Où va la CGT ?
Comme en 2006, nous allons tenter de rapporter le déroulement du Congrès, mais vu d'un point de vue "non officiel" (et donc non conformiste, non objectif et parfaitement orienté, mais... honnête). A la fois en retraçant le déroulement des travaux, et en fournissant toutes les informations, tous les détails, tous les points de friction occultés par les compte rendus officiels...
On notera sur le site du Congrès que le déroulement officiel du Congrès est parfaitement calibré et minuté (voir ICI). Le signe évident de la volonté de garder sous contrôle le déroulement des scéances...
Le Lundi, c'est l'ouverture
Accueil des délégués ce matin. L'occasion de constater que parmi les 982 délégués représentants 520 221 mandats, il n'y a que 347 femmes (35%)... Du chemin à faire, on l'a déjà constaté !!! Moitié privé, moitié public, 30% d'ouvriers, 50% d'employés et 20% de cadres, à 85% en CDI. Si on compte les retraités, ça ne doit pas faire beaucoup de chômeurs, sans-papiers et précaires !!! Il n'y a que 70 jeunes (moins de 30 ans), mais pour 75% des délégués c'est le premier congrès. Alors là le signe évident de la tentative de contrôler le congrès par des délégués peu formés et donc supposés facilement influençables. On verra, on n'est pas forcément jeune et con à la fois !
Et puis, il y a le patio, vous savez, ce lieu de passage au coeur du congrès dans le parc des expositions ? Comme d'hab', les stands des sponsors, ceux qui financent le Congrès... Alors, on a là le stand de France Telecom (bien connu pour sa politique sociale), celui de Veolia apprécié par nos camarades du CGT-E Dalkia, celui de Saint-Gobain, de la RATP, de Géodis... et de bien d'autres... Il ne manque que Total (AZF, Erika...). Quand la bourgeoisie finance un congrès syndical, c'est qu'il y a un cheveu dans le potage...
Que penser du discours fleuve de Thibault ? C'était long, ça ne marchait pas trop, un peu chiant pour dire. Les feuillets lus les uns derrière les autres, les blagues à deux balles dont il est un habitué, pas vraiment d'ambiance. Détendu le Thibault, c'est sur, mais quand même, à bien écouter, tout son discours était sur la défensive, pour répondre quelque part aux opposants. Pas du tout le discours prétendument "offensif" dont on parle dans les journaux et les radios.
Bien sûr, il a quand même cherché à se justifier de toutes ces méchantes accusations de complicité tacite avec Sarkozy... Tous les médias l'ont souligné.Mais on ne prête qu'aux riches, n'est-ce pas ?
La CFDTisation ? On n'en parle pas, mais on prend le temps de se justifier d'être allé à l'université d'été de la CFDT, en affirmant que la CGT reste fidèle à son histoire, et que de toutes les façons, c'est elle qui a gagné les prud'hommes, non ?
On va poursuivre le "syndicalisme rassemblé", et d'abord avec la FSU [On en reparlera sur ce blog], même si on prétend qu'il n'y a pas (encore) de cadre précis... On va poursuivre à fond la CES et la CSI (le "développement humain durable", le "travail décent", c'est de là que ça vient...) et on vous promet une super journée européenne le 24 mars 2010. Sur quoi ? Ah, ben... bon, plus tard, plus tard...
On va se mobiliser dur de chez dur, avec début 2010 une grosse campagne nationale sur les "revendications", emploi, salaire, vous allez voir ce que vous allez voir. Sur quelles revendications ? Ah, ben... bon, le droit suspensif sur les licenciements, peut-être, ou le Nouveau Statut du Travail Salarié, la reconversion ou la mort ? Les salaires ? Rien de très précis... Evidemment, tout cela est lié à la défense de l'emploi industriel, d'ailleurs "l'importante" mobilisation du 22 octobre (où Thibault a été copieusement sifflé... tiens, il n'en a pas parlé ???) a permis de réouvrir les négociations sur l'avenir industriel, les Etats Généraux de l'Industrie, même si ce n'est pas encore exactement ce qu'on voulait. Dommage que la Fédé de la Chimie (FNIC) revendique maintenant le retrait de la Conf' de ces Etats Generaux bidons... Mais on vous promet, là ce ne sera pas pareil, plutôt comme le Grenelle de l'environnement qui a permis des avancées importantes ??? [Nota : le congressiste interloqué...]
L'enjeu de 2010, ça va être les retraites, le marqueur de l'affrontement. Si c'est joué comme en 2003 ou 2007, on a du souci à se faire. La revendication, c'est le départ à 60 ans, avec 75% du salaire de référence, et au minimum le SMIC. Disparition du nombre d'années de cotisations ??? Alors, là, ce serait une nouveautée !
Enfin, le couplet traditionnel sur la défense du service public, citation de Maurice Thorez à l'appui, s'il vous plaît. Un évident appel du pied aux traditionnalistes du PCF, parce que Thorez, ça fait une paye qu'il a pas été cité dans la CGT !
Enfin, au final, tout va bien, les structures tout va bien, le Cogetise tout va bien, Bref, tout va bien.
Applaudissements de la salle. Rideau.
Après, on a eu le droit à la présentation des invités.
Sans surprise, la CFDT et l'UNSA huées copieusement. Normal. Le PCF et le Parti de Gauche chaudement applaudis, le PS et le NPA plus mitigés, mélange d'applaudissement et de huées.
Mais c'est demain que les vraies affaires commencent avec la discussion et le vote du rapport d'activité.
3 heures de débat pour un premier vote en fin de matinée, ça va être chaud.
Le Mardi, c'est le vote du rapport d'activité
Au départ, la question était de savoir si Jean-Pierre Delannoy allait pouvoir avoir la parole, comme il l'avait annoncé largement dans la presse. On se rappelle qu'en 2006, toutes les interventions avaient été censurées...
Bonne surprise, on lui passe le micro. Sifflé au début, Delannoy ne se laisse pas démonter et développe son intervention. Une intervention de lutte de classe et pas une intervention magouille d'une organisation politique, une bonne intervention rappelant le contenu de sa candidature. Et pour finir, les applaudissements de l'assemblée, preuve que l'argumentaire avait porté.
L'affaire semblait bien entamée, et le débat se poursuivait. Bien sur, pas mal de piques sur "ceux qui font la promotion de la division", mais aussi une autre intervention remarquée d'un jeune des dockers du Havre, très lutte des classes, carrément rentre dedans et ne se reconnaissant pas dans l'orientation confédérale.
C'était un peu nouveau et surprenant et on se demandait si la direction confédérale avait renoncé au contrôle du débat. Rassurez-vous, elle n'a rien perdu de son imagination et de sa verdeur ! Faute de pouvoir interdire la parole à Jean-Pierre, ce qui aurait fait carrément désordre vue la publicité autour de sa candidature, il fallait la saboter.
Et quand on a des sales besognes à faire, on fait appel aux hommes (et femmes) des basses oeuvres.
Et c'est à ce moment qu'on a vu arriver sur scène une forte délégation de sans-papiers de l'UL de Massy (les drapeaux en faisaient foi), Raymond Chauveau et Francine Blanche en arrière plan. Standing ovation de la salle. Et c'était parti sur la grande lutte de la CGT, la seule chose que la confédération essaye de se mettre sous la dent comme "victoire" depuis le dernier congrès.
Intervention d'un sans-papiers de l'Isère qui explique comment il a été régularisé grace à la CGT, intervention du porte parole des sans-papiers de Massy appelant à étendre la grève, quasiment à la grève générale des sans-papiers.
Quand on connaît la réalité de la pratique de la confédération à ce propos, quand on voit les mensonges éhontés qu'elle répand à ce propos, quand on voit les scissions que cela commence à provoquer dans le mouvement, on est proprement halluciné par le discours.
Entendons-nous : il est évidemment essentiel de développer la lutte des sans-papiers, et on ne saurait reprocher leur présence à ce congrès, comme d'ailleurs au meeting de rentrée. Mais la mise en scène au congrès confédéral a été une manipulation, et il faut le dire !
Les dirigeants confédéraux se moquent de la réalité et ne sont pas à un mensonge près. Leur objectif était clair : en plein débat difficile sur le rapport d'activité, prétendre apporter un résultat, et escamoter l'intervention critique de Delannoy. Et il faut le reconnaître, la plupart des congressistes n'ont vu que du feu à cette mise en scène réglée au millimètre.
Et pour conclure, Daniel Prada au nom de la direction confédérale pouvait même se permettre d'en rajouter une louche en affirmant que la meilleure réponse aux détracteurs avait été donnée par les sans-papiers eux-mêmes au cours du débat !!!
Cela dit, partout dans les couloirs, ce qui s'entend très fort, c'est le ras le bol des journées bidon et de la mobilisation sabotée du printemps 2009. Même quand on se résigne à voter pour la direction confédérale, on n'est pas dupe !
Une manoeuvre de magouille à grande échelle, appuyée sur un mensonge honteux, extrêmement choquante, mais pas vue comme telle par le congrès. Elle est belle l'orientation confédérale et la pratique qui va avec !!!
Le vote sur le rapport d'activité avait lieu en fin de matinée. Avec bien entendu une fois de plus le débat sur les abstentions. Car on le sait, depuis toujours, la Conf' refuse de prendre en compte les abstentions !
Elle annonce donc 77,3% de pour, 22,7% de contre et 7,7% d'abstentions. C'est déjà une nette diminution par rapport à 2006 (5% de pour en moins, et 1,5% d'abstentions en plus).
Uniformisés sur les votants, cela donne : 71,3% de pour, 21% de contre, et 7,7% d'abstentions, voilà qui reflète mieux la tonalité du congrès.
L'après midi avait lieu une conférence de presse de JP Delannoy à 15h, pour l'anecdote, l'accès à la salle de presse a été refusé par la sécurité, ce qui traduisait, au minimum une certaine fébrilité. Elle a finalement eu lieu au bar. A lire l'interview dans le Point à l'issue de ce débat sur le rapport d'activité.
Sinon, c'était le début du débat sur le document d'orientation, on en reparlera...
Le Mercredi, c'est la poursuite du débat sur le document d'orientation