En ce début de semaine, la presse bourgeoise fait ses choux gras avec en gros titre : « La coalition se fissure» (voir aussi ici et ici pour le 22 mars). Surprise manifeste pour nos pisse-copies, mais rien de neuf sous le soleil pour Servir le Peuple, rien de plus que ce qui a été affirmé depuis le début : il n’y a pas de "communauté internationale" (encore moins "d’Empire") unifiée, et sur le dossier libyen encore moins… Mais bel et bien, deux camps qui s’affrontent.
Le bloc impérialiste pro-Kadhafi campe sur ses positions, sans la moindre surprise. Ainsi l’impérialisme italien, dont les pétroliers ENI, la semaine dernière, ont repris l’approvisionnement en brut à la faveur de la contre-offensive kadhafiste : pour le ministre des Affaires étrangères, lundi 21 mars, il n’était « pas question que l’Italie fasse la guerre » à la Libye du colonel. Et ce mardi 22 mars, Berlusconi et Frattini affirment que l’Italie pourrait… interdire l’usage de ses bases aériennes, à moins que l’OTAN assure le commandement des opérations. Autrement dit, impossible : composé de 28 pays (pour la plupart impérialistes, ou « gendarmes régionaux » comme la Turquie), l’organisation militaire n’est pas plus unie sur le dossier que l’UE, l’ONU ou quelque « communauté internationale » que ce soit. Il est inenvisageable d’obtenir un consensus pour une opération estampillée OTAN… Cela pourrait passer inaperçu, mais en réalité, une telle décision serait la première que prend l’Italie, vis-à-vis de Washington, depuis la Seconde Guerre mondiale (la Turquie AKP, de son côté, avait déjà refusé l’utilisation de son territoire pour l’invasion de l’Irak) ! Jusque là, les bases de l’OTAN en Italie ont toujours pu être utilisées, contre la Yougoslavie, l’Irak, l’Afghanistan ou déjà la Libye, en 1986. Plus fort encore (dans le genre clair et net) : Frattini a ajouté que «l'attitude de la France n'est pas acceptable. L'Italie ne peut pas avoir seulement les immigrés, nous devons absolument protéger aussi nos investissements» en Libye ! L’antagonisme entre les intérêts italiens et l’opération franco-anglo-US ne pouvait pas être affirmé plus clairement…
De son côté, l’Allemagne réaffirme haut et fort « ne pas regretter son non-engagement » contre le régime du clan Kadhafi. L’Etat espagnol (qui assure 8% des achats de pétrole libyen) participera à l’opération, mais précise qu’elle sera « de courte durée » : sous-entendu, attention à ne pas aller trop loin… La Chine a répété sa condamnation, sur des préoccupations humanitaires, ce qui a de quoi bien faire rigoler, quand on connaît son soutien aux satrapes birmans, soudanais et autres nord-coréens, et l’oppression subie par les travailleurs chinois ou les minorités, à coup de milliers d’exécutions capitales par an. En Russie, le PM Poutine a comparé l’opération aux « croisades du Moyen-âge » ; cependant (encore un fait peu habituel), le président Medvedev (considéré comme représentant le courant plus pro-occidental de la bourgeoisie russe) a jugé ces propos « inacceptables ». L’impérialisme russe n’en appelle pas moins à un « cessez-le-feu immédiat ».
Du côté des semi-colonies, une sorte de « nouveau camp non-aligné » se fait jour contre l’intervention : après le Brésil et l’Inde qui, avec la Russie et la Chine (BRIC), s’étaient abstenus au Conseil de sécurité, la Turquie clame clairement son opposition et « exclut » sa participation aux frappes, tandis que pour le PM bulgare, il s’agit d’une « aventure guidée par le pétrole ». L’Algérie (qui achète pour plusieurs milliards de matériel militaire à la Russie) a également appelé à la « cessation des hostilités ». La Ligue arabe, par la voix son porte-parole Amr Moussa (égyptien) a jugé que « l’opération s’est écartée des termes de la résolution 1973 », tandis que l’Union africaine la condamne elle aussi fermement. Soyons clairs : JAMAIS ces « conférences » de bourgeois compradores et autre garde-chiourmes de l’impérialisme (ou candidats, comme Moussa en Egypte) ne prendraient de telles positions, s’ils n’avaient pas de puissantes forces impérialistes en appui derrière !
Mais du côté de la coalition, les choses prennent aussi une tournure curieuse. Ainsi pour les USA, les frappes vont « diminuer d’intensité » : "A moins que quelque chose d'inhabituel ou d'inattendu survienne, nous pourrions observer une diminution de la fréquence des attaques", a déclaré le général Carter Ham, propos confirmé par le secrétaire d’Etat (ministre) à la Défense, Robert Gates. Plus surprenant encore, pour le plus haut gradé US Mike Mullen, les frappes visent à « protéger les civils » mais n’ont « pas pour but de chasser Kadhafi du pouvoir »… Il semblerait bien que l’impérialisme US lui-même soit divisé sur le dossier… un certain nombre (dont peut-être la frange dure, conservatrice de la bourgeoisie) prenant au sérieux le risque de « mettre les islamistes au pouvoir », « comme Clinton au Kosovo » (NDLR 23/03 : opposition du "Tea Party" à l'intervention confirmée)… En tout cas, c’est ce que redoute leur « antenne » en France, le « parti républicain » de l’ex-FN Jean-François Touzé.
Côté français, si l’impérialisme BBR est en pointe de l’intervention, pour l’hebdomadaire intello-bourgeois « de gauche » Nouvel Obs, Sarkozy et son « conseiller spécial » improvisé BHL auraient totalement court-circuité Juppé et le ministère de la Défense, beaucoup plus réservés. L’état-major obéit au « chef des armées », mais serait également très réticent. Et Jean-Marie Le Pen, sans prendre position clairement pour Kadhafi (comme il l’avait fait pour Saddam ou Milosevic), a vivement critiqué (comme pour la Côte d’Ivoire…) la « précipitation » de Sarkozy… A un an des présidentielles, ce n’est pas le moment pour le FN de prendre trop nettement position sur une question qui manifestement, divise la bourgeoisie impérialiste (dont le fascisme, on le sait, n’est que le porte-flingue en dernière extrémité).
Enfin, on a déjà dit que côté anglais, la « cheffe de la diplomatie » UE Catherine Ashton (travailliste) était du côté des « réservés » sur l’opération… On le voit, l’unanimité ne règne pas même au sein des pays impérialistes en pointe de la "croisade" anti-Kadhafi !
La situation est complexe : cette phrase rabachée par les "anti-impérialistes" est on ne peut plus vraie, même si pour SLP, elle n'implique pas de se ranger derrière Kadhafi et ses appuis impérialistes !
Ainsi donc, IL FAUT condamner sans ambigüité l’intervention impérialiste qui prétend « voler au secours » du Peuple libyen (en réalité, lui voler sa lutte !) ; mais il apparaît clairement que les « anti-impérialistes » (enfin, rien là que d’habituel...), traditionnels avocats des Milosevic, Mugabe et autre El-Béchir, mais aussi, plus surprenant (esprit de contradiction ?), les ultra-gauchistes qu’on a connu plus circonspects, se sont montés le bourrichon en se lançant à l’assaut d’un « complot impérialiste », insultant les masses populaires insurgées libyennes et versant dans le soutien objectif à Kadhafi. Comme si nous étions en face d’un nouvel Irak, ce qui n’est pas du tout le cas. La guerre d’Irak était une guerre s’inscrivant pleinement dans la crise générale du capitalisme par surproduction absolue de capital : une guerre qui ne visait pas seulement la rapine, mais aussi la destruction de capital, la réduction à néant d’un pays et de son économie (1 million de morts, par la violence directement, ou par la surmortalité)… Ici en Libye, il s’agit tout au plus d’assurer par les armes, face à un autocrate têtu qui s’accroche, la même « transition démocratique » (et confiscation de la révolte populaire) qu’en Tunisie et en Egypte, en conquérant au passage des « parts de gâteau » libyen supplémentaires… et encore : on s’aperçoit, au fil des dépêches, que les gouvernements et les états-majors eux-mêmes ne sont pas tellement fixés sur leurs propres buts de guerre !
Face à cela, Servir le Peuple réaffirme sa position : IL Y A DEUX GUERRES.
L’une oppose deux blocs impérialistes : France-Angleterre-USA appuyant le « CNT » (et encore, on a vu les dissensions internes !) contre Kadhafi soutenu par l’Allemagne, l’Italie, la Russie etc. etc. Celle-là, nous n’avons rien avoir avec, et nous la dénonçons et la combattons par la solidarité internationaliste.
L’autre oppose une révolte POPULAIRE à un clan corrompu, mafieux, sanguinaire (on l’a vu et que personne ne le nie !) et vendu aux impérialistes depuis des années, y compris ceux qui aujourd’hui veulent l’éjecter pour le remplacer par un autre. Dans celle-ci, LE CAMP DU PEUPLE EST NOTRE CAMP !!!
A lire aussi, les déclarations marxistes-léninistes du ROC-ML sur la situation en Libye :
DECLARATION DU ROCML
LYBIE
AVEC LE PROLETARIAT ET LE PEUPLE
CONTRE LA DICTATURE DE LA BOURGEOISIE
ET L’IMPERIALISME
Survenue à la suite des soulèvements populaires en Tunisie et en Egypte, l’insurrection armée en Lybie présente des caractéristiques communes avec les premières, mais aussi des différences sous quelques aspects importants.
En Tunisie et en Egypte, les dictateurs étaient de fidèles valets des puissances impérialistes occidentales, européennes et étasunienne. Ni Ben Ali ni Moubarak n’ont un jour mis en cause les intérêts des USA, de la France, ni ceux des autres puissances de l’Europe de l’Ouest. En échange, avant les soulèvements, ces impérialismes ont toujours soutenu les dictatures en place.
En Tunisie et en Egypte, ce sont les peuples, avec au premier rang le prolétariat et sa jeunesse, qui se sont soulevés contre les dictatures, contre le chômage et la misère. Face à la contestation du pouvoir à leur solde, les pays impérialistes ont hésité à prendre position. Fallait-il soutenir les dictateurs jusqu’au bout ou mettre en place une solution de rechange?
Sous-estimant la force du soulèvement populaire, la France qui était le principal investisseur en Tunisie, a commis l’erreur de soutenir son ami Ben Ali au-delà du « politiquement raisonnable ». Cette faute a été mise à profit (pas de cadeaux entre « alliés » rivaux !) par les Etats-Unis qui eux, ont eu l’intelligence de lâcher Ben Ali assez tôt, fait mine de soutenir le camp du peuple et en sous main ont travaillé à l’installation d’une solution « démocratique » maintenant la domination conjointe de l’impérialisme (des USA, maintenant) et autant que possible de la bourgeoisie locale, avec l’armée comme pilier du nouvel Etat bourgeois. Le même scénario s’est appliqué à l’Egypte.
La composition des gouvernements de transition censés établir la démocratie se modifie en fonction de la poursuite, des objectifs et de la force du mouvement populaire, par l’élimination des personnages les plus liés à la dictature. Mais en aucun cas, la bourgeoisie et l’armée chapeautée par les conseillers militaires américains ne laisseront franchir au peuple le fil rouge de l’ordre capitaliste impérialiste.
Les communistes ont soutenu la lutte des peuples tunisien et égyptien contre les dictateurs Ben Ali et Moubarak. Ils continueront à les soutenir dans leurs luttes présentes et à venir contre les gouvernements dits de transition fabriqués par l’impérialisme US, pour un pouvoir populaire, pour une société débarrassée de l’exploitation et de l’oppression capitalistes impérialistes.
La situation est-elle identique en Lybie ? Non, pour plusieurs raisons.
La première est que la Lybie représente un enjeu économique important. Elle est en effet le troisième pays producteur de pétrole d’Afrique (1,8 millions de barils par jour) et son sous-sol en contiendrait d’énormes réserves (44 milliards de barils de réserves prouvées). Elle est donc l’objet des convoitises des puissances impérialistes et excite leurs rivalités.
Actuellement, l’extraction du pétrole est partagée entre les firmes BP, Royal Deutch Shell, Total, BASF, Statoil, Rapsol et Gazprom. Après la levée des sanctions internationales en 2004, les investissements de compagnies américaines comme Exxon Mobil, Chevron et Conoco Phillips, sont restés limités à l’exploration offshore avec des résultats décevants.
La seconde est la structure tribale de la société lybienne. Après le coup d’Etat de 1969 Kadhafi avait promis une juste répartition des revenus nationaux entre les différentes tribus. Or, il a n’a pas respecté cet engagement. La rente pétrolière profite principalement à son clan. L’insurrection est largement inspirée par une volonté de revanche des chefs des tribus spoliées et de leurs populations. Ce sont les milices tribales qui constituent le bras armé de l’insurrection.
La troisième, c’est le caractère incontrôlable de la politique de Kadhafi et sa propension à défier les intérêts américains. Ainsi en est-il de son soutien (réciproque) aux pays de l’ALBA, de son hostilité à l’Etat d’Israël, de ses rapports cordiaux avec la Russie (souhait de Kadhafi, en 2008, d’installation d’une base navale russe dans le port de Benghazi, contrats d’armements), de ses relations avec la Chine qui réalise une percée en lybie…
Les soutiens de Castro et de Chavez à Kadhafi, les mises en gardes de la Russie contre une intervention militaire américaine, les hésitations de la Chine, nouvelle venue en terre lybienne et qui attend de voir évoluer les évènements, les hésitations puis le ralliement de l’UE à une intervention militaire de l’OTAN sous condition d’un accord de l’ONU et de la Ligue arabe…Tous ces faits témoignent qu’un affrontement aigu et complexe entre les intérêts de plusieurs blocs rivaux se superpose à la juste lutte du peuple lybien contre la dictature et pour des rapports économiques, sociaux et politiques plus justes.
Il est clair qu’en ciblant Kadhafi, les USA ont décidé de liquider un adversaire.
Le déploiement de forces militaires américaines en soutien aux forces armées de l’insurrection, leur intervention directe en cas de besoin n’ont qu’un but : établir leur domination politique sur la Lybie et conquérir la première place dans le pillage du pétrole et du gaz lybien.
Cette politique impérialiste de la canonnière est inacceptable. Elle est contraire aux intérêts du peuple lybien. Les communistes dénoncent et combattent toute intervention militaire des USA contre la Lybie, sans occulter les visées d’aucun autre impérialisme. Ils dénoncent l’hypocrite aide humanitaire de l’UE, sa prise de position en faveur d’une intervention militaire, et en particulier les menaces de frappes aériennes de la France, qui n’ont d’autre but que de préserver leurs intérêts en cas de victoire de l’insurrection.
Notre dénonciation de l’impérialisme implique-t-elle que nous soutenions Kadhafi ? Nullement. Car les ennemis de nos ennemis ne sont pas forcément nos amis. Kadhafi foule aux pieds les intérêts de la classe ouvrière et du peuple de Lybie, et en particulier de sa fraction la plus exploitée et opprimée, les travailleurs immigrés. Il réprime par la violence toute manifestation de révolte ouvrière et populaire. Il sous-traite pour le compte de l’UE la chasse à l’émigration africaine. Il marchande les richesses de son pays aux impérialistes les plus offrants. Il ne fait pas partie de nos amis. Nous ne le défendons pas. Il va sans doute être victime des rivalités inter-impérialistes pour le repartage du monde et celui de la révolte contre le régime qu’il a imposé à son peuple. Nous ne le pleurerons pas.
Les communistes soutiennent et continueront à soutenir les luttes du peuple Lybien et en particulier du prolétariat de Lybie pour les libertés démocratiques, pour l’égalité et le bien être, contre le sionisme, contre l’impérialisme quel qu’il soit, pour le pouvoir populaire.
DENONCONS ET COMBATTONS TOUTES LES INTERVENTIONS IMPERIALISTES, NOTAMMENT CELLE DE LA FRANCE !
C’EST AU PEUPLE LYBIEN SEUL QU’IL APPARTIENT DE REGLER SES PROPRES AFFAIRES !
Rassemblement Organisé des Communistes Marxistes Léninistes ( France)
11 Mars 2011
DECLARATION DU ROCML ET DE LA JCML
http://www.jcml69.com/article-
MOBILISATION GENERALE CONTRE L’AGRESSION ARMEE
DE L’IMPERIALISME CONTRE LA LIBYE !
Après le vote positif du Conseil de Sécurité de l’ONU, les forces aériennes et maritimes françaises, étasuniennes et britanniques ont commencé à bombarder la Libye dans le but de faire tomber le régime de Kadhafi.
S’ingérant dans les affaires intérieures d’un Etat, les puissances impérialistes ont décidé d’imposer les adversaires de Kadhafi à la direction de l’Etat libyen.
Les chefs de la rébellion ont manifestement promis aux puissances impérialistes de meilleurs contrats pour le pillage du pétrole et du gaz libyen.
Cela signifie également que les puissances impérialistes -alliées pour piller les richesses naturelles de la Libye, mais rivales par leurs intérêts- sont tombées d’accord pour les parts respectives du partage du butin. La Russie et la Chine auront elles aussi accès au partage en échange de leur bienveillante abstention lors du vote au conseil de sécurité.
La France s’est à cette occasion placée en pointe de l’agression pour récupérer les points qu’elle a perdus en Tunisie et en Egypte.
Soyons clairs : l’intervention militaire est un acte d’agression impérialiste dont le but est le pillage de la Libye. Elle n’a rien à voir avec la défense du peuple libyen, la démocratie et l’urgence humanitaire. Les premiers bombardements des forces impérialistes ont d’ailleurs déjà fait des dizaines de morts dans la population civile.
Même si nous n’avons pas de sympathie particulière pour Kadhafi, le ROCML et la JCML condamnent les actes d’agression armés contre la Libye et en particulier le rôle incitatif de la France impérialiste en faveur de cette agression.
C’est eux peuples et aux peuples seuls de décider de leur avenir. Pas aux armées étrangères au service des pilleurs de la planète.
Le ROCML et la JCML appellent tous leurs membres, tous leurs sympathisants, et tous les hommes et les femmes épris de liberté à prendre toutes les initiatives possibles et à participer aux actions contre les actes de guerres perpétrés par les puissances impérialistes.
A BAS L’INTERVENTION ARMEE CONTRE LA LYBIE !
A BAS L’IMPERIALISME FRANÇAIS !
VIVE LA LUTTE DU PEUPLE LYBIEN POUR SON INDEPENDANCE, LES LIBERTES POLITIQUES ET LE PROGRES SOCIAL !
Le 20 mars 2011
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