'habitude, à SLP, de dire que les communistes doivent ‘faire’ avec les masses et les mobilisations telles qu'elles sont et non telles qu'ils voudraient qu'elles soient ; nous l'avons dit à l'automne 2010 sur les retraites, au printemps-été 2011 sur les Indigné-e-s et nous le redisons aujourd'hui : le rôle des communistes est précisément d'être dans les mobilisations, du moment qu'elles ont un minimum d'aspects progressistes, pour ÉLEVER la conscience collective et la rendre révolutionnaire, et non d'attendre que les masses soient aussi rouges que nous le voudrions. 

Et puis, comme on ne se refait pas, certains passages sont ignobles, comme "Vaste hypocrisie alors que le père de Leonarda Dibrani a joué avec sa propre famille initialement déjà en Italie, venant en France pour toucher les prestations familiales au moyen de l'obtention de la nationalité française" (!!! discours n'ayant rien à envier à Le Pen, Zemmour ou Morano). Mais surtout, cet article nous attaque à mots couverts, car le lien avec notre récent article sur Lampedusa est évident : "Il y a lieu ainsi de réfuter le pseudo anti-impérialisme qui voit en l'immigration un phénomène révolutionnaire, alors que c'est le produit de l'exploitation semi-coloniale semi-féodale des pays non capitalistes". Nous allons donc répondre et réitérer une nouvelle fois notre position : OUI, pour nous, l'immigration ‘sauvage’ (c'est-à-dire pas voulue et organisée par les États impérialistes eux-mêmes, comme dans les années 1960 avec les sergents-recruteurs de Bouygues au Portugal et de Renault en Algérie, le BUMIDOM de Debré etc.) est OBJECTIVEMENT SUBVERSIVE (nous n'avons jamais dit ‘révolutionnaire'), car elle consiste en une tentative individuelle du travailleur, au bénéfice de lui-même, de sa famille et/ou de sa communauté villageoise, d'aller RÉCUPÉRER dans les pays impérialistes un peu de ce que ces derniers ont VOLÉ dans son pays d'origine. Lorsque le ‘p’‘c’‘mlm’ dit que "les masses ont le droit de vivre dans leur propre pays sans avoir à tout abandonner pour tenter de devenir des travailleurs tout en bas de l'échelle dans les pays impérialistes", il est évident que nous ne pensons PAS AUTRE CHOSE ; comme est évident l’‘humanisme’ paternaliste qui dégouline de la démarche de ‘gauche’ en faveur des migrants (paragraphes suivants de l'article). Mais pour le moment, il n'en est pas ainsi ; il n'est PAS POSSIBLE de vivre dignement dans ces pays et c'est pourquoi, tout en espérant vivement qu'une Guerre populaire les libèrera de leurs satrapes et de l'impérialisme, nous soutenons le DROIT de ces personnes à venir récupérer dans les pays impérialiste un peu de ce qui a été volé à leurs Peuples. C'est pourquoi 137210606 smalll'argument selon lequel le père Dibrani venait en ‘France’ pour ‘toucher les allocs’, en plus d'être ignoble, est selon nous inopérant, et nous disons même au contraire : C'EST une forme de récupération, les ‘allocs’ des ‘cités grecques’ ouest-européennes sont PERMISES par la surexploitation des ‘hilotes’ du ‘Tiers-Monde’ ou des Balkans (au terme d'un processus que pouvait déjà entrevoir Lénine en 1916...), il a donc RAISON de vouloir en profiter [1]. Si le Kosovo est pauvre, c'est parce qu'il a été pendant des années périphérisé et opprimé par un chauvinisme ‘yougoslave’ grand-serbe dont on connaît, jusqu'en 1995, la complaisance de l'impérialisme BBR envers lui ; avant de tomber aux mains d'anciens hoxhistes renégats et de mafieux albanais avec l'appui de l'impérialisme US et de l'Allemagne, auxquels la France s'est jointe in extremis. Il est donc 1/ objectif, logique et 2/ JUSTE que des Kosovar-e-s viennent se ‘rembourser’ en ‘France’, en Allemagne et dans leurs appendices impérialistes (Italie, Suisse, Bénélux). Sinon, que dit-on de foncièrement différent des nationalistes ‘sociaux’ et ‘ethno-différentialistes’ à la Dieudonné-Soral, Ayoub & co ("il faut de nouveaux rapports Nord-Sud pour tarir l'immigration à la source", comme ça "chacun chez soi et Dieu pour tous", et c'est ‘réglé) ?

Pour le reste, nous avons du mal à comprendre le rapport entre la nécessaire expropriation du Capital, avec notamment l'expulsion (mais aussi et surtout l'expropriation, ce que le ‘p’‘c’‘mlm’ oublie de dire) des oligarques étrangers (mais pas plus ni moins que les ‘français’, qui fuiront en masse), et la libre circulation des travailleurs qui est l'expression de la fraternité des Peuples et un principe absolu des communistes, dans les limites, certes, que nous imposera l'ennemi (pas question de le laisser ‘pomper’ tranquillement nos forces de travail et nos ‘cerveaux’, par exemple). La question ne se pose pas vraiment selon nous, car nous pensons que quoi que l'on fasse, les pays du ‘Tiers-Monde’ seront en révolution avant nous (donc les travailleurs ne chercheront plus à migrer, seuls les contre-révolutionnaires le feront). Mais sur le principe, il est évident qu'une quelconque base rouge socialiste en Europe accueillerait à bras ouverts non seulement tous ceux et celles qui sont "bannis de leur patrie pour la cause de la liberté", comme le proclamait la Constitution démocratique-radicale bourgeoise de 1793, mais également "tous ceux et celles qui sont affamé-e-s par la main des monopoles impérialistes" !! Ce dans quoi semble, depuis longtemps déjà, baigner le ‘p’‘c’‘mlm’, c'est une vision fantasmée et malsaine du socialisme comme une caricature de l'URSS de Staline et des pays de l'Est des années 1950, un socialisme ultra-autoritaire et ultra-verticaliste ‘par en haut’, avec un Parti infaillible qui a toujours raison même contre les masses (sur leur lancée, ils se sont encore lâchés le lendemain, lisez, c'est édifiant et après ça dites-nous si vous avez envie de risquer votre vie pour un tel ‘socialisme’...). Pour nous, cette vision est la cause n°1 de l'émergence d'une nouvelle bourgeoisie dans l'appareil ‘socialiste’ et (donc) des échecs du siècle dernier. Et le problème de son ‘éclairé’ leader nous semble être la difficulté à assumer qu'il a été DE DROITE et que, quelque part, il le reste toujours un peu dans le fond (la siono-complaisance n'étant finalement qu'une petite partie de cela). Il ne fait là, en réalité, qu'enrober de verbiage pseudo-ultra-communiste sa pensée profonde, qui est qu'il y a trop d'immigré-e-s en France, et qu'il y en a marre de ces gens totalement étrangers à la grande culture françaiiiiise de Le Nôtre, Racine et Diderot... Mais sans doute sommes-nous de ces ‘libéraux’ contre lesquels le ‘p’‘c’‘mlm’ mène sa petite croisade !

munegu.jpgPour ce qui est, enfin, de "Monaco qui sera envahi, aussi simplement et sans procédure", nous ne pensons certes pas autre chose de ce nid à nantis et à capitaux plus ou moins crades dirigé par un roitelet absolu ; mais... désolés les gars, Monaco c'est à nous, pas à vous : Monaco c'est l'Occitanie nissarde, pas la ‘France’ ! La principauté fait en réalité partie comme les 26 cantons de la Confédération suisse, le Luxembourg, le Liechtenstein, Andorre ou encore Saint-Marin de ce que l'on peut qualifier de vestiges étatiques pré-modernes : de petits États qui ont été préservés de l'anéantissement (qui n'en a pas moins traversé l'esprit de plus d'un dirigeant de leurs grands voisins !) pour être en quelque sorte "neutralisés" et transformés en conservatoires de capitaux, fonction indispensable à la machine capitaliste. Les rares Monégasques ‘de souche’ (citoyens et non résidents de la principauté, 20% des 35.000 habitant-e-s, généralement les plus modestes) sont d'ailleurs parmi les derniers gardiens de l'occitan ‘alpin maritime’, conjointement et mêlé au monégasque lui-même, dialecte plutôt ligure proche de celui de Vintimille (État italien) ; on estime le nombre de locuteurs à environ 5.000 (15% de la population). L’actuelle principauté sera vraisemblablement intégrée dans le païs (ou parçan) de Haute-Côte-d’Azur avec Menton, Roquebrune et l’arrière-pays ; elle formera une Commune populaire avec les communes voisines de Beausoleil, Cap d’Ail et la Turbie (58.000 personnes, c’est beaucoup mais il y aura ventilation vers l’intérieur des terres et sans doute fuite de beaucoup de bourgeois), elle-même divisée en secteurs (bastidas) etc. Les grands possédants qui n’auront pas pris la poudre d'escampette seront affectés à des brigades de travail, dans les plantations d’orangers ou ailleurs. Tout ceci sera décidé démocratiquement par les masses populaires dotées des droits civiques, c'est-à-dire les personnes vivant uniquement de leur travail et non de celui des autres. Vous pouvez donc, chers ‘détenteurs de la science MLM’, vous carrer vos fantasmes annexionnistes au même endroit que monsieur Mélenchon les siens (sur la Wallonie)...

3. Le fascisme : forcément ‘national ET SOCIAL’ ? 

C'est quelque chose que l'on entend souvent : pour beaucoup, beaucoup de forces ne peuvent pas être qualifiées de fascistes car non seulement elles n'ont pas un caractère paramilitaire et illégaliste violent, mais elles n'ont pas un discours ‘social’ et ‘révolutionnaire’, elles sont ‘trop conservatrices’ etc. C'est évidemment la position générale de la bourgeoisie, pour laquelle le fascisme "c'est pas elle", ce n'est pas un produit du capitalisme. C'est la position des gaullistes, dont l'idéologie provient des Croix-de-Feu des années 1930, dont il faut donc démontrer le ‘non-fascisme’ (thèses de René Rémond). C'est la position des trotskystes, pour lesquels le fascisme n'est pas avant tout l'expression la plus réactionnaire (terroriste ouverte) du Grand Capital, mais avant tout un mouvement de la petite-bourgeoisie auquel le capitalisme en crise ‘cède’ le pouvoir avant que celui-ci ne ‘tombe’ entre les mains du prolétariat (comme si les monopoles pouvaient ‘céder’ ainsi le pouvoir à une classe subalterne). Et c'est évidemment la position des fascistes (ceux qui veulent vraiment le pouvoir en tout cas !), qui se défendront toujours d'enfreindre la loi, d'être violents, et donc... d'être fascistes. Mais c'est aussi la position de ‘marxistes’ pour qui le fascisme est un mouvement ‘révolutionnaire’, ‘anticapitaliste’ mais ayant le défaut d'être ‘romantique’, anti-scientifique (eux par contre le sont absolument !), et donc réactionnaire. Ce fascisme ‘révolutionnaire’, venant ‘du milieu de la société’ [voir cet article-fleuve des ‘matérialistes.com’ consacré à un groupe de musique fascistoïde], a l’‘avantage’ d'être totalement déconnecté du Grand Capital monopoliste, sauf à considérer que celui-ci n'est pas au pouvoir et veut justement le prendre, ce qui dans les deux cas contredit totalement le marxisme-highres 00007939 copyléninisme et a fortiori le maoïsme. Dans tous les cas, le fascisme est clairement réduit aux groupes activistes, qui se heurtent en effet parfois aux foudres de la loi, et totalement délié du pouvoir d'État en place : il est fait totalement l'impasse sur la fascisation rampante des pratiques de gouvernement et des grands partis bourgeois même ‘de gauche’ (Valls, Gerin), qui va pourtant (historiquement) toujours de pair. Mais c'est sûr, cela évite de s'attaquer à la grosse bête étatique ! Pour autant, l'on voit mal comment cela pourrait mener, en dernière instance, à autre chose que défendre le pouvoir ‘démocratique’ bourgeois en place, ‘menacé’ par le fascisme... alors même que cet épouvantail du ‘voisin de droite’ (UMP et FN pour le PS, FN pour l'UMP, groupes ultras pour le FN) est le leitmotiv de toutes les politiques ‘fascistes modernes’ depuis plus de 20 ans ("si on ne fait pas" ceci ou cela "ce sera la droite", ou "le FN va monter", "les extrêêêêmes" etc. etc.). 

Mais une autre théorie possible, c'est que le fascisme comme forme de gouvernement (dictature terroriste ouverte de la bourgeoisie contre toute contestation sociale, appuyée sur une certaine mobilisation de masse) n'est pas lié en soi à un modèle économique, dirigiste/keynésien ou ‘libéral'/'état-minimaliste’. Autrement dit, le fascisme n'est pas forcément dirigiste et ‘social’ comme il l'était dans les années 30 et suivantes du siècle dernier (comme typiquement l'Allemagne nazie). Il l'était lorsque, disons de 1930 à 1970 environ, le capitalisme y voyait le meilleur moyen (soutien à la consommation) pour enrayer sa crise systémique et sa chute constante du taux de profit. Il faut bien dire qu'à l'époque, le libéralisme économique était quasi inexistant politiquement : la gauche bourgeoise, associée à la social-démocratie et éventuellement aux ‘communistes’ opportunistes, était ‘État-providence’ ; la droite plus ou moins modérée ou réactionnaire était ‘État-providence’ en mode démocrate/social-chrétien ; et l'extrême-droite était ‘État-providence’ en mode national-socialiste ou national-catholique corporatiste ‘Rerum novarum.

Ceci semblait avoir définitivement porté ses fruits dans les années 1960. Dans les pays très avancés, ayant réussi à encadrer les masses dans la société de consommation, régnait une alternance de social-démocratie et de démocratie-chrétienne ou autre conservatisme social modéré ; tandis que dans les pays à tensions sociales plus fortes régnaient des formes plus autoritaires et répressives (État espagnol, Portugal, dans une moindre mesure Italie, Japon, État français).

Mais le monde entra au début des années 1970 dans une nouvelle crise générale, et s'imposa alors l'idée que la ‘relance’ (enrayer la chute du taux de profit) se ferait par la ‘flexibilité’, la ‘compétitivité’, la diminution de rôle de l'État ‘régulateur’ dans l'économie. La droite devint ‘néolibérale’ friedmanienne, reagano-thatchérienne, la ‘gauche’ social-libérale rocardo-blairiste, tandis que dans de nombreux pays, comme en Amérique latine, en Turquie, en Corée, en Indonésie ou aux Philippines etc., ce sont chicagoboysdes régimes fascistes qui mettront en œuvre le tournant ‘libéral’. En Europe même, l'extrême-droite, le FN n'étant pas en reste, avait dans les années 1980 et début 1990 un discours très thatchérien. C'est à partir du milieu des années 1990 que le FN (notamment) commencera à adopter un discours anti-mondialisation’, un discours plus ‘mixte’ continuant à défendre les entreprises contre la ‘bureaucratie’, le ‘racket fiscal’, le ‘terrorisme syndical’, les ‘charges’ et ‘carcans juridiques’ en tout genre auxquels s'ajoutent désormais la ‘technocratie de Bruxelles’, mais mettant également en avant un ‘État protecteur’ contre un ‘libéralisme sauvage’ : comme le résumaient bien les mots de Le Pen lui-même en 2002, "économiquement de droite, socialement de gauche et nationalement de France". En cela, lorsque l'on voit le discours politique général aujourd'hui, en particulier depuis la grande crise de 2008, il n'a peut-être rien fait d'autre que d'être un précurseur... Aujourd'hui, plus grand monde, surtout pas en Europe continentale mais plus guère non plus dans les pays anglo-saxons, ne se présente ouvertement comme un disciple de Milton Friedman et de Margaret Thatcher, cela depuis même avant le grand crash financier de 2008 (probablement depuis la crise asiatique et russe de 1997-98, l'effondrement argentin de décembre 2001 etc.). Sarkozy lui-même, en campagne en 2007, se posait en défenseur de "l'économie réelle, productive" contre la "finance" et la "loi des actionnaires", en des termes n'ayant rien à envier à Arnaud Montebourg... À la différence que pour lui il fallait avant tout de la ‘flexibilité’, réduire les ‘charges’ et les ‘rigidités’ sur les entreprises et le travail pour créer de l'emploi (donc de la consommation), alors que pour Montebourg il faut de l'intervention et de la dépense publique, des aides sociales, des emplois aidés et des nationalisations (vision keynésienne) dans ce même but. Mais dans les deux cas, ce qui est visé c'est la LUTTE CONTRE LA BAISSE DU TAUX DE PROFIT, ce qui d'une manière ou d'une autre se fera en augmentant l'extorsion de plus-value : d'un côté les ‘charges’ sont en réalité un salaire différé du travailleur, sur lequel on peut facilement ‘jouer’ puisqu'il ne le perçoit pas directement donc ne s'en ‘aperçoit pas’ ; de l'autre on lui donne (d'une main) de l'argent, mais pour qu'il consomme (c'est ainsi que les ‘socialistes’ au pouvoir cherchent à décourager l'épargne par la taxation), donc pour le récupérer de l'autre : extorsion comme soldat-de-la-consommation et non plus de la production [2]. Car quelle que soit la forme de gouvernement et de ‘gestion’ de la production-exploitation qu'il revêt, le capitalisme ne cherche JAMAIS autre chose.

C'est pourquoi nous sommes de plus en plus sur cette position qu'il faut bien différencier le fascisme comme FORME DE GOUVERNEMENT (dictature du Capital au terrorisme et au chauvinisme guerrier plus ou moins ouvert) du MODÈLE ÉCONOMIQUE, qui est globalement soit ‘libéral’ (dans le sens de ‘libérer’ les entreprises des ‘charges’ et autres ‘tracasseries bureaucratiques'), soit keynésien (intervention de l'État en appui à la demande). Le programme économique du Front National est pour le moment un melting-pot de défense reagano-poujadiste de l'entreprise (héritée des années 80) et d'État-providence’ pompidolien (ajouté depuis), la solution sur l'un comme l'autre front étant de "sortir de la technocratie européenne", virer les ‘immigrés’ et liquider l’‘assistanat’ ; et il est probable que, dans la démagogie électorale comme dans l'éventuel exercice du pouvoir, il dansera sur l'un ou l'autre pied au gré du vent.

Le fascisme comme forme de gouvernement, c'est en définitive le Grand Capital qui ne s'embarrasse plus des grands ‘principes’ des Lumières et du républicanisme bourgeois du 19e siècle (encore qu'il s'en revendique de plus en plus contre les ‘barbares’ qui peupleraient les quartiers populaires, à la manière des colonialistes de la 3e République) ; et la lutte contre le fascisme ce n'est pas défendre la bourgeoisie qui s'y accroche encore (libérale ou social-libérale, démocrate ou social-démocrate, ‘républicaine'), mais mettre à profit ce ‘bas les masques’ pour montrer aux masses qui ont sincèrement cru en ces principes (que le capitalisme a produit à une certaine époque, mais qu'il est voué à piétiner en permanence) que les seules véritables Lumières sont celles, rouges, de la destinée communiste du genre humain ! 

 

[1] D’ailleurs, le fait même de dire que le ‘droit’ d’immigrer en Europe est lié au fait de travailler et (donc) de rejoindre la tant fantasmée ‘classe ouvrière’, c’est OUBLIER (et de fait, exclure de cette classe ouvrière) qu’à l’heure où nous écrivons près du tiers de la population active (en âge de travailler et non-étudiante, non-invalide etc.), soit plus de 9 milions de personnes, est soit sans emploi soit dans des conditions d’emploi très précaires (CDD sur CDD, missions d’intérim, ou carrément ‘au black’), soit encore ‘stagiaire jusqu’à nouvel ordre’ (énormément de 25-30 ans) ou en ‘chômage partiel’ (près de 100.000 salarié-e-s à chaque instant t) ; et que ces personnes forment indiscutablement le VRAI prolétariat, ce mot dont se gargarisent les avant-gardes autoproclamées. Aujourd’hui en ‘France’, avoir un emploi stable et à peu près garanti, en CDI par exemple, même pour un(e) ouvrier(e) au travail très pénible, c’est être ‘privilégié’, c’est faire partie d’une ‘aristocratie’ du salariat. Et considérer que la seule ‘classe ouvrière’ qui vaille sont les gens dans cette situation, qui travaillent de manière déclarée et stable, c’est assurément être un ‘révolutionnaire’ bien petit-bourgeois ! 

[2] Le capitalisme a en réalité toujours fonctionné ainsi, puisqu'il consiste par nature à arracher au travailleur tout moyen de production propre et à lui donner de l'argent (salaire) pour qu'il achète... ce qu'il a lui même produit, ou ce que d'autres travailleurs ont produit pour la classe capitaliste en général. Mais mettre particulièrement l'accent sur cela (lui permettre de consommer au-delà de ses besoin primaires : manger, se loger, se vêtir etc.) est la grande "révolution" capitaliste du 20e siècle, avec notamment des théoriciens comme Henry Ford (un grand admirateur du nazisme comme chacun-e le sait) ; en même temps que s'achevait la guerre de classe (bourgeoise) contre l'autosuffisance alimentaire (fin des jardins ouvriers), immobilière (ne plus pouvoir construire son propre logement : permis de construire, plans d'urbanisme) etc. etc. - sans quoi cela n'aurait pas été drôle...

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  • : Servir Le Peuple : le blog des Nouveaux Partisans
  • : Retrouvez SLP sur son nouveau site http://servirlepeupleservirlepeuple.eklablog.com/ Servir Le Peuple est un média COMMUNISTE RÉVOLUTIONNAIRE, marxiste-léniniste-maoïste, visant par la RÉFLEXION, l'INFORMATION et l'ÉDUCATION POLITIQUE ET CULTURELLE de masse à favoriser la renaissance du mouvement communiste révolutionnaire dans l'État français et le monde francophone.
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Les articles des derniers mois :

Retrouver Servir le Peuple sur son NOUVEAU SITE
servirlepeuple.eklablog

novembre 2014
octobre 2014
septembre 2014
août 2014
juillet 2014

Retrouver Servir le Peuple sur son NOUVEAU SITE
servirlepeuple.eklablog

DOSSIER PALESTINE (conflit de juillet 2014) :
Sionisme, islamisme et ennemi principal : quelques précisions
Post-scriptum important : le cas Feiglin
Le sionisme, "fils de France"
Au cas où il serait utile de le préciser...
Deux clarifications importantes
Flash info en direct : ils ont semé la hoggra, ils ont récolté l'Intifada !
Flash info - importance haute : la manifestation pro-palestinienne de demain à Paris est INTERDITE
Le problème avec la Palestine...
Grande manif contre les crimes sionistes à Paris (13/07)
Magnifique manifestation pour la Palestine à Tolosa, capitale d'Occitanie occupée
Petites considérations sur le sionisme et l'identification-"obsession" palestinienne
Considérations diverses : une mise au point nécessaire sur nos positions internationalistes et aux côtés des Peuples

juin 2014

POSITION DES COMMUNISTES RÉVOLUTIONNAIRES DE LIBÉRATION OCCITANE SUR LES ÉLECTIONS MUNICIPALES ET EUROPÉENNES DES PROCHAINS MOIS

L'affaire Dieudonné-Valls :
Plutôt bon article sur la ‘Déclaration de guerre de la République à Dieudonné’ (la pseudo-controverse réactionnaire entre l’antisémite dégénéré et les gardiens du temple républicain)
Quelques mises au point complémentaires (et conclusives) sur la ‘‘question Dieudonné’’ (et Dreyfus, le Front populaire, l’antisémitisme etc.)
Réflexion théorique : loi Gayssot, lois antiracistes et "mémorielles", "antifascisme" bourgeois etc., quelle position pour les communistes ?

Dossier Breizh :
Breizh : comment l'étincelle écotaxe a mis le feu à la lande
"Esclave", "identitaire", chouan, cul-terreux arriéré de service : pour paraphraser Césaire, "n'allez pas le répéter, mais le Breton il vous EMMERDE"
Considérations diverses – en guise de ‘‘petit debriefing’’ de ces derniers mois : Bretagne, fascisme, ‘‘Lumières’’ et Kaypakkaya… (point 1)
Considérations diverse (26/11/2013) : eh oui, Servir le Peuple a toujours quelques petites choses à vous dire ;-) (point 1)
Appel de la gauche indépendantiste bretonne (Breizhistance) pour le 30 novembre (avec notre critique de la position du ROCML)
Le Top Five des drapeaux qui n'ont PAS été inventés par un druide nazi  (mortel !)
Et en guise (provisoire) de conclusion : La Gauche indépendantiste bretonne revient sur la mobilisation de Karaez/Carhaix

Comité de Construction du PCR des Terres d'Òc : Déclaration du 11 Novembre

La phrase du moment :

"La tyrannie cessera parmi mon peuple ; il n'y aura que liberté, liberté toute nue, sans déguisement. Bouleversements d’États entiers : je les renverserai de fond en comble, il n'y aura rien de reste. Il va y avoir de terribles renversements de conditions, de charges et de toutes choses. Je veux faire un monde nouveau, je veux tout détruire. Je veux appeler à moi la faiblesse, je veux la rendre forte. Pleurez gens du monde, pleurez grands de la terre, vos puissances vont tomber. Rois du monde, vos couronnes sont abattues !"

Élie Marion, "prophète" et guérillero camisard cévenol, 1706.

Amb l'anma d'un Camisart, Pòble trabalhaire d'Occitània endavant !

 

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État français : 

Quartiers populaires - Colonies intérieures :

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Internationalisme :

Castillanophones (État espagnol et Amérique latine) :

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Germanophones et scandinaves : 

À l'Est, du nouveau : 

Grèce :

  • KOE ('maoïsant', allié à la gauche bourgeoise SYRIZA, en anglais) [dissous dans SYRIZA en 2013, publie maintenant Drómos tis Aristerás, en grec]
  • KKE(m-l) (marxiste-léniniste 'maofriendly', partie en anglais, le reste en grec)
  • ANTARSYA (Coordination de la gauche anticapitaliste pour le renversement, avec des trotskystes, des 'maos' etc., en grec)
  • ANTARSYA - France (site en français)
  • Laïki Enotita ("Unité populaire") - France (en français et en grec, scission anti-capitulation de SYRIZA, pour s'informer)
    EKKE (Mouvement communiste révolutionnaire de Grèce, 'maoïsant' et membre d'ANTARSYA, présentation en anglais, le reste en grec)

Karayib (Antilles-Guyane) & Larényon (Réunion) okupé : 

Monde arabe / Résistance palestinienne :

État turc / Kurdistan : 

  • Maoist Komünist Partisi (PC maoïste de Turquie/Kurdistan-Nord)
  • DHKP-C (ML, tendance 'guévariste')
  • TKP/ML (maoïste)
  • MLKP (ML, site francophone)
  • ATİK (Confédération des Travailleurs de Turquie en Europe, maoïste, en anglais)
  • Nouvelle Turquie (information et soutien à la Guerre populaire et aux luttes, en français) [ancien blog]
    Nouvelle Turquie (nouveau site)
  • YPG (Unités de Protection du Peuple, Kurdistan "de Syrie", en anglais)
    PKK (Kurdistan "de Turquie", site en anglais)
    PYD (Parti de l'Union démocratique, Kurdistan "syrien", site en anglais)
    ActuKurde (site d'information en français)

Afrique :

Asie & Océanie :

Antifa :

Action Antifasciste Bordeaux (plus mis à jour, mais "cave aux trésors")

AA Alsace (idem)

Union Révolutionnaire Antifasciste du Haut-Rhin (URA 68, page Facebook)

Collectif Antifasciste Paris - Banlieue

Action Antifasciste Paris - Banlieue

Montpellier Antifa

Collectif Antifasciste 34

Collectif Antifasciste Rennais (AntifaBzh)

Cellule Antifasciste Révolutionnaire d'Auvergne (CARA, page Facebook)

Carcin/Quercy Antifascista (page Facebook)

Occitània Antifascista (page Facebook)

Breizh Antifa (page Facebook)

Perpignan Antifa (page Facebook)

Action Antifasciste de Pau

Union Antifasciste Toulousaine

Ipar Euskal Herria Antifaxista (Pays Basque du Nord antifasciste)

REFLEXes - site d'informations antifascistes

La Horde, portail d'information antifa

Rebellyon - rubrique "Facho"

Redskins Limoges

Droites extrêmes - blog Le Monde (site d'information bourgeois bien fourni, parfait pour le "watch")

Document : Ascenseur pour les fachos (série de 6 vidéos Youtube, Antifascisme.org, site social-démocrate)

 

Guerre pop' - Asie du Sud :

Inde Rouge (nouveau site "officiel" francophone)

Comité de Soutien à la Révolution en Inde

Comité de solidarité franco-népalais

Fil d'actu "Inde - Népal" du Secours Rouge - APAPC

J. Adarshini (excellent site en français)

Revolution in South Asia (en anglais)

Maoist Resistance (guérilla maoïste indienne - en anglais)

NaxalRevolution (Naxalite Maoist India, en anglais)

Banned Thought (en anglais)

Indian Vanguard (en anglais)

The Next Front (Népal - anglais)

Signalfire (sur la GPP en Inde et aux Philippines, le Népal et les luttes populaires dans le monde - en anglais)

Communist Party of India (Marxist-Leninist) Naxalbari (a fusionné avec le PC d'Inde maoïste le 1er mai 2014)

New Marxist Study Group (maoïste, Sri Lanka)

Parti communiste maoïste de Manipur (page Facebook)

 

Guerre pop' - Philippines :

Philippine Revolution (en anglais)

The PRWC Blogs

(tous deux remplacés apparemment par ce site CPP.ph avec notamment les archives d'Ang Bayan, l'organe officiel du Parti)

Solidarité Philippines

Fil d'actu "Philippines" du Secours Rouge - APAPC

 

Guerre pop' & Luttes armées - Amérique latine :

CEDEMA - actualité des mouvements armés en Amérique latine (+ qqs documents historiques)

 

Nuevo Peru (Pérou, basé en Allemagne, en castillan et allemand principalement)

Guardias Rojos (Pérou, page FB)

Fil d'actu "Amérique latine" du Secours Rouge - APAPC

Archives

Autres documents théoriques

 

Récapitulatif des "grandes thèses" de Servir le Peuple


À lire également, les Considérations Diverses, petits "billets" trop courts pour faire un article et donc regroupés par trois, quatre ou plus, exprimant notre CONCEPTION DU MONDE sur toute sorte de sujets. 


Même étude sur l'État espagnol (1 et 2) ; le Royaume-Uni (1 et 2) et l'Italie.

 

APRÈS 8 SÈGLES… (Huitième centenaire de la bataille de Muret 1213 & DÉCLARATION FONDATRICE de notre Comité de Construction du PCR-Òc)

 

 






 

 

 


 


 

 

Le 'centre mlm' de Belgique, la Guerre populaire et le (n)PCI (sur la stratégie révolutionnaire en pays impérialiste) ; et dans la continuité :

Gramsci et la théorie de la Guerre populaire en pays capitaliste très avancé (1ère partie)

et Gramsci et la théorie de la Guerre populaire en pays capitaliste très avancé (2e partie)

 

 

 

EXCLUSIF : Lotta Continua - "Prenons la Ville !" (1970) [avec un salut rouge et fraternel à l'AA Bordeaux ]

Manifeste Programme du (n)PCI

Présentation

du chap. 1 du Manifeste pour les lecteurs/trices francophones (valable pour tout le Manifeste)

 

(Chapitre I): PDF - WORD

 

 

 MANIFESTE COMPLET

(version non-définitive ; chap. 4 et 5 pas encore validés par les camarades italiens)

 

IMPORTANT pour la compréhension du Manifeste :

La crise actuelle, une crise par surproduction absolue de capital (en PDF)

article de 1985 paru dans Rapporti Sociali n°0

[en bas de la page en lien, icône
PDF - Télécharger le fichier pour télécharger le document]

Autres analyses d'actualité









Situation décisive au Népal 

En matière de conclusion sur la situation au Népal, et ses répercussions dans le Mouvement communiste international 

Questions-réponses sur la situation au Népal

 

Discussion sur la "gauche" en Amérique latine et la bourgeoisie bureaucratique

 

Sur la liquidation réformiste en Euskal Herria : l'analyse d'un communiste abertzale

Sur la liquidation réformiste en Euskal Herria, 2e partie

Sur la liquidation réformiste en Euskal Herria, 3e et dernière partie  

 

 

 

 


Considérations diverses 03-2013 - et un peu de polémique/critique, ça fait pas de mal ! (sur Chavez, le 'bolivarisme', le 'fascisme' de celui-ci et autres choses...)

Autres articles historiques

 

25 avril 1945 : le Peuple italien terrasse le fascisme

 

 


 




Et en guise de récapitulatif/synthèse : Considérations diverses sur les États, les Nationalités, la Subsidiarité et le Pouvoir populaire ; ici (point 1) : Considérations diverses – fin octobre 2013 : État et révolution bourgeoise et ici : Considérations diverses : 1/ Le cœur des nations est aujourd’hui le Peuple