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9 novembre 2014 7 09 /11 /novembre /2014 12:39


catalogneComme cela était prévu de longue date - et comme nous avions déjà eu l'occasion d'en parler, le Peuple catalan s'est donc rendu aux urnes ce dimanche pour décider... de son indépendance. Il est ressorti des urnes de cette consulta un OUI FRANC ET MASSIF des quelques 2,2 millions de votants aux deux questions qui étaient posées : que la Catalogne devienne un État (91,82% soit 2,05 millions de voix) et qu'elle devienne un État INDÉPENDANT (80,76% soit 1,8 millions).

Petit problème, lui aussi annoncé de longue date : ce référendum était rigoureusement non-autorisé par le pouvoir "constitutionnel" de l’État central espagnol, qui refuse et refusera donc catégoriquement d'en reconnaître le résultat. État bourgeois aux abois (comme nous l'avons maintes fois analysé), l'"Espagne" s'est donc refusée à même envisager la situation qu'aurait eu à gérer - par exemple - Londres en cas de victoire de l'indépendance en Écosse en septembre dernier.

Cette obstruction démocratique s'est d'ailleurs reflétée dans les urnes par une très forte abstention : plus de 3 millions de personnes sur les 5 millions et demi potentiellement convoquées (soit plus de 60%) ne se sont pas déplacées, les espagnolistes n'étant généralement pas allés voter à un scrutin considéré par eux comme illégitime et dénué de toute valeur (ce qui leur permettra évidemment de dire que l'abstention + le "non" sont largement au-dessus du "oui"...). Ceci a aussi pu jouer au demeurant sur la mobilisation du camp indépendantiste, soit par légalisme (on imagine mal l'électorat CiU, par exemple, en grands rebelles...) soit par sentiment d'inutilité. Néanmoins, ce sont en définitive quelques 40% de participation et un tiers des habitants de la Catalogne en mesure de voter (le droit de vote était ouvert à partir de 16 ans ainsi qu'aux étrangers résidents depuis plus d'un an) qui se sont prononcés pour l'indépendance de leur pays (rappelons aussi que bien des élections tout à fait légales et reconnues ne connaissent pas une participation bien supérieure... il suffit de penser aux dernières européennes : 42% en "France", 45% en "Espagne" !). Tous les scénarios sont donc désormais du domaine du possible, surtout lorsque l'on connaît la tradition de grande brutalité de Madrid quand il s'agit d'empêcher l'éclatement de sa construction étatique historique au service du Capital.

La question catalane au sein de l’État espagnol a été assez bien étudiée par Servir le Peuple dans son article sur la construction historique de cet État. La Catalogne faisait originellement partie (de fait, elle était le moteur économique) du Royaume d'Aragon qui, en s'unissant à celui de Castille-León (mariage de Ferdinand II et Isabelle Ière), a donné naissance au Royaume d'Espagne. Les classes dominantes catalanes (aristocratie et bourgeoisie) étaient donc originellement - en quelque sorte - des "associées" de celles de Castille au sein du nouvel État moderne ; mais des "associées" se sentant très vite "flouées", n'obtenant qu'une toute petite partie (Pays valencien et Baléares) des terres "re"conquises sur Al-Andalus tandis que les colonies "découvertes" dans les Amériques étaient directement rattachées à la Couronne castillane. Ceci amènera, assez rapidement, la renaissance d'un très fort sentiment autonomiste voire indépendantiste dès lors (17e siècle) que le "miracle espagnol" du "Siècle d'Or" montrera ses premiers signes d'essoufflement (faute d'un réinvestissement intelligent par la Castille des richesses pillées outre-mer) ; tandis que de leur côté, les masses du peuple comme dans toute la péninsule résistaient naturellement à un État moderne synonyme de leur soumission brutale à l'accumulation primitive capitaliste, de la destruction de leur vie sociale "républicaine" dans les villages et les bourgs et de leur réduction à une pure force de travail productrice de plus-value.

L’État espagnol "résoudra" cela au 18e siècle, après deux grands révoltes (Guerra dels Segadors - "Guerre des Faucheurs" - et celle de la Guerre de Succession d'Espagne), en imposant "tout simplement" à l'ancienne "Couronne d'Aragon"... le centralisme à la française, d'autant plus facilement que c'était désormais un petit-fils de Louis XIV, Philippe V de Bourbon, qui régnait sur le trône madrilène. Dès lors, sans cesser d'être la partie économiquement la plus développée de l’État, la Catalogne allait être politico-militairement soumise au pouvoir de Madrid, lequel agissait au demeurant (à cette époque et encore longtemps après) en "relais" de son voisin du Nord - notre oppresseur et négateur, l’État français ! C'est qu'en définitive, l’État "espagnol" castillan comme son homologue français s'est formé en absorbant une nationalité beaucoup plus riche à la base (Catalogne et Occitanie), mais contrairement à ce dernier il n'a pas su ensuite fortifier ÉCONOMIQUEMENT sa position dominante (ce que l'Empire colonial permettait pourtant Catalogne-oklargement, mais il a dilapidé ce "capital" !), ne pouvant plus dès lors s'imposer que par la force ainsi que par le soutien d'une puissance "tutélaire" (la France du règne de Louis XIV jusqu'à la Seconde Guerre mondiale, puis les États-Unis dans le cadre de la Guerre froide et désormais la "Banane bleue" européenne).

Ceci scella de fait la naissance de la question catalane, en dehors de laquelle il n'existe aujourd'hui aucune prise de position politique sérieuse (que ce soit pour ou contre l'autodétermination) sur ce territoire : l'"espagnolisme" hérité du franquisme (PP) et ses misérables appendices sociaux-démocrates (PSOE) et sociaux-libéraux (Ciutadans ou UPyD), autrement dit le camp du Capital "central" castillan, dédient toute leur activité politique dans la "région" à s'y opposer ; il y a une bourgeoisie catalane ultra-autonomiste (CiU, ERC) qui se sent désormais prête pour l'indépendance (pour avoir son propre État bourgeois) ; il existe même une extrême-droite (Plataforma) autonomiste mais anti-séparatiste et liée aux Identitaires hexagonaux, à la Ligue du Nord etc. etc. ; et il y a des "marxistes" et des "anarchistes" qui (comme ici) combattent l'affirmation catalane mais la grande majorité de la gauche radicale et révolutionnaire (CUP, Arran, mouvement des squats autogérés etc.) s'en revendique toutefois aux côtés de la lutte sociale, d'autant plus aisément que l'héritage historique va dans ce sens.

Après la mort de Franco et l'avènement de Juan Carlos de Bourbon (1975), les tenants de l'"Espagne unie, grande et libre" lâchèrent pas mal de lest en inscrivant dans la nouvelle Constitution de 1978 le système des autonomies ("refondant" ainsi en quelque sorte le "pacte" historique entre le pouvoir central et les classes dominantes nationales : on peut parler de nouvelle polysynodie) ; la Generalitat de Catalogne en obtenant d'ailleurs une particulièrement large ; mais 30 ans plus tard la phase terminale de la crise générale capitaliste (frappant le pays avec la violence que l'on sait) a fait ressurgir la question avec force, la recherche (tant populaire que bourgeoise) d'une autre porte de sortie à ladite crise que l'austérité promise par Rajoy se confondant - pour ainsi dire - avec la revendication d'un vote d'autodétermination.

[Au milieu des années avait été discuté entre l'ensemble des partis catalans (coalition PSC-ERC alors au pouvoir et CiU d'Artur Mas, alors chef de l'opposition) et le Premier ministre Zapatero un nouvel Estatut (statut d'autonomie) rénové, finalement adopté en 2006 par une loi des Cortes de Madrid suivie d'un référendum en Catalogne. Mais la Gauche républicaine (ERC), qui avait participé aux discussions initiales, le rejette alors comme trop modéré ; tandis que le PP de Mariano Rajoy, lui, introduit devant le Tribunal constitutionnel (la "Cour suprême" espagnole) recours sur recours qui aboutissent finalement, dans un contexte marqué par l'explosion de la crise et le crépuscule du zapaterisme, à l'invalidation en juin 2010 de 14 articles (les plus fondamentaux) sur 223... C'est à ce moment-là que se lèvent dans toute la communauté autonome, à commencer par la capitale Barcelone, d'immenses mobilisations sous le mot d'ordre "Som una nació, nosaltres decidim" ("nous sommes une nation, c'est nous qui décidons") qui peuvent être considérées comme le point de départ du processus souverainiste actuel ; dans un contexte où par ailleurs la CiU de Mas, revenue au pouvoir en 2010 dans une position plus que précaire (uniquement grâce à une abstention négociée des socialistes), doit convoquer en novembre 2012 de nouvelles élections à l'issue desquelles... elle ne peut cette fois conserver la Généralité qu'avec l'appui de l'ERC. C'est celle-ci qui (en fait) impose à Mas, en échange de cet appui, l'agenda d'organiser un référendum d'ici la fin 2014 ; amenant par la force des choses l'éclatement de la CiU entre la Convergence démocratique (CDC) de Mas et l'Union démocratique (UDC) démocrate-chrétienne, plus conservatrice et opposée à l'indépendance, qui tombera par la suite rapidement dans l'oubli (sur tout ce processus, voir l'annexe en fin d'article).]

Sur cette question, notre position s'est toujours voulue claire et simple : nous soutenons radicalement et sans réserves l'autodétermination démocratique du Peuple catalan comme de tous les Peuples de la péninsule ibérique ; comme tout ce qui va dans le sens de DÉTRUIRE cet État espagnol PILIER de l'ordre capitaliste-impérialiste européen.

En revanche, ce qui est vrai et qui a pu nous être reproché, c'est que nous avons dès l'annonce de la fameuse consulta émis de sérieuses réserves quant à la praticabilité de cette voie institutionnelle-référendaire telle que promue par les représentants de la bourgeoisie catalane (aile droite CiU et aile gauche ERC) à la tête de la Généralité, au regard du "séisme politique" que représenterait une indépendance catalane pour l'ordre bourgeois européen. De fait, toutes les excellentes raisons (forcément excellentes, puisque ce sont les nôtres !) exposées ici de soutenir (comme nous le faisons) la lutte d'autodétermination du Peuple catalan sont aussi celles qui faisaient qu'il n'y avait que DEUX VOIES : soit (comme en Écosse) un référendum autorisé mais avec un déploiement titanesque d'hégémonie intellectuelle "espagnoliste" rendant presque impossible la victoire du "oui" ; soit déclarer purement et simplement la consultation "inconstitutionnelle", "nulle et non avenue" quel qu'en soit le résultat. Comme nous le savons tout-e-s, c'est cette seconde option qui a été choisie : le choix, comme presque toujours avec Madrid, de la force brute pour un État/système faible.

Nous avons donc à présent une assez nette majorité qui s'est dégagée du scrutin en faveur d'une indépendance de la Catalogne, mais concrètement aucune indépendance puisque le pouvoir central refuse de reconnaître le résultat. Que va-t-il donc se passer ? La Generalitat, Artur Mas et Oriol Junqueras en tête, va-t-elle proclamer (comme les héroïques députés irlandais du Sinn Féin en 1919) la GUERRE D’INDÉPENDANCE ? On se doute bien que rien n'est moins sûr.

voluntat-poble-lema-campanya-CiU EDIIMA20121109 0142 5Beaucoup plus probable est que, outre les recours devant les juridictions constitutionnelles et nonobstant le rôle de "Père de la Nation" dans lequel se verrait bien Mas, ce dernier et - surtout - la classe qu'il représente, la bourgeoisie catalane suffisamment autonome économiquement de Madrid et du reste de l’État, tentent d'utiliser le résultat de la consulta pour "gratter" de nouvelles prérogatives et avantages pour "leur" Catalogne... et surtout pour eux-mêmes (ceci étant parfois ouvertement assumé : "si nous obtenons 1,5 millions de oui ou plus, Rajoy sera obligé de discuter avec nous" etc. etc.). L'ERC de Junqueras, qui a le vent en poupe en ce moment, pourrait en profiter de son côté pour appeler à de nouvelles élections, qui pourraient bien faire d'elle le premier parti en nombre de sièges au Parlement...

Ce versant bourgeois du mouvement indépendantiste catalan (dont nous avons exposé plus haut les racines historiques) ne peut et doit pas être nié par les communistes révolutionnaires marxistes que nous sommes. Il a des implications jusque dans les propos de certains dirigeants de l'ERC (la "Gauche républicaine" de Catalogne) qui ont pu mettre en avant, tout "de gauche" qu'ils sont, des "arguments"... dignes de la droite flamande parlant des Wallons ou d'Angela Merkel parlant des Grecs, en mode "le Sud - andalou, murcien etc. - coûte trop cher à la Catalogne", ce qui leur a valu une volée de bois vert de la part des autres gauches radicales d'affirmation des Peuples (notamment celle d'Andalousie !) et un refus catégorique de faire liste commune aux dernières européennes... Savoir que des personnes n'ayant que des considérations d'avantages fiscaux et/ou institutionnels et des magouilles politiciennes en tête ont pu se servir des aspirations de millions de personnes à une société plus démocratique et plus juste ne peut que susciter la saine et légitime colère des révolutionnaires communistes que nous sommes. En réalité, avec le veto "espagnoliste" du Pouvoir madrilène (dont on attend maintenant, non sans inquiétude, de voir les mesures qu'il va prendre...), cet aspect forme tout simplement le principal obstacle et frein à la Libération révolutionnaire du Peuple catalan ! Mais efforçons-nous - justement - d'être dialectiques et de ne pas nous focaliser exclusivement sur cela ; efforçons-nous de voir aussi l'autre aspect des choses...

Sur le versant populaire en effet, la signification profonde de la consulta est le DROIT DU PEUPLE À DÉCIDER ; décider de son destin et de ce qui est bon pour lui non seulement en dehors de l'"Espagne" mais aussi - pour une large partie du mouvement, en tout cas sa frange la plus combattive - en dehors de l'ordre capitaliste européen et mondial, quand bien même (comme on l'a dit) il serait complètement idéaliste et utopique de penser parvenir à cela au travers d'un simple vote. Et sur ce point, la Catalogne et l’État espagnoliste tout entier sont en réalité - désormais - assis sur un volcan !

catalunya arranEn Écosse, il y a la possibilité de dire que la tant réclamée parole au peuple lui a été donnée et que le résultat a été négatif, vox populi vox dei et rideau, circulez y a plus rien à voir... Mais ici en Catalogne, quels qu'aient été les multiples intérêts portant la consulta et les divergences - voire les contradictions totales !* - entre eux, le fait indéniable est que le mouvement en faveur de ce référendum a été une GIGANTESQUE et MASSIVE MOBILISATION POPULAIRE et une formidable école de révolution (cet aspect-là des choses, exprimé notamment à travers l'Assemblée nationale catalane (ANC), nous l'avons TOUJOURS RÉSOLUMENT SOUTENU et nous sommes sincèrement désolés si des personnes ont pu interpréter notre position autrement). Que vont faire ces personnes qui ont lutté (depuis parfois plus de trois ans) pour que cette consultation puisse se tenir, qui sont allées - évidemment - y voter OUI et qui voient maintenant leur volonté niée et ignorée par l’État central ? Et quelle va être la réaction de ce dernier devant leurs - quasi certaines - manifestations de colère ??**

En vérité, une seule question se pose au jour d'aujourd'hui et c'est celle-là.

Les choses sont en fait désormais - en dernière analyse - TRÈS SIMPLES :

1°/ le principe d'autodétermination démocratique est aujourd'hui totalement acquis dans la Nation catalane et surtout - ce qui nous intéresse vraiment - dans les classes populaires, le Peuple travailleur de Catalogne, y compris chez les (nombreuses) personnes de ce Peuple travailleur originaires d'autres parties de l’État ou du monde (très importantes communautés est-européennes, nord-africaines, sud-américaines etc.) ;

2°/ la question qui se pose désormais est donc celle du COMMENT ; autrement dit, le Peuple travailleur de Catalogne doit comprendre qu'aucune voie légaliste et électorale ne peut l'amener vers les aspirations démocratiques et sociales qui sont les siennes et que seule le peut la voie de la lutte révolutionnaire, la voie de la Guerre populaire en pays occidental telle que théorisée (en fin de compte) plus par Gramsci que par Mao et exposée ici et ici.


nacioneslibres.jpg


* Une bonne illustration de ces contradictions est la position publiée fin octobre par l'organisation Endavant OSAN (Organizatció Socialista d'Alliberament Nacional - Organisation Socialiste de Libération Nationale) :

"Devant la convocation d'une consulta édulcorée, fruit de la non-désobéissance de la CiU à l'interdiction antidémocratique de l'État, Endavant OSAN souhaite faire part des réflexions suivantes :

Nous ne pouvons pas laisser aux mains des autonomistes la mobilisation pour l'autodétermination car, si nous le faisons, ces derniers utiliseront cette mobilisation pour négocier une réforme institutionnelle, une nouvelle insertion de la Catalogne dans l''Espagne' et laisseront la voie libre à l'État pour annihiler les droits nationaux dans le reste des Pays catalans [la région de Valence et les Baléares NDLR].

Nous ne pouvons pas faire le jeu de l'autonomisme en esquivant la confrontation politique et en le laissant surfer sur la vague de la mobilisation pour les droits nationaux qu'a connue la Catalogne ces dernières années.

Nous appelons le Peuple travailleur des Pays catalans qui vit dans les quatre provinces de la Principauté [la "région" Catalogne de la Generalitat] à remplir et faire déborder les urnes, le 9 novembre, de votes pour l'indépendance.

Si la consulta est gênée ou interdite par l'État, nous estimons extrêmement important de nous mobiliser pour empêcher que la CiU ne se conforme ainsi à l'interdiction à moindre frais, et pour que le Peuple reste assuré de pouvoir exprimer le 9-N sa volonté populaire par-dessus les interdictions et les obéissances à celles-ci.

Parallèlement, nous considérons aussi que l'action du 9 novembre ne servira à rien - ou pire encore, servira l'autonomisme - s'il n'y a pas dès le 10 novembre une offensive pour déloger l'autonomisme du pouvoir et pour construire une hégémonie indépendantiste d'ampleur nationale qui brise l'ordre social établi, base même de notre soumission à l''Espagne'."

Voir aussi, pour information, la position de Breizhistance :  Avec le Peuple catalan pour l’indépendance ! et cet entretien avec un député des CUP (social-démocratie radicale indépendantiste).

** Des proclamations unilatérales d'indépendance sont ainsi prévues prochainement par certaines organisations, notamment l'ANC.


ANNEXE - tiré d'un (excellent) article de 2017, suite au nouveau référendum : quelques rappels historiques et contemporains

http://www.editoweb.eu/nicolas_maury/Quelques-eclaircissements-utiles-pour-comprendre-l-independantisme-catalan_a12368.html

[Sur la situation actuelle]

Remontons en 2006. Un Estatut d'Autonomia de Catalunya, dans le cadre de la Constitution espagnole de 1978, est adopté et mis en place. Il est approuvée par le Parlement de Catalogne le 30 septembre 2005, fut transmis au Congrès des députés, où il fut accepté le 30 mars 2006, puis au Sénat, où il fut approuvé le 10 mai 2006. Un référendum tenu en Catalogne le 18 juin 2006 confirma le texte, qui fut promulgué par le roi Juan Carlos et publié par la loi organique 6/2006 du 19 juillet 2006.

Ce statut d'autonomie vise plusieurs aspects :

- Il définit la Catalogne comme une "nation", et non plus une "nationalité".

- Il renforce la co-officialité de l'espagnol et du catalan, avec une reconnaissance du catalan comme langue officielle.

- Il renforce la laïcité dans l'enseignement public.

- Il réactive des "droits historiques" de la Catalogne, qui fondent l'autonomie de la région non pas sur la constitution ou un accord de l’État mais par l'histoire.

- Il renforce la justice et élargie les compétences du Tribunal supérieur de justice de Catalogne et crée un Conseil de justice de Catalogne.

- Renforcement de la part fiscale : 50% de l’impôt sur le revenus et de la TVA restera dans les caisses de la Generalitat, 58 % des impôts spéciaux et 100 % sur les autres impôts et taxes. De plus la Catalogne obtient le droit de légiférer librement pour les caisses d'épargne, mais aussi les organismes de crédit, de banque et d'assurance.

Coup de tonnerre, dans un arrêt rendu le 28 juin 2010, le Tribunal constitutionnel annule 14 des articles du statut d'autonomie, sur un total de 223, à la requête du Parti populaire dirigé par un certain Mariano Rajoy. La plupart des points détaillés ci dessus seront donc cassés par le Tribunal constitutionnel.

La réaction est assez importante en Catalogne. Il faut savoir qu'à cette époque l’indépendantisme est très marginale et que la plupart des partis politiques sont autonomistes et ne souhaitent pas quitter l'Espagne. Il y a juste un débat entre Monarchie ou République.

Le 13 septembre 2009, un référendum populaire est organisé par des associations indépendantistes à Arenys de Munt sur la volonté de ses habitants d'être indépendants de l'Espagne. Après cela, 167 communes de Catalogne ont organisé le 13 décembre 2009 un référendum autour de la question suivante : « Êtes-vous d'accord pour que la Catalogne devienne un État de droit, indépendant, démocratique et social, intégré dans l'Union européenne ? ». Au total, 700.000 personnes étaient convoquées aux urnes et 200.000 se sont exprimées. Le « oui » a gagné à près de 95 % face au « non » avec 3,52 %.

À Barcelone, le 10 juillet 2010, une immense manifestation déferle dans les rues de la capitale catalane, à l'appel de tous les partis politiques ayant des sièges au Parlement de Catalogne (sauf le Parti populaire et Citoyens), tous les syndicats catalans et environ 1600 associations culturelles. Entre 1.100.000 et 1.500.000 personnes défilent sous les slogans "Som una nació. Nosaltres decidim" (Nous sommes une nation. C'est nous qui décidons) et ils condamnent les décisions du Tribunal constitutionnel.

La crise qui secoue l'Espagne et les premières cures d'austérités menées par José Luis Rodríguez Zapatero et la coalition gouvernementale, permettent une victoire électorale de la droit post-franquiste. Le Parti Populaire remporte les élections législatives le dimanche 20 novembre 2011 et Mariano Rajoy devient Premier ministre le 19 décembre 2011.

Son mandat est marqué la crise économique, l'austérité, l'explosion de la pauvreté et de la précarité, des scandales politico-financiers.

En Catalogne, les autonomistes se muent en indépendantistes. Pour beaucoup la réponse à la crise économique passe par la création d'une République catalane sociale (rappelons qu'Artur Mas mènera une politique d'austérité très forte en Catalogne à partir de 2012).

D'un point de vue institutionnel, la situation est bloquée. Le gouvernement refuse toute négociation et est retranché derrière la Constitution. Madrid justifie sa légalité au nom de la démocratie et refuse systématiquement toutes les propositions des catalans. Or la constitution qui fixe l'indivisibilité du peuple d'Espagne ne peut être modifiée que par un référendum légal, c'est à dire validé par les 2/3 des membres du parlement (Cortes), mais le PP s'y refuse.

Dans l'esprit des catalans, renforcé par la nécessité d'en finir avec ces institutions et la confrontation institutionnelle. Pour beaucoup de catalans, l'idée indépendantiste ne fait que se renforcer pour avoir un pays neuf, démocratique, au service du peuple et non de la classe politico-économique dominante (les scandales de corruption se multipliant au PP et au PSOE).

Ainsi plusieurs mobilisations vont marquer la Catalogne.

Des communes de Catalogne se déclarent "Territori Català Lliure" (territoire catalan libre). Au début mai 2013, 197 communes et 5 conseils de comarques, représentant 20,8 % de la population de la Catalogne, s'étaient proclamés territoire libre catalan.

Le 11 septembre 2012, entre 1,5 et 2 millions de personnes se rassemblent à Barcelone pour la Diada Nacional (fête nationale) pour affirmer que la Catalogne soit : "Catalunya, nou estat d'Europa" ("La Catalogne, un nouvel état d'Europe"). Cette manifestation coïncide avec l'arrivée au pouvoir d'Artur Mas et de la droite libérale en Catalogne.

À cette manifestation participent tous les partis politiques (communistes inclus) à l’exception du PP, du PSC-PSOE et des Ciudadanos. Les CUP participent séparément à la manifestation. Pour eux la Catalogne ne doit pas suivre la voie économique néolibérale de l'Union européenne et qui est la cause de la crise.

Le 29 juin 2013, un grand "Concert per la Llibertat" (concert pour la liberté) est célébré sur le Camp Nou à Barcelone. C'est une autre grande mobilisation sociale en faveur de l'indépendance. Plus de 400 artistes ont participé à l’événement.

Le 11 septembre 2013, jour de la Diada Nacional, une nouvelle initiative va rassembler plus de 1,6 millions de personnes à travers la Catalogne. C'est la "Via Catalana cap a la Independència" (Voie catalane vers l'indépendance). Une chaîne humaine qui traverse toute la Catalogne et au delà (la manifestation part d'Argelès en Catalogne Nord).

Le 27 septembre 2014, le président catalan Artur Mas convoque pour le 9 novembre une consultation d'autodétermination. Les deux questions posée : « Voulez-vous que la Catalogne soit un État ? En cas de réponse affirmative, voulez-vous que cet État soit indépendant ? ». À la suite de ce référendum jugé illégal par le Tribunal constitutionnel et transformé en consultation non contraignante, 2.300.000 catalans se rendent aux urnes et 80,7 % d'entre eux se prononcent pour l'indépendance de la Catalogne.

Fort de ce succès, Artur Mas dissout le Parlement catalan et convoque des élections régionales anticipées pour le 27 septembre 2015.

Les élections du 27 septembre 2015 sont un succès mitigé pour les indépendantistes qui, avec 47,8 % des voix, n'emportent pas la majorité absolue des suffrages, mais sont majoritaires en sièges (72 sur 135) au Parlement régional, bien que divisés entre la liste Junts Pel Si, avec 62 sièges, et celle de la Candidature d'unité populaire (CUP), qui en obtient 10.

L'histoire vous la connaissez, le 1er octobre 2017, un référendum, jugé illégal, mais contraignant est organisé en Catalogne.

[De fait]  Ce sont les libéraux au pouvoir : pourquoi c'est faux

(Déjà la majorité organisatrice du référendum de novembre 2014 dépendait totalement du soutien de l'ERC à Mas, et) depuis les élections au Parlement de Catalogne du 27 septembre 2015, c'est une coalition indépendantiste, Junts pel Sí (Ensemble pour le OUI), qui dirige la Generalitat. Cette coalition succède au leadership du parti Convergence démocratique de Catalogne (CDC - ex CiU) et de son président Artur Mas. Cette coalition met fin à une longue période d'austérité libérale, on y reviendra.

Qui compose la coalition Junts pel Sí ?

- Les libéraux du parti Convergence démocratique de Catalogne (devenu depuis Parti Démocratique Européen Catalan - PDECat). Ces derniers sont en minorité avec 29 sièges sur les 62 de la coalition.

- Les républicains de gauche Esquerra Republicana de Catalunya (ERC), conduit par Oriol Junqueras, orienté politiquement sur la gauche de la sociale-démocratie. Cette formation politique accompagne les écolo-communistes (ICV-EUiA) et les progressistes comme à Barcelone. Au sein de la majorité, l'ERC représente 21 député.e.s sur 62.

- Les Démocrates de Catalogne, de tradition chrétien-démocrate, représenté.e.s par 3 député.e.s.

- Le Moviment d'Esquerres (MES) qui est une scission du Parti des Socialistes de Catalogne (PSC - PSOE) et qui dispose d'un siège.

- Catalunya Sí, une plate-forme politique à gauche qui a aujourd’hui fusionnée avec l'ERC.

- Des personnalités politiques comme Raül Romeva, ancien député européen de l'Initiative pour la Catalogne Verts (ICV - ex-PSUC).

- Et d'associations trans-partisanes comme le Reagrupement Independentista, Avancem, l'Associació de Municipis per la Independència, l'Òmnium Cultural, l'Assemblea Nacional Catalana. On retrouve au parlement Carme Forcadell i Lluís, ancienne présidente de l'ANC et Muriel Casals (ICV - ex-PSUC), ancienne présidente d'Òmnium (aujourd'hui décédée).

Et enfin, non membre de la coalition Junts pel Sí, la Candidatures d'Unité Populaire (Candidatura d'Unitat Popular - CUP). Une formation politique anticapitaliste, antifasciste, féministe, communiste et inspiré du municipalisme libertaire. Avec 10 député.e.s au parlement catalan, cette formation très à gauche permet aux indépendantistes d'avoir la majorité. Et les CUP ont exigé deux choses pour apporter leur soutien : La démission d'Artur Mas (symbole de l'austérité) et une réorientation des politiques en rupture avec le libéralisme.  

[Rappels historiques]

Quelques dates historiques et comment la Catalogne fut absorbée par l'Espagne

L'origine de la Catalogne se trouve dans la "Marche d'Espagne" de l'empire carolingien. La Catalogne naît au IXème siècle. Le "père fondateur" légendaire de la Catalogne serait Guifred le Velu "El pelut" nommé comte de Barcelone en 878 au concile de Troyes. Guifred le Velu est l'ancêtre de la dynastie de Barcelone, qui construit peu à peu l'État catalan autour du comté de Barcelone.

En 1137, le comte de Barcelone épouse l'héritière du royaume d'Aragon. À ce moment naît la Couronne d'Aragon qui développe un mode d'administration original, très décentralisé pour répondre aux fortes différences tant politiques qu'économiques et linguistiques des deux parties de la Couronne, le Royaume d'Aragon et la Principauté de Catalogne. Ce royaume sera une véritable thalassocratie en méditerranée.

En 1283, la Principauté de Catalogne approuve les constitutions catalanes et, en 1359, a créé la Députation du Général (ou Generalitat). Le plus vieux parlement d'Europe.

Une union dynastique avec la Couronne de Castille et celle d'Aragon est actée en 1479. La Principauté de Catalogne conserve toutes ses prérogatives, son autonomie et son parlement comme "droits historiques".

Avec la Guerre des Faucheurs (Guerra dels Segadors) un conflit va toucher une grande partie de la principauté de Catalogne entre les années 1640 et 1659. Elle prendra fin à la signature du traité des Pyrénées entre les royaumes d'Espagne et de France. C'est à ce moment là que le Roussillon et la moitié du comté de Cerdagne se retrouvent annexés à la France.

Cette guerre fait suite à la guerre de Trente Ans (1618 - 1648) et au raz-le-bol des populations catalanes de devoir subir la présence des troupes castillanes dans les campagnes. À cette époque les armées vivaient sur le terrain. Au début de mai 1640, les paysans de Gérone attaquent les troupes qu'ils hébergent. À la fin du mois, les paysans, auxquels se joignent les faucheurs en juin, atteignent Barcelone et se rendent maîtres de la cité. Ils assassinent des fonctionnaires et des juges royaux. Le vice-roi lui-même est assassiné alors qu'il essaie de fuir par la mer.

Pau Claris, un ecclésiastique à la tête de la Generalitat de Catalogne, proclame la République catalane. Mais l'oligarchie catalane perd vite la maîtrise du mouvement. Le soulèvement se transforme en une révolte des paysans appauvris contre la noblesse et les riches des villes qui sont à leur tour l'objet d'agressions.

Une authentique révolution sociale vient d'éclater. Cette révolution sera réprimée par l'Espagne et par la France. L'hymne national de la Catalogne, Els Segadors, est inspiré par la révolte des faucheurs de 1640.

Les conséquences de la Guerre des Faucheurs de 1640-1659, de la prise de Barcelone le 11 septembre 1714 par les forces franco-castillanes de Philippe V de Bourbon, des guerres carlistes au xixe siècle ou de la dictature nationaliste et centralisatrice de Francisco Franco entre 1939 et 1975 ont fortement diminué le rôle politique et culturel joué par la Catalogne en Espagne et en Europe.

La Catalogne cesse d'exister le 11 septembre 1714.

La Renaixença

Depuis les années 1880, la question de l'autonomie catalane, à laquelle le roi Felipe V avait mis fin par les décrets de Nueva Planta entre 1705 et 1716, resurgit à la faveur de la Renaixença catalane.

Les guerres carlistes déchirent le XIXe siècle espagnol et marquent profondément le pays. C'est aussi suite à cette période troublée que le renouveau culturel de la Catalogne (la Renaixença) et un retour des revendications linguistiques et nationalistes catalanes (le catalanisme). Au tournant du XXème siècle, la Catalogne est l'un des pôles de développement de l'Art nouveau, qui y prend le nom de modernisme catalan, marqué par les productions d'architectes (Antoni Gaudí, Lluís Domènech i Montaner, Josep Puig i Cadafalch), de peintres (Ramon Casas, Santiago Rusiñol), de sculpteurs (Eusebi Arnau, Josep Llimona) et de revues proches du milieu catalaniste (L'Avenç).

En 1914, les partis catalanistes ont gagné la création de la "Mancommunauté de Catalogne", sans autonomie spécifique, mais avec un ambitieux programme de modernisation. Elle est abolie en 1925 par la dictature espagnole de Miguel Primo de Rivera.

En 1931 est proclamée la République catalane confédérée à l'Espagne à la suite de la victoire électorale des partis catalanistes de gauche et obtient en échange, après négociation avec le nouveau gouvernement de la République espagnole, un statut d'autonomie en 1932 qui ressuscite l'institution de la Généralité de Catalogne (en catalan : Generalitat de Catalunya), présidée par l'indépendantiste de gauche Francesc Macià. Sous la présidence de Francesc Macià (1931-1933) et Lluís Companys (1933-1940), tous deux membres de la Gauche républicaine de Catalogne (ERC), la Généralité développe un programme social et culturel avancé. Ce statut est suspendu en 1939 lorsque la Catalogne, fidèle à la république, se soumet aux troupes nationalistes de Franco durant la guerre d'Espagne.

En 1940, le président catalan, Lluís Companys, est arrêté en France par les nazis et exécuté par le régime franquiste.

La Généralité de Catalogne est rétablie en 1977.

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21 octobre 2014 2 21 /10 /octobre /2014 13:19

 

maocNous avions présenté, il y a quelques mois, une initiative organisée dans l’État espagnol comme le modèle de ce pour quoi nous nous battons : l'unité indéfectible des Peuples, au sein d'un même État capitaliste et au-delà, pour BRISER LES CHAÎNES de ces États et de tous les impérialismes.

Nous allons maintenant tenter de vous illustrer, par un exemple, TOUT CE QUE NOUS NE VOULONS PAS. Car il faut bien comprendre qu'il y a des têtes dures et que quand bien même il ne resterait qu'UN SEUL petit facho, nazillon ou autre farfelu réactionnaire pour revendiquer, dans un État donné, l'indépendance d'un Peuple donné, les défenseurs dudit État (y compris "de gauche", les pseudo "citoyens du monde" et vrais gardiens du temple qui prônent son "dépassement" universaliste abstrait) s'en empareraient pour y assimiler et y réduire TOUTE affirmation des Peuples périphérisés et niés par celui-ci et toute remise en question de cette construction historique capitaliste qui est - on ne le rappellera jamais assez - le grand râtelier auquel ils bouffent*. C'est finalement un peu la même chose que l'antisémitisme ou le conspirationnisme en matière de soutien à la Palestine (en particulier) ou de lutte contre l'impérialisme (en général) : comment se faire les arguments vivants des pires ennemis de la cause que l'on dit défendre. Il faut donc mettre une fois pour toutes les choses au clair.

Cet exemple, qui pourrait bien être un jour ce "der des ders", nous l'avons trouvé en la personne de Jean-Pierre/Yann-Ber (en breton) Tillenon.

Jean-Pierre/Yann-Ber Tillenon est un cas typique de ces militants qui, pris dans l'"orbite" intellectuelle de la gauche révolutionnaire lorsque celle-ci était puissante (il a fréquenté le milieu autonome parisien des années 1970 et partagé un temps la vie de Joëlle Aubron), ont tout naturellement dérivé vers la droite radicale et les fantaisies réactionnaires en tout genre dès lors que cette force d'attraction s'est affaiblie (autre exemple : Patrick/Padrig Montauzier, fondateur et leader d'Adsav). Après avoir fréquenté (entre autres) Serge Ayoub ou encore Guillaume Faye, il se revendique désormais de... "l'extrême-centre" - mais si une telle identité politique peut exister de manière sincère (et assez largement) en Bretagne, pays de petite entreprise et de culture politique Tillenondémocrate-chrétienne, elle sert aussi (et pour cause) de paravent à des gens impossibles à classer autrement qu'à l'extrême-droite (une version locale du "ni droite ni gauche" en quelque sorte) ; et nous voyons mal, en l’occurrence, comment classer autrement un personnage qui a participé (en 2006) à une conférence sur "l'avenir du monde blanc" en Russie aux côtés de son grand collègue (donc) Guillaume Faye, de "Terre et Peuple" de Pierre Vial et de leurs amis internationaux (russes, allemands, "espagnols", grecs etc.).

L'on pourra peut-être nous reprocher de nous en "prendre" à un activiste politique d'un autre Peuple, et donc de nous "mêler de ce qui ne nous regarde pas". Il est clair que Yann-Ber Tillenon n'est pas un cas unique, ni en Bretagne ni dans le reste de l'Hexagone, et il en existe sans doute de similaires en Occitanie même si le (tout petit) PNO, qui partage la même vision "ethniste", est issu d'une déviation du marxisme (François Fontan) et n'a pas dérivé plus à droite que le Modem ou l'UDI tandis que la droite extrême est plus généralement sur la vision maurrasso-identitaire "classique" (Occitanie-France-Europe). [MàJ : c'est confirmé cela existe bel et bien... Nous savions que Richard Roudier s'était fait (vers la fin 2012) jeter du Bloc identitaire - pour des embrouilles d'égo essentiellement. Suite à cette rupture, manifestement, sa "Ligue du Midi" a rejeté la reconnaissance de la "patrie historique" française pour évoluer vers une "ligne Tillenon" en mode "Ici (en Occitanie) c'est pas la France". Toute la critique de Yann-Ber Tillenon qui va suivre s'applique donc évidemment à ces énergumènes. Roudier a fait partie dans les années 1970 du groupe "Pòble d'Òc", issu pour l'essentiel de l'extrême-droite régionalo-européiste montpelliéraine ("Jeune Languedoc") ; une majorité du groupe évoluera cependant vers des positions plus "à gauche" (socialisantes, fédéralistes libertaires, écologistes) ce qui entraînera son départ en 1976. Il sera ensuite un membre fondateur d'"Unité radicale" puis du Bloc identitaire (la scission avec les "eurasistes" de Christian Bouchet se fit alors, rappelons-le, sur la défense des thèses de Guillaume Faye avec lequel le Bloc rompra cependant par la suite). MàJ nov. 2015 : mais ceci ne les empêche manifestement pas d'assurer la sécurité d'un élu du Front National, dont le symbole reste à ce jour (à notre connaissance...) une flamme tricolore et dont l'hostilité aux affirmations nationalitaires réelles est notoire...]

Mais nous avons simplement trouvé que dans l'interview en lien ci-dessous (datant de 2007 mais ses idées n'ont guère changé depuis), la limpidité de ses propos ("foufous" en apparence mais en réalité très cohérents) donne un aperçu particulièrement clair de ce courant de pensée - à partir de quoi, libre à chacun-e de remplacer "Bretagne" par "Occitanie", "Corse", "Euskal Herria", "Alsace" ou ce qu'il/elle veut, cela revient au même ! Et puis, au-delà de cela, Occitans et Bretons sont embarqués sur le même "bateau France", la question de ce qui est proposé à l'encontre de ce "bateau" nous concerne donc tous et d'ailleurs, Jean-Pierre/Yann-Ber Tillenon a bel et bien un projet pour nous puisque l'Occitanie (d'un seul tenant ou pas, nous ne savons pas, il faudrait le lui demander) doit logiquement faire partie de la dizaine d'"États-régions" par lesquels il veut remplacer l’État français.

Nous vous invitons donc à lire avec attention l'interview ci-dessous, donnée par Yann-Ber Tillenon à un web-magazine de "culture trash" : 

http://www.vice.com/fr/read/extrmement--louest


Et maintenant que vous avez bien lu (avec attention on l'espère), place à l'analyse en profondeur des choses.

En somme, ce que prône Jean-Pierre/Yann-Ber Tillenon, c'est :

- une "Europe-civilisation" autrement dit une Europe impérialiste complètement unifiée, vision (complètement idéaliste et utopique au demeurant) qui relève plutôt (d'habitude) du social-libéralisme, de la démocratie chrétienne ou de la libéral-démocratie bourgeoise mais que l'on trouve aussi (minoritairement) en version d'ultra-droite fasciste depuis toujours (c'est un peu ce que voulait Hitler mais sous suprématie allemande, puis le "nationalisme européen" avec la FANE ou encore l'hebdomadaire "d'opposition nationale et européenne" Rivarol, "l'Europe aux 100 drapeaux" du nationaliste réactionnaire et collabo breton Yann Fouéré dont s'inspire certainement notre "druide", les eurasistes de Jean Thiriart et aujourd'hui les héritiers de ceux-ci ou encore les Identitaires, mais Tillenon pousse la vision encore plus loin) ;

antifabzh.jpg- consistant en une fédération d'"États-régions" fondés sur la "pureté" ethnique... Autrement dit il veut la même chose que les États-"nations" que nous avons actuellement, dans ce qu'ils ont de pire en matière de chauvinisme, xénophobie, suprématisme racial (même masqué sous un pseudo "respect des différences") et exclusion, mais correspondant aux nationalités réelles et non aux territoires que la bourgeoisie d'un Centre (ici en "France" : Paris) s'est annexée comme base première d'accumulation et a proclamé "Nation". Waouh, c'est clair qu'il y a comme un progrès ! Mais enfin, bien léger ; en termes de rupture avec l'idéologie dominante on va dire qu'on a vu mieux... L'on notera aussi que cet État bourgeois moderne, Yann-Ber Tillenon en connaît parfaitement les "piliers" : "1) la monnaie, 2) l’armée, 3) les frontières, 4) la législation" et qu'il reproche en définitive à la "France"... de ne plus les posséder ("L’État français n’a plus de monnaie propre, quasiment plus d’armée et plus de frontières. Quant aux lois, elles sont votées par Bruxelles à 80%").

À l’État français, Jean-Pierre/Yann-Ber Tillenon va donc reprocher non pas sa périphérisation (dès la conquête à la fin du 15e siècle) puis sa négation pure et simple (à partir de 1789) du Peuple breton, parallèlement à la colonisation, à l’asservissement et au génocide d'innombrables Peuples outre-mer, mais son "cosmopolitisme" contraire aux "puretés" ethniques ; "cosmopolitisme" qui fait bien sûr démarrer "vraiment" l'oppression française en 1789 (la Bretagne, c'est bien connu, n'était pas du tout opprimée sous l'Ancien Régime et aucun Bonnet rouge de 1675 ne s'est jamais balancé au bout d'une royale corde !). D'ailleurs, si cet État du Capital bleu-blanc-rouge n'avait pas importé autant de "bicots" et de "bamboulas" pour faire face aux besoins du capitalisme des Trente Glorieuses, on y vivrait peut-être un peu mieux sa périphérisation et sa négation de Breton - c'est en tout cas ce que semblent sous-entendre ses propos ("Le patronat français n’arrivait pas à changer le peuple français. Il a donc préféré changer de peuple en laissant entrer une population allogène plus docile. Mais ça commence à se retourner contre lui." (...) "La France est au bord de la guerre civile." (...) "À Chevilly-Larue [en région parisienne hein, pour précision...], où j’ai ma maison, ma bagnole a cramé pendant les émeutes. Je l’ai vu aussi quand Ben Laden a réussi son coup, ça hurlait de joie dans les cités."). Et pour quelqu'un qui - manifestement - veut nier la construction historique "France" (puisqu'il prône son remplacement par une dizaine d’"États-régions" indépendants), les mots France et Français reviennent un peu beaucoup - et sans guillemets - dans son discours... Et n'est-ce pas un drapeau tricolore français qu'il nous semble bien voir en en-tête de son nouveau blog personnel ? Il y a un moment où il faut savoir !

En définitive, Jean-Pierre/Yann-Ber Tillenon est un "Breton" profondément français d'esprit (de l'aile droite de l'idéologie française) qui vit d'ailleurs (il le dit lui-même) en... région parisienne (Chevilly-Larue) et qui s'imagine que par quelques mesures cosmétiques comme "bretonniser" son prénom, parler un brezhoneg "académique" (qui nie la richesse populaire des dialectes locaux) ou adopter un panthéisme druidique il est en "rupture" avec une construction historique vieille de 800 ans - et l'hégémonie idéologique qui va avec.

Europe100drapeauxDepuis une quarantaine d'années la "France" est en crise profonde (la crise qui annonce, en réalité, sa fin comme réalité historique !) et comme beaucoup d'autres, Tillenon est à la recherche d'une "alternative" (non-révolutionnaire bien entendu, sans autre rupture avec le capitalisme que - éventuellement - le rebaptiser en "socialisme national", "solidarisme" ou autre foutaise). Pour un certain nombre de personnes, cette crise a pour nom "européisme" et il "faut" donc en revenir aux "souverainetés", aux frontières et à la maîtrise de la politique intérieure comme étrangère de naguère (des années 1960) - maîtrise que Tillenon semble d'ailleurs lui aussi regretter. Pour d'autres il "faut" au contraire aller encore de l'avant dans l'intégration européenne, qui serait le "seul avenir de la France" - nous avons vu que cette conception n'était pas vraiment un marqueur clair d'appartenance au libéralisme bourgeois, et que des fascistes pouvaient la partager. Il "faut", peut-être, redéfinir les alignements géopolitiques : il reste (et restera sans doute toujours) des BHL pour être d'un atlantisme inconditionnel, mais pour beaucoup il faudrait se tourner vers la Russie, qui serait actuellement le "conservatoire" des "valeurs européennes" ; une Russie qui devrait pour certains "plus regarder vers l'Europe" (et réciproquement) et moins vers l'Asie et le "tiers-monde" ; tandis que d'autres assument un "eurasisme tiers-mondiste". Pour certains cela doit inclure le "rempart" israélien (qui devrait du coup aller frapper à la porte du Kremlin) face à l'"ennemi mortel" arabo-musulman : c'est le cas de Tillenon qui est proche de Guillaume Faye (100% sur cette ligne) et défend totalement l’œuvre de "restauration nationale" sioniste. Pour d'autres, il faut absolument rejeter cette "jambe" de l'"ordre mondialiste" (l'autre étant bien sûr les États-Unis d'Amérique).

Pour la plupart (comme les Identitaires mais aussi bon nombre d'eurasistes, "solidaristes" et autres nazbols qui se sont tournés vers cette thématique ces dernières années - voir ici et ici par exemple ; ou encore de "néo-païens" dans la mouvance "Terre et Peuple") il y a les "petites patries charnelles" locales qui fleurent bon l'"identité" organique et millénaire (depuis les "Gaulois", "ancêtres" de la moitié de l'Hexagone "français" au grand maximum mais c'est pas grave, voire carrément depuis le Néolithique...), il y a l'Europe "civilisation" et "puissance" à (re-)construire mais entre les deux il y a tout de même l'échelon "France" ("patrie historique") à respecter. Jean-Pierre/Yann-Ber Tillenon fait tout simplement partie des quelques uns (avec les gens d'Adsav par exemple) qui veulent purement et simplement "faire sauter" cet échelon pour rattacher directement leur nationalité réelle à un bloc impérialiste européen à construire ; en d'autres termes il refuse le compromis maurrassien entre les nationalités réelles et l'État/impérialisme BBR. Mais - comme nous l'avons dit - ce qu'il reproche à cette construction historique du Capital sous direction parisienne ce n'est pas son œuvre de transformation des classes populaires en chair à usine et à canon, mais son "cosmopolitisme" : la maigre esquisse de multiculturalisme que les nécessités du capitalisme (certes) et les luttes populaires ont imposé à la société capitaliste "française", et qui lui est déjà insupportable. C'est un séparatisme réactionnaire, visant des objectifs 100% capitalistes ("Californie de l'Europe" etc. etc.) sans même s'embarrasser des "formes" libérales et "humanistes" bourgeoises comme peuvent le faire le PNO ou le Parti breton (ex-aile gauche du POBL, l'aile droite ayant formé Adsav sur des thèses proches des siennes). 

En définitive, Jean-Pierre/Yann-Ber Tillenon (qui livre ici quelques éléments biographiques révélateurs dans un "bel" esprit 100% patriarcal, militariste et temps-béni-des-colonies : "Ancien du 5e RMP né en 1947 à Paris 13e. Je suis d'origine bretonne et alsacienne (...) J'ai été volontaire pour le 5e RMP en Polynésie. Je voulais "voir du pays" et je pensais aux "Vahinés", aux "bains de soleil" et à la sieste sous les cocotiers. J’ai été agréablement surpris de constater que la Légion, en plus des histoires des héros au combat que j'entendais étant gosse pendant la guerre d'Algérie, était  une grande fédération, une grande armée  européenne" - tout un programme !!!) ne "reconnaît plus" la Bretagne ET LA FRANCE de sa jeunesse... et sa "solution" c'est donc le repli sur l'ethnicité "pure" des nationalités réelles, seule à même selon lui d'éviter le "cosmopolitisme" et son corollaire la "décadence", "produits inévitables" de l'appartenance à la construction "France".

breizh gwenhadu komunourSon discours peut paraître "allumé" à première vue, mais en réalité tout se tient. Il a une volonté de puissance pour "sa" Bretagne et son modèle (puisque l'on a parlé d'"alternative" non-révolutionnaire et 100% capitaliste) il le revendique ouvertement : la... Californie ("faire de la Bretagne une Californie de l'Europe"). Excellent modèle en effet... d'un point de vue capitaliste : prise indépendamment, la Californie serait la 10e économie capitaliste mondiale et assurément un pays impérialiste (malheureusement nous sommes anticapitalistes et anti-impérialistes et ce pays n'est donc pas un "modèle" à nos yeux, ni pour la Bretagne ni pour l'Occitanie... nous nous rappelons que la Californie c'est aussi quelques 20 à 25% d'exclus dans une misère noire, une ségrégation sociale sur base "raciale" - mais aussi métropole/"cambrousse" - omniprésente - mais cela n'est sans doute pas pour déplaire au triste sire Tillenon ; des dizaines d'années de prison pour ceux qui "sortent des clous" pour survivre - parfois pour le vol d'une pizza si c'est le "third strike" - etc. etc.).

Il est cependant bien conscient que pour une Bretagne seule (indépendante) cela n'est pas réalisable. Au sein de la "France" cela n'est pas réalisable non plus puisque cet État est (selon lui) un facteur de décadence et une bride pour les "énergies", qui inonde la Bretagne de "bougnoules" et de "négros" sous la chape de plomb d'une "bureaucratie soviétique" ("La France est le dernier régime totalitaire du monde avec la Chine" - il va de soi que pour lui, la Chine incarne encore le "communisme")... Reste donc une Bretagne fédérée au sein d'une Grande Europe blanche et "visionnaire". L'on voit mal comment, dans une telle Europe, la Bretagne pourrait être autre chose que la périphérie qu'elle est actuellement vis-à-vis des régions dominantes (la "Banane bleue"), mais cela n'a guère d'importance pour lui : le Peuple breton, dans le fond, ne l'intéresse pas ; "sa" Bretagne est un "idéal", une "super-vision", un "concept philosophique" et non une réalité sociale sur un territoire donné, fruit d'un processus historique et à transformer dans un processus historique, un projet révolutionnaire de libération pour le Peuple breton (c'est à dire les personnes qui vivent et travaillent aujourd'hui en Bretagne et n'y sont pas des ennemies du peuple, selon la conception léniniste de la nationalité ; et non les personnes qui pourraient revendiquer une "ascendance celte millénaire" !)... Et puis après tout, avec la "Banane bleue" on reste entre peuples "aryens" et respectables n'est-ce pas (Allemands, Flamands, Suisses, Alsaciens etc.) ; notre Yann-Ber étant lui-même à moitié alsacien, donc "banane-bleusien" (la "race supérieure" ?) dans un sens.

Tout cela sent bon l'utopie totale et - donc - l'idiot utile, comme le furent déjà ses prédécesseurs du PNB dans les années 1940. C'est finalement la même chose que les conceptions religieuses réactionnaires (et leurs corollaires antisémites) dans les pays musulmans et les colonies intérieures de cette culture en Europe, ou encore le "kémitisme" de certain-e-s afro-descendant-e-s (conceptions que Soral et Dieudonné s'efforcent de "drainer" vers l'extrême-droite "gauloise" FN, tentant en quelque sorte de reproduire le "compromis maurassien" mais cette fois-ci avec les "non-blancs") : des résistances RÉACTIONNAIRES d'ensembles humains donnés contre la domination centraliste et impérialiste des États du Capital (domination dont un aspect possible est l'"uniformisation", à laquelle Tillenon réduit tout le problème) ; résistances tournées vers un passé idéalisé, vers le "paradis perdu" et la "tradition" ("une nouvelle SOCIÉTÉ TRADITIONNELLE celtique au 21e siècle, siècle de la postmodernité" - ici) et non vers la construction de l'avenir démocratique-réel et communiste de l'humanité ; mais auxquelles il ne faut pas non plus fantasmer plus d'importance qu'elles n'en ont, autrement dit en faire la menace fasciste stratégiquement principale de notre époque, car la (para)phrase de C.L.R. James qui s'applique aux colonies intérieures "non-blanches" s'applique également aux Peuples "blancs" niés par la construction historique de l’État : l'on peut affirmer sans problème que "tout mouvement fasciste d'étendue hexagonale (aussi déguisé soit-il) sera obligé de s'attaquer à l'affirmation des Peuples niés et périphérisés", ce que devraient suffire à prouver (toutes) les prises de position du Front National sur un sujet aussi picrocholin que la Charte européenne des langues minoritaires et régionales, ou encore l'expérience de la "Révolution nationale" Strollad komunour breizhvichyste en 1940-44 - quand bien même les amis de Yann Fouéré tentèrent de la court-circuiter en traitant directement avec les Allemands. Pour autant, cela existe et il nous faut donc prendre position dessus - ne serait-ce que, comme nous l'avons dit, parce que cela sert d'argument vivant à nos petits détracteurs "de gauche".

Il faut dire hélas (mais l'autocritique est ici essentielle) qu'à cela, c'est-à-dire tant aux délires d'un Tillenon qu'aux "argumentations" jacobines élaborées à partir de ce genre de "cas d'espèce", les limites de nos luttes autonomistes ou indépendantistes de gauche (progressistes ou révolutionnaires) ont souvent tendance à prêter le flanc. Voici ce que nous pouvions déjà écrire il y a deux ans à ce sujet :

"Il faut véritablement s'arrêter et insister lourdement sur ce point, car il est fondamental et l'aboutissement de tout ce que nous venons de voir. L'on observe en effet très largement, dans l’État français mais aussi dans les autres (État espagnol etc.), une tendance de l'affirmation (y compris progressiste, y compris révolutionnaire) des Peuples niés qui en constitue selon nous une grande limite : la tendance à vouloir prioritairement délimiter un territoire "national" "au village près", sur des critères notamment linguistiques (et "culturalistes"), débouchant parfois sur des prises de bec avec d'autres affirmateurs de Peuples voisins etc. etc. - l'on pourrait peut-être employer, pour qualifier cette déviation, le terme rabelaisien de "picrocholinisme".

Un travers que l'ennemi (centraliste bleu-blanc-rouge, espagnoliste etc.) ne se prive d'ailleurs pas de retourner contre nous, se découvrant soudain... "anti-centraliste" et "anti-expansionniste" pour nous traiter précisément de cela, de centralistes et d'expansionnistes, nous accusant de vouloir nier la grande diversité régionale de l'Occitanie (bien réelle avec ses 6 ou 7 aires linguistiques et culturelles elles-mêmes subdivisées) ou mettant en avant la question du gallo en Bretagne ; ou encore, dans l’État espagnol, rappelant le particularisme de telle partie d'Andalousie (Almeria, Grenade) ou de tel pays catalan (Valence, Baléares). C'est là une tactique éprouvée et vieille comme le monde, qui porte un nom dont vous nous passerez la grossièreté : l'enculage de mouches. Autrement dit l'ergotage, le pinaillage sur des points de ce style pour faire s'effondrer la question principale d'une revendication sous un "bombardement" de questions secondaires. Ce à quoi nous avons, hélas, amplement tendance à prêter le flanc - de par les limites de notre compréhension des choses.

Car il est bien évident que la diversité linguistique et culturelle des régions de la vaste Occitanie ne les inclut pas moins dans ce qu'il faut bien appeler la question méridionale de l'Hexagone, qui EST la question principale ; de même qu'en Bretagne le brezhoneg (parlé au Moyen Âge jusqu'aux portes de Rennes et Nantes) a finalement beaucoup moins reculé face à l'oïl du Val de Loire (donnant le gallo) que le gaélique irlandais face à l'anglais, et pourtant personne (en tout cas beaucoup moins de monde) ne se risque à nier l'Irlande comme réalité et question nationale face à son oppresseuse historique - l'Angleterre.

C'est la raison pour laquelle il faut marteler et marteler encore, ici et ailleurs, maintenant et à l'avenir que la question est SOCIALE, la lutte est SOCIALE. C'est particulièrement net en Occitanie, qui ne peut pas se revendiquer historiquement d'un État unifié (ni moderne ni même pré-moderne) sur l'ensemble de son territoire : l'Occitanie existe par la France, comme POSITION SOCIALE (socio-territoriale) au sein de l'ordre français ; au même titre que (par exemple) le Mezzogiorno italien (qui s'identifie largement, mais pas totalement à l'ancien Royaume de Naples) ; et la lutte qui l'affirme est une lutte pour se libérer de cette position (mais cela est également valable pour la Bretagne ou pour la Corse, qui peuvent se revendiquer d'un État souverain par le passé). La "libération nationale", terme auquel nous préférons celui de Libération révolutionnaire du Peuple (LRP) car "national" inclut nécessairement la bourgeoisie, n'est pas quelque chose qu'il s'agirait de "combiner" d'une manière ou d'une autre avec la "libération sociale", autrement dit la lutte de classe : elle EST l'expression spécifique de la lutte de classe du Peuple travailleur, dans les conditions spécifiques d'un Peuple absorbé et nié par un grand État moderne lors de sa formation.

La lutte pour la langue est une lutte pour la "reconquête de soi" en tant que Peuple, en antagonisme avec l’État qui veut faire de nous ses "citoyens" uniformisés autrement dit les petits soldats productifs de son Capital : c'est une lutte très importante mais subordonnée ou, plus exactement, impliquée par la lutte sociale qu'est la libération révolutionnaire (anticapitaliste) en tant que Peuple travailleur inscrit dans un certain ordre social au sein des frontières d'un État (des murs d'une prison, d'un enclos à force de travail).

En définitive, soit l'on a compris cela soit on ne l'a pas compris ; et c'est alors la porte ouverte à toutes les dérives (isolement folklorique et inexistence politique, électoralisme et incrustation dans le système que l'on dénonce, populisme voire xénophobie réactionnaire) quelle que soit la quantité de vent que l'on brasse par ses moulinets nationalistes."

Nous, nous ne vivons pas dans la nostalgie de notre jeunesse occitane en France ; nous ne la regretterions pas même si nous étions nés au Moyen Âge (avant la Conquista) ; mais ce n'est de toute façon pas le cas : nous avons toujours vécu dans un enclos à force de travail dénommé "France" et sur un territoire occitan qui s'est vu attribuer une certaine place - périphérique, provinciale - en son sein. Nous regardons vers l'avenir et l'avenir, pour nous comme pour toute l'humanité, c'est d'en finir avec cette réalité et ce paradigme historique pour passer à autre chose. Nous ne sommes pas non plus spécialement nostalgiques de l'époque où "80% des lois" qui servent à nous opprimer n'étaient pas "faites à Bruxelles" : nous combattons bien évidemment l'Union européenne comme appareil de classe capitaliste mais nous voyons aussi, il faut le dire, plutôt positivement ce symptôme d'affaiblissement de l’État et de l'impérialisme bleu-blanc-rouge.

La "France" est le nom d'un appareil politico-militaire ET IDÉOLOGIQUE (= de "contrôle des consciences") servant à encadrer une masse de force laborieuse au service de l'accumulation de capital (production de plus-value). Ce mode de production, le capitalisme, a été une étape atrocement douloureuse mais nécessaire et incontournable de l'histoire de l'humanité, sans laquelle nous aurions encore une espérance de vie d'une trentaine d'années, nous serions à la merci du moindre aléa climatique ou de la moindre épidémie, etc. etc. Une étape "progressiste" en ce sens d'historiquement nécessaire, au sens où la longue marche de l'humanité vers le communisme devait passer par là exactement comme elle devait passer par le pire esclavage de l'Antiquité, ou comme la vie qui naît doit passer par l'accouchement, atrocement douloureux lui aussi (ce terme de "progressiste" a cependant pris aujourd'hui une connotation positive qui fait que nous évitons de l'employer au sujet du capitalisme et de son œuvre, car cela nous semble incompatible avec la LUTTE idéologique et physique que nous livrons contre lui).

Mais aujourd'hui ce mode de production a fait son temps et n'est plus en mesure d'apporter le moindre progrès à l'humanité, seulement le lot de désastres et de violences inhumaines qui l'ont toujours accompagné (Marx disait que le Capital "arrive au monde suant le sang et la boue par tous les pores"). Dès lors, nous devons et voulons abattre ce mode de production capitaliste et EN FINIR avec ses États/appareils d'encadrement politico-militaire et idéologique. Cela conduira forcément, en brisant ces murs, à en libérer les Peuples (ensembles de travailleurs partageant une même culture, une même histoire, une même économie productive) qui pourront dès lors (à nouveau) avancer vers l'avenir : la Commune Humanité.

Des Peuples LIBRES ET SOCIALISTES qui soient comme des PONTS JETÉS VERS L'UNIVERSEL, tel est ce pour quoi nous luttons ; et certainement pas pour des répliques en "modèle réduit" des États capitalistes que nous subissons et combattons actuellement, a fortiori dans ce qu'ils ont de pire (chauvinisme, racisme), au service d'une fantasmagorique "Europe puissance" pour la "défense du monde blanc" (traduction : des monopoles européens) !

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* L'on s'arrêtera ici pour souligner la cocasserie de la chose car en réalité (et en dernière analyse), si l'on regarde bien les deux principales racines de l'extrême-droite "régionaliste", nous avons : 1°/ le courant de pensée maurrassien qui a toujours rejeté le centralisme parisien et exalté les identités "régionales" comme composantes de la "civilisation française" (certains éléments comme Tillenon "sautant" à présent l'échelon "France" pour inclure directement leur "identité" bretonne ou occitane ou autre dans l'"Europe blanche") ; et 2°/ des indépendantistes ou autonomistes qui ont été de gauche dans les années 1970, comme (dans une certaine mesure) Tillenon ou (surtout) Montauzier d'Adsav... et qui ont dérivé vers la droite selon exactement le même cheminement intellectuel qu'un nombre considérable (pour ne pas dire une majorité) de gens-de-gôôôche tout ce qu'il y a de plus "républicains", jacobins et "universalistes" "français" - en un mot, "tous ces immigrés/Arabes/Noirs/musulmans un peu ça va - on est pas racistes hein ! - mais trop c'est trop, et pis ils s'intègrent pas, ils veulent nous imposer leur religion et leur culture arriérée etc. etc., alors bon ils seraient peut-être mieux chez eux quand même"... Sauf qu'au lieu de tenir ce raisonnement dans le cadre de la "Républiiiiique"/"citoyenneté" et des "valeurs" bleu-blanc-rouges, ils le tiennent dans le cadre de l'"identité" et de la "patrie charnelle" de leur nationalité réelle (Bretagne, Occitanie etc.). Les jacobinards "républicains"-"universalistes"-"de gôôôche" ont donc beau jeu de nous donner des leçons, et feraient mieux de garder celles-ci et de ses les introduire dans un endroit plus approprié.

 

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15 octobre 2014 3 15 /10 /octobre /2014 12:53

 

Nous avons déjà évoqué sur SLP la magnifique lutte du Peuple andalou (dans l’État espagnol) pour sa Libération révolutionnaire ; et nous avions alors souligné la très grande similitude entre cette lutte et la nôtre, ici en Occitanie : similitude par la position géographique méridionale dans les États qui nous renferment, certes, mais aussi et surtout par l'époque de nos Conquistas respectives (entre le début du 13e et la fin du 15e siècle pour l'essentiel, puis "pacification" jusqu'au 17e voire 18e) faisant de celles-ci l'acte fondateur et fondamental, le BAPTÊME DE SANG de nos États modernes (espagnol et français) respectifs. Nous sommes les uns et les autres, aux côtés du Mezzogiorno de l’État italien, la "question méridionale" de ces États !

Et ceci se reflète aujourd'hui dans le beau témoignage de solidarité qu'adresse la jeunesse révolutionnaire indépendantiste d'Andalousie, l'organisation Jaleo!!!, aux camarades occitans de Libertat! face aux persécutions judiciaires qu'ils subissent actuellement.

http://www.jaleoandalucia.org/joomla/index.php/component/content/article/3-internacional/352--jaleo-en-solidaridad-con-libertat-izquierda-revolucionaria-de-occitania.html

De la part de Jaleo!!! – Jeunesse indépendantiste d'Andalousie, nous voulons exprimer notre solidarité avec Libertat, gauche révolutionnaire d'Occitanie, face à la répression politique subie de la part de l’État français. Depuis plusieurs mois déjà se multiplient les convocations policières contre les militants de Libertat, pour le seul fait de leurs actions en défense de la langue occitane ou d'espaces politiques comme le bar associatif la Tor deu Borrèu.

Toutes ces procédures conduiront certains militants de l'organisation devant la justice, comme c'est déjà le cas pour un camarade qui passera en procès le 17 octobre prochain suite aux violences policières contre les concerts organisés par la Tor deu Borrèu dans le cadre de la dernière Fête de la Musique à Pau.

Depuis l'Andalousie, nous adressons un salut chaleureux et solidaire aux camarades de Libertat et nous affirmons notre soutien à l'existence d'espaces politiques tels que la Tor deu Borrèu. Si l’État français met en cause ces espaces et ces organisations, c'est parce qu'il perçoit comme une menace la Résistance des Peuples.

La répression des États capitalistes ne connaît pas de répit, ni dans l’État espagnol ni dans l’État français. La lutte des Peuples et la solidarité internationaliste non plus !

Solidarité avec les Peuples en Lutte !

La resisténcia qu’ei ua question de dignitat ! (La résistance est une question de dignité !)

Occitània, socialisme et libertat ! (Occitanie, socialisme et liberté !)

La Tor viurà ! (La Tor vivra !) 

occitania.jpg             bandera-andaluciamaoc


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4 octobre 2014 6 04 /10 /octobre /2014 17:24

harcelée par l'État français pour son combat quotidien d'affirmation progressiste du Peuple occitan :

http://comitat-libertat-tor.blogspot.fr/

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14 septembre 2014 7 14 /09 /septembre /2014 08:21


des-partisans-de-l-independance-de-l-ecosse-Le verdict des urnes est donc tombé ce matin, assez conformément à ce que nous (comme la plupart des sondages) avions prévu : après deux ans de débats acharnés et même deux semaines de suspense "tendu" (quelques rares sondages ayant donné le "oui" vainqueur...), l'Écosse vient de "refuser" par 55,3% (2 millions de voix) de quitter le Royaume-Uni. Un résultat nettement moins serré, d'ailleurs, que ne l'annonçaient les dernières enquêtes d'opinion...

Pour le Premier ministre indépendantiste Alex Salmond et son Scottish National Party (SNP, plutôt social-libéral voire social-démocrate), c'était quoi qu'il arrive un pari gagnant à tous les coups : si le "oui" l'emportait c'était évidemment un triomphe comme peu d'hommes peuvent en rêver dans leur vie (être le "père d'une nation")... mais même une défaite par 40% ou plus de "oui" représentait dans tous les cas un énorme succès et un rapport de force considérable dans les relations du pouvoir autonome avec Londres, pour exiger la "dévolution" de nouvelles prérogatives (des promesses de larges transferts de compétences au gouvernement écossais après le référendum avaient déjà été faites depuis des mois, et encore réitérées à la veille du scrutin). C'est ce qui explique les gesticulations de David Cameron ces derniers jours : il fallait non seulement empêcher à tout prix une victoire du "oui" (qui aurait été un coup terrible pour l'impérialisme british, même si la vengeance de celui-ci contre l’Écosse aurait ensuite été toute aussi terrible), mais aussi un score indépendantiste trop important et un Salmond en insupportable position de force dans les futurs pourparlers. Le résultat de ce matin le met finalement dans une position "raisonnablement acceptable" - il eut été beaucoup plus difficile pour Londres que les choses se soient jouées à quelques dizaines de milliers de voix.

Quoi qu'il en soit, de ce résultat ressortent deux conclusions essentielles :

- C'est un coup de tonnerre de plus dans le ciel européen et mondial : la crise générale du capitalisme balaie tout sur son passage et remet même en question les États produits dudit capitalisme (comme appareils politico-militaires d'un Centre capitaliste, ici Londres) ; États semi-coloniaux fantoches comme ceux dessinés au Proche-Orient après la Première Guerre mondiale mais aussi grands États impérialistes d'Europe y compris les plus anciens (l'Écosse a partagé le même souverain avec l'Angleterre dès 1603 puis été formellement réunie en 1707, donnant naissance au Royaume-Uni), qui se disloquent de toute part. Les Peuples travailleurs* niés et périphérisés par ces constructions capitalistes se réaffirment avec force ; ils comprennent et rejettent ce qu'ils sont : de simples pions, des rouages de la machine à valoriser le capital, chacun à une place bien définie qui lui a été attribuée par le Centre dans l'ensemble productif étatique. Ils se réapproprient leur histoire - celle de cette négation - et la brandissent fièrement comme un étendard de libération. Lorsque les États capitalistes (produits du développement historique du capitalisme) étaient florissants, ils pouvaient encore duper et aliéner les masses populaires dans des "citoyennetés" et des "patries" fictives : "britannique", "espagnole", "française" etc. ; mais à présent tout s'effondre et l'illusion se dissipe comme les effets de quelque drogue. scottish republican faucille marteauDans deux mois est censée voter la Catalogne... Tel est le mouvement historique bien réel qui s'est exprimé dans ce scrutin écossais : l’Écosse reste "britannique" mais quelques 44,7% (1,6 millions de personnes) ont voté pour en faire un nouvel État indépendant (vote majoritaire, même, avec 53% dans la première ville Glasgow), quelle que soit la "folle aventure" que cela représentait, voyant là la réponse aux terribles difficultés que la crise capitaliste leur inflige au quotidien (plusieurs études ont montré que c'étaient principalement les jeunes, à la situation économique toujours plus précaire, et les revenus modestes qui se prononçaient pour l'indépendance).

Il faut dire que l'Écosse, contrairement à la Catalogne qui est plutôt (historiquement) une associée flouée du pouvoir castillan, sait plutôt bien ce qu'être une périphérie veut dire : dès son annexion définitive par Londres suite à la guerre victorieuse de Guillaume d'Orange contre les jacobites partisans de Jacques II Stuart (1688-1702), ponctuée d'affreux massacres et débouchant finalement sur l'Acte d'Union de 1707, elle a été littéralement mise en coupe réglée par le capitalisme britannique dans le rôle de productrice de matières premières (charbon et autres minerais, moutons pour la laine de l'industrie textile) à travers une expropriation brutale de la communauté productive traditionnelle qu'était le clan (processus notamment décrit par Marx dans le Capital chap. XXVII,  L'expropriation de la population campagnarde) ; expropriation souvent menée (d'ailleurs) avec la complicité des chefs de clans eux-mêmes devenant landlords ("seigneurs de la terre") et entraînant une émigration massive vers l'Angleterre ou l'Amérique du Nord... Peu d'industries de transformation y ont été développées (essentiellement dans la région de Glasgow, la Clydeside) et elles ont de toute façon été violemment démantelées sous Thatcher ; aujourd'hui encore le pays se caractérise par son sous-peuplement (5,3 millions de personnes sur 78.772 km², soit 67 habitants/km²) et l'importance de sa diaspora (plus d'un million de personnes nées en Écosse mais expatriées, principalement en Angleterre bien sûr) ainsi qu'un très important problème foncier (des milliers de kilomètres carrés sont la propriété de quelques landlords et leurs habitants de purs et simples locataires).

C'est sans doute au Royaume-Uni que les territoires et les peuples périphérisés ont le plus les caractéristiques john macleande véritables colonies. La conscience de cela a toujours profondément empreint le mouvement révolutionnaire socialiste/communiste local avec notamment la figure (hélas peu connue) de John MacLean, l'un des plus grands dirigeants communistes du 20e siècle à nos yeux [même si bien sûr, comme ici avec nos jacobinards, a toujours existé un "communisme" (plutôt anglais) mettant en avant un "unionisme rouge"].

- Mais c'est aussi, comme au Québec il y a 19 ans et comme en Catalogne dans deux mois (où là pour le coup le "oui" devrait être massif mais le référendum non reconnu par Madrid** - d'autant plus massif que le référendum ne sera pas reconnu et sans doute largement boycotté par les anti-indépendantistes...), une démonstration éclatante de l'impossibilité de la voie légaliste, institutionnelle et (surtout) à l'intérieur du capitalisme pour cette (ré)affirmation ; l'illustration parfaite qu'il n'y a de voie véritable que dans la Guerre populaire, pour la Libération révolutionnaire du Peuple (LRP qui n'est pas la "libération nationale" marxiste-léniniste "étapiste" classique, incluant la bourgeoisie***).

Réaffirmer un Peuple comme le Peuple écossais contre l’État moderne (ici britannique) qui l'emprisonne depuis des siècles, c'est une négation au sens marxiste de cet État moderne qui est le produit du capitalisme : cela ne peut donc être qu'une négation du capitalisme lui-même ! Toute tentative qui 1°/ ne remet pas en cause le système capitaliste et 2°/ tente de passer par la voie des institutions bourgeoises, des référendums etc. et non par une mobilisation révolutionnaire de masse est en principe vouée à l'échec fut-ce "d'un cheveu" (comme au Québec en 1995) et, dans l'hypothèse où elle réussirait, à donner naissance à un État fantoche, faussement "libre" et totalement dépendant : à quelques encablures des côtes écossaises, les 26 comtés irlandais formant la "République d’Éire" en donnent un bon exemple - au demeurant, cet État n'est pas né d'un référendum mais bien d'une guerre de libération trahie par une partie de sa direction bourgeoise

Les forces marxistes (voir ci-dessous) qui rejetaient le référendum et l'indépendance sur l'air de "cela ne changera rien pour la classe ouvrière", "c'est 'bon' capitalisme écossais contre 'mauvais' capitalisme anglais", "blanc bonnet et bonnet blanc" etc. etc. n'avaient pas tort dans l'absolu... et dans l'immédiat. Leur problème c'est de nier un mouvement historique bien réel en considérant, finalement, qu'elles détiennent la vérité et que les millions de gens qui ont voté "oui" sont des cons qui n'ont rien compris - autrement dit une posture aristocratique. Leur problème, c'est de ne pas voir les profondes aspirations populaires qui s'expriment ainsi et leurs possibilités de transformation en mobilisation révolutionnaire - autrement dit une attitude non-matérialiste.

jacobitesQuant aux archi-classiques arguments comme quoi "le prolétariat n'a pas de patrie", les revendications nationales populaires "diviseraient le prolétariat international" etc. etc., de fait c'est bien Rosa Luxemburg dans ce qu'elle avait de pire qui semble être la référence politique de ces 'marxistes' - indifféremment qu'ils se réclament d'elle ou de Lénine-Trotsky, Lénine-Staline, Lénine-Staline-Mao, Bordiga ou qui que ce soit. Il semble nécessaire de leur opposer ce que disait Lénine lui-même en 1914 dans une controverse (justement) avec Luxemburg au sujet de la séparation (totalement pacifique d'ailleurs) entre la Suède et la Norvège, intervenue quelques années plus tôt : "Il ne peut faire le moindre doute que les sociaux-démocrates suédois auraient trahi la cause du socialisme et de la démocratie s'ils n'avaient pas combattu, par tous les moyens, tant l'idéologie et la politique des landlords suédois que celle des 'Kokoshkin' locaux [Fédor Kokoshkin était un 'constitutionnel-démocrate' ('cadet') russe de l'époque de Lénine, favorable à la 'libéralisation' de l'Empire vis-à-vis des nationalités mais fermement hostile à toute autodétermination], et s'ils avaient manqué à exiger non seulement l'égalité des nations en général (ce à quoi les Kokoshkin peuvent souscrire) mais aussi leur droit à l'autodétermination : le droit de la Norvège à faire sécession. L'alliance étroite entre les travailleurs norvégiens et suédois, leur complète et fraternelle solidarité de classe, n'a pu que gagner à la reconnaissance par les travailleurs suédois du droit des Norvégiens à l'indépendance. Ceci a convaincu les travailleurs norvégiens que les travailleurs suédois n'étaient pas infectés par le nationalisme, et qu'ils plaçaient la fraternité avec les prolétaires norvégiens au-dessus des privilèges de la bourgeoisie et de l'aristocratie suédoise. [...] Ils ont démontré qu'en dépit de toutes les vicissitudes de la politique bourgeoise - les relations bourgeoises pourraient très possiblement amener une répétition de la sujétion forcée des Norvégiens aux Suédois ! - ils seraient capables de de préserver et défendre la complète égalité et la solidarité de classe entre les travailleurs des deux nations, contre à la fois la bourgeoisie suédoise et la bourgeoisie norvégienne". CQFD... On ne peut pas dire que la Norvège indépendante soit devenue un modèle d’État socialiste prolétarien ; et pourtant telle était la position de Vladimir Illitch Oulianov !

L'objectif du référendum (côté écossais) était certes une indépendance 100% bourgeoise et capitaliste : le modèle revendiqué du SNP d'Alex Salmond est la social-démocratie scandinave et son projet était de faire du pays une autre Norvège assise sur la rente pétrolière de la Mer du Nord, le tout en tentant (comme la "République" d'Irlande du Sud avant lui) de jouer l'UE (l'axe franco-allemand) contre l'Angleterre. La monarchie n'était pas remise en question (Élisabeth II devait rester "reine d'Écosse" comme elle "règne" symboliquement sur l'Australie, le Canada etc.) et le grave srsm1problème foncier que nous avons évoqué ne devait pas faire l'objet de plus que quelques mesurettes. La question de la véritable libération, celle du Peuple travailleur vis-à-vis de l'exploitation capitaliste, restait absolument entière.

Mais il est tout aussi absurde et ridicule de présenter les choses comme du "nationalisme réactionnaire" ou carrément du "fascisme". Ce que les partisans de l'indépendance revendiquaient souvent dans les débats, c'était d'être les "derniers défenseurs du modèle britannique d'après-guerre", celui de l'"État-providence" et du progrès social laminé par 35 ans de thatchérisme et de blairisme - d'ailleurs la perspective d'un maintien des conservateurs au pouvoir à Londres, à l'issue des prochaines élections, influait considérablement sur les résultats des sondages. Du SNP social-démocrate jusqu'à la gauche révolutionnaire "socialiste" (= marxiste), républicaine-socialiste sur le modèle irlandais ou anarchisante comme le fameux groupe de punkcore antifasciste Oï Polloï, c'est clairement à gauche de l'échiquier politique que se trouve le camp pro-indépendance ; même si évidemment des forces de "gauche" unionistes existent aussi, à commencer par les travaillistes (qui perdraient là un de leurs derniers grands réservoirs électoraux et une quarantaine de députés à Westminster !) mais aussi, bien sûr, toutes sortes de "marxistes" tant "staliniens" que trotskystes ou apparentés pour qui l'"orthodoxie" dogmatique fait office de ligne politique [on peut voir un bon aperçu ici http://tendanceclaire.npa.free.fr/breve.php?id=9760 des positions au Royaume-Uni, ainsi que la déclaration du Parti 'communiste' 'écossais' (en fait la section écossaise de PC de Grande-Bretagne, il existe sinon un PC d’Écosse qui soutient l'autodétermination) et ici la version in french de la position du WSWS, tandis qu'en 'France' c'est bien sûr le festival jacobinard tant attendu 1 - 2 (position du PRCF ultra-partagée à la 'gauche de la gauche') et les incontournables "ça changera rien pour la classouvrièèèère" trotskystes 3 - 4]... En somme, toutes les forces de gauche n'étaient pas pour l'indépendance, mais toutes les forces pour l'indépendance étaient de gauche ! La droite conservatrice et réactionnaire était intégralement hostile à l'indépendance et farouchement pour le maintien de l'Union, des tories de David Cameron jusqu'aux souverainistes-populistes du UKIP de Nigel Farage - le FN britannique, arrivé en tête aux dernières européennes au Royaume-Uni mais obtenant (et pour cause) ses plus mauvais scores en Écosse (partagée entre SNP au nord, Labour au centre et libéraux-démocrates au sud ; l'UKIP n'étant en tête nulle part). De fait, comme en Bretagne, en Corse, au Pays Basque ouanti-independance dans certaines (nombreuses) régions d'Occitanie, la conscience et l'affirmation de Peuple nié par l'État moderne agit plutôt comme un antidote efficace à la mobilisation réactionnaire "nationaliste" étatiste qu'autre chose... Une droite réactionnaire qui a fait défiler 15.000 personnes pour le "non" à Édimbourg samedi sous la sinistre bannière "orangiste" des assassins d'Irlande du Nord : voilà de quel côté sont les fascistes là-bas !

Quelle que soit la voie erronée (légaliste, institutionnaliste, capitaliste comme "horizon indépassable") où elle s'engage, c'est donc une aspiration profondément populaire et juste qui s'exprime là, et qui s'exprime avec des "mots" ultra-majoritairement progressistes. On voit d'ailleurs nettement, au regard des résultats électoraux, comment le thatchérisme a fait massivement glisser à gauche un électorat jusque-là - en dehors de la Clydeside - plutôt conservateur (résultats de 1979, 1992 et 1997) ; puis comment le sentiment indépendantiste est inexorablement monté avec la phase terminale de la crise générale du capitalisme jusqu'à porter le SNP au pouvoir en 2007 et le reconduire triomphalement en 2011, ce qui a conduit au présent référendum (23% pour le SNP en 2003, 33% en 2007 et 45% en 2011, score équivalent à celui du "oui" aujourd'hui).

Bien sûr, ce projet de société indépendantiste n'est "progressiste" et idyllique que dans l'idéal car si, contrairement à Madrid pour la Catalogne, Londres a accepté la tenue du référendum et la reconnaissance de son résultat, elle tenait également prêt tout un arsenal de mesures visant à décourager le vote indépendantiste et, en cas de succès du "oui" malgré tout, à "torpiller" immédiatement l'économie du nouvel État : refus, par exemple, que l'Écosse conserve même temporairement la livre sterling, sachant que Bruxelles avait par ailleurs clairement rejeté l'intégration automatique du pays dans l'UE et donc dans l'euro (qui a pourtant cours dans de nombreux pays ex-yougoslaves non-membres comme la Bosnie, le Monténégro ou encore le Kosovo... ah oui mais c'est vrai : là pour le coup ce sont des "indépendances" totalement voulues et pilotées par l'Union pour se faire des néocolonies !), etc. etc. - de fait, contrairement aux fantasmes de "complot balkanisateur" de certains, Bruxelles semble plutôt attachée à défendre bec et ongles l'"intégrité" territoriale de ses grands États membres... Ceci voulait bien sûr dire ce que cela voulait dire : aller mendier les republican socialistbonnes grâces du FMI et de la Banque mondiale pour permettre à l’Écosse indépendante d'être viable, avec les conséquences que l'on imagine. C'est sans doute ce qui a fait pencher un bon nombre d'électeurs vers le maintien du statu quo, ou en tout cas vers l'abstention (autour de 15% tout de même, même si la participation a été exceptionnelle et l'avance du "non" - nettement plus large que dans les derniers sondages - tend à montrer que c'est vers ce choix que se sont portés les "8 à 14% d'indécis" qui ressortaient de ces enquêtes).

Voilà (et le même raisonnement vaut pour le référendum catalan prévu le 9 novembre) un bon exemple d'où se situe la différence entre une démarche institutionnelle légaliste et une démarche de lutte de libération révolutionnaire mobilisant véritablement le Peuple, "seul créateur de l'histoire universelle" comme disait Mao, pour construire une société nouvelle (par mobiliser nous n'entendons évidemment pas faire voter, mais mobiliser dans une dure lutte qui transforme au quotidien les rapports sociaux). Si en apparence "le Peuple décide souverainement de son destin", la "libération" est ici en réalité quémandée à l’État central qui va tout faire pour qu'une majorité (même courte) refuse l'"aventure" de l'indépendance, et si d'"aventure" le Peuple en question "passait en force", le lui faire payer très cher en faisant de la Grèce un paradis sur terre à côté de la situation économique et sociale du nouvel État. En d'autres termes : on va demander à des millions d'hommes et de femmes qui ne sont pas des hommes et des femmes nouveaux/velles forgé-e-s dans le feu d'une longue et dure lutte révolutionnaire, ayant appris l'autonomie populaire etc. etc., de se prononcer majoritairement pour ou contre un incroyable saut dans l'inconnu... Il est absolument évident qu'une majorité (même courte) va à tous les coups préférer la sécurité de ce qu'ils/elles ont toujours connu ! Mais ceci peut et doit, aussi, être un moyen de faire prendre conscience au Peuple de l'impasse institutionnaliste et de mobiliser sa fraction avancée dans la voie révolutionnaire - ce qui est évidemment impossible en niant, comme certains "marxistes", la réalité des aspirations exprimées dans le mouvement populaire pour l'indépendance et en n'y voyant qu'"aliénation" ou "aspirations petites-bourgeoises", en un mot "conneries contre-révolutionnaires".

100 0745Ni panacée, ni "pure merde réactionnaire" : telle est notre position sur ces mouvements indépendantistes qui connaissent une expansion radicale en Écosse ou en Catalogne, a fortiori lorsqu'ils s'expriment dans un langage progressiste (nous avons évidemment beaucoup plus de mal avec un mouvement "de riches" et d'expression majoritairement réactionnaire comme en Flandre, même si nous ne considérons pas plus l’État belge comme une "nation" que les États français, britannique ou espagnol et même si les Flamands étaient, jusqu'au milieu du 20e siècle, une nationalité profondément méprisée et opprimée par la bourgeoisie francophone bruxelloise, avant de devenir une nation capitaliste dynamique voyant les Wallons pauvres et socialistes comme des boulets - un côté "marre des pauvres" que l'on sent aussi pointer parfois dans le discours catalan, hélas). Nous voyons là de la matière sociale en mouvement pour des raisons objectives et légitimes - historiques - et qu'il s'agit de mettre en mouvement dans un sens révolutionnaire, car elle est (actuellement et évidemment) politiquement confuse et peut aussi (bien sûr) aller dans un sens réactionnaire, qui la verra soit être écrasée soit être récupérée pour consolider l'ordre social européen et mondial - et non l'affaiblir. Nous n'avons pas dit autre chose au sujet des aspirations (en l'occurrence) autonomistes et en apparence "interclassistes" voire "réacs" qui se sont exprimées en Bretagne à l'automne 2013. Cela nous a bien sûr valu l'hostilité de tous les défenseurs de l’État moderne tel qui l'est (ou soi-disant de son "dépassement" "a-national" idéaliste et abstrait), y compris "rouges" ou "anars" (soi-disant révolutionnaires et en réalité petits bourgeois vivant de cet ordre social historiquement construit). Mais aussi, parfois (comme au sujet de la Catalogne), l'incompréhension de personnes partageant nos convictions "occitanistes" mais voyant (terrible "crise de confiance" que connaissent les personnes révolutionnaires depuis un quart de siècle) dans ce genre de démarche institutionnalo-légaliste leur référence absolue...

saoirseNotre position concernant notre propre pays l'Occitanie, quant à elle, a déjà été exposée et expliquée plusieurs fois : nous ne sommes pas indépendantistes au sens "commun" (= "mauvais mais hélas répandu", cf. Gramsci) de créer à tout prix un État occitan, peu importe son contenu de classe. Nous sommes pour créer une BASE ROUGE de la révolution mondiale en Occitanie et si cela implique la séparation d'avec l’État français (tel qu'il est actuellement cela l'implique forcément) alors nous nous séparerons ; mais si cela peut se faire au sein d'un "Hexagone rouge" ou de tout autre cadre territorial plus grand, alors nous nous y fédérerons sans aucun problème... mais sans accepter pour autant un quelconque hégémonisme de qui que ce soit.

Cette logique de libération révolutionnaire d'une périphérie en tant que territoire géographique permet d'ailleurs de "dés-ethniciser" la revendication et d'éviter ainsi que d'éventuelles minorités nationales (issues de l'immigration par exemple) soient inquiétées et finalement gagnées par la propagande unioniste/centraliste qui présenterait l'affirmation du Peuple nié comme "xénophobe", avant de se retrouver ensuite accusées d'avoir fait "capoter" les choses comme au Québec en 1995 (division des masses populaires au service du système dominant, mais là dans l'exemple québécois c'était inévitable vu la logique bourgeoise et "petite-blanche" qui est celle du PQ). S'il existe (en Occitanie comme ailleurs) des secteurs sociaux comme ce que nous appelons les colonies intérieures (et d'autres "indigènes"), ou encore les Rroms, qui sont dans une situation spécifique appelant une lutte autonome spécifique, c'est bien (à travers un processus que nous avons exposé en long, en large et en travers) l'Occitanie en tant que TERRITOIRE qui est une province et une périphérie de la construction capitaliste "France" avec l'ENSEMBLE des classes populaires vivant dessus, et non "les Occitans" comme communauté "organique" fantasmée et supposée descendre des paysans du Moyen Âge ou carrément des peuples antiques conquis par Rome - il est hélas probable que beaucoup de personnes trompées par l'ennemi croient que cette vision est la nôtre, et que nous ne luttons pas contre l’État français comme appareil d'oppression qui nous périphérise mais contre les "allogènes"...

saorsaNous pensons de toute manière qu'une indépendance occitane capitaliste est impossible, car seule une fraction infinitésimale de la bourgeoisie occitane y est favorable - la grande majorité trouve son compte dans l’État français, fut-ce au prix d'une certaine "décentralisation" - et par conséquent, spontanément, seule une petite minorité des masses populaires l'est aussi. Nous ne sommes pas et ne serons certainement jamais dans le cas du Québec, de l’Écosse ou de la Catalogne, où une portion plus que conséquente de la classe dominante veut son propre État. La conscience de Peuple occitane existe, elle est beaucoup plus répandue que ne veulent bien le croire les thuriféraires de la "République une et indivisible", mais elle ne peut prendre un caractère réellement affirmatif et offensif que dans le cadre et au service d'une démarche révolutionnaire, d'une lutte pour une nouvelle société, une société socialiste puis communiste. L'Occitanie existe objectivement (territoire d'une langue et d'une culture du nord du "Massif central" aux Pyrénées et du Golfe de Gascogne aux Alpes) mais elle ne peut exister subjectivement (dans la conscience de masse) que comme PROJET RÉVOLUTIONNAIRE. Dans un sens, c'est mieux : nous ne nous trouverons jamais confrontés aux rudes débats d'une prise de position face à la perspective d'un État bourgeois indépendant, même si quelques esprits "gagne-petit" pourraient faire jouer ce rôle à une quelconque "avancée institutionnelle". Mais la tâche n'en est que plus immense, car nous devons TOUT CONSTRUIRE : nous n'avons pas la matière première d'une conscience collective léguée par la bourgeoisie, que nous pourrions "travailler" et transformer... Nous devons partir de cette conscience 100% populaire qui existe bel et bien, largement, mais diffuse, peu structurée et subissant l'hégémonie intellectuelle de la bourgeoisie dominante.

Dans ce combat qui, répétons-le encore une fois, n'a de sens qu'inscrit dans une lutte révolutionnaire MONDIALE, nous saluons et encourageons le Peuple travailleur écossais CONSCIENT dans la poursuite de sa lutte pour la Libération !


Saor is Sòisealach Alba !
Free an Socialist Scootlund !

(Écosse libre et socialiste !)


* Ce terme (fréquemment taxé de 'révisionnisme' par les guignols pour qui le dogmatisme fait office de pensée politique) englobe le prolétariat http://servirlepeupleservirlepeuple.eklablog.com/les-classes-le-proletariat-a114084216 et les classes populaires assimilables par leur niveau de vie, autrement dit les personnes qui tirent l'essentiel pour ne pas dire la totalité de leurs ressources de leur propre force de travail (de manière salariée ou 'à leur compte'), et non de l'emploi de la force de travail d'autrui (définition de la bourgeoisie et des classes dominantes en général).

** Cette différence d'approche idéologique procède de la réalité matérielle. L'Angleterre peut tenir ses périphéries et donc se permettre de les reconnaître comme nations (ce qu'elle a toujours fait, dans le sport comme dans les régiments militaires), présentant le Royaume-Uni comme une "famille" de nations et non comme un "État-nation" contre toute évidence. Elle peut même se permettre de laisser se tenir un référendum pouvant déboucher sur l'indépendance d'une "nation constitutive" de la "famille", sachant qu'elle aurait de sérieux moyens de rétorsion contre la "fugitive" (elle l'a déjà montré, en 1920 et depuis, en Irlande) au cas où tous les moyens de pression préalables n'auraient pas empêché la victoire du "oui".
La Castille ne peut pas se permettre cela car économiquement, au Nord de la péninsule en tout cas (Catalogne, Pays Basque), ce ne sont pas des périphéries mais des capitalismes bien plus dynamiques que le sien, superposés sur des classes populaires très conscientes par rapport à la moyenne européenne (cela, par contre, au Nord comme en Castille comme au Sud : partout). L'"espagnolité" d'ailleurs, pour dire les choses clairement, est "monnayée" depuis la "transition" de 1975-82 aux bourgeoisies nationales contre le maintien de l'ordre... Elle peut aussi l'être, éventuellement, sur l'argument que dans le "concert" européen et international "l'Espagne pèse ensemble 47 millions (d'habitants) et 1.300 milliards (de dollars de PIB) alors que les Catalans, les Basques etc. seuls ne pèseraient que quelques millions d'habitants et quelques centaines de milliards de PIB". Mais si une bourgeoisie (comme la catalane ou la basque) se sent réellement en mesure de se "faire la malle" et se montre manifestement capable de mobiliser en masse en ce sens, Madrid n'a pas le 1/10e des moyens de Londres pour rendre (d'abord) très improbable une victoire de l'indépendance et (le cas échéant) faire payer très cher celle-ci aux sécessionnistes. Elle est donc obligée de bloquer les choses autoritairement, en refusant par exemple - catégoriquement - que se tienne le référendum, et de reconnaître ses résultats au cas où il se tiendrait quand même.

*** Il est clair que 100 ans ou presque après que Lénine ait théorisé la libération nationale, il faut être capables de constats de faits pour avancer. Le ridicule du nihilisme national des luxemburgistes, de certains anarchistes, certains trotskystes etc. a été amplement exposé et le fond de l'ignoble a même été atteint ces dernières années au sujet de la Palestine (cherchez sur Facebook le groupe "Révolution permanente", vous verrez). Mais la faillite des libérations nationales bourgeoises est aussi un fait établi et la perspective d’États "indépendants" que l'"ex"-métropole (qui le reste sur le plan économique...) mettrait immédiatement en faillite ne fait plus recette, même comme "premier pas", ainsi qu'on peut le voir dans les dernières colonies directes tricolores ("Dom-Tom") qui s'accrochent désespérément à Paris et même dans d'anciennes colonies, comme l'île comorienne d'Anjouan, qui voudraient... redevenir "françaises". Ce n'est pas là une position que nous trouvons particulièrement intelligente ni que nous soutenons, mais c'est une bonne illustration des limites qu'il nous faut à tout prix dépasser. Vive la Libération révolutionnaire des Peuples !

 

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25 août 2014 1 25 /08 /août /2014 09:24

 

maocNous avons vu ici comment le fond antisémite dans l'idéologie de l'État français était véritablement indissociable de la construction de cet État et en particulier de la conquête de notre Occitanie au 13e siècle, laquelle abritait l'essentiel des Juifs à l'époque et où s'appliquèrent les premières mesures de discrimination, persécution et expulsion - tout comme il est indissociable du Drang nach Osten en Allemagne, de la "Re"conquista dans l'État espagnol, bref de la formation de l'État moderne en général, dans le sang de la conquête, comme base première d'accumulation de la plus-value.

Nous avons également vu comment le sionisme est né à la fin des années 1870 (avant même que Herzl ne le synthétise idéologiquement) dans un contexte de dépeçage de l'"homme malade" ottoman que venait de vaincre militairement la Russie (Congrès de Berlin 1878) et d'établissement de protectorats sur des territoires entiers (Égypte par l'Angleterre, Tunisie par la France, Bosnie par l'Autriche) ou des communautés particulières de celui-ci (comme les chrétiens du Liban) ; avec l'appui du Grand Capital financier ouest-européen dans un but (encore une fois) de former des bases d'accumulation capitaliste et dans un esprit de culte du "Progrès" et de la "civilisation" que l'Europe et l'Amérique du Nord se "devaient" de faire "rayonner" sur les peuples "sauvages" et "barbares"... Et nous avons vu comment cet esprit créait forcément de grandes affinités avec l'idéologie coloniale et "civilisatrice" bourgeoise spécifiquement française (indépendante d'ailleurs de la forme républicaine des institutions puisque ce n'est pas la république qui règne avant 1792 ni entre 1804 et 1848 et 1852 et 1870, mais qui s'est consolidée sous cette forme et que nous appelons aujourd'hui idéologie républicaine) ; dans son application tant "extérieure" (ultramarine, coloniale)... qu'intérieure ("provinces") ; et que de l'entrechoquement entre cette affinité fondamentale et le fond antisémite historique de la société capitaliste bleu-blanc-rouge procédait le caractère passionnel de la question sioniste/palestinienne en Hexagone.

Nous allons maintenant nous pencher sur quelque chose qui n'a apparemment rien à voir (ce que ne manqueront pas de s'écrier tous les pseudo-"communistes" cartésiens francouilles)... et pourtant TOUT ; ou plus exactement qui illustre de manière parfois hallucinamment frappante cette identité (ou plutôt cette filiation) idéologique. Il s'agit des idées, débats et discours ayant présidé (entre 1750 environ et le Second Empire) à la fameuse mise en valeur des Landes de Gascogne ; discours dans lesquels cette terre occitane est présentée ni plus ni moins que comme un désert d'Afrique ou d'Asie centrale peuplé de Bédouins ou de Tatars mi-hommes mi-bêtes... Les Landais d'alors étaient tout simplement considérés comme un peuple à coloniser, des sauvages paresseux, peureux et lâches, des barbares vêtus de peaux de bêtes et vivant à la limite de l'humanité et de l'animalité dans des tribus arriérées, sur une terre nue et désolée loin de toute civilisation (source)[1]. Une civilisation que l’ère des "Lumières", de la "révolution" bourgeoise et du "progrès" colonisateur s’était justement mise en tête d’apporter à la région.

Une très riche source documentaire à ce sujet est l'ouvrage Histoire de la Forêt Landaise - Du désert à l'âge d'or de Jacques Sargos ; mais il n'est malheureusement pas disponible en version numérisée sur Internet. Il convient donc de lire ce très intéressant article publié sur le site de la revue franco-brésilienne "Confins" :

La transformation des Landes de Gascogne (XVIIIe-XIXe), de la mise en valeur comme colonisation intérieure ?

 

66-27-2267 commensacq la mouleyre bergers echassiers dans lIl faut dire que le paysage offre à cette époque, en effet, un aspect de désolation certain : des derniers vignobles au sud de Bordeaux jusqu'aux rives (barthes) de l'Adour s'étend une immense steppe sablonneuse piquée de bruyères, de genêts, d'ajoncs épineux et de quelques rares arbres ; parcourue de troupeaux de moutons sous la garde de leurs rudes bergers juchés sur leurs célèbres échasses. Un auteur du 19e siècle évoque "pendant l’été la nudité des déserts d’Afrique (et) pendant l’hiver, l’humide et froide surface des marais de Sibérie". La pignada (forêt de pins maritimes) existe déjà depuis des millénaires (l'espèce est endémique de la côte atlantique), mais elle reste généralement limitée (mêlée de feuillus) aux abords des cours d'eau ou des étangs (forêt-galerie) ou encore à certaines zones du littoral (à proximité de Lacanau, Arcachon, La Teste de Buch, Biscarrosse ou en Marensin entre Léon et Soustons) : elle couvre au total moins de 15% du territoire (200.000 ha). L'habitat est extrêmement dispersé : les "villages" consistent en quelques maisons autour d'une petite église et en divers hameaux de quelques maisons eux aussi, à l'ombre de quelques arbres et parfois très éloignés les uns des autres, appelés "quartiers". Sur l'étendue steppique se dressent, isolées de tout, les bergeries aux toits de tuiles (parcs) ou de paille (bordes)... qui deviendront les fameuses "maisons landaises" mais ne le sont alors nullement car le berger, lui, loge dans une sommaire cabane de branchages et/ou de fagots de genêts à côté. Les maigres cultures exigent un harassant travail de fertilisation du sol (principalement avec le lisier des bêtes, ainsi qu'avec de la bruyère), de désensablement et de sarclage des mauvaises herbes ; travail qui, société pastorale oblige, est généralement l'apanage des femmes. La notion de propriété privée individuelle, on l'imagine, est floue : base de l'élevage et donc principale source de revenus, les pâturages sont des "communs" appartenant à la collectivité (mais les cultures le sont parfois aussi !).

big arnaudin-p38

Par contraste, au sud de l'Adour, la riante Chalosse (aux parcelles paysannes bien individualisées depuis plusieurs siècles) fait figure d'"Eldorado" et voue d'ailleurs un mépris souverain à son infortunée voisine ; tandis qu'au nord se tient le richissime Bordelais viticole à l'élite déjà largement francisée. On a là, comme avec les Pyrénées profondes ou encore les Monts d'Arrée en Bretagne, un phénomène typique de périphérisation en cascade où la nation périphérisée (occitane ou bretonne) méprise et relègue elle-même ses parents pauvres, vus comme des êtres à peine humains. Le parler gascon local lui-même est qualifié de "noir" (negre), synonyme de "sale", "rustre", "cul-terreux", par opposition au parler "clair" des terres plus proches de Toulouse ou Bordeaux... C'est d'ailleurs souvent de ces "périphéries privilégiées", de ces "centres relais" comme (principalement) Bordeaux que viendront les plus virulents discours "civilisateurs". Le terme même de "Landes" a une connotation si infâmante que lors de la création des départements en 1790, les notables locaux s'insurgent contre cette appellation pour revendiquer plutôt celle de "département de l'Adour" (qui n'eût pas été illogique il est vrai).

Pourtant cette société agro-pastorale est bel et bien cohérente et viable, permettant de vivre (bien que rudimentairement) au plus grand nombre.  Elle avait même pu, par le passé, jouer le rôle de vaste étendue d'élevage ovin extensif (fournissant laine, viande, lait etc.) dans le cadre de l'ensemble économique ("tributaire") cohérent que représentait encore au 16e siècle la Gascogne d'Albret-Navarre. Son unique problème, alors que le capitalisme s'impose partout et que la bourgeoisie s'apprête à s'emparer - puis s'empare - du pouvoir politique par et pour elle seule (autoproclamée "Nation française"), c'est qu'elle ne permet la valorisation d'aucun capital.[2]

Si le Second Empire (1852-70) parachèvera spectaculairement le processus, c'est donc dès le "Siècle des Lumières" que des "physiocrates" bordelais ou parisiens commencent à faire planter massivement des pins (endémiques et dont la semence coûte alors un prix dérisoire) qui ont l'avantage de fixer et drainer les sols sableux et marécageux (c'est le "grand combat" de l'ingénieur des Ponts et Chaussées Nicolas Brémontier) mais aussi et surtout de produire en grande quantité du bois et de la résine (gemme -> gemmage), matériaux dont l'économie de l'époque et du siècle suivant fait une consommation quotidienne et industrielle (de la construction au chauffage en passant par le papier, les essences diverses pour la résine etc.), offrant par conséquent des revenus considérables aux propriétaires de ces plantations.

GintracLandesAu tout début de la "révolution" bourgeoise, vers 1790, le grand notable bordelais Journu Aubert (membre du directoire de la ville) évoque ces "200 lieues de terrain dans un état de mort", "un trente-sixième de la superficie du royaume" auquel il est plus que temps d'apporter la "civilisation" puisque l'on va bien s'emparer d'"isles lointaines" qui ne "prospèrent qu'arrosées de la sueur des Nègres" et qu'il faut de surcroît défendre contre la convoitise des puissances rivales...[3] C'est bien une logique totalement coloniale qui s'exprime là vis-à-vis de cette terre particulièrement déshéritée de nostra Occitània. Le terme de "colonisation" est même ouvertement employé à l'époque, comme encore en 1849 lorsque naît une Compagnie ouvrière de COLONISATION des Landes de Gascogne (qui tentera une expérience de culture du riz). Le terme revêt alors, à vrai dire, son sens premier et essentiel (et extrêmement valorisant dans le contexte historique) : amener sur un territoire donné les "bienfaits du commerce et de l'industrie", autrement dit du capitalisme ; en arrachant ce territoire à l'arriération... mais en arrachant aussi la grande masse de la population à ses moyens de subsistance immémoriaux pour en faire de purs instruments de la production de plus-value.

[Lire : http://partage-le.com/2018/10/linvention-du-capitalisme-comment-des-paysans-autosuffisants-ont-ete-changes-en-esclaves-salaries-pour-lindustrie-par-yasha-levine/]

On envisage à cette même époque (ou un peu auparavant) l'implantation de colons suisses ou allemands, mais des voix s'élèvent pour invoquer les risques de frictions avec les "indigènes" locaux, en sus du protestantisme des colons en question et des banquiers qui se proposent de les financer (dans une "France" encore largement "fille aînée de l'Église" et dans une région sur laquelle les visées anglaises ne semblent jamais tout à fait éteintes) : le projet est donc finalement abandonné.

La description des habitants, comme l'évoque Sargos dans son livre, mêle alors allègrement "le singe, l'Arabe et le Peau-Rouge d'Amérique", le tout perché sur des échasses qui en renforcent encore l'aspect inhumain. Il n'est d'ailleurs pas exclu par certains, à l’époque, qu'ils descendent réellement de quelques-uns des "Maures" stoppés par Charles Martel à Poitiers en 732 (ce grand et fameux mythe de la construction "nationale" monarcho-bourgeoise "France"). Des pièces de théâtre aux décors de carton-pâte se chargent d'offrir ces pittoresques "sauvages" au divertissement du big arnaudin-p37bourgeois parisien dans ce qui préfigure les expositions coloniales, zoos humains et autres spectacles de Buffalo Bill quelques décennies plus tard... Sauf que les acteurs réellement autochtones sont rares et, de fait, ces "Landais" d'opérette s'expriment plutôt dans ce qui ressemble à un français populaire de la campagne normande, où ils ont plus vraisemblablement été recrutés.

C'est que le Gascon des Landes, tel l'ours dans sa tanière auquel on le compare souvent, est de tempérament casanier. Lorsque la "révolution" bourgeoise instaure la conscription militaire, rien n'est plus difficile que de l'y soumettre et lorsque c'est enfin chose faite, à des années-lumière de tout sentiment patriotique envers la "Grande Nation", "il quitte avec désespoir ses bruyères solitaires et jamais aucune des séductions de la civilisation ne peut le retenir sous les drapeaux au-delà du terme fixé par la loi". Il ignore évidemment tout de la "noble langue" de Montaigne, Racine et Boileau, ne s'exprimant (lorsqu'il s'exprime, c'est-à-dire rarement) que dans son "patois" incompréhensible ; il ignore même (souvent) tout du gouvernement en place à Paris voire de la notion même de France, "étranger à l'empire de toute loi" et même de "toute église", baigné dans ses traditions et ses "superstitions" ancestrales.

Même vu d'Occitanie "utile" (et surtout bien francisée comme il faut...), de Bordeaux, Toulouse, Pau ou Bayonne, il est absolument intolérable pour la bourgeoisie alors triomphante que de tels individus règnent sans partage sur près de 15.000 km² ; à l'heure où il s'agit d'annexer définitivement à la "Nation française" proclamée, autrement dit à la bourgeoisie capitaliste et à la valorisation de son capital, la grande masse des producteurs et de transformer les Peuples (occitan comme breton, catalan comme normand ou picard, corse comme lorrain ou franc-comtois) en "français"/force de travail et les territoires sur lesquels ils vivent en forces productives génératrices de plus-value - le "fluide vital" du capitalisme.

Dans les années 1820, sous le règne des frères "restaurés" de Louis XVI (Louis XVIII et Charles X), naît de l'imagination fertile de deux hommes d'affaires (Joseph du Pau et Eugène Lucet) un projet encore plus hallucinant : ils se proposent tout simplement de constituer une société au capital de 100 millions de francs et d'acheter 750.000 hectares (7.500 km², soit plus de la moitié des Landes !) pour un prix symbolique... à l'État, car ces terres sablonneuses constitueraient selon eux des "lais et relais de la mer" sur lesquels (en vertu d'un principe juridique remontant aux origines de la monarchie franque) aucune collectivité ni aucun particulier n'a de titre de propriété valable ; et de les diviser en quelques centaines de lots de taille égale (plusieurs milliers d'hectares donc) qui seront affermés à des gentlemen farmers prêts à relever le défi de les mettre en culture (et qui pourront éventuellement eux-mêmes big interieur landais2les subdiviser et les sous-affermer). C'est carrément ici un discours de "terre sans peuple" (en tout cas sans peuple légitime) et de "faire fleurir le désert" qui est appliqué à la Gascogne maritime ; exactement le même[4] que dans les hautes plaines du Kansas face aux Cheyennes, dans l'outback australien face aux Aborigènes ou dans les djebels d'Algérie face aux tribus kabyles ; et que l'on retrouvera logiquement dans le sionisme (pur produit de cette époque rapidement enrobé de mythologie biblique...) face à des Palestiniens tout aussi légitimes sur leur terre que les bergers landais à échasses sur la leur - si sableuse et ingrate qu'elle fût. Voilà, à l'attention de tous les petits connards "gauche"-coloniale dont le pro-sionisme honteux le dispute seulement au jacobinisme revendiqué, AU NOM ET SUR LA BASE DE QUOI nous sommes antisionistes, anticolonialistes et anti-impérialistes : tout simplement du fait que l'histoire de notre Peuple comme de tous les Peuples de la planète sous le capitalisme est finalement l'histoire d'une conquête et d'une colonisation au sens premier que nous avons vu plus haut - et nullement au nom et sur la base d'un quelconque "antisémitisme obsessionnel", "anticapitalisme romantique" ou "socialisme français" (surtout "français") ! En parlant de "socialisme français", d'ailleurs, il est intéressant de relever ici combien cet esprit saint-simonien associant "socialisme" et "progrès" façon rouleau compresseur imprègne profondément l'identité de la gauche hexagonale...

Un autre grand bourgeois (et député), bordelais encore une fois, s'éleva cependant contre ce projet en arguant (comme déjà pour les projets de colonisation suisse ou autre) que cela risquerait de rendre la région ingouvernable, qu'il valait mieux s'en tenir au (vieux) projet de canal reliant la Garonne à l'Adour et que c'était avec les Landais et non contre eux qu'il fallait procéder à la mise en valeur et au développement de leur territoire. Il faut dire qu'à l'époque l'Occitanie était championne d'Hexagone toute catégories pour les soulèvements et rébellions collectives contre les forces de l'ordre, que bientôt dans les Pyrénées commencerait la "Guerre des Demoiselles" et que déjà, dans les Landes, se multipliaient les incendies (moins signe de colère, d'ailleurs, que pratique indispensable à l'économie pastorale) contre les pignadas existantes.

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C'est finalement cette vision qui l'emportera quelques décennies plus tard sous le Second Empire, seul le projet de grand canal étant abandonné au profit du chemin de fer - qui a pris son essor entre temps et s'avère de réalisation beaucoup plus commode : ligne reliant Paris à l'"Espagne" natale de l'impératrice en passant par son cher Biarritz, et ligne Bordeaux-Arcachon sous l'égide des (localement) incontournables frères Pereire.

Louis-Napoléon "Badinguet" Bonaparte, élu président par le Parti de l'Ordre en 1848 et devenu empereur quatre ans plus tard après le sanglant coup d'État que l'on connaît (et que l'Occitanie démocrate-socialiste combattit les armes à la main), a en effet pris fait et cause pour le projet "civilisateur" et la conjonction de ceci avec (nous y reviendrons) le début de l'engouement touristique pour le "Sud-Ouest" donne dans les années 1850 l'impulsion décisive, avec tout l'autoritarisme et le dirigisme étatique qui caractérise l'époque : la Loi relative à l'assainissement et la mise en culture des Landes de Gascogne est finalement promulguée le 19 juin 1857. Elle oblige les municipalités à 1°/ assainir les terres communales par drainage, afin d'enlever le surplus d'eau de la partie capillaire de la nappe phréatique et ainsi rendre le sable apte à la plantation, et 2°/ vendre aux enchères les communaux ainsi drainés à des propriétaires privés, à raison d'un douzième chaque année pour ne pas brusquer cette réforme foncière (on a donc suivi les préconisations du baron d'Haussez trois décennies plus tôt). Ces propriétaires ont ensuite à leur charge de rentabiliser les sols achetés par la plantation (la loi n'excluait pas que les communes plantent avant de vendre, mais l'investissement était bien trop lourd). Il n'est pas fait explicitement mention de planter du pin mais, le processus étant déjà enclenché depuis plusieurs décennies, c'est évidemment la culture qui sera choisie dans 99% des cas. C'est le coup de grâce pour la société agro-pastorale dont les communaux (s'il est utile de le rappeler) n'étaient ni plus ni moins que les pâtures, autrement dit le premier ou plus exactement l'unique moyen de production (vu que les cultures végétales avaient elles-mêmes besoin des déjections du bétail). Bien que pendant tout le demi-siècle qui suit la loi de 1857 des voix s'élèvent pour invoquer la nécessité de maintenir l'activité d'élevage, à la veille de la Première Guerre mondiale il ne reste pratiquement plus de pasteurs landais.

big femme resineQuant aux lots mis aux enchères, les notables des villages et autres cultivateurs aisés (il existe tout de même çà et là de bonnes terres...) "bien introduits" auprès des municipalités et/ou des autorités préfectorales (lorsque l'État se substitue aux communes "défaillantes") en seront évidemment les premiers bénéficiaires. En 30 ans, de 1857 à 1887, les deux tiers des communaux des Landes et la moitié de ceux de Gironde sont ainsi vendus ; avant que l'on ne recommence (à la fin du siècle) à reconnaître le droit à une propriété communale et collective... dès lors presque totalement disparue.

C'est donc à l'arrivée, en effet, principalement à des Landais que va profiter la "cocagne" du bois et de la résine... mais au prix d'un creusement terrible (à vrai dire hors de tout schéma de pensée pour les frustes bergers autochtones) des inégalités et de la condamnation à la misère des non-propriétaires de ces "mines d'or vert", qui se recyclent tant bien que mal (plutôt mal que bien...) comme prolétaires ruraux ou métayers (ce qui revient pratiquement au même...) dans la récolte et la transformation des deux matériaux. La démographie d'ailleurs, que les plans "physiocratiques" voyaient croître exponentiellement, tend plutôt à la diminution ; la monopolisation des terres par les grandes pinèdes privant  le reste des habitants de toute ressource et les poussant à émigrer en masse vers les grands centres industriels qui se développent autour de Bordeaux, Toulouse ou Bayonne (ou carrément vers Paris) ; non sans avoir provoqué au préalable des luttes sans merci entre forestiers et éleveurs (avec comme on l'a dit des plantations incendiées etc.) ainsi qu'entre les ouvriers et métayers du gemmage (eux-mêmes souvent anciens bergers) et les propriétaires qui les emploient : http://www.histoiresocialedeslandes.org/landes_modernes.asp.

De fait, si la population du département des Landes augmente de 25.000 habitants (soit près de 9%) entre 1831 et 1866, elle connaît ensuite une diminution de 3,86% jusqu'à la Première Guerre mondiale (contre 10% d'augmentation au niveau hexagonal) et de 4,74% (contre +6,9%) entre les deux guerres. L'"âge d'or" de la forêt de pins est donc aussi et surtout, comme dans toutes les périphéries de l'État français, celui de l'exode rural.

big table soupeLa population restée et (donc) prolétarisée sur place, quant à elle, donne naissance à un très important mouvement syndicaliste, socialiste (surtout) voire (dans une moindre mesure mais quand même) communiste rural ; avec une agitation sociale importante notamment dans les années 1930 (crise mondiale du capitalisme) mais aussi en 1920, ayant laissé à la postérité le Chant des Piquetalos - littéralement "ceux qui ramassent les vers de terre" pour survivre, évocation claire de la misère de ces métayers qui dépendent totalement de leurs propriétaires, auxquels ils versent la moitié du produit de leur récolte et doivent même (en plein 20e siècle !) corvées et redevances en nature ! Bien entendu, la SFIO futur PS et (dans les pas de celle-ci) le PC se chargeront bien comme il faut de pétrir tout cela dans le moule "républicain", secret de l'impuissance du prolétariat hexagonal....

Et puis la "mise en valeur" du pays landais ne se fait de toute façon pas sans une certaine colonisation extérieure, qu'il s'agisse du tourisme qui se développe à partir du Biarritz impérial, de la ville thermale de Dax ou encore de l'Arcachon des frères Pereire, ou du "phalanstère" que le très saint-simonien Louis-Napoléon "Badinguet" établit en 1857 entre Morcenx et Labouheyre et baptise quelques années plus tard du nom de la sanglante boucherie militaire de Solferino, son "petit Austerlitz" à lui. Celui-ci, comme d'autres projets parfois aussi farfelus que l'élevage extensif de... dromadaires, connaîtra un succès pour le moins limité et culmine aujourd'hui à 343 habitants (n'ayant jamais dépassé de beaucoup les 600) ; en revanche, l'on voit nettement se dessiner dès le début de l'exode paysan le systématique "chassé-croisé" entre celui-ci et la villégiature bourgeoise (rares sont les villages qui ne comptent pas au moins un somptueux et... détonnant manoir de la fin du 19e siècle) qui s'est depuis massifiée, la destination étant relativement cheap comparée à d'autres (lotissements de maisonnettes "style landais", campings etc.).

Pins des Landes -04"Ainsi soit-il" : comme (on l'a dit) dans le Grand Ouest américain, en Afrique, en Australie ou en Palestine, la "Marche du Progrès" est triomphalement passée. Le "désert" de genêts et d'ajoncs est devenu forêt d'émeraude... et une société séculaire a disparu à tout jamais, laissant la place à quelques riches sylviculteurs et à des prolétaires peu à peu condamnés à l'exil puis désormais remplacés par des touristes, des résidents secondaires, des retraités pas assez friqués pour la côte provençale ou basque et des "rurbains" de Bordeaux ou de Biarritz-Anglet-Bayonne qui trouvent là un mètre carré un poil plus abordable (s'ils veulent une maison avec jardin pour les enfants) qu'aux abords de ces villes, au prix d'une demi-heure ou une heure de route pour se rendre au boulot le matin. Le moindre des paradoxes n'est sans doute pas que le vignoble bordelais, qui méprisait hier souverainement ce "Désert des Tartares", forme aujourd'hui le "couloir de la pauvreté" aquitain avec un taux beaucoup plus élevé de bas revenus, de chômage et d'exclusion ; toutes choses qui ne sont pas pour autant négligeables dans les Landes du moment que l'on laisse de côté les retraités (relativement) aisés, les gros professionnels du tourisme et les cadres des grandes villes, et que l'on s'éloigne de la côte et des grands axes... La Haute Lande autour de Labouheyre, secteur historiquement parmi les plus déshérités, reste ainsi une "poche" importante de bénéficiaires du RSA.

De fait, l'"âge d'or" de la sylviculture landaise a pris fin à peu près en même temps que les Trente Glorieuses sous l'effet de la crise et de la concurrence mondiale ; le recul du bois dans la construction et l'industrie en général puis du papier comme support de communication, le développement (salutaire) du recyclage etc. etc. enfonçant encore le clou. Du pétrole a été découvert en 1954 à Parentis près de Biscarrosse, mais le gisement s'est vite avéré très limité (il assure aujourd'hui moins d'1% des besoins hexagonaux). C'est véritablement l'industrie touristique qui a pris le relais, en plus comme on l'a dit (depuis une grosse vingtaine d'années) d'un phénomène de "rurbanisation" (dans un rayon de 60 km autour de Bordeaux et Bayonne-Dax) et d'une économie de sous-traitance pour l'activité des "métropoles régionales" facilitée par une nette amélioration du réseau routier (A63 Bordeaux-A63LandesBayonne et A660 vers Arcachon, A65 Pau-Mont-de-Marsan-Langon ouverte en 2010, voie rapide reliant Mont-de-Marsan à l'A63 et Bayonne etc.) ; économie de PME forcément porteuse de beaucoup de précarité pour son salariat. La très contestée ligne à grande vitesse (LGV) Bordeaux-"Espagne", projet pour bourgeois inaccessible aux classes populaires, traversera peut-être bientôt le pays landais ; mais elle ne s'arrêtera de toute façon qu'à Dax (ou dans une gare ex nihilo entre Dax et Bayonne), laissant l'essentiel du territoire sans autre moyen de transport que la voiture personnelle (avec l'indispensable et coûteux sésame du permis de conduire pour la jeunesse).

Nous avons encore là une illustration de ce que nous avons tant de fois exposé : aussi loin que l'on puisse sembler être de la violence qui se déchaîne actuellement en Palestine, ou qui a pu frapper par le passé tel ou tel Peuple hors d'Europe, la logique est la même et nous avons vu combien le discours l'accompagnant peut présenter des similitudes édifiantes ; la société séculaire, collectiviste et solidaire des pasteurs landais a été niée par le développement du capitalisme qui a "plié" le pays et ses habitants aux besoins de la valorisation de son capital (extraction de la plus-value), laquelle est son moteur même. Le capitalisme a apporté le "progrès" et il ne s'agit pas pour nous de dire qu'il aurait "fallu" que les Landes restent dans la misère, l'ignorance, la faim et le paludisme d'il y a trois siècles. Mais ce "progrès" a été apporté, d'abord et avant tout, par et pour les intérêts et le profit de quelques uns (comme toujours avec le capitalisme : c'est sa logique même !) ; conformément à ces intérêts (hexagonaux et pas seulement locaux) et donc irrémédiablement façonné par eux. En d'autres termes et en clair, le "progrès" a été impulsé "d'en haut" (par les détenteurs de capitaux souhaitant valoriser ceux-ci) et non dans une logique de SERVIR LE PEUPLE - ce qui n'est de toute façon pas possible avec le capitalisme, poursuivant l'intérêt personnel privé, mais seulement avec le SOCIALISME où les classes productrices définissent (planifient) elles-mêmes les besoins et le travail nécessaire pour y répondre dans l'intérêt de tou-te-s : "de chacun selon ses capacités, à chacun selon ses besoins".

Aujourd'hui, l'ordre du jour pour l'humanité est de nier le capitalisme par le communisme (à travers le socialisme) et de faire ainsi renaître, quelque part, cette solidarité et ce collectivisme disparus mais À UN NIVEAU SUPÉRIEUR, "avec la fibre optique" en quelque sorte : avec tous les acquis du stade douloureux mais nécessaire pour l'humanité qu'aura été le règne du Capital ! 

Lire aussi :

http://confins.revues.org/6351

http://www.histoiresocialedeslandes.org

http://fr.wikipedia.org/wiki/For%C3%AAt_des_Landes#Histoirehttp://fr.wikipedia.org/wiki/Système_agro-pastoral_dans_les_Landes_de_Gascogne

 

[1] En 1798, Grasset de Saint-Sauveur estimait que "les paysans landais sont peu civilisés ; le genre de vie qu’ils mènent les rend tout à fait rustiques et presque sauvages". Si le trait, pour l’observateur d’aujourd’hui, reste forcé, il essaye néanmoins de nuancer son jugement tandis que d’autres, tel Lamoignon de Courson, sont plus définitifs en affirmant que "[…] les habitants des Landes sont des espèces de sauvages, par la figure, par l’humeur et par l’esprit […]". Ces quelques mots, écrits en 1714 et très largement plagiés par la suite, sont le point de départ de l’histoire du sauvage landais.
En 1839, le vicomte de Métivier (riche propriétaire landais intéressé par la mise en valeur de sa région) ajoute que les Landais s’organisent en "[…] tribus presque nomades ; de ces tribus plus ou moins malheureuses aux yeux de l’homme qui, pour la première fois, visite une nation qui est en quelque sorte une nation à part, de par le physique et le moral de ses individus, ses usages, ses coutumes, ses vêtements, ses peines et ses plaisirs". Une décennie plus tard est encore écrit que "le pasteur landais, être éminemment paresseux, peureux et lâche, préfère de beaucoup le métier inactif qui l'emploie et qui lui rapporte peu à la vie de travail qui le ferait subsister avec aisance. On peut, sans exagérer, dire que cet être à la mine livide et féroce ne pense ni ne réfléchit. On peut soutenir que tous ses mouvements sont purement instinctifs. Juché sur ses tchankes [sic… le k n’est pas nécessaire, ce n’est pas le Pays Basque !], il ne sait faire que l'ouvrage des femmes. Il ne rougit point de tricoter [on apprécie au passage l’esprit ultra-patriarcal de l’époque, et l’on observe comment la division sexuelle du travail n’était pas encore si complète dans cette société archaïque, les femmes accomplissant quant à elles des travaux "d’hommes" dans les champs]. Complètement dépourvu d'intelligence, passé par ses fonctions à l'état de brute, il représente probablement l'intermédiaire tant cherché de l'homme et du singe. Sa constitution physique tient du crétinisme. On peut en trouver les causes dans la perversité de ses mœurs, qu'on ne pourrait trouver plus abominables en aucun pays ni en aucun temps. Du reste, s'il est devenu crétin par état et par vice de conformation, il est cruel, barbare et sans pitié. Gardez-vous de l'offenser : il devient alors une bête fauve, n'épargnant ni les femmes ni les enfants" (Gabriel Bouyn, 1849)

[2] Pour le baron d'Haussez (1826), successivement préfet des Landes puis de Gironde, deux causes contrariaient la mise en valeur de la région, à savoir "la nature des propriétés et le caractère des habitants". En plus de l’immigration (ou plutôt de la colonisation de peuplement !) et du métissage (pour "gommer" le fameux "caractère" vu comme une tare génétique...), il proposait "l’aliénation des landes communales" comme seul moyen de remédier "à de si graves inconvénients". Ainsi "face au plus puissant des intérêts, l’amour de la propriété, [le] déplorable régime de communauté, dernier vestige des siècles de barbarie [qui] asservit encore ces plaines immenses" disparaîtrait. Dès lors, il résume un point de vue largement partagé lorsqu’il affirme que "bien des choses restent à faire avant que, dans la contrée des Landes, on ait placé la civilisation à la hauteur où elle est parvenue dans le reste de la France".

[3] "Il ne s’agit pas moins de que de rendre la vie à deux cents lieues de terrain dans un état de mort. [...] C’est vraiment là une conquête digne d’un peuple qui a renoncé solennellement à celles que l’on n’obtient que par effusion de sang. [...] Puisque la plus grande ambition des peuples et des individus est d'étendre constamment leurs domaines, pourquoi hésitons-nous à prendre, pour ainsi dire, possession de celui-là, à mettre en valeur une portion même de l’intérieur du royaume."

[4] Voici ce qu’écrit un auteur alors que commence la phase finale et "radicale" de la mise en valeur : "40 lieues [les 160 km séparant Bordeaux de Bayonne] de désert plus inconnues que les savanes lointaines du Missouri ou que les solitudes de l’Afrique Centrale, [dont les bergers] sont les Arabes ou les Indiens de nos landes" [...] "ce grand désert sablonneux, le Sahara de la France […] attend leur dépouille, et doit recouvrir bientôt ces derniers sauvages destinés sans doute à disparaître. La civilisation, en effet, les chasse devant elle, comme le fait aux États-Unis la colonisation américaine" (Henry Ribadieu, 1859)
http://confins.revues.org/6351

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3 mai 2014 6 03 /05 /mai /2014 11:43

bandeau CC PCR-Òc

Pour les élections européennes du 25 mai prochain, dans la circonscription Ouest, nous retirons la consigne générale d'abstention pour la liste NPA-Breizhistance "Pour une Europe des Peuples et des Travailleurs". Les raisons données par la Gauche indépendantiste bretonne pour cette candidature sont convaincantes et remplissent les conditions que nous avions posées pour nuancer au cas par cas notre appel au boycott : ne pas semer les illusions sur la nature de l'UE, de ses institutions (le Parlement européen est qualifié textuellement de "façade démocratique sans pouvoir") et de sa possibilité de "changer de l'intérieur", sur la nature de l'État français prison des Peuples et bras armé du Capital + clair progressisme bien sûr. La nature de classe de la tête de liste (NPA) Pierre Le Ménahès, ancien ouvrier d'usine à la retraite, est évidemment un autre point que nous percevons positivement.

Cela signifie que sans nous faire d'illusions ni sur un gros score, ni sur la capacité d'éventuels élus d'influer réellement sur le cours des choses au sein d'un Parlement européen pur "cache-sexe" "démocratique" des décideurs au service du Capital (ni plus ni moins que nos "braves" ministres de chaque État membre, régulièrement réunis en "petit comité" !), nous aurons une appréciation positive (comme embryon de conscience populaire révolutionnaire et libérationiste) de chaque suffrage qui se portera sur cette liste. Chaque localité lui offrant un score notable signifiera pour les communistes authentiques, les communistes de libération révolutionnaire des Peuples, un terreau sur lequel mener un intense travail politique d'agitation révolutionnaire, et une potentielle base rouge pour la Guerre populaire que nous voulons et devons mener demain.

Petite présentation ici : NPA-Breizhistance pour l'Europe des travailleurs et des peuples et ici : Liste commune NPA-Gauche Indépendantiste Bretonne.

Présentation du programme et des candidats : Présentation du programme et de la liste « Pour une Europe des peuples et des travailleurs »

NPA-Bzhistance.jpg

Le Comité étudiera au cas par cas d'autres éventuels retraits de la consigne générale d'abstention.


Post Scriptum : en Corse l'organisation de gauche radicale "A Manca" ("La Gauche"), un temps "branche locale" du NPA avant de prendre ses distances en 2012, appelle clairement au boycott : Européennes 2014 : mieux que les élections, expulser le capitalisme ! ("Pour notre part, nous avons cru un temps que ces élections pouvaient constituer une tribune. Force est de constater que les travailleurs rejettent ce système. Ils le font, encore pour l’heure, de manière passive en s’abstenant. Une partie y participe en usant de votes qu’ils croient anti- système et qui profitent à l’extrême- droite. (...) Nous appelons les travailleurs, les chômeurs, les retraités et l’ensemble de celles et ceux que ce système écrase à ne pas participer aux prochaines élections européennes").

Dans la même circonscription Sud-Est dont dépend la Corse se présente une liste "Régions & Peuples solidaires" dirigée par François Alfonsi, membre du Parti de la Nation corse et député européen EELV, avec des Occitans (Partit Occitan), des Arpitans (Mouvement Région Savoie) et des Imazighen ("Berbères") de cette importante colonie intérieure. Nettement plus "bourgeoise", cette liste ne remplit pas à notre sens les conditions pour lever la consigne de boycott ; nous serons cependant attentifs à ses résultats (comme expression d'un "mouvement de fond" sur une ligne qui demeure non-réactionnaire).


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11 avril 2014 5 11 /04 /avril /2014 14:15

 

Alors que l'entité fRance célèbre dans les larmes de crocodile "l'année du centenaire" de la Grande Boucherie de 14-18, faisant mine de pleurer les victimes des "horreurs de la guerre" d'hier pendant que continuent à tomber comme des mouches celles de l'impérialisme d'aujourd'hui (on pense en particulier à la Centrafrique où l'armée impérialiste BBR est en train de couvrir d'abominables massacres, 20 ans après le génocide rwandais dont elle est exclue des commémorations par le gouvernement local ce qui est une excellente chose !), une exposition revient sur le sort très particulier des "provinciaux" périphérisés durant le sinistre conflit ; sur le mépris – omniprésent à l'époque – de ces "Méridionaux" occitans "paresseux" et "lâches", "rouges" et "boulets de la France", mépris qui aura cette fois – dans l'hystérie militariste bleu-blanc-rouge – des conséquences funestes ; ainsi que sur le rôle sanguinaire des TRAÎTRES ET VENDUS "méridionaux" comme le "catalan" Joffre – mais la liste des Occitans dans ce cas  est elle aussi longue : les Foch, Gallieni, Nivelle etc. ; car ainsi que l'écrivait Jules Michelet dans les années 1840, "dans le Midi, les gens aisés du moins sont français", tandis que "le petit peuple est tout autre chose, peut-être espagnol ou maure".

Si vous êtes ou passez en Provença, nous vous invitons vivement à faire un tour à cette exposition hélas (et volontairement de la part de l'ordre BBR) confidentielle ; car c'est en se réappropriant ce genre de mémoire que les Peuples travailleurs d'Hexagone (pas seulement les Occitans), dont l'entité fRance (aujourd'hui "République une et indivisible" des monopoles capitalistes) se repaît de la chair (à canon) et de la force de travail depuis des siècles, pourront forger leur compréhension révolutionnaire du système d'oppression dans lequel ils vivent et forger les armes de la solution : la Guerre populaire, la Révolution prolétarienne qui, dans l’État multinational/ Prison des Peuples "français", veut dire la Libération révolutionnaire des Peuples enchaînés (LRP) !

Petite présentation :

1914, la tragique histoire d’une injustice militaire, une erreur de stratégie menant à l’exécution de deux soldats méridionaux. À l’occasion du centenaire de la Grande Guerre, les Archives départementales présentent documents, objets et équipements… En parallèle, on trouve les planches originales de la bande dessinée La Faute au Midi, signées par le dessinateur A. Dan et l’historien Jean-Yves Le Naour.

Une Histoire oubliée

Les soldats provençaux du XVe corps sont engagés lors d’une des premières grandes batailles opposant les Français aux Allemands. Mais l’ennemi attire tout simplement les Français sur le terrain qu’il a fixé comme champ de bataille, avec une artillerie dont les tirs sont réglés à l’avance. Les troupes se font massacrer par un déluge d’obus et de mitraille, sans même voir un seul soldat ennemi.

Si les Méridionaux abandonnent 10 000 morts sur le terrain, ils sont pourtant bientôt accusés d’être les responsables de la défaite. La rumeur se répand, orchestrée par le généralissime Joseph Joffre et le ministre de la Guerre Adolphe Messimy, que les soldats de « l’aimable Provence » auraient lâché pied devant l’ennemi. La tempête gagne alors toute la France : les soldats méridionaux sont désormais diffamés par la propagande officielle. 

 L’Exposition

Cette exposition revient sur cette blessure longtemps à vif : en partant de la mobilisation, elle évoque la violence des premières batailles, quand les soldats français découvrent la guerre industrielle et la puissance du feu.
L’accusation de lâcheté des Méridionaux révèle ensuite un racisme intérieur qui ne date pas de 1914. A l’heure de la construction de l’identité nationale, au XIXe siècle, le Méridional est apparu comme le contretype du bon Français, un individu souvent grossier, parfois imbécile, toujours ridicule, vantard et outré. Bref, un Tartarin !
Cette exposition aborde enfin le thème des fusillés qui ont également hanté la mémoire de la Grande Guerre en suivant la tragédie de deux soldats du XVe corps, Auguste Odde et Joseph Tomasini.

L’exposition est articulée en plusieurs sections qui reprennent tout à la fois les planches de la bande dessinée et les documents divers (affiches, objets, photographies) retenus pour illustrer l’histoire des soldats du XVe corps et de leur légende noire. 

 Archives et bande dessinée

Ce partenariat avec les Archives départementales des Bouches-du-Rhône démontre une fois de plus la plasticité de la bande dessinée, sa capacité à traiter tous les sujets, toutes les disciplines et son aptitude à intégrer des documents et des objets hétérogènes.
Chaque année, l’exposition est associée à une série de rencontres entre les auteurs et le public dans le réseau de la Bibliothèque départementale de prêt.

Centre aixois des Archives départementales des Bouches-du-Rhône

25 allée de Philadelphie - Aix-en-Provence

04 13 31 57 00

Du 24 mars au 5 juillet

 

la faute au midi1la faute au midi2

C'est ainsi que, unis avec tous les autres cercles de la domination impériale (néocolonies d'Afrique, dernières colonies des Caraïbes, de l'Océan Indien et du Pacifique, colonies intérieures des "territoires perdus" de la République bourgeoise de merde), nous renverserons dans un torrent de feu et de joie cet État pilier du G7 et du G20, de l'Union européenne et de l'OTAN, bref de l'impérialisme mondial ! 

Lire aussi, pour s'en rappeler tout au long de cette "année du centenaire", notre Déclaration du 11 Novembre :

Comité de Construction pour le Parti communiste révolutionnaire des Terres d'Òc : Déclaration du 11 Novembre

 

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17 mars 2014 1 17 /03 /mars /2014 09:53

 

Cet article a été publié sur Mediapart (juin 2013) et mérite d’être reproduit ici. Cela fait longtemps que ces fumeuses théories sévissent, aussi bien dans les milieux républicards-bleu-blanc-rouge de droite et d’extrême-droite (voir ici la position de Marion Maréchal-Le Pen sur les langues ‘‘régionale’’ à l’Assemblée, et ici les positions du FN en général) que (voire surtout) dans le milieux de ‘‘gauche’’ (l’inénarrable Mélenchon et ses copains/copines à la Françoise Morvan etc.) voire d’‘‘extrême-gauche’’ (POI trotskyste ou PRCF ‘stalinien’, CNT-AIT ‘libertaire’ etc., sans oublier bien sur le ‘p’‘c’‘mlm’ ‘maoïste’), revivant chaque nuit en rêve Valmy et l’An II, purs héritiers de la Libre Pensée, du petit père Combes et du Parti radical de la IIIe République ; sans parler bien sûr des traditionnelles passerelles entre les deux, qui ont toujours existé. On a notamment pu le voir lorsque la périphérie Breizh-Izel s'est levée en masse contre sa périphérisation l'automne dernier...

Nous avons déjà écrit dans nos pages que la théorie du ‘‘complot de l’étranger’’ est une constante de l’idéologie bourgeoise francouille depuis que Waterloo (1815) a mis fin à l’hégémonie européenne et quasi-mondiale de l’entité France (‘‘la fin de la France des 130 départements’’ dixit ce brave Zemmour...). Des thèses profondément fascistes mais qui, sous la plume d’‘‘intellectuels de garde’’ de la ‘‘Sainte République’’ se voulant ‘‘de gôôôôche’’ et comme pour donner raison posthume à (ce que n'a en réalité jamais dit) sir Winston Churchill (‘‘les fascistes de demain se diront eux-mêmes antifascistes’’), se parent allègrement de reductio ad hitlerum à tour de bras (comme si, on l’a déjà dit, la France n’avait pas elle-même fait Hitler par son traitement de l’Allemagne après la Première Guerre mondiale !).

 

francoise-morvanEn réponse au texte de Françoise Morvan publié en avril dernier sur Mediapart, l'historien Jean-Pierre Cavaillé critique la théorie du complot ethniciste de la Charte européenne des langues régionales et minoritaires développée par quelques auteurs. « Ainsi, derrière tout acte militant non seulement en faveur de la ratification de la charte, mais tout aussi bien pour la reconnaissance voire même la transmission des langues minorées, c’est le spectre de l’ethnicisme qui tirerait les ficelles. »


Rien n’est plus intéressant à étudier, mais aussi rien n’est plus terrible à subir que les théories conspirationnistes, car leur reconstruction de la réalité, à la fois délirante et hyperlogique, qui exploite la peur et attise la haine –ces passions tristes qui sont le poison de la politique–, possède un pouvoir considérable de persuasion dont les effets sont toujours nocifs. Les exemples ne manquent pas : les jésuites tramaient l’assassinat des rois de France ; ce sont les francs-maçons qui ont engendré dans l’ombre la Révolution française ; les juifs complotent pour dominer le monde ; c’est la CIA qui a manigancé les attaques du 11 septembre, etc., etc.

En France (car il s’agit d’une théorie nationale, guère exportable), nous sommes confrontés à une théorie du complot anti-européenne et antigermanique, selon laquelle l’Europe, avec toutes ses institutions, ne serait rien d’autre que la couverture d’une politique secrète pangermaniste visant à rien de moins que la destruction des autres États nations –et en particulier de la France– au profit d’une Allemagne triomphante. Ainsi l’Europe serait-elle le brasier des États qui fait renaître le phénix du Reich des cendres du nazisme.

L’Allemagne triomphante 

Yvonne Bollmann est l’une des représentantes majeures de cette théorie, obsédée par la soi-disant germanisation de l’Alsace et ce que l’on pourrait appeler la « question allemande » [1]. Ses arguments sont à ce point caricaturaux que je me suis toujours demandé comment elle pouvait être prise au sérieux par les universitaires qui l’invitent dans leurs colloques à prétention scientifique. Dans le cadre de cette théorie générale, Bollmann et quelques autres auteurs (en particulier Lionel Boissou, Pierre Hillard, Françoise Morvan) développent la théorie locale du complot ethniciste de la Charte européenne des langues régionales et minoritaires, selon laquelle cette charte, les institutions qui l’ont portée (en particulier le Conseil de l’Europe), les vingt-quatre pays qui l’ont signée et ratifiée et tous ceux qui militent en France pour sa ratification, sont ou partisans ou dupes d’une conception politique racialiste et ethniciste, et travaillent en sous-main à l’édification d’une Europe des Volksgruppen, c’est-à-dire des ethnies et des tribus, grâce à laquelle l’Allemagne s’apprête à imposer sa domination impériale retrouvée. Soit, pour le dire avec Bollmann, « la Charte des langues est une chose allemande, inspirée par l’ethnisme, à l’opposé de la culture politique propre à la France, et destinée à la détruire » (table ronde du 14 mai 2004 organisée par François Taillandier, avec Michel Alessio, Yvonne Bollmann et Henri Giordan).

Ainsi, derrière tout acte militant non seulement en faveur de la ratification de la charte, mais tout aussi bien pour la reconnaissance voire même la transmission des langues minorées, c’est le spectre de l’ethnicisme qui tirerait les ficelles. L’ethnicisme, à son tour, est entendu de manière univoque, dans cette reductio ad hitlerum systématiquement pratiquée par cette logique paranoïaque, comme crypto-racialisme et « donc », in fine, crypto-nazisme... Nous, qui œuvrons pour la ratification, serions « donc », en dernier recours, des nazis sans le savoir, encore que de multiples arguments pseudo-historiques soient déployés pour montrer que nous ne sommes dupes qu’à moitié, et donc à moitié, voire tout à fait complices du complot.

9782755401998Cette thèse délirante, selon laquelle la reconnaissance des langues minoritaires est le cheval de Troie d’une Europe ethnique (et allemande !), n’est pas nouvelle ; à parcourir les sites, les blogs et les forums, elle semble assez largement partagée dans les milieux souverainistes et libres penseurs (Réseau Voltaire, Libre Pensée, Riposte Laïque, Comité Valmy…). Au-delà, elle est instrumentalisée par beaucoup de ceux qui sont hostiles, non seulement à la ratification de la Charte, mais à toute reconnaissance des langues minorées. On la trouve énoncée jusque dans des revues universitaires comme Hérodote (voir à ce sujet, mon post de décembre 2007 : Hérodote radote. Langue et nation en France). Le combat mené contre les écoles associatives bilingues exploite aussi volontiers l’idée d’un complot du « communautarisme » contre l’école française de la République (voir, ici, l’Odieux complot de Calandreta dévoilé par les héros de l’école publique). Sauf que, dans ce cas, ce serait le libéralisme économique et le grand capital qui tireraient les ficelles et non plus l’Allemagne, mais il suffit de mettre en avant la promotion allemande du libéralisme pour associer les deux entités maléfiques derrière toute initiative, quelle qu’elle soit, en faveur de nos langues. Du reste, certains, comme Pierre Hillard, ont ajouté un chapitre au grand récit du grand complot en expliquant que les États-Unis ont pris le relais de l’Allemagne dans cette opération de destruction des États européens visant à imposer partout l’économie libérale sans plus aucune résistance (« Washington considère comme prioritaire de priver les Européens de leurs États pour mieux les faire entrer dans un libre-marché globalisé », article de P. Hillard, sur le site du Réseau Voltaire, se proposant de montrer que « Les Verts sont partisans d’une Europe des Ethnies »).

Ainsi, l’écho de la thèse complotiste contre les langues régionales est-il beaucoup plus large et ce n’est pas sans une certaine stupeur que je l’ai trouvé exposé dans sa forme la plus pure par Françoise Morvan, passionaria des opposants au mouvement breton [2], « invitée » par la rédaction de Mediapart à présenter et défendre son point de vue, dans un article intitulé Contre la charte des langues régionales. Je vous invite à le lire, car il s’agit d’un chef d’œuvre du genre. Chef d’œuvre sans doute, car, pour étonnant que cela puisse paraître, j’ai entendu des avis embarrassés, voire positifs sur ce texte, jusque dans les milieux occitanistes [3].

Histoire du complot 

C’est que, en faisant explicitement fonds sur les travaux de Bollmann et de Boissou, Morvan appuie son argumentaire sur « l’histoire » ; l’histoire du complot ethniciste ou, comme elle l’appelle, du « lobby ethniciste européen ».

FNlanguesIl reviendrait à la FUEV (Föderalistische Union Europäischer Volksgruppen), encore dite UFCE (Union fédéraliste des communautés européennes [4]), aujourd’hui FUEN, d’avoir « concocté » et « rédigé » la Charte pour le Conseil de l’Europe : ainsi celle-ci est-elle « une arme de guerre contre les États-nations (et en premier lieu la France) ». Cette ONG fondée en 1949 serait, selon Françoise Morvan et les autorités auxquelles recourt celle-ci (Bollmann et Boissou), un réseau pangermaniste aux relents nazis. Ainsi la Charte serait-elle, en sous-main, un cheval de Troie ethnique visant, on l’a déjà vu, à la destruction des États nations. D’ailleurs, elle dévoilerait ses intentions cachées en octroyant des droits spécifiques à des groupes de citoyens –raison invoquée par le Conseil constitutionnel français pour bloquer sa ratification– ; la reconnaissance de ces droits collectifs ouvrant grand le chemin à l’affirmation ethnique. 

La critique du complot est la preuve de son existence

Le propre des théories complotistes consiste à développer des scénarios d’explication hyper-rationnelle à partir d’éléments isolés ayant un degré minimal de validité ou de probabilité liés les uns aux autres dans un système d’une cohérence infernale. Le complot, comme l’a bien analysé Pierre-André Taguieff (L'Imaginaire du complot mondial), est irréfutable, toute preuve visant à démontrer que le complot n’existe pas étant immédiatement renversée en preuve de son existence. Bien sûr, dans cette logique paranoïaque, ceux qui s’engagent dans cette voie de la déconstruction du pseudo-complot, comme je le fais ici, ne font rien d’autre que de « prouver » en fait qu’ils font partie des comploteurs. Taguieff a repéré quatre principes dans cette logique irréfutable : « rien n’arrive par accident ; tout ce qui arrive est le résultat d’intentions ou de volontés cachées ; rien n’est tel qu’il parait être ; tout est lié, mais de façon occulte. »

400px-SpeakFrenchBeCleanPourtant, le démontage de la logique conspirationniste est absolument nécessaire, vital pour le combat que nous menons, qui vise à affirmer haut et fort que les locuteurs des langues minorées ont droit à la reconnaissance culturelle et institutionnelle sans laquelle l’existence même de ces langues et des formes culturelles auxquelles elles sont associées se trouve purement et simplement niée. À ce titre, la Charte européenne a longtemps constitué pour nous, particulièrement en France, où il est si difficile de se faire entendre, une attente, un espoir. Quoi que nous dirons en sa faveur, les conspirationnistes nous répondront toujours et invariablement que derrière l’engagement pour les langues, nous cherchons à promouvoir secrètement une Europe des micro-nations, des ethnies, des races et des tribus sous domination allemande. Mais le bon sens n’est pas conspirationniste, il ne saurait l’être, il sait que nous vivons dans un monde contingent où l’accidentel, l’inattendu ne cesse de survenir, de troubler la carte et compromet souvent les complots les mieux ourdis (car il serait absurde évidemment de nier l’existence de cette forme de prise de pouvoir aussi vieille que l’action politique). Nous savons que les seules intentions et les volontés que nous pouvons prêter aux acteurs sont celles qui, d’une façon ou d’une autre, se déclarent dans les discours et dans les actes (autrement dit les spéculations sur ce que les acteurs pensent au fond d’eux-mêmes sont nulles et non avenues et conduisent d’abord à leur faire dire ce que nous voulons) ; nous savons qu’il est absurde de diviser la réalité historique entre un monde d’apparences fallacieuses et une réalité vraie strictement dissimulée ; nous voyons bien qu’il est faux de penser qu’un système de liens occultes unit tout ce qui arrive dans les affaires humaines ; si cela était le cas, la réalité serait autrement mieux ordonnée qu’elle ne l’est !

Lire la suite

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Sur cette question des langues "régionales", lire aussi : Comment les langues du Peuple ont été rendues illégitimes - très bon article d'une occitaniste universitaire montpelliéraine rappelant ces évidences que "la Révolution de 1789 est une révolution bourgeoise, et les républiques qui l’ont suivie le sont tout autant" (ce qui fait toute sa différence avec la Révolution bolchévique de Lénine, ouvrière et paysanne) ; et que "ce qui est en jeu est fondamentalement d’ordre social" : "supprimer le « patois », c’est ôter un écran entre les masses et la parole normative des nouveaux maîtres", lesquels pensent "non sans naïveté" que "quand ils (les masses travailleuses) parleront comme nous (les bourgeois), ils penseront comme nous et ne bougeront que dans les limites que nous leur fixerons"...

 

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9 mars 2014 7 09 /03 /mars /2014 17:07

 

Le 9 mars 1954 naissait Robert Gerard "Bobby" Sands, combattant héroïque de la Liberté et de la République irlandaise. Embastillé par l'Empire britannique dans un sinistre "H-block" de Long Kesh, il y donnera sa vie le 5 mai 1981 pour la cause républicaine, après 66 jours de grève de la faim.

Les Empires et leurs mercenaires peuvent tuer les révolutionnaires et les vendus à la Gerry Adams trahir leur mémoire ; mais nous savons tous et toutes qu'ils ne peuvent pas tuer la Révolution.

Le jour est proche où les murs des États-Prisons des Peuples s'abattront dans une clameur de joie qui s'élèvera jusqu'au ciel.

Visca Occitània libre e anticapitalista !

Saor agus sóisialach Éire !

L'ora es venguda ! Tiocfaidh ár lá !

bobby sands mural in belfast3209
"Notre vengeance sera le rire de nos enfants"
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  • : Servir Le Peuple : le blog des Nouveaux Partisans
  • : Retrouvez SLP sur son nouveau site http://servirlepeupleservirlepeuple.eklablog.com/ Servir Le Peuple est un média COMMUNISTE RÉVOLUTIONNAIRE, marxiste-léniniste-maoïste, visant par la RÉFLEXION, l'INFORMATION et l'ÉDUCATION POLITIQUE ET CULTURELLE de masse à favoriser la renaissance du mouvement communiste révolutionnaire dans l'État français et le monde francophone.
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Les articles des derniers mois :

Retrouver Servir le Peuple sur son NOUVEAU SITE
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novembre 2014
octobre 2014
septembre 2014
août 2014
juillet 2014

Retrouver Servir le Peuple sur son NOUVEAU SITE
servirlepeuple.eklablog

DOSSIER PALESTINE (conflit de juillet 2014) :
Sionisme, islamisme et ennemi principal : quelques précisions
Post-scriptum important : le cas Feiglin
Le sionisme, "fils de France"
Au cas où il serait utile de le préciser...
Deux clarifications importantes
Flash info en direct : ils ont semé la hoggra, ils ont récolté l'Intifada !
Flash info - importance haute : la manifestation pro-palestinienne de demain à Paris est INTERDITE
Le problème avec la Palestine...
Grande manif contre les crimes sionistes à Paris (13/07)
Magnifique manifestation pour la Palestine à Tolosa, capitale d'Occitanie occupée
Petites considérations sur le sionisme et l'identification-"obsession" palestinienne
Considérations diverses : une mise au point nécessaire sur nos positions internationalistes et aux côtés des Peuples

juin 2014

POSITION DES COMMUNISTES RÉVOLUTIONNAIRES DE LIBÉRATION OCCITANE SUR LES ÉLECTIONS MUNICIPALES ET EUROPÉENNES DES PROCHAINS MOIS

L'affaire Dieudonné-Valls :
Plutôt bon article sur la ‘Déclaration de guerre de la République à Dieudonné’ (la pseudo-controverse réactionnaire entre l’antisémite dégénéré et les gardiens du temple républicain)
Quelques mises au point complémentaires (et conclusives) sur la ‘‘question Dieudonné’’ (et Dreyfus, le Front populaire, l’antisémitisme etc.)
Réflexion théorique : loi Gayssot, lois antiracistes et "mémorielles", "antifascisme" bourgeois etc., quelle position pour les communistes ?

Dossier Breizh :
Breizh : comment l'étincelle écotaxe a mis le feu à la lande
"Esclave", "identitaire", chouan, cul-terreux arriéré de service : pour paraphraser Césaire, "n'allez pas le répéter, mais le Breton il vous EMMERDE"
Considérations diverses – en guise de ‘‘petit debriefing’’ de ces derniers mois : Bretagne, fascisme, ‘‘Lumières’’ et Kaypakkaya… (point 1)
Considérations diverse (26/11/2013) : eh oui, Servir le Peuple a toujours quelques petites choses à vous dire ;-) (point 1)
Appel de la gauche indépendantiste bretonne (Breizhistance) pour le 30 novembre (avec notre critique de la position du ROCML)
Le Top Five des drapeaux qui n'ont PAS été inventés par un druide nazi  (mortel !)
Et en guise (provisoire) de conclusion : La Gauche indépendantiste bretonne revient sur la mobilisation de Karaez/Carhaix

Comité de Construction du PCR des Terres d'Òc : Déclaration du 11 Novembre

La phrase du moment :

"La tyrannie cessera parmi mon peuple ; il n'y aura que liberté, liberté toute nue, sans déguisement. Bouleversements d’États entiers : je les renverserai de fond en comble, il n'y aura rien de reste. Il va y avoir de terribles renversements de conditions, de charges et de toutes choses. Je veux faire un monde nouveau, je veux tout détruire. Je veux appeler à moi la faiblesse, je veux la rendre forte. Pleurez gens du monde, pleurez grands de la terre, vos puissances vont tomber. Rois du monde, vos couronnes sont abattues !"

Élie Marion, "prophète" et guérillero camisard cévenol, 1706.

Amb l'anma d'un Camisart, Pòble trabalhaire d'Occitània endavant !

 

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État français : 

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À l'Est, du nouveau : 

Grèce :

  • KOE ('maoïsant', allié à la gauche bourgeoise SYRIZA, en anglais) [dissous dans SYRIZA en 2013, publie maintenant Drómos tis Aristerás, en grec]
  • KKE(m-l) (marxiste-léniniste 'maofriendly', partie en anglais, le reste en grec)
  • ANTARSYA (Coordination de la gauche anticapitaliste pour le renversement, avec des trotskystes, des 'maos' etc., en grec)
  • ANTARSYA - France (site en français)
  • Laïki Enotita ("Unité populaire") - France (en français et en grec, scission anti-capitulation de SYRIZA, pour s'informer)
    EKKE (Mouvement communiste révolutionnaire de Grèce, 'maoïsant' et membre d'ANTARSYA, présentation en anglais, le reste en grec)

Karayib (Antilles-Guyane) & Larényon (Réunion) okupé : 

Monde arabe / Résistance palestinienne :

État turc / Kurdistan : 

  • Maoist Komünist Partisi (PC maoïste de Turquie/Kurdistan-Nord)
  • DHKP-C (ML, tendance 'guévariste')
  • TKP/ML (maoïste)
  • MLKP (ML, site francophone)
  • ATİK (Confédération des Travailleurs de Turquie en Europe, maoïste, en anglais)
  • Nouvelle Turquie (information et soutien à la Guerre populaire et aux luttes, en français) [ancien blog]
    Nouvelle Turquie (nouveau site)
  • YPG (Unités de Protection du Peuple, Kurdistan "de Syrie", en anglais)
    PKK (Kurdistan "de Turquie", site en anglais)
    PYD (Parti de l'Union démocratique, Kurdistan "syrien", site en anglais)
    ActuKurde (site d'information en français)

Afrique :

Asie & Océanie :

Antifa :

Action Antifasciste Bordeaux (plus mis à jour, mais "cave aux trésors")

AA Alsace (idem)

Union Révolutionnaire Antifasciste du Haut-Rhin (URA 68, page Facebook)

Collectif Antifasciste Paris - Banlieue

Action Antifasciste Paris - Banlieue

Montpellier Antifa

Collectif Antifasciste 34

Collectif Antifasciste Rennais (AntifaBzh)

Cellule Antifasciste Révolutionnaire d'Auvergne (CARA, page Facebook)

Carcin/Quercy Antifascista (page Facebook)

Occitània Antifascista (page Facebook)

Breizh Antifa (page Facebook)

Perpignan Antifa (page Facebook)

Action Antifasciste de Pau

Union Antifasciste Toulousaine

Ipar Euskal Herria Antifaxista (Pays Basque du Nord antifasciste)

REFLEXes - site d'informations antifascistes

La Horde, portail d'information antifa

Rebellyon - rubrique "Facho"

Redskins Limoges

Droites extrêmes - blog Le Monde (site d'information bourgeois bien fourni, parfait pour le "watch")

Document : Ascenseur pour les fachos (série de 6 vidéos Youtube, Antifascisme.org, site social-démocrate)

 

Guerre pop' - Asie du Sud :

Inde Rouge (nouveau site "officiel" francophone)

Comité de Soutien à la Révolution en Inde

Comité de solidarité franco-népalais

Fil d'actu "Inde - Népal" du Secours Rouge - APAPC

J. Adarshini (excellent site en français)

Revolution in South Asia (en anglais)

Maoist Resistance (guérilla maoïste indienne - en anglais)

NaxalRevolution (Naxalite Maoist India, en anglais)

Banned Thought (en anglais)

Indian Vanguard (en anglais)

The Next Front (Népal - anglais)

Signalfire (sur la GPP en Inde et aux Philippines, le Népal et les luttes populaires dans le monde - en anglais)

Communist Party of India (Marxist-Leninist) Naxalbari (a fusionné avec le PC d'Inde maoïste le 1er mai 2014)

New Marxist Study Group (maoïste, Sri Lanka)

Parti communiste maoïste de Manipur (page Facebook)

 

Guerre pop' - Philippines :

Philippine Revolution (en anglais)

The PRWC Blogs

(tous deux remplacés apparemment par ce site CPP.ph avec notamment les archives d'Ang Bayan, l'organe officiel du Parti)

Solidarité Philippines

Fil d'actu "Philippines" du Secours Rouge - APAPC

 

Guerre pop' & Luttes armées - Amérique latine :

CEDEMA - actualité des mouvements armés en Amérique latine (+ qqs documents historiques)

 

Nuevo Peru (Pérou, basé en Allemagne, en castillan et allemand principalement)

Guardias Rojos (Pérou, page FB)

Fil d'actu "Amérique latine" du Secours Rouge - APAPC

Archives

Autres documents théoriques

 

Récapitulatif des "grandes thèses" de Servir le Peuple


À lire également, les Considérations Diverses, petits "billets" trop courts pour faire un article et donc regroupés par trois, quatre ou plus, exprimant notre CONCEPTION DU MONDE sur toute sorte de sujets. 


Même étude sur l'État espagnol (1 et 2) ; le Royaume-Uni (1 et 2) et l'Italie.

 

APRÈS 8 SÈGLES… (Huitième centenaire de la bataille de Muret 1213 & DÉCLARATION FONDATRICE de notre Comité de Construction du PCR-Òc)

 

 






 

 

 


 


 

 

Le 'centre mlm' de Belgique, la Guerre populaire et le (n)PCI (sur la stratégie révolutionnaire en pays impérialiste) ; et dans la continuité :

Gramsci et la théorie de la Guerre populaire en pays capitaliste très avancé (1ère partie)

et Gramsci et la théorie de la Guerre populaire en pays capitaliste très avancé (2e partie)

 

 

 

EXCLUSIF : Lotta Continua - "Prenons la Ville !" (1970) [avec un salut rouge et fraternel à l'AA Bordeaux ]

Manifeste Programme du (n)PCI

Présentation

du chap. 1 du Manifeste pour les lecteurs/trices francophones (valable pour tout le Manifeste)

 

(Chapitre I): PDF - WORD

 

 

 MANIFESTE COMPLET

(version non-définitive ; chap. 4 et 5 pas encore validés par les camarades italiens)

 

IMPORTANT pour la compréhension du Manifeste :

La crise actuelle, une crise par surproduction absolue de capital (en PDF)

article de 1985 paru dans Rapporti Sociali n°0

[en bas de la page en lien, icône
PDF - Télécharger le fichier pour télécharger le document]

Autres analyses d'actualité









Situation décisive au Népal 

En matière de conclusion sur la situation au Népal, et ses répercussions dans le Mouvement communiste international 

Questions-réponses sur la situation au Népal

 

Discussion sur la "gauche" en Amérique latine et la bourgeoisie bureaucratique

 

Sur la liquidation réformiste en Euskal Herria : l'analyse d'un communiste abertzale

Sur la liquidation réformiste en Euskal Herria, 2e partie

Sur la liquidation réformiste en Euskal Herria, 3e et dernière partie  

 

 

 

 


Considérations diverses 03-2013 - et un peu de polémique/critique, ça fait pas de mal ! (sur Chavez, le 'bolivarisme', le 'fascisme' de celui-ci et autres choses...)

Autres articles historiques

 

25 avril 1945 : le Peuple italien terrasse le fascisme

 

 


 




Et en guise de récapitulatif/synthèse : Considérations diverses sur les États, les Nationalités, la Subsidiarité et le Pouvoir populaire ; ici (point 1) : Considérations diverses – fin octobre 2013 : État et révolution bourgeoise et ici : Considérations diverses : 1/ Le cœur des nations est aujourd’hui le Peuple